Fallait-il continuer la guerre en Afrique du Nord ?

Les Totalitarismes à l'assaut de l'Europe !

Re: Fallait-il continuer la guerre en Afrique du Nord ?

Message par BRH » Mercredi 29 Septembre 2010 10:10:43

boisbouvier a écrit :On ne sait pas ce qui se serait passé si Hitler avait proposé ce que vous dites : retour des prisonniers et paix sans annexion en échange d'un renversement d'alliances. Le plus probable est que Laval ait accepté et que Pétain ait refusé. (Mais de toute façon, Hitler n'y croyait pas.)


Grosso modo, c'est ce que Laval avait concocté avec Abetz. Mais Hitler n'avait aucunement l'intention d'y donner une suite.

Montoire est le moment de la négociation de Pétain avec Chuchill via Rougier. Pétain n'en avertit pas Laval et il le démet le 13 décembre à la grande surprise de celui-ci.


ça reste encore très obscur, cette négociation... La révocation de Laval et son arrestation traduisent la grande déception de Pétain : il s'est compromis et n'a rien obtenu de significatif. Comme Laval persiste en dépit de tout bon sens, le maréchal met un coup d'arrêt à la tendance collabo !

Or, ce congédiement de Laval eut des effets bénéfiques différés.
Grâce à lui, Laval est apparu aux Allemands comme un martyr de la cause collaborationniste et le grand mérite de Pétain fut de le rappeler en avril 42 quand il comprit tout le bénéfice qu'il pourrait tirer de la confiance qu'il inspirait à Abetz en particulier et à l'Etat-Major nazi via l'ambassade d'Allemagne en général au moment où l'occupation promet de devenir très dure.


On est dns l'interprétation. Ce n'est guère historique...

Laval eut l'immense mérite de répondre parfaitement à cette double attente. Il accepta de jouer le rôle de l'ami sincère de l'Allemagne qui souhaitait sa victoire au risque de mettre en danger non seulement sa carrière mais sa vie.
Son sacrifice ne fut pas inférieur à celui de Pétain.


Allons donc... Laval voulait prendre la place de Pétain et croyait bel et bien à une victoire de l'Allemagne. Evidemment, il pensait aussi au "vieux pays". Néanmoins, son rôle fut néfaste, contrairement à ce que vous soutenez.

A Tilsitt y eut-il renversement d'alliances ?
Précisément pas.
Napoléon tenta de charmer Alexandre comme un snob qui cherche à se faire adouber par une dynastie de l'ancienne noblesse.
Alexandre fit comme Metternich après Wagram : il pratiqua l'attentisme en espérant des jours meilleurs.


Mais si, il y a bel et bien un renversement des alliances, puisque Alexandre va jusqu'à déclarer la guerre à l'Angleterre ! Une escadre russe gagnera même Lisbonne en 1808, pour soutenir la marine impériale !

D'ailleurs, Napoléon n'est pas à blâmer d'avoir cherché un terrain d'entente avec les Puissances d'Ancien Régime.
C'était la condition d'une paix durable.


Bien entendu. Mais en 40, Pétain se voit plutôt dans la peau d'Alexandre 1er...
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Re: Fallait-il continuer la guerre en Afrique du Nord ?

Message par boisbouvier » Mercredi 29 Septembre 2010 10:36:19

On est dns l'interprétation. Ce n'est guère historique...


Il est pourtant historiquement prouvé que nos prisonniers rentrèrent sains et saufs à 98 %, que les Juifs français furent sauvés à 85%, que 600 000 ouvriers français seulement furent déportés alors que Sauckel en réclamait 2000 000, que les famines mortelles furent évitées, qu'il n'y eut que 4000 fusillés et 1200 massacrés pour un peuple de 40 millions d'habitants et que tout cela fut obtenu sans trahir l'alliance anglaise malgré des sollicitations répétées de l'Occupant. La France détenait des atouts stratégiques importants avec sa flotte et ses bases de l'Empire et Pétain parvint à éluder jusqu'au bout les demandes de Hitler les concernant.
Comparez avec les autres pays occupés et vous verrez la différence. Pendant que les théâtres de Paris faisaient salle comble et que le cinéma produisait chef d'oeuvre après chef d'oeuvre, Varsovie croulait sous les bombes et les Balkans s'embrasaient.
Tout cela n'aurait pas été possible sans Laval et le climat de confiance qu'il avait eu l'habileté de créer avec l'ambassade de la rue de Lille.
Son rappel en avril 42 fut une aubaine pour nos intérêts matériels.
Son éviction en décembre 40 avait été une aubaine pour nos intérêts moraux.
Songez qu'à l'époque (fin 40),Emmanuel Mounier, Hubert Beuve-Méry, Simone Weil s'étaient résignés à vivre dans la "nouvelle Europe" hitlérienne. (N° 50 de la NRH)
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Re: Fallait-il continuer la guerre en Afrique du Nord ?

Message par boisbouvier » Mercredi 29 Septembre 2010 17:27:50

Mais si, il y a bel et bien un renversement des alliances, puisque Alexandre va jusqu'à déclarer la guerre à l'Angleterre ! Une escadre russe gagnera même Lisbonne en 1808, pour soutenir la marine impériale !


Et bien ça prouve qu'Alexandre, en fait de collaboration avec l'Antéchrist, est allé beaucoup plus loin que Pétain qui, lui, n'a rien cédé...sauf des mots.

Citer:
Montoire est le moment de la négociation de Pétain avec Chuchill via Rougier. Pétain n'en avertit pas Laval et il le démet le 13 décembre à la grande surprise de celui-ci.


ça reste encore très obscur, cette négociation... La révocation de Laval et son arrestation traduisent la grande déception de Pétain : il s'est compromis et n'a rien obtenu de significatif. Comme Laval persiste en dépit de tout bon sens, le maréchal met un coup d'arrêt à la tendance collabo !


