Jardin David a écrit :Personnellement je n'ai pas de réponse définitive pour désigner un seul et unique responsable militaire à la défaite de 1940, mais GAMELIN me semble un bon candidat. Les raisons principales souvent évoquées :
- stratégie de base 100% défensive .... mais modifiée au dernier moment
- absence de réserve au moment décisif
- grenouillages politiques variées
Ceci étant, je ne suis pas certain que le résultat aurait grandement différé avec un autre généralissime. Réécrire l'histoire me semble nécessiter de remonter assez loin. 1934 ?
JD
DHouliez a écrit :Pensez réellement que l'on puisse désigner un seul et unique responsable ?
Je ne suis pas juge !
"Seul et unique" me semble un peu trop conciliant envers les autres membres de la caste des officiers généraux (si on en reste aux responsabilités militaires). Disons que "principal" me semble plus approprié. Là encore, je n'ai pas de certitude absolue et je lirai avec plaisir toute contribution qui souhaiterait démontrer qu'il faut chercher ailleurs.
JD
dhouliez
Moi non plus, je ne suis pas juge, sinon de l'intérêt de certains messages pour la tenue correcte du forum.
Ce dont je suis par contre convaincu, c'est de l'intérêt limité de cette approche.
Bien entendu, il faut chercher ailleurs, pas nécessairement parce que Gamelin ne serait pas le principal responsable, mais par principe.
C'est pourquoi les postures définitives désignant les "ganaches" et les "nuls" n'ont aucun intérêt.
"La caste" des officiers généraux n'était pas unie, par exemple, et en son sein, certains n'avaient certainement pas comme priorité la solidarité avec les autres généraux... voir le cas du général Bourret, par exemple.
Faire de Daladier le mentor de Gamelin est également simplificateur.
DH
Je n'ai pas d'éléments particuliers à ajouter concernant GAMELIN, mais l'exemple de BOURRET n'est pas forcément probant. Même qualifié de "républicain" (ce serait à définir sans jugement de valeur) BOURRET n'en reste pas moins prisonnier du même modèle de pensée. La lecture déjà ancienne de ses mémoires ne m'a pas beaucoup avancé. Au moins n'a t-il pas effectué de réécritures auto-justificatrices.
Comment aurait-il pu sortir du modèle de pensée militaire dominant, celui de cette caste ? Pour cela il fallait laisser du temps au temps, subir des pertes et apprendre (*). De GAULLE militaire n'a pas été meilleur. C'est justement ce facteur temps qui n'était pas disponible en juin 1940.
Ceci dit je ne voudrais pas en faire des lignes et des lignes sur ce sujet qui reste, à mes yeux, trop peu factuel et davantage basé sur nos impressions personnelles.
JD
(*) hors aspects militaires, on peut aussi ajouter qu'il fallait prendre la dimension des spécificités nazies et des dangers inédits que cela représentait. On pourrait disserter sur l'attitude anti-patriotique des communistes mais ils n'étaient pas les seuls, loin de là.
JARDIN DAVID a écrit:
ce sujet qui reste, à mes yeux, trop peu factuel et davantage basé sur nos impressions personnelles
DHouliez
Bien d'accord.. mais dès lors, quel était l'intérêt de relancer le sujet sur ces bases ?
Je ne suis pas d'accord avec l'utilisation du terme "caste", le "modèle de pensée" serait à définir, comparer l'action de de Gaulle divisionnaire avec celle de Gamelin généralissime n'a pas de sens (pas plus qu'avec au minimum les trois quarts des autres divisionnaires), le poids des "spécificités nazies" méritait d'être pesé en fonction du moment et des décisions à prendre, etc.
Encore une fois, quel est l'intérêt de relancer un sujet sur l'appréciation des qualités de Gamelin, à base d'impression(s) personnelle(s), alors même qu'une étude nouvelle vient de paraître sur le sujet ?
Cette étude mériterait d'être lue et discutée pour sortir des impressions personnelles, justement.
JARDIN DAVID
Je suis tout à fait d'accord pour éviter la partie de ping-pong ... que je n'ai pas spécialement initiée. Il est vrai que le récent rangement de mon rayonnage 1940 et la relecture de quelques passages des mémoires de GAMELIN m'ont incité à intervenir assez inutilement.
On ne parle plus de BOURRET et ce que j'ai écrit de de GAULLE ne concerne effectivement qu'un récent divisionnaire à TT, pas de rapport direct avec la responsabilité du généralissime. Simple observation de ma part sur une sclérose (j'espère ne pas choquer) ... générale !
Lire Simon CATROS est probablement la meilleure chose à faire sur ce sujet. Peu de dispo en ce qui me concerne et j'en reste donc là en attendant avec plaisir les notes de lecture des uns et des autres.
Bonne lecture à tous !
