Loïc Bonal a écrit :En gros : si Hitler avait vraiment voulu envahir la Grande-Bretagne, comment s'y serait-il pris ?
Ma réponse n'a pas varié : de la même manière, grosso modo, que ce qui s'est passé dans les faits, avec tentative de conquête de l'espace aérien au-dessus de la Manche et de l'Angleterre méridionale, et concentration d'une flotte de transport capable d'acheminer des forces importantes et des moyens lourds de l'autre côté du Channel.
La concentration de la flotte de transport a bel et bien commencé fin juillet. Liddel Hart donne des chiffres à ce sujet. Il est incontestable que les forces britanniques auraient été incapables de repousser l'assaut sur les côtes anglaises...
Ce sont les amiraux allemands qui ont convaincu Hitler de la nécessité d'éliminer la RAAF de la Manche avant toute tentative de traversée...
Un raid aéroporté en ouverture ? Possible, mais à condition que les pertes en soient acceptables, c'est-à-dire d'avoir obtenu une supériorité aérienne suffisante pour ne laisser que la portion congrue aux pièces de la DCA britannique et aux quelques chasseurs qui auraient réussi à franchir l'ombrelle de protection des Bf 109.
Ce raid était également prévu dans la région de Douvres: il devait viser à sécuriser une zone de débarquement à l'est ou à l'ouest de Douvres. Devaient s'y employer les parachustistes et la 22e ID. Rien de plus n'était prévu.
Il est par contre certain que le rapport de forces est incroyablement défavorable aux Britanniques à l'été 1940. Cependant, le fossé de la Manche annule en grande partie ce déséquilibre, en créant des difficultés logistiques des plus considérables qu'une flotte d'avions un peu usée et affaiblie par les récentes opérations ne saurait en aucun cas contourner. Surtout, s'emparer de la Crète, où les défenseurs en sont réduits, plus ou moins, à leurs propres forces, et conquérir la Grande-Bretagne où le potentiel militaire (usines) et démographique est bien plus élevé, c'est une toute autre paire de manches.
Sans jeu de mots... Bien entendu, la Crête et la Grande-Bretagne, ce n'est pas tout à fait pareil. Hitler n'a pas osé, parce qu'il n'était pas fixé sur ses objectifs. Il ne voulait pas détruire l'Angleterre. C'est donc l'Angleterre qui l'a détruit !!!
A mon avis, une victoire allemande n'est possible que si une Panzergruppe (trois ou quatre divisions mécanisées minimum) est disponible au nord de la Manche, afin de mener une opération éclair qui serait courte car l'espace stratégique métropolitain britannique est des plus réduits. Or, ceci suppose que l'on puisse traverser la Manche avec des bateaux (en effet, les "Tauchpanzer" amphibies ont été transformés entre juin et octobre 1940, à raison de 160 PzKpfW III plus huit Panzerbefehlswagen III et 42 PzKpfW IV - mais essentiellement entre août et octobre 1940 justement - sans compter que des chars ne servent à rien sans les véhicules de la chaîne logistique qu'il y a autour : camions, camionnettes, motos, véhicules légers, tracteurs, etc ; et que ce ne sont pas 200 chars dont il est question là, mais plutôt 600 ou 800 pour trois divisions blindées). Or la possibilité de traverser la Manche en flux continus implique d'avoir dissuadé la Home Fleet de venir perturber la noria, c'est-à-dire d'avoir obtenu la supériorité aérienne sur le Channel.
Une vague de 650 panzers était prévue dès le début des opérations, selon Liddel Hart. Merci de confirmer le détail des chars amphibies, plus nombreux encore que je ne l'avais relevé... les 450 autres auraient été des PzI et II, vraisemblablement.
Cela dit, les Allemands semblaient avoir prévu de traverser à l'aide de la protection d'un champ de mines. Et même de deux, plus certainement: un dans la Mer du Nord, l'autre dans la Manche, nécessairement plus perméable...
Mais de toute façon, la Royal Navy serait intervenue, supériorité aérienne acquise par les Allemands ou pas... Les bombes anti-bindages étaient-elles prêtes ou pas à l'été 40 ? En tout cas, elles ne l'étaient pas en juin...
La logique militaire est ici indéniable. Nous ne sommes plus dans des actions de troisième dimension sur un espace réduit et surtout clairement délimité (Crète, Rhodes, Malte) ou à l'isolement réduit dans le temps (ponts sur la Meuse, Eben-Emael, "Husky", "Overlord", "Market Garden", "Varsity", etc) grâce à la relève par des éléments amis. Nous sommes dans un cas de figure où l'on envoie les forces aéroportées à l'assaut (admettons, c'est leur mission) sans savoir si elles seront rejointes en raison de risques de coupure des lignes de communications et des flux logistiques. C'est admettre que potentiellement, les 15 ou 20 000 hommes envoyés en "enfants perdus" risquent potentiellement d'être perdus sans remède. Aucun chef militaire - à l'exception peut-être, dans le même ordre de grandeur, de Montgomery et de Navarre postérieurement, et avec quels brillants résultats ! - ne peut accepter cela. Surtout que leur survie ne conditionne absolument pas la réussite de la suite de l'opération, puisqu'il y a quand même après la conquête d'un pays de 40 millions d'habitants à réaliser...
Bien noté. Je pense néanmoins que les Allemands avaient de bonnes chances de réussir, même sans une supériorité aérienne définitive. Reste que celle-ci a bien failli être acquise, si Hitler n'avait pas varié dans ses objectifs, qui ne semblent d'ailleurs qu'avoir visé l'instauration d'un gouvernement décidé à négocier...
Tant que les Français constitueront une nation, ils se souviendront de mon nom !
Napoléon