Non!
Pétain a dit à Rougier avant qu'il ne parte pour Londres -et donc avant Montoire- de dire aux Anglais qu'il ne leur en voulait pas de Mers-el-kébir, et qu'il n'entrerait pas dans une alliance militaire avec les Allemands.
Rougier a dit à Churchill que le Maréchal ne savait pas ce qu'il voulait mais fort bien ce qu'il ne voulait pas. Or, il ne voudrait pas faire de tort à la G-B tant qu'elle resterait dans la guerre.
Certes, le 30 octobre, six jours après Montoire, le Maréchal parle de "collaboration "avec l'Allemagne mais il s'empresse d'adresser une lettre personnelle et manuscrite à Churchill et à lord Halifax, le 9 novembre, où il dit qu'il ne s'agit que de collaboration de principe en vue d'obtenir des améliorations économiques et celle du sort des prisonniers. Et les échanges reprennent entre la France et l'Angleterre.
Tout cela est confirmé par une note de Lord Halifax en date du 19 décembre 1940.
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Re: Fallait-il continuer la guerre en Afrique du Nord ?

Message par BRH » Mercredi 29 Septembre 2010 17:52:39

Je crois que l'on vous rétorque les points suivants :

1/Il n'est pas prouvé que Pétain ait reçu Rougier avant son départ pour l'Angleterre.
2/Aucun document n'atteste sa mission auprès des Anglais
3/la note Halifax n'existe pas.

Mais, Pétain n'a en effet parlé que de collaboration économique et en a communiqué avec Churchill. Il n'avait pas besoin, de toute façon, de Rougier, pour cela.
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Re: Fallait-il continuer la guerre en Afrique du Nord ?

Message par boisbouvier » Mercredi 29 Septembre 2010 19:29:13

1/Il n'est pas prouvé que Pétain ait reçu Rougier avant son départ pour l'Angleterre.
2/Aucun document n'atteste sa mission auprès des Anglais


Quand il s'agit de missions secrètes les preuves documentaires sont forcément absentes ou peu apparentes.
Or, je me suis donné la peine de lire intégralement les Mémoires de guerre de Churchill.
Je vous assure qu'il reconnait avoir reçu Rougier même s'il est très discret sur leurs entretiens pour satisfaire aux exigences de l'accord qu'il a conclu le 7 août avec De Gaulle qui lui imposait de rompre avec Vichy.
Rougier projetait de rencontrer, outre Churchill, De Gaulle. Churchill n'a accepté de rencontrer Rougier qu'à condition qu'il renonce à rencontrer De Gaulle. Ce qui eut lieu !

La rencontre Pétain-Rougier d'avant le départ de ce dernier pour Londres devait se faire en cachette de Laval.(Pétain commence à craindre Laval qui "ne pense pas faux mais qui pense bas"). Elle eut lieu discrètement mais en présence du vice-amiral Fernet qui servit de go-between.

En résumé Pétain a délégué Rougier à Churchill en cachette de Laval et Churchill a reçu Rougier en cachette de De Gaulle.
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Re: Fallait-il continuer la guerre en Afrique du Nord ?

Message par boisbouvier » Vendredi 01 Octobre 2010 07:02:48

Le N° 50 de la Nouvelle Revue d'Histoire me comble d’aise, car il épouse toutes mes vues et m’apporte même un petit supplément : l’article de Bernard Bruneteau : « Hitler pour 1000 ans ». Il montre à quel degré de désarroi on était arrivé entre juin 40 et juin1941, et à gauche plus qu'à droite : Mounier, Beuve-Méry, Simone Weil… résignés à une Europe nouvelle entièrement redessinée et, surtout, réinterprétée par Hitler !
Curieusement, le bémol que m’inspire ce N° 50 vient de l’article de F-G Dreyfus. Il estime « inadmissible » le statut des Juifs d’octobre 40.
Je ne suis pas de cet avis.
En effet, ce n’est qu’après l’arrivée de Dannecker à Paris, fin août 1940, et l’annonce faite par La Laurencie à Vichy que les Allemands comptaient appliquer les lois de Nuremberg à la zone occupée que la décision d’instaurer un statut des Juifs fut prise.
C’était grave au plan des principes car ça montrait que les Allemands entendaient gérer la zone occupée non seulement comme un occupant le fait d’une zone militaire mais, comme un leader politique le fait de son pays, en légiférant au plan des mœurs et des lois. Les Allemands allaient-ils prendre l’habitude d’appliquer leurs lois propres à toute la zone occupée ? Cela n’allait-il pas avoir une influence sur l’ampleur de leurs annexions au moment de signer un traité de paix ? Allaient-ils se contenter de reprendre l’Alsace-Lorraine ou étendre leurs prédations à 15 ou 20 départements du Nord et de l’Est ? Il était urgent de les prendre de vitesse en épousant leur manie antisémite pour, par une esquive habile, leur couper l’herbe sous le pied.
Or, ce statut des Juifs fut un mal pour un bien.
Grâce à lui, en effet, les Allemands ne prirent pas cette habitude de se sentir entièrement chez eux en zone occupée et ils laissèrent l’autorité de Vichy s’exercer sur ses fonctionnaires autres que ceux de police en zone occupée.
Plus fort encore, Bousquet et Laval parvinrent en août 42 à récupérer leur autorité sur les forces de police elles-mêmes : c’est tout le sens des accords Bousquet-Oberg signés à ce moment-là et qui permirent de sauver la grande majorité des Juifs de France.
Quand la décision de solution finale entra dans sa phase opérationnelle en Europe de l’ouest après la conférence de Wannsee du 20 janvier 42, Heydrich vint à Paris installer sa SS en mai 42 et l’on aurait dû s’attendre au pire.
Or, curieusement, c’est le contraire qui arriva.
Au cours de l’entrevue que Heydrich accorda à Bousquet, le 6 mai 42, à l’hôtel Ritz, ce fut Bousquet qui gagna la partie en jouant la carte de la dignité et de l’honneur d’un fonctionnaire loyal qui ne veut renier ni sa patrie ni son devoir professionnel. Et ça a marché !
Heydrich se mit au garde à vous et dit : « M. Bousquet, vous m’avez tenu un langage d’homme et je vous respecte ». Et le reste suivit, y compris la lettre d’Oberg à Himmler pour se plaindre des empêchements que Vichy mettait à s’emparer des Juifs et la réponse de Himmler quand il dit qu’il renonçait aux Juifs français « pour le moment ».
C’est donc Léon Poliakov qui a raison quand il dit : « Du sort relativement plus clément de la communauté juive de France, Vichy fut, en fait, le facteur prépondérant ».
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Débat avec Delpla et Boisbouvier :

Message par boisbouvier » Lundi 25 Octobre 2010 07:04:49

Pourtant Churchill et Hitler sont tombés d'accord, le premier pour dire que l'armistice lui avait rendu service et le second pour dire qu'il fut sa plus grosse faute.