"L'Allemagne commet donc la même erreur en déployant la majorité de ses forces présentes à l'Ouest face à la ligne Maginot, dans le secteur le plus puissant de la ligne Siegfried, et en y concentrant la presque totalité des unités d'active de l'HGC. Situation au 9 septembre 1939 :
D'autre part, du côté français, il n'y a pas d'accumulation de moyens derrière le Rhin et seules quelques divisions sont placées aux environs de la frontière suisse pour éventuellement parer à la possibilité d'une attaque par le Nord du territoire helvétique.
N'est il pas plus simple, pour l'expliquer, de penser que la Meuse et le Rhin sont des barrières naturelles fort difficiles à franchir et particulièrement favorables à la défense ?
Au risque de me répéter, il faut replacer les situations dans leur contexte d'époque. Il est beaucoup trop facile de les juger avec ce que nous savons aujourd'hui. En 1939, il n'existe aucun exemple de franchissement de larges coupures d'eau, dont la rive opposée est défendue, aussi rapidement que le fut celui de la Meuse, sans un très large soutien d'artillerie.
Les deux guerres mondiales dénombrent de très nombreux exemples d'attaques massives d'infanterie repoussées par des mitrailleuses installées dans des lignes de défense ne bénéficiant bien souvent d'aucun obstacles naturels tels que la Meuse.
De plus, la manœuvre Dyle ne sera pas contestée par la grande majorité des hauts-officiers français, c'est l'option Breda qui le sera, et à juste titre. Cette option, imposée par Gamelin, est incontestablement à mettre à son passif."
Je vais déjà vous contredire sur l'exemple de l'Allemagne. Lorsque l'on parle de stratégie défensive, il est évident que l'on va chercher à concentrer le maximum de forces dans le ou les secteurs ou l'on pense avoir le plus de risques de subir une attaque ennemie. L'Allemagne, dite-vous, ne s'attendait pas à subir une attaque ? Alors pourquoi laisser 1/3 de ses forces à l'Ouest et particulièrement 14 divisions d'active face à la ligne Maginot ?
En revanche, je vous rejoins sur l'immobilisme stratégique français. L'on ne croit pas à un franchissement aussi rapide de la Meuse et l'on pense avoir le temps, le cas échéant, d'y envoyer des renforts.
Ensuite, les réserves sont assez également réparties derrière le front, la situation des GU françaises le 9 mai au soir est suffisamment parlante pour se passer de commentaires (vous pourrez en outre constater qu'il n'y a pas de concentration de troupes derrière le Rhin) :
Je vais à nouveau me répéter. l'expérience de la 1re GM a démontré que la rupture d'un front peut arriver, aucune ligne de défense étant infranchissable. Lors d'une attaque, l'ennemi fait en sorte de concentrer suffisamment de troupes pour se donner les moyens de la rupture. Ce qui est grave, c'est de na pas pouvoir reconstituer une ligne de défense un peu plus loin pour empêcher l'ennemi d'exploiter la rupture. Et c'est exactement ce qui va arriver en 1940, la très rapide progression allemande ne permettra jamais de reconstituer une ligne de défense. Toute la stratégie allemande repose sur la vitesse de progression des PzD.
Ensuite, si l'exemple polonais a effectivement été analysé il faut rappeler que les situations sont très différentes. La Pologne n'a pas eu le temps de mobiliser une bonne partie de ses troupes et les stratèges polonais ont voulu défendre la totalité du territoire, ce qui a amené à une dilution de leurs troupes à l'avantage de l'Allemagne, celle-ci concentrant son action sur quelques axes majeurs.
Or, au 10 mai l'armée française est entièrement mobilisée et déployée. De plus, le franchissement de la Meuse a été grandement facilité, pour ne pas dire rendu possible, par l'absence de forces aériennes françaises et la carence en moyens antiaériens. L'expérience de la guerre démontrera que les Stuka sont très sensibles aux attaque aériennes et à la DCA, et sur ces deux point, Gamelin n'a aucune responsabilité.
Enfin, Gamelin est bien loin d'être le seul a avoir sous-estimé les possibilités offertes par le développement de la motorisation et de l'arme aérienne. C'est une constante que l'on trouve chez bien des officiers supérieurs français et de nombreuses autres nations durant la seconde moitié des années 1930. Je rappellerais que toutes les armées confrontées à la Wehrmacht durant les premières années de guerre n'ont pas fait mieux que les Français et ont enchaîné les défaites. Même l'US Army en 1942 -1943 prit bien des déculottées en AFN.
La victoire allemande devait être rapide pour pouvoir retourner ses forces contre l'Ouest. Il fallait donc engager en Pologne le maximum de troupes possible. Or, l'Allemagne laisse 44 divisions à l'Ouest dès l'attaque de la Pologne, qui auraient été bien plus utiles en Pologne. Le Reich pensait donc possible une attaque française dès le début des hostilités et il était impératif de défendre puissamment la ligne Siegfried, au risque de perdre cet atout défensif majeur.
