Entretiens d'Henri Guillemin sur Pétain !

[boisbouvier]

La SDN a été contre-performante puisqu'elle a abouti à rendre Mussolini solidaire de Hitler alors qu'au départ il le détestait, ainsi que le note Churchill dans ses Mémoires.
D'autre part, par l'illusion de sécurité qu'elle a entretenue au sein des démocraties européennes, elle a désarmé et endormi la vigilance de ces démocraties. Le cas de mars 36 est à cet égard significatif.
J'en conclus qu'il vaut mieux pas de tribunal du tout qu'un tribunal sans gendarmerie. Il ne fait que brouiller les pistes et c'est pourquoi j'approuve le gouvernement Bush d'être intervenu en Irak pour la seule raison de punir Saddam Hussein d'avoir violé la Charte des nations unies en provoquant deux guerres. Qu'avait fait l'ONU, cette pâle copie de la SDN ?
A l'âge thermo-nucléaire où nous vivons, on ne peut faire l'économie d'une gendarmerie internationale et l'exemple de la Rhénanie prouve que c'est lorsqu'il est dans l'oeuf qu'il est avantageux de tuer le crocodile.
J'espère que l'Iran qui est en train de violer le TNP signé par lui recevra la leçon qu'il mérite avant qu'il ne soit trop tard.
Si on laisse se développer l'armement nucléaire dans le monde, une ville comme Paris pourra un jour être détruite par un Ben Laden quelconque désireux de punir un gouvernement qui aura interdit le voile islamique.

[BRH]

Pour faire suite à la série d'émissions de Guillemin sur Pétain, voici le débat final sur Pétain avant Vichy. Me Isorni, Henri Amouroux, Raymond Tournoux et Jean-Noël Jeannenay donnent la réplique au vieux professeur :

http://www.youtube.com/watch?v=E5n-a6qL2MQ

Un mot à propos de la citation de Pétain donnée par Jeannenay "Si les Allemands passent par les Ardennes, on les repincera à la sortie". Citation célèbre à charge contre Pétain... Mais Isorni rugit : "citation tronquée, car le maréchal ajoute : à condition d'y réaliser les travaux nécessaires !" Et comme on le sait, les travaux nécessaires n'ont pas été réalisés...

[boisbouvier]

Guillemin expose très bien. C'est un sacré prof. Mais aussi un prof de patronage. Ce n'est pas à lui qu'il faut demander de trouver que Vichy fut astreint à la tâche d'organiser l'équivoque. Est-il même capable de le comprendre ? j'en doute. A l'entendre reprocher au Maréchal d'avoir parfois effectué des repas avec plusieurs plats de viande en période de rationnements on comprend à qui on a affaire. Une âme pure, mais aussi une âme simple. C'est vrai que le Maréchal fut gourmand ce qu'un De Gaulle, par exemple, n'était pas. Mais est-ce à cette aune qu'on doit juger un homme d'état ? Certains de nos rois comme Henri IV ou Louis XIV furent coureurs de femmes. Ils n'en furent pas moins estimés et on le leur pardonne bien volontiers. Moi, en tout cas.

[boisbouvier]

Un mot à propos de la citation de Pétain donnée par Jeannenay "Si les Allemands passent par les Ardennes, on les repincera à la sortie". Citation célèbre à charge contre Pétain... Mais Isorni rugit : "citation tronquée, car le maréchal ajoute : à condition d'y réaliser les travaux nécessaires !" Et comme on le sait, les travaux nécessaires n'ont pas été réalisés...

Oui. Daladier en a parlé lors de sa déposition au procès Pétain. Ces travaux auraient été réalisés dans un premier temps (des mines, des murs, ça ne coûte rien) mais ensuite détruits pour permettre aux deux routes qui permettaient de traverser la forêt des Ardennes de servir de voie d'accès à nos armées désireuses de se rendre en Belgique.
Pour une fois qu'on a pensé à agir offensivement dans cette guerre il a fallu que ça détruise notre défense et que ça serve l'offensive de l'ennemi !
L'excuse de notre état-major a été la lenteur de la Belgique à entrer dans une alliance avec nous.