Sans oublier Göring.
Il a dit à Nuremberg qu'il regrettait que Hitler n'ait pas suivi son conseil de continuer la campagne de France par une attaque au sud : Alger, Dakar.
Je vois mal en effet comment les deux divisions d'Auchinleck auraient pu empêcher les 90 divisions allemandes renforcées de 60 divisions italiennes et d'autant d'espagnoles d'arriver à Suez et à Bassorah. Churchill tombait.
En juin 40, Franco était mur pour entrer dans une alliance avec Hitler.
Quant aux flottes française et britannique combinées, elles n'auraient pas pesé lourd sous les coups d'une Luftwaffe basée en Sicile, en Espagne, au Maroc et en Calabre. La moitié de la Mediterranean Fleet a été coulée au large de la Crète en mai 41 par des avions allemands basés en Grèce... sans parler de la Force Z, en mer de Chine, en décembre 41.
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Débat avec Delpla

Message par BRH » Lundi 25 Octobre 2010 09:22:09

Vous répétez toujours la même chose... Mais cela ne vaut pas démonstration ! S'il était si facile de traverser le détroit de Gibraltar ou le canal de Sicile, on se demande bien pourquoi les Allemands n'ont pas franchi le Pas de Calais en août ou septembre 1940 !C'est bien beau d'avoir des centaines de divisions, encore faut-il avoir des milliers de bateaux pour les transporter outre-mer !!! Hitler avait bel et bien l'attention d'offrir un armistice à la France : il savait qu'il ne pouvait exiger la remise de la flotte française et qu'il devait laisser une partie de la métropole "libre" de toute occupation. Après coup, il était toujours facile de dire : "ah, si nous avions sû"...
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Re: Débat avec Delpla et Boisbouvier : Pétain et les Juifs

Message par BRH » Lundi 25 Octobre 2010 09:35:04

boisbouvier a écrit :
Pour étayer cette opinion, il faudrait démontrer que la poursuite de la lutte en AFN était impossible. Vous vous y êtes essayé, mais sans succès de mon point de vue.



Pourtant Churchill et Hitler sont tombés d'accord, le premier pour dire que l'armistice lui avait rendu service et le second pour dire qu'il fut sa plus grosse faute.


Ce n'est pas exactement pareil. Churchill peut bien avoir dit cela, après les évènements, satisfait de la tournure qu'avait pris le déroulement de la guerre. Hitler peut bien avoir confessé une erreur. Mais la plus grande, c'est d'avoir attaqué l'URSS sans avoir au préalable mis hors-jeu l'Angleterre. Il a été victime de son admiration pour l'empire britannique. Prendre Suez avant d'attaquer l'URSS eût été en effet pertinent. Et pour y parvenir, obtenir un renversement des alliances en se procurant le concours actif de Vichy. Il ne l'a pas fait car il admirait les Anglais et détestait la France. En somme, il a été victime de ses préjugés... :lol:
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Re: Débat avec Delpla et Boisbouvier : Pétain et les Juifs

Message par boisbouvier » Lundi 25 Octobre 2010 10:28:45

S'il était si facile de traverser le détroit de Gibraltar ou le canal de Sicile, on se demande bien pourquoi les Allemands n'ont pas franchi le Pas de Calais en août ou septembre 1940 !C'est bien beau d'avoir des centaines de divisions, encore faut-il avoir des milliers de bateaux pour les transporter outre-mer !!!


Je vous signale, BRH, que, malgré Malte, le franchissement du détroit de Sicile n'a posé aucun problème ni aux Allemands ni aux Italiens jusqu'en 1943 puisque Rommel et l'Africa Korps l'ont franchi en février 41, comme les Italiens le faisaient depuis longtemps. La grande différence entre le détroit de Sicile et le Pas de Calais c'est que les aérodromes d'Angleterre avantageaient les Anglais. Leurs avions pouvaient combattre au dessus du sol anglais, atterrir et repartir quand les avions allemands ne disposaient que d'une autonomie de 30 minutes, réduite à 20 minutes au dessus de Londres.
Cet avantage-là, en Sicile, ce sont les Allemands et les Italiens qui l'avaient, et je vois mal la RAF se transporter si loin de ses bases à ce moment-là. Gibraltar n'a une capacité que de 150 avions et, de toute façon, est trop éloigné. C'est tellement vrai que, pour ravitailler les armées d'Egypte et d'Ethiopie les convois anglais devaient faire le tour de l'Afrique avec deux mois de navigation en plus.
C'est pourquoi Göring lorgnait Dakar. Une base sous-marine eût pu interrompre ce trafic.
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Re: Débat avec Delpla et Boisbouvier : Pétain et les Juifs

Message par BRH » Lundi 25 Octobre 2010 12:02:38

boisbouvier a écrit :
S'il était si facile de traverser le détroit de Gibraltar ou le canal de Sicile, on se demande bien pourquoi les Allemands n'ont pas franchi le Pas de Calais en août ou septembre 1940 !C'est bien beau d'avoir des centaines de divisions, encore faut-il avoir des milliers de bateaux pour les transporter outre-mer !!!


Je vous signale, BRH, que, malgré Malte, le franchissement du détroit de Sicile n'a posé aucun problème ni aux Allemands ni aux Italiens jusqu'en 1943 puisque Rommel et l'Africa Korps l'ont franchi en février 41, comme les Italiens le faisaient depuis longtemps.