De plus, le ratio de troupes habituellement reconnu depuis la Première Guerre mondiale dans l'attaque est de 3 contre 1, et bien plus si la position ennemie est puissamment fortifiée, ce qui est le cas avec la ligne Siegfried.
En fonction du nombre de divisions allemandes déployées face à la ligne Maginot, je vous laisse faire les calculs du nombre d'unités françaises qu'il aurait fallu engager dans l'offensive pour avoir une vraie chance de succès et le ratio que ce nombre représente sur la totalité de divisions disponibles début septembre 1939.
Donc vous nous dites que les réserves peuvent être déployées derrière le Rhin, mais vous refusez d'envisager de la même façon qu'elles peuvent être déployées derrière la Meuse, alors qu'une bonne partie d'entre elles est située plus près de la Meuse que du Rhin, c'est bien cela ?
Tout comme vous persistez à ignorer (je vous l'ai déjà dit) que dès le 13 mai, il est décidé de porter sur la limites des 9e et 2e armées un premier lot de grandes unités disponibles (14e, 36e, 44e DI et 87e DIA) et de constituer sur la Sambre un groupement (2e DCR et 43e DI) susceptibles d'intervenir au profit de la 9e armée.
.prévoir une réserve centrale entre les deux points forts de nos positions. Dans une certaine mesure, cette nécessité n'était pas tout à fait abandonnée, puisque l'activation de la VIème armée était prévue et c'est bien ce qui fut ordonné. Mais les DI affectées à cette mission étaient bien trop loin pour intervenir à temps : seules les 14e et 36e Di furent lancées dans la bataille en 1er échelon, le reste parvenant à mesure en s'échelonnant derrière l'Aisne...
Il faut croire que ces renforts, totalisant pourtant plus de 80 000 hommes, sont négligeables. Tout comme vous refusez d'entendre que la toute la stratégie allemande repose sur la vitesse de progression des troupes motorisées et blindées. La réussite de la percé de Sedan n'est pas la conséquence de l'absence de réserves françaises, mais de la vitesse de progression allemande.
Eric Denis a écrit:
Ensuite, si l'exemple polonais a effectivement été analysé il faut rappeler que les situations sont très différentes. La Pologne n'a pas eu le temps de mobiliser une bonne partie de ses troupes et les stratèges polonais ont voulu défendre la totalité du territoire, ce qui a amené à une dilution de leurs troupes à l'avantage de l'Allemagne, celle-ci concentrant son action sur quelques axes majeurs.
C'est, en effet, l'analyse faite par Gamelin et Georges. La percée des Ardennes démontre qu'ils se sont trompés et se sont bercés d'illusions. Georges a plutôt écouté Corap avec plus d'attention que Gamelin, mais il n'a pas su inverser la tendance...
C'est l'analyse faite par tous les attachés militaires étrangers durant la campagne de Pologne et elle est plutôt juste. La percée des Ardennes ne démontre en rien que cette analyse est fausse.
BRH a écrit:
Ensuite, la faiblesse de notre DCA résulte du fait que sa remontée en puissance n'a pas été jugée prioritaire...
C'est bien plus compliqué que ça mais ça nécessiterait des pages entières pour répondre. Mais quoi qu'il en soi, dans ce cas, où est la responsabilité de Gamelin sur ce point pourtant fondamental pour l'ATF 40 ?
BRH a écrit:
Cependant, il a bel et bien incarné au plus haut niveau cette sous-estimation des capacités de l'arme motorisée et aérienne. Au reste, ce n'est pas le grief principal que je retiens contre lui et qui serait plutôt d'ordre tactique. Quitte à me répéter moi aussi, le grief principal à lui faire, c'est de ne pas avoir disposé d'une réserve stratégique, capable de réagir rapidement à une percée inopinée !
Mais en 1939, le monde entier sous-estime les capacités des troupes motorisées et des forces aériennes, et c'est même le cas de la majorité des hauts responsables militaires allemands.
Et puis réagir rapidement, ça veut dire quoi exactement ? La réaction française débute dès le 13 mai, lorsque seules quelques petites unités allemandes ont traversé la Meuse.
Vous avez une drôle de conception du résumé. Plutôt que "j'ai fait un résumé", il aurait été plus correct de dire "j'ai copié une partie de l'article, en mettant certaines phrases en gras". Vous prendrez ça comme une leçon d'épistémologie si ça vous chante.
Et donc, vous avez l'impression que l'auteur considère que Gamelin est un nul (votre idée de départ, j'insiste un petit peu, parce que sinon, on pourrait se méprendre sur votre motivation), seul et unique responsable militaire de la défaite ?
Je cite une phrase également, en "soulignant" au contraire ce que vous n'avez pas souligné...
Citation :
L’absence de réserves importantes ou leur éloignement est une variable lourde ; mais pas la seule.
Le problème est que, visiblement, vous ne voulez pas que l'on étudie ces autres raisons...
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