par BRH » Jeudi 24 Juillet 2014 17:29:41
http://www.louis17.com/documentation-scientifique/
file:///Users/Downloads/rapport+G+Lucotte+II+juin+2014+v2.pdf
RESUME
Nous avons obtenu des séquences ADN mt de cheveux de Karl Wilhelm Naundorff qui prétendait être le fils de Louis XVI (1754&1793) et Marie-Antoinette (1755-1793). L'authenticité de ses cheveux a pu être établie en microscopies optique et électronique. Les séquences des régions hypervariables de l'ADN mt (extrait de deux cheveux différents) montrent cinq
mutations : 16298 C; 72 C; 152 C; 195 C et 263 G ; l'haplogroupe de cet ADN mt correspond au sous-haplogroupe HVO. Par conséquent, Naundorff ne peut plus être exclu d’être considéré comme étant Louis XVII sur la base de séquences ADN mt de son humérus (comme l’avaient affirmé Jehaes et al., 1998 ).
Les comparaisons des séquences ADN mt extraites des cheveux de Naundorff rapportées ici et celles (Jehaes et al., 2001) d'Anne de Roumanie ( descendante vivante Habsbourg) montrent que les deux correspondent à l'haplogroupe ADN mt général du groupe HV.
En 1793, durant la Révolution Française, le Roi de France Louis XVI (1754-1793 et la Reine Marie-Antoinette (1755-1793) furent décapités. Leurs enfants, Marie-Thérèse-Charlotte (1778-1851) et Louis-Charles (1785-1795?) restèrent prisonniers au Temple (à Paris), où ils survécurent à la mort de leurs parents. D'après les archives officielles Louis-Charles, qui fut proclamé roi de France, Louis XVII, immédiatement après la mort de son père, mourut de
tuberculose au Temple le 8 juin 1795. Mais depuis, la version officielle de sa mort fût sans cesse l'objet de questionnements.
L'une des théories persistante soutient que c'est un substitué qui mourut le 8 juin 1795. Juste après la mort officielle de Louis XVII, des individus prétendirent être Louis XVII. Le plus fameux d'entre eux, Karl Wilhelm Naundorff (1785?-1845), vint à Paris en 1833. Il réussit à rassembler suffisamment de preuves pour convaincre d'anciens serviteurs de la Cour de Versailles et des Tuileries de son ascendance. Naundorff fut déporté vers l'Angleterre par les autorités françaises en 1836 ; il mourut à Delft (Hollande) en 1845, où il fut enterré sous le nom " Louis XVII, Roi de France et de Navarre, né à Versailles le 27mars 1785, décédé à Delft le 10 août 1845".
Il y a une quinzaine d’années, Jehaes et al.( 1) excluait Naundorff comme étant le fils de Marie-Antoinette, sur la base des séquences ADN mitochondriales ( ADN mt) d'un de ses restes ( os prélevé de Naundorff en 1950, conservé dans un bocal qui n'a jamais été scellé, et utilisé par le Pr Froeutjes auprès de ses étudiants comme " matériel didactique" de l'ordre de la " curiosité"), comparé à ceux ( tous Habsbourg) obtenus de cheveux de deux sœurs de Marie-Antoinette,Johanna-Gabriela ( 1750&1762) et Maria-Josépha ( 1751-1767), de Marie-Antoinette elle-même, et aux séquences ADN obtenues sur deux apparentés maternels vivants ( Anne de Roumanie et André de Bourbon Parme ).
Dans la présente étude nous comparons les séquences ADN mt obtenues des cheveux authentiques de Naundorff à celles déjà publiées (1,2).
MATERIEL ET METHODES
Les cheveux
L'un de nous (C.C.) a fourni le matériel : une grande enveloppe, contenant une enveloppe de taille moyenne (avec à l'intérieur deux boucles de la perruque de Naundorff) et une petite enveloppe contenant ses propres cheveux. Les inscriptions (en français) sur la petite enveloppe (figure 1) portées par le dernier détenteur (Anna Thomas) indiquent l'origine de ces cheveux : " les cheveux, contenus dans cette enveloppe, sont ceux que j'ai coupé (ôtés) de ma propre main de la tête de feu le Prince Charles-Louis de Bourbon, Duc de Normandie. A Delft le 13 août 1845. Jan Soutendam, Docteur Médical". Soutendam était en effet l'un des trois docteurs (avec Snabilié et Kloppert) qui avait examiné deux jours avant (le 10 août) le corps de Naundorff, décédé à cette date. Sur la face avant de la petite enveloppe (non montrée ici) une autre annotation précise que l'avant-avant dernier propriétaire était Otto Friedrichs, l'un des meilleurs spécialistes dans le passé de Louis XVII et de Naundorff.
La boucle (Figure 1), comprenant environ une centaine de cheveux qui varient du blanc à plus foncé. Cinq d'entre eux (numéro 1 à 5) ont été choisis à des fins d'analyses.