Ce passage se faisait à l'abri des côtes tunisiennes, neutralisées par l'armistice. En novembre 42, les Allemands ont commencé par s'assurer une tête de pont à Bizerte par voie aérienne, avant d'y débarquer avec des navires.

La grande différence entre le détroit de Sicile et le Pas de Calais c'est que les aérodromes d'Angleterre avantageaient les Anglais. Leurs avions pouvaient combattre au dessus du sol anglais, atterrir et repartir quand les avions allemands ne disposaient que d'une autonomie de 30 minutes, réduite à 20 minutes au dessus de Londres.


Même avantage pour des avions français et anglais basés en Tunisie...

Cet avantage-là, en Sicile, ce sont les Allemands et les Italiens qui l'avaient, et je vois mal la RAF se transporter si loin de ses bases à ce moment-là. Gibraltar n'a une capacité que de 150 avions et, de toute façon, est trop éloigné. C'est tellement vrai que, pour ravitailler les armées d'Egypte et d'Ethiopie les convois anglais devaient faire le tour de l'Afrique avec deux mois de navigation en plus.
C'est pourquoi Göring lorgnait Dakar. Une base sous-marine eût pu interrompre ce trafic.


Gibraltar n'est pas en Tunisie.
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Re: Fallait-il continuer la guerre en Afrique du Nord ?

Message par boisbouvier » Mardi 26 Octobre 2010 05:30:34

Ce passage se faisait à l'abri des côtes tunisiennes, neutralisées par l'armistice. En novembre 42, les Allemands ont commencé par s'assurer une tête de pont à Bizerte par voie aérienne, avant d'y débarquer avec des navires.


Justement !
La Tunisie fut occupée par les Allemands en deux jours, en novembre 42, et ils s'y maintinrent pendant six mois alors que l'essentiel de leurs forces était fort occupé en Russie, que la VIII° armée de Montgomery talonnait au sud et que les Américains poussaient à l'ouest. On voit mal comment notre pauvre armée faite de débris de bric et de broc aurait pu résister à une attaque germano-italienne venue de Libye, combinée à une attaque espagnole venue du Maroc. Gibraltar ? Mais Hitler avait prévu de lancer dessus sa compagnie de parachutistes qui s'était distinguée lors de la prise de Eben Emaël dont les portes blindées n'avaient pas résisté aux charges creuses. S'il n'avait pas pensé à cette option stratégique en juillet 40, aurait-il demandé à Vichy des aérodromes au Maroc ?
Et, pour se battre, il faut des munitions. L'AFN n'avait pas d'usines pour en fabriquer et les munitions anglaises ne pouvaient armer ni nos canons ni nos fusils ni nos mitrailleuses. Pas les mêmes calibres.
Hitler avait raison: "Notre plus grosse faute fut l'armistice".
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Re: Fallait-il continuer la guerre en Afrique du Nord ?

Message par Francois Delpla » Mardi 26 Octobre 2010 05:41:39

@ Michel : toujours le beurre et l'argent du beurre !
les vertus de l'armistice démontrées par des difficultés qui découlent de l'armistice, ainsi celles de la flotte anglaise en Méditerranées, dues tout entières à la perte bête et brutale des colonies et de la puissante flotte de l'allié français.

@ Bruno :

-vous êtes bien bon de répondre à Michel sur ses mêmes éternelles citations tronquées et isolées de De Gaulle à Remy (rapportées par ce fourbe) et de Churchill à Georges (mais pour l'instant et je ne sais pourquoi nous échappons à Odic, que dans un fil jadis il s'obstinait à appeler "Le Pordic", sans doute une protestation de l'inconscient : "le porc dit que..."). La seule façon de faire l'histoire de leur jugement sur l'armisice, c'est de prendre le corpus entier de ce qu'ils en ont dit... et qui ne va pas, mais pas du tout, dans ce sens.

-Barbarossa est bel et bien la dernière carte de Hitler dès lors que l'Angleterre ne joue pas le jeu et reste en guerre. Car ce qu'il vise c'est un nouvel ordre mondial aux dépens de la France et de l'URSS, accepté par les Anglo-Saxons.

Et non, comme tant le croient encore, une "domination mondiale", dont le voeu n'est, chez ceux qui le lui prêtent, que la projection de l'image globale qu'ils ont de lui, celle d'un gamin coléreux et insatiable.
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Re: Fallait-il continuer la guerre en Afrique du Nord ?

Message par BRH » Mardi 26 Octobre 2010 08:07:54

Ayant remanié les messages, il me paraissait malséant d'empêcher Boisbouvier de répondre. Ceci étant fait, nous pourrons définitivement fermer ce fil.

La Tunisie fut occupée par les Allemands en deux jours, en novembre 42, et ils s'y maintinrent pendant six mois alors que l'essentiel de leurs forces était fort occupé en Russie, que la VIII° armée de Montgomery talonnait au sud et que les Américains poussaient à l'ouest.


Quelle invraisemblance ! :roll: Bizerte et le Cap Bon furent occupés en deux jours (par des parachutistes, débarquant de junkers 88, faute d'opposition du général Barré, attentiste et neutralisé par l'attitude collabo de l'amiral Estéva ! Ensuite, les navires italiens établirent leur noria, toujours sans opposition de notre marine et de notre aviation. Ce n'est que le 18 novembre que Barré se décidât finalement à faire ouvrir le feu sur les troupes de l'Axe.

http://www.upba.fr/UPBA_Decolonisation/ ... 0mai43.pdf

On voit mal comment notre pauvre armée faite de débris de bric et de broc aurait pu résister à une attaque germano-italienne venue de Libye, combinée à une attaque espagnole venue du Maroc. Gibraltar ? Mais Hitler avait prévu de lancer dessus sa compagnie de parachutistes qui s'était distinguée lors de la prise de Eben Emaël dont les portes blindées n'avaient pas résisté aux charges creuses. S'il n'avait pas pensé à cette option stratégique en juillet 40, aurait-il demandé à Vichy des aérodromes au Maroc ?


Tout ceci est expliqué à longueur de colonnes ici-même dans les posts précédants.

