29 juillet 1830 ! Paris va connaître un nouveau 10 août . L'émeute a ouvert les prisons qui déversent leurs égoûts sur la capitale . L'archevêché sera pillé . On placera un cadavre sur le trône royal aux Tuileries . L'événement qui provoque le dénouement se produit en début de matinée . Deux régiments de ligne qui gardent les alentours de la place Vendôme tout près des Tuileries , font dissidence . Le maréchal Marmont fait appel , pour renforcer la défense du château où siège le gouvernement , à un bataillon de Suisses fidèles qui garde la colonnade du Louvre , à l'autre bout du périmètre formé par l'ensemble Louvre-Tuileries . Les émeutiers en profitent pour rentrer dans le Louvre , grimper aux étages , et tirer sur les troupes qui stationnent dans les cours intérieures . Celles-ci refluent vers les Tuileries , traversent le Pavillon de l'Horloge , et se replient vers les jardins et la Concorde . L'état-major et les ministres sont contraints à leur tour de se retirer vers l'Etoile et , finalement , de gagner Saint-Cloud auprès du Roi . Celui-ci dispose ainsi de 12 000 hommes sûrs , bien armés , impatients d'en découdre après avoir pris les coups sans en donner , et prêts à mitrailler "à la Bonaparte" toute troupe hirsute et baveuse qui , sortant de sa tanière de Paris , s'aviserait de venir faire un mauvais parti au Roi en terrain découvert. Il n'empêche que Paris est aux mains de la Révolution. Quelques députés tentent d'y encadrer le mouvement en nommant une commission provisoire composée de bric et de broc avec l'inévitable La Fayette pour tenter d'organiser la garde nationale . Le Roi tient un conseil des Ministres à saint-Cloud . L'opinion qui l'emporte est celle de l'apaisement par le retrait des ordonnances , le renvoi du ministère Polignac , et la nomination du duc de Mortemart comme président du conseil. Un seul ministre a défendu la fermeté : Guernon-Ranville , procureur général près la Cour de Lyon , ministre de l'instruction publique . Il est la seule tête politique du cabinet Polignac . Il était le seul à se prononcer contre les ordonnances avant qu'elles fussent prises , parce qu'elles exposaient le Trône . Il est le seul à les défendre maintenant qu'elles mettent aux prises la Monarchie et la Révolution et que celle-ci doit coûte que coûte être vaincue . Le ministre préconise que le gouvernement se retire à Tours avec les corps constitués et la représentation diplomatique , tandis que la famille royale d'établira derrière la Loire au milieu du peuple fidèle . Dans cette position , on entreprendra la reconquête de la capitale sur cette engeance de sac et de corde impunie depuis plus de 40 ans , et qui puise dans cette impunité l'aliment de crimes renouvelés. Le Dauphin appuie cette résolution énergique à laquelle le Roi semble un instant sensible . Mais finalement , la logique de la Légitimité déjà éprouvée par Louis XVI et à laquelle , pourtant , Charles X s'était juré de ne pas succomber , sera la plus forte . Mystère de la monarchie de droit divin... Nul besoin de rechercher des explications occultistes à ce dénouement : Bruno a évoqué et développera peut-être les fumées du visionnaire Martin , la survivance de Louis XVII , et le faux dauphin Naundorff . Je ne nie pas que tout ceci ait pu contribuer à miner les esprits et à les priver de ressorts dans l'épreuve , mais l'explication me semble beaucoup plus simple et tenir en un seul mot : lassitude . Je pense que lorsqu'une minorité de gens raffinés se trouve confrontée à une masse vulgaire et haineuse que la morale ne suffit plus à tenir à sa place , le dégoût la conduit naturellement à s'éloigner . En ce sens , je crois que la fin de la Monarchie légitime peut être analysée comme un acte de renoncement volontaire . Quant le duc de Mortemart sera enfin parvenu à approcher la commission sortie de l'émeute , on lui répondra seulement : "c'est trop tard" . C'était trop tard en réalité depuis bien longtemps...
Au Moniteur où tout est passé sous contrôle de l'insurrection , on n'a pas pu sortir l'édition du matin . Dans l'après-midi , on publiera sur une demi-page , en gros caractères , la composition de la commission. Le lendemain , le Moniteur publiera une autre composition en précisant que celle de la veille ne venait pas de la commission. Le b..... !
C'est avec ces deux éditions insolites , et symboliques de l'ère nouvelle qui s'ouvre , que s'achève cette éphéméride réalisée grâce à Fabrice . Grand merci à lui
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