[Francois Delpla]

le Vendredi 05 Novembre 2010 05:31:45

n'a pas très bien vieilli !

[BRH]

En effet, et de plus c'est hors-sujet...

[BRH]

Un mot à propos de la citation de Pétain donnée par Jeannenay "Si les Allemands passent par les Ardennes, on les repincera à la sortie". Citation célèbre à charge contre Pétain... Mais Isorni rugit : "citation tronquée, car le maréchal ajoute : à condition d'y réaliser les travaux nécessaires !" Et comme on le sait, les travaux nécessaires n'ont pas été réalisés...

Oui. Daladier en a parlé lors de sa déposition au procès Pétain. Ces travaux auraient été réalisés dans un premier temps (des mines, des murs, ça ne coûte rien) mais ensuite détruits pour permettre aux deux routes qui permettaient de traverser la forêt des Ardennes de servir de voie d'accès à nos armées désireuses de se rendre en Belgique.
Pour une fois qu'on a pensé à agir offensivement dans cette guerre il a fallu que ça détruise notre défense et que ça serve l'offensive de l'ennemi !
L'excuse de notre état-major a été la lenteur de la Belgique à entrer dans une alliance avec nous.

Il s'agissait là de travaux annexes, dits "de couverture"... en aucun cas des travaux sérieux qui devaient comprendre une ligne de casemates CORF. A part quelques-unes, on aura surtout des blocs MOM (main d'oeuvre militaire), pour la plupart manquant de créneaux blindés et sans portes blindées d'accès ! Notre Etat-Major n'a donc aucune excuse, car les ouvrages fortifiés étant inachevés, il y positionnera une division de série B, ne disposant même pas de sa dotation théorique en armement ! Il ne songera même pas à y pallier en organisant une position défensive aussi forte qu'en 1917...

[boisbouvier]

Henri Guillemin a très mal vieilli en effet puisqu'il est mort. Or, il a bien fait car il m'a paru pitoyable à moi qui avais tant admiré certaines de ses prestations antérieures sur Jeanne la Pucelle ou sur Pascal. Il a beau avoir été pris en défaut à plusieurs reprises et avoir reconnu s'être trompé il a fallu qu'il conclue qu'il était satisfait de ne pas avoir été contredit une seule fois.
Par exemple, Tournoux lui a fait remarquer que Pétain ne mesurait pas 1,80 m comme il l'a dit deux fois mais 1,71. Or, il a reconnu s'être trompé. Ce n'est d'ailleurs qu'un tout petit détail à côté du reste. Pétain ambitieux tapi dans l'ombre à l'affut de s'emparer du pouvoir ? Mais c'est Reynaud qui l'y a appelé, au pouvoir, lui dit Isorni. Silence embarrassé de Guillemin. Etc.

[Francois Delpla]

attention aux raisonnements binaires !

ils ont tendance à être un peu primaires.

Si Pétain n'est pas un comploteur assoiffé de pouvoir ou un réac rêvant de la douceur de vivre d'avant la Révolution, il n'est pas nécessairement à l'autre extrémité du vaste spectre des possibles : un retraité qu'on va quérir pour se tirer d'un mauvais pas.

Pour sortir de ce très mauvais match, j'appelle de mes voeux une étude fine de son ambassade espagnole qui donnait à Hitler l'occasion de l'observer de près comme de le prendre subtilement en main, par l'intermédiaire de l'ambassadeur Stohrer de façon certaine et documentée, des SS aussi très probablement, sans parler du très hispanisant Canaris.