Et, pour se battre, il faut des munitions. L'AFN n'avait pas d'usines pour en fabriquer et les munitions anglaises ne pouvaient armer ni nos canons ni nos fusils ni nos mitrailleuses. Pas les mêmes calibres.
Hitler avait raison: "Notre plus grosse faute fut l'armistice".


Faux. Des usines existaient pour la fabrication de la munition de 7,5 mm (fusil MAS 36 et FM 24/29) et de 8 mm (fusil Lebel et mitrailleuse Hotchkiss). Nous pouvions compter sur les armes américaines, dont les fameux mille canons de 75 mm livrés par les Américains et finalement détournés vers l'Angleterre. De quoi équiper 10 Divisions.
Tant que les Français constitueront une nation, ils se souviendront de mon nom !

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Le point de vue du général Gallois...

Message par BRH » Lundi 15 Novembre 2010 10:03:26

Au sujet de l'armistice de juin 40


Par le général CR


Pierre-Marie GALLOIS


DECEMBRE 2007



Lors de notre dernier entretien sur les ondes de Radio-Courtoisie, le 21 novembre dernier, la présentation du très intéressant livre de Jacques Bourdu a été l'objet d'une controverse. La brièveté du temps d'antenne qui m'était imparti n'a pas permis d'éclairer le débat et, encore moins de le conclure. L'occasion m'est donnée, aujourd'hui, d'apporter au moins un témoignage puisque j'ai vécu cette triste période, non seulement en spectateur mais en minuscule acteur, ballotté par la tempête qui ravageait mon pays.

Jusqu'au début des années 30, la France n'avait pas affiché les symptômes du mal dont elle souffrait : la perte de près de 1,5 million des siens, cinq millions de victimes, blessés, traumatisés à vie, le nord-est du pays détruit. Et quelles pertes humaines, celles de générations pleines d'ardeurs prêtes au sacrifice pour servir la cause nationale !

Il n'est pas surprenant qu'ainsi affaiblie par l'Allemagne, la France ait été en profond désarroi et, accablée par les désastres et les souffrances de la guerre, elle ait manifesté, en toutes circonstances, un pacifisme qui eût été de bon aloi s'il n'avait été contemporain du redoublement du bellicisme allemand. Le Führer, dans Mein Kampf (publié en français en 1934) ne cachait pas ses intentions : " La France, avait-il écrit, est le principal obstacle à l'obtention des résultats (de son programme) et ces résultats ne seront atteints, ni par les prières au Seigneur, ni par les discours, ni pas les négociations à Genève. Ils doivent l'être par une guerre sanglante ". Et, en 1930 déjà, 15 millions d'Allemands souscrivaient aux projets de Hitler. Celui-ci justifiait son aversion de la France : " il faut qu'on se rende enfin clairement compte de ce fait : l'ennemi mortel, l'ennemi impitoyable du peuple allemand est et reste la France… ". Obsession permanente du peuple allemand, Hitler en témoigne encore lorsqu'il écrit :
" … La guerre de 1914 ne fut, Dieu en est témoin, nullement imposée aux masses, mais au contraire désirée par tout le peuple".

De ce côté du Rhin, à la même époque, usant de son talent oratoire, Aristide Briand était un des apôtres de la paix… à tout prix. Afin de désarmer davantage encore les esprits, même le langage était appelé à la rescousse. C'est ainsi que le mot bombardement était proscrit et que, par exemple, on ne devait plus parler " d'aviation de bombardement " mais user de l'expression " aviation lourde de défense… ".

D'ailleurs, quel qu'ait été le gouvernement de la France, celle-ci épuisée par sa si coûteuse victoire, abandonnée par ses alliés désireux de commercer avec une Allemagne convalescente a, peu à peu, renoncé aux garanties du traité de Versailles. Et ce furent l'évacuation de la Rhénanie dès 1924, le plan Young limitant les " Réparations " dues par l'Allemagne, le renoncement à l'accord tripartite (France, Grande-Bretagne, Italie) de Stresa qui devait sanctionner les violations par Berlin des traités de paix, la remilitarisation de la Rhénanie, enfin en 1938, Munich.

Et tandis que l'Allemagne rétablissait le service militaire (en mars 1935), que Berlin obtenait de Londres un accord lui permettant de disposer d'une flotte de guerre au tonnage égal au tiers de celui des bâtiments du Commonwealth, que Hitler faisait travailler fiévreusement au réarmement et que, le 7 mars 1936, ses troupes entraient en Rhénanie, la France baissait les bras. Conclue en janvier 1936, trois ans après l'arrivée de Hitler au pouvoir, l'alliance des parties de gauche, socialiste et communiste, l'emportait lors des élections d'avril 1936. Paradoxalement près de 2 millions cessèrent de travailler, la majorité occupant les usines. Les accords de Matignon ramenant à 40 heures la durée hebdomadaire du travail accordant les congés payés et instaurant les conventions collectives, accords signés en juin 1936, ne mirent pas fin aux revendications.
En mai 1937 l'exposition internationale de Paris ouvrit ses portes alors que nombre de ses pavillons n'étaient pas achevés. Ils ne le seront pas encore à l'automne lors de la clôture de cette exposition.

Surtout face à l'Allemagne préparant la Guerre, le bilan de ces années régies par le " front populaire " a été désastreux : la production française a baissé, de l'ordre de 5 %, tandis que l'Allemagne doublait la sienne, l'investissement a été, en France, ralenti, le nombre de chômeurs doublé, passant de 400.000 en 1935 à près de 900.000 en 1937, les prix ont augmenté et il a fallu dévaluer le franc. Prudemment, la Belgique renonça, officiellement, à l'alliance française. (1937). C'est que Hitler révélait sa puissance : Il envahit l'Autriche (mars 1938), Munich lui accorde le démantèlement de la Tchécoslovaquie (septembre 1938) et il annexe Memel (mars 1939).

En France, au cours de ces années décisives, l'effondrement de la production et, en ce qui nous concerne ici, le marasme des industries d'armement, l'industrie aéronautique étant hâtivement nationalisée, ont été dictés par un pacifisme virulent, totalement inopportun face au bellicisme ouvertement affiché par l'Allemagne.
Dès septembre 1933, l'année d'Hitler à la chancellerie, Léon Blum affirmait : … " du moment qu'on démolit l'armée, j'en suis ". Et un an après, son complice du futur " front populaire " Maurice Thorez, proclamait à la Chambre des Députés : " nous ne croyons pas un seul instant à la défense nationale… les prolétaires n'ont pas de patrie ". Il ajoutera devant le même auditoire " … nous invitons nos adhérents à pénétrer dans l'armée afin d'y accomplir la besogne de la classe ouvrière qui est de désagréger cette armée ". Thorez confirmait ainsi les positions qu'il avait prises avant qu'Hitler n'accède au pouvoir, mais après la publication de Mein Kampf : le 3 juillet 1932 il menait, à la tribune, une campagne pacifiste : … " Nous sommes contre la défense nationale. Nous sommes les partisans de Lénine et du défaitisme révolutionnaire ".

Et, trois ans après que le nazisme eut triomphé en Allemagne, Léon Blum avait eu la naïveté de prononcer devant les députés le discours suivant :
" Contre ce danger (le nazisme) je défie quelqu'un d'entre vous de trouver une autre parade sûre, d'autre moyen de garantie possible, que le désarmement de l'Allemagne, accepté volontairement par elle, ou qui lui serait imposé par l'accord unanime de toutes les autres puissances ". Que le président du Conseil des ministres français ait pu tenir de pareils propos est aberrant. Par démagogie, et le pacifisme étant racoleur, tous les dirigeants politiques de ces désastreuses années 30 : Herriot, Daladier, Briand, Sarraut, Chautemps, comme Léon Blum, ignorèrent, ou feignirent d'ignorer à la fois Mein Kampf et le bellicisme allemand .

Ayant affirmé qu' " il ne laisserait pas Strasbourg sous la menace des canons allemands " Albert Sarraut s'inclina lorsqu'en mars 1936 les Allemands réoccupèrent la Rhénanie, le général Gamelin lui ayant affirmé qu' " envoyer rapidement un corps expéditionnaire français même plus ou moins symbolique, serait chimérique ".

Ayant assuré l'ambassadeur de Tchécoslovaquie que la France remplirait ses engagements si les traités n'étaient pas respectés, Léon Blum s'accommodera, en février 1939, de l'occupation de ce pays par les forces allemandes.

Quant à Daladier, il signa les accords de Munich (fin septembre 1938) et regagna Paris en déclarant : … " Je reviens de Munich avec la conviction profonde que cet accord est indispensable à la paix en Europe ", déclenchant les applaudissements de la population française trompée par ses dirigeants. Plus tard, Daladier révélera que si la France avait disposé d'un millier de bombardiers il eût négocié Munich tout autrement. Mais, à qui la faute sinon aux gouvernants inconscients que les Français s'étaient donnés ? Ils célébrèrent le 14 juillet 1936, trois mois après la remilitarisation de la Rhénanie par les troupes de Hitler, en écoutant Thorez et Daladier discourir sous une banderole portant l'inscription " Pour le Désarmement. Vive Jaurès ".

Ainsi, systématiquement, ces hommages politiques désarmèrent moralement et matériellement la France. Ils sont, indirectement responsables de la Seconde Guerre mondiale et de ses centaines de millions de victimes. En 1936 la France était encore en mesure de freiner le nazisme. Il eût fallu qu'elle soit une réelle puissance militaire et non un territoire délibérément ouvert à l'invasion par l'aboulie de sa population et la sottise de ses dirigeants.

Nommé Inspecteur Général de la défense aérienne du territoire, le maréchal Pétain s'adjoignit le lieutenant-colonel Vauthier qui venait de publier un livre prophétique intitulé " le danger aérien et l'avenir du pays ". Selon le général Laure, Paul Vauthier exerça une forte influence sur le maréchal. " Nous avons tenu à souligner ici l'attitude plutôt combative prise à ce moment (1929-1930) vis-à-vis de l'Armée de l'Air par Pétain qui, lorsqu'il deviendra Inspecteur Général de la défense aérienne du territoire, insistera, au contraire, pour activer le développement de cette armée".
Sans succès, d'ailleurs, si l'on en juge par l'état de cette armée en 1940.

En janvier 1939 seulement, le maréchal, parlant à Science Po, déclara : " Comme les armements terrestres et maritimes ont été très peu modifiés depuis 1918, on pourrait en déduire que les caractères de la guerre future seront, au début, les mêmes que ceux de la guerre passée. Il n'en sera pas ainsi parce qu'il s'est produit un fait nouveau considérable, de nature à bouleverser les conditions de la guerre future. Le fait nouveau, c'est l'apparition de l'avion et sa participation à la guerre ".

A quoi, le général Gamelin, trois semaines plus tard, rétorquait : " Que peut l'aviation contre des hommes enterrés dans des tranchées étroites ". Toujours le complexe 14-18, ou plutôt 15-17 avec la guerre d'usure et l'échange de coups entre deux fronts quasi statiques. Résultat : en décembre 1938, l'état-major créditait l'Allemagne de 5.000 avions de bombardement de première et de deuxième ligne contre, à la rigueur, 22 avions français équivalents . (1)

La majorité des membres du haut commandement militaire français demeurait profondément marquée par la première phase de la Première Guerre mondiale, oubliant la seconde et les succès obtenus par les chars et la guerre de mouvement à partir de la mi 1918.

Ainsi, les " modernes ", Charles De Gaulle, Paul Vauthier, furent-ils incompris et même ouvertement brimés. En 1934, publiant " Vers l'armée de métier " (force blindée professionnelle) De Gaulle s'attira les foudres de la hiérarchie. A l'époque, chef d'état-major de l'armée de terre, le général Colson interdira la diffusion de l'ouvrage. La même année, au ministère, boulevard Saint Germain, le général Maurin, ministre de la Guerre refusa de prendre la parole avant que le lieutenant-colonel De Gaulle eut quitté la salle où devait se tenir la conférence.