[boisbouvier]

Le match n'était pas si mauvais.
Tournoux, Isorni et Amouroux furent à la fois mesurés et pertinents. Jeanneney fut plutôt confus. Trop jeune pour comprendre les implications d'une politique de double jeu et, a fortiori, de double duplicité. Elle fut un cas unique dans l'histoire et n'est pas prête d'être enseignée à Sciences Po. A l' ENA ? Peut-être un jour. Mais il faut encore attendre. Raymond Aron est réservé à une élite. D'ailleurs, j'ai vu ce Jeanneney l'autre jour à l'Ecole militaire à l'occasion de la projection en avant-première d'un film (antivichyste comme il se doit) et j'ai pu me rendre compte qu'il n'avait pas changé.
Ce Jeanneney est le petit-fils du président du Sénat qui, à côté d'Herriot, encouragea les députés et sénateurs à résigner leurs pouvoirs entre les mains d'un "sauveur de la patrie", le 10 juillet 40. Je pense que c'est à lui qu'Isorni faisait allusion quand il parla de ceux qui avaient tiré partie de Vichy et qui se permettaient néanmoins de le critiquer une fois le danger passé. Tous des ingrats !

[boisbouvier]

Benoist-Méchin a du style.
De ce Jeanneney, président du Sénat, il dit : "il n'est pas triste, il est funèbre".
A côté du jovial Herriot il rappelle le Stan Laurel du couple fameux du cinéma, dit-il aussi.
Je n'ai pas eu la cruauté d'en parler à son petit-fils. D'ailleurs ce n'eût pas été juste car on ne demande pas à un président du Sénat d'être un rigolo. Ce qu'on peut lui demander par contre c'est un minimum de probité. Puisqu'il juge que Pétain fut un ambitieux assoiffé de pouvoir qui souhaita -et même provoqua, et oui, vous savez bien : L'étrange défaite"- la défaite de la France pour être à même de s'en emparer, pourquoi n'en a-t-il rien dit le 10 juillet 40 à ses 647 collègues ? Au lieu de quoi il les a encouragés à ce désistement.

[boisbouvier]

Mais Guillemin, quel triste sire !
Dire que c'est à des gens comme lui qu'on confie nos enfants.

[boisbouvier]

L'évocation de l'entre-deux-guerres par Tournoux m'a paru très juste. Cette époque fut terrible. Entre le communisme de Lénine et de Staline, le fascisme de Mussolini, le nazisme d'Hitler et le néo-isolationnisme américain, l'Europe fut loin d'être à la fête à ce moment-là. Or, les subtils dosages politiques dans la logique républicaine tels que la constitution de 1875 les avait permis et encouragés n'en permettaient pas la gestion. Quatre gouvernements rien que pour 1934. Quelle anarchie ! Quelle débandade ! Qu'une défaite cinglante se produise et vous imaginez le tableau. Finie la république de papa et de grand papa : à l'épreuve des faits elle s'était révélée n'être que du caca. Pétain fut l'un des rares à y croire encore. La preuve ? Il garda dans son premier gouvernement certains de ses anciens commis (Peyrouton) et même de ses anciens ministres (Laval, Baudouin..) même s'il inaugura par ailleurs le gouvernement technocratique qui fit florès après lui.

[boisbouvier]

attention aux raisonnements binaires

Bien sûr.
Quand un raisonnement nous déplait il a cette caractéristique définitive d'être binaire.
J'aimerais qu'on me donne un exemple, un seul, d'un raisonnement qui ne le serait pas. Un raisonnement qui serait, disons...trinaire.

[boisbouvier]

Autre exemple. Tu as écrit : "La France, par l’armistice, se retrouve en hitlérie, dans toutes ses zones et son empire colonial.
Hélas ! c'est entièrement faux. Ce qui a mis la France en hitlérie ce n'est pas l'armistice, c'est la défaite, et ce qui a empêché cette hitlérie d'être totale c'est au contraire l'armistice puisqu'elle a empêché Hitler de s'emparer non seulement de son empire colonial mais aussi de la partie sud de l'hexagone.
Or, un raisonnement binaire existe à ce sujet. Il consiste à dire : soit la lutte à outrance soit le déshonneur.
Qui préfère la mort à la vie ?
Si c'est ton cas, dis le.
Pour qu'on rigole.