Et lorsqu'en octobre 1936, De Gaulle réussit à s'entretenir avec le président du Conseil des ministres, Léon Blum, celui-ci déclara s'opposer formellement à la mise sur pied de formations blindées car il les tenait pour être les instruments d'un coup d'Etat militaire. Ainsi, sans le savoir, Léon Blum sera un précieux auxiliaire de Hitler et l'artisan direct de la défaite des armes de la France. (2) Les Français ne lui en tiennent pas rigueur car il contribua à améliorer leurs conditions d'existence avec la semaine de 40 heures et les congés payés… heureuses conquêtes sociales effaçant le désastre militaire.

Celui-ci était prévisible. Dans le cadre d'un fort désarroi moral, le retard matériel de notre appareil militaire et la pratique d'une doctrine dépassée laissaient présager le pire.

La doctrine ? Parlons-en. En 1938, lieutenant à l'escadrille 588, basée à Colomb-Béchar, j'avais été très intéressé par une étude du critique militaire Eddy Bauer, publiée par la Revue militaire suisse. Il décrivait comment, au cours de la guerre d'Espagne, les aviateurs républicains, attaquant en rase-mottes une division italienne sur la route de Guadalajara, avaient anéanti cette grande unité en la prenant en enfilade, pour détruire au canon aérien et à la grenade ses camions et ses blindés… Mettant à profit l'absence du commandant d'escadrille - en permission - et avec l'accord du colonel Azan, commandant la Légion étrangère, j'organisais un exercice similaire, mes avions défendant l'aérodrome contre une formation de la Légion simulant l'attaque de la base.

Le commandement de l'Air en Algérie sanctionna cette initiative : l'avion devait être utilisé autrement, en altitude et sur un front stabilisé. C'était pourtant deux ans avant que les Stukas n'envahissent le ciel de France et attaquent en piqué.
Les Allemands, d'ailleurs, affichaient leur supériorité sans pour autant inciter les Français à l'effort. En 1938, à Zurich, une démonstration aérienne avait opposé les matériels allemands aux français et cela dans tous les domaines militaires : interception, chasse, reconnaissance et entraînement. Et, dans toutes les subdivisions de l'arme aérienne, les appareils allemands l'avaient emporté sur les français. Le général Vuillemin, alors chef d'état-major de l'Armée de l'Air fut même invité à venir constater sur place l'état de l'aviation militaire allemande. En vain.

En février 1940, deux mois avant le début des hostilités, j'étais stagiaire à Toulouse pour la familiarisation aux vols à haute altitude. Le commandant Michy dirigeait le stage. Il demanda à la demi douzaine de jeunes officiers stagiaires de prendre des tours de garde nocturne près de nos avions car, disait-il, il faut redouter des sabotages.

A l'époque, le pacte germano-soviétique signé le 23 août 1939 était encore en vigueur et les communistes français croyaient servir leur cause en sabotant le matériel militaire destiné à lutter contre l'Allemagne.

En usine, il était facile d'introduire des tampons de coton dans les circuits d'huile des moteurs et, ainsi, de provoquer leur arrêt en vol. Pareille panne était imprévisible….

Au cours de ce stage le commandement décida que quatre d'entre nous formeraient deux équipages pour se rendre à Châteaudun - où était un dépôt de matériels - pour y chercher deux avions Potez 63 affectés à l'école de Toulouse. Mais ces avions bi moteurs étaient dépourvus de leurs hélices, aussi fallait-il en prélever sur nos avions et, par le train, gagner Châteaudun où les mécaniciens les fixeraient sur les avions à convoyer à Toulouse, où les hélices retrouveraient leurs places initiales.

Nous avions bien deux appareils en plus mais sans hélices, donc inutilisables.

Avant cette triste expérience métropolitaine, et depuis mars 1939, j'avais eu la charge, sous la direction du commandant Marchal, de gérer le matériel aérien de la 5ème Région aérienne, c'est-à-dire de l'Afrique du nord, de Rabat à Tunis, en passant par Alger où siégeait l'état-major du Commandant supérieur de l'Air en AFN, en l'occurrence le général d'armée aérienne Pennés.

Nous ne disposions, en AFN, que d'avions de combat dépassés par le progrès technique. Nous faisait aussi défaut une industrie d'armement locale. L'Atelier Industriel de l'Air de Casablanca, assemblait les avions américains achetés par la mission Ziegler, mais ces appareils, aussitôt mis en état de vol, étaient convoyés en métropole. Et l'AFN dépendait entièrement du Service du matériel métropolitain pour les pièces de rechange de ses équipements aériens.

Afin de masquer ses carences, Paris adressait à l'état-major d'Alger de singuliers messages : en substance : Vos avions - majoritairement des Potez 25 - sont lents, moins de 160 kilomètres/heure et les chasseurs italiens qu'ils pourraient avoir à affronter sont deux à trois fois plus rapides, mais cette infériorité peut être un avantage car elle permet des virages plus serrés. Ou encore, autre note ministérielle : " l'armée de l'Air n'a pas besoin de moteurs de plus de 800 cv " (alors qu'à l'époque les avions civils américains étaient propulsés par des moteurs de plus de 1000 cv).

Le ravitaillement en pièces de rechanges par la métropole était lui aussi défaillant.

Aussitôt entrée en guerre contre la France (10 juin 1940) l'Italie fit survoler Alger par ses avions et hydravions sans pour autant que les avions de chasse basés à Alger-Maison Blanche prennent l'air. Le commandement de la 5ème région Aérienne s'en inquiéta à juste titre et fit enquêter. " Comment voulez-vous que j'accomplisse ma mission de défense d'Alger, répliqua le capitaine commandant l'escadrille de Loire 46 aux enquêteurs, voici trois mois que je réclame des pneus pour mes avions. Ils en sont dépourvus, ou ceux qu'ils ont encore sont dans un tel état que les appareils sont inutilisables ".

A partir du 18 juin et durant encore une semaine, des centaines d'avions militaires (probablement quelque 800) franchirent la méditerranée pour chercher refuge en Afrique du Nord. Le chef d'état-major me désigna, ainsi qu'un officier mécanicien, le capitaine Crosnier pour aller inspecter ces avions répartis sur les bases côtières d'AFN et rendre compte de leur aptitude au combat. Plus de la moitié d'entre eux étaient " incomplets ". Manquaient leur armement ou la radio, les viseurs, ou encore les lance-bombes ou les maillons des mitrailleuses, lorsque les avions n'en étaient pas dépourvus…

Aussi, début juillet 1940, après l'attaque de la flotte française à Oran-Mers-el-Kébir, l'état-major eut les plus grandes difficultés à rassembler les quelques dizaines d'avions destinés, en représailles, à bombarder Gibraltar.

Ni le gouvernement français, ni l'état-major n'avaient envisagé de préparer l'AFN à poursuivre le combat en cas de défaite en métropole, celle-ci étant tenue pour inconcevable. Les ressources africaines - en hommes - étaient déployées en France et aucun stock, aucun approvisionnement militaire n'avaient été constitués en vue d'y conduire, un jour, des combats de longue durée.
Cependant, ainsi qu'on va le voir, le premier réflexe nord africain a été la résistance et la poursuite des combats, confortant ainsi la thèse de Jacques Bourdu.

Le 17 juin, après quinze mois d'état-major au 4ème Bureau, j'obtins l'autorisation de rejoindre une unité combattante. A bord d'un Caudron 635 " Simoun " je gagnais le poste de commandement du général Pennés, installé à Tebessa pour y diriger les opérations aériennes contre l'Italie. Au début de l'après-midi je me présentais au grand chef. Sur le pas de la porte je le vis, accoudé à son bureau et… pleurant à chaudes larmes. Interdit, je ne savais quelle contenance tenir… Mais il m'interpella ainsi … " Avez-vous entendu la radio ? Non, mon général, j'étais en vol... ". Maîtrisant ses sanglots, il s'écria : " le maréchal a ordonné le cessez-le-feu… cessez-le-feu… vous savez ce que cela signifie ? C'est la défaite, vous entendez, la défaite… la défaite totale.. Mais je n'ai pas d'ordres… je continue, ici on continue… Ce soir, on bombardera Trapani…. Vous voulez combattre… allez à Aïn Beida, le capitaine de Chassey y commande un " groupe de marche " mis sur pied avec les pauvres matériels que nous avons, il vous casera dans ses équipages… ".

Le bombardement eut lieu mais ce fut un échec, plusieurs avions, victimes d'incidents techniques, firent demi tour et les autres manquèrent leur objectif. Il restait, sans en avoir les moyens, le refus de s'incliner. Ce refus subsista car, le 22 juin, donc cinq jours après le cessez-le-feu du maréchal, Alger envoya en France une mission dirigée par le commandant Sailly et dont je fis partie avec, pour instruction, de faire diriger sur l'AFN des matériels de combat et les pièces de rechange existant encore dans les dépôts de Marseille, Tarbes, Béziers. Autre échec, le désordre, voire la panique étaient dominants et nous rentrâmes à Alger quasi bredouilles.

Nul ne peut dire ce qui se serait passé si la France, refusant la défaite de ses armées, avait poursuivi le combat et mené la vie dure à l'occupant, en métropole, en méditerranée et en Afrique du Nord. Il existe un exemple, certes difficilement transposable en raison de circonstances locales différentes mais néanmoins significatif, c'est celui des Serbes. Refusant de s'incliner devant un ultimatum et leur capitale bombardée, les Serbes prirent le maquis, aux ordres du général Mihaïlovic, d'abord, de Tito ensuite. Ils immobilisèrent dans les Balkans des divisions qui eussent été bien utiles aux Allemands sur le front russe, puis des divisions italiennes, et contribuèrent ainsi à la victoire des alliés. Ils payèrent un terrible tribut humain à cette héroïque résistance, et l'Allemagne vient de les punir de lui avoir fait perdre sa guerre de conquête et d'asservissement, avec d'ailleurs, l'assistance des alliés américains, britanniques et français, au service de la cause de leur ex-ennemi commun.

Si la France s'était tout entière soulevée contre l'envahisseur ou seulement si les forces armées qui lui restaient en mer et en Afrique avaient tenté de poursuivre le combat, il est fort probable que la barbarie allemande, comme dans les Balkans, se serait donné libre cours, massacrant et pillant sans merci. L'Allemand aurait matérialisé sa haine séculaire du Français, le réduisant à l'esclavage et ravageant son territoire après en avoir déporté la population. Aux six millions de victimes de l'holocauste, cette fois sans distinction confessionnelle, d'autres millions de Français auraient été traités à la chambre à gaz. Churchill s'est trompé en écrivant que " l'armistice n'a épargné à la France aucune souffrance ".

Certes, la soumission de Vichy a été déshonorante et nous en avons payé le prix, ne serait-ce qu'à Yalta.
Mais il nous est resté assez de forces pour reprendre le combat aux côtés des alliés libérateurs. Il demeure aussi l'héroïsme des hommes, dans la clandestinité, puis dans la lutte ouverte, qui reprirent les armes contre l'ennemi, sur terre, en mer et dans le ciel. L'aviation, pour sa part, a formé un mémorable contingent de combattants, tels Accart, de Bordas, Clostermann, Ezzano, Marin la Meslée, Mouchotte… tandis que de Gennes et La Poype s'illustraient sur le front germano-soviétique… Et il y en eut tant d'autres qui suscitent le respect et l'admiration des survivants parce qu'ils défièrent aussi, inlassablement, la mort pour que revive la France.

Général CR Pierre Marie Gallois




Notes

(1) Hubert Vauthier. Le général Paul Vauthier 1885-1979, penseur militaire. Revue historique des armées n°1. 2000. pp 113-123

(2) Le général Weygand avait été l'avocat de la mécanisation mais un exercice peu concluant, au camp de Mailly, en 1932, lui attira les foudres du général Dufieux si bien que le Commandement renonça et que ce n'est qu'en 1936 que l'idée d'une force blindée autonome fut reprise.

Tant que les Français constitueront une nation, ils se souviendront de mon nom !

Napoléon
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