Microscopie
Les cinq cheveux ont été examiné en micrographie stéréoscopique confocale, et par MEB-EDX (modèle Philips XL 30 version environnementale) ; sonde à rayons X, Bruker AXS energy dispersive, système d’analyse PGT (modèle Spirit, Princeton Gamma technologie). Toutes les analyses moléculaires ont été réalisées d'après la méthodologie recommandée dans notre précédente étude (3) qui concerne l'ADN ancien (a-ADN). L'ADN génomique a été extrait du bulbe du cheveu numéro 2 de façon standard (0,5 M EDTA, sarcosyl 20% et protéinase K 10 mg/ml), et purifié en utilisant un kit commercial (NucleosSpin+ Kit ; Macherey-Nagel, Duren, Allemagne), en suivant les instructions du fabriquant (avec quelques modifications).
Amplification des régions hypervariables de l'ADN mt
Les séquences de l’ADN mt génomique pour HVR1 et HVR2 (régions hypervariables 1 et 2) ont été amplifiées par PCR avec les amorces F15971 et R16410, et avec les amorces L15 et H484,respectivement. Pour chaque PCR, l’extrait d’ADN des échantillons de cheveux a été amplifié dans un mélange réactionnel de 12,5Rl : 2mM MgCl2, 50mM KCl, 10mM Tris / HCl pH 9, 0,1% Triton X&100,0,2mM de chaque dNTP, 0,1 RM de chaque amorce, et 2.5 U d’ADN polymérase (Ampli Taq Gold ;
Applied Biosystems, Foster city, CA, USA). L’amplification a été conduite avec une étape de dénaturation initiale à 95°C pendant 6 minutes, suivie de 35 cycles à 95°C pendant une minute, 55°C pendant une minute, et 72°C pendant une minute.
Séquences ADN HVR1 et HVR2
Les produits des PCR ont été purifiés sur gel d’agarose (QIA&Quick PCR Purification Kit; Qiagen, Valencia, CA, USA). Les deux brins de tous les fragments amplifiés d'ADN mt extraits à partir de pièces de gel d’agarose ont été directement séquencés (BigDye Terminator Cycle Sequencing Kit ; Applied Biosystems) et séparés (ABI PRISM 3130 Genetic Analyser ; Applied Biosystems).Les séquences obtenues ont été alignées sur les séquences de référence révisées de Cambridge(4), afin
d'identifier la présence des sites polymorphes. Le Software Seqscape (Applied Biosystems) et l'analyse Clustal (http:\\www.clustal.org) ont été utilisés pour l’alignement des paires de bases.
RESULTATS
Le tableau 1 résume les caractéristiques microscopiques principales des cinq cheveux de Naundorff étudiés. Leurs couleurs sont blonde, brun-rouge ou brun. La figure 2 montre un exemple d'une analyse MEB-EDX sur l’un de ces cheveux (cheveu 1): les écailles sont bien visibles sur la photographie SEM. Très peu de particules d'impuretés sont visibles sur leurs surfaces, les cheveux correspondants ont été lavés et nettoyés. L’épaisseur moyenne de ces cinq cheveux = 46,6 microns (26/57). Le cheveu numéro 2 est particulièrement fin. La figure 3 montre la principale caractéristique des cheveux de Naundorff, signalée il y a plus de cinquante ans (5): l'excentrement du canal médullaire, une anomalie relativement rare présente dans certains cheveux (quand le trichogramme est étudié en microscopie de haute résolution). Les cinq cheveux (sauf cheveu numéro 2, trop fin) présentent cette anomalie.Tous les cheveux étudiés, même les plus nettoyés, présentent des pellicules à la surface (figure 4); La couverture de pellicules est la plus intense pour le cheveu numéro 2. Contrairement aux cellules desquamées de la peau ordinaires, les pellicules sont des agrégats de centaines ou milliers (en fonction
de la taille) de cornéocytes, avec un pourcentage élevé de noyaux résiduels à l'intérieur des cellules(6).
La figure 5 montre le bulbe du cheveu numéro 2. La surface de ce bulbe est particulièrement riche de substances organiques ; cette partie a été choisie en premier pour des examens d’extraction d’ADN.
Résultats sur les séquences ADN mt HVR1 et HVR2
Une quantité approximative de 20 ng d'ADN génomique a été obtenue à partir du bulbe du cheveu numéro 2. Des expériences préliminaires concernant le gène amélogénine (7) ont montré que l'individu correspondant est un male XY. Nous avons obtenu des séquences ADN (de 16025 à 16355 et de 67 à 299, respectivement) sur les segments HVR1 (16032&16352) et HVR2 (72&294) d’ADN mt extraits du bulbe du cheveu numéro 2. Une mutation seulement (16298 C) est présente dans la séquence HVR1 ; mais il y a quatre mutations (72C,152C, 195C et 263G) dans la séquence HVR2. Les mêmes résultats ont été obtenus dans une étude répliquée concernant l'ADN mt extrait du cheveu numéro 3. Dans le système de nomenclature européenne récente, (8), la combinaison 16298C, 72C, 152C, 195C,263G correspond au sous-haplogroupe de l'ADN mt HVO.
DISCUSSION
C'est sur la base de comparaisons des séquences consensus HVR1 et HVR2 sur des séquences ADNmt entre l'humérus de Naundorff et les autres échantillons Habsbourg connus à l'époque que Jehaes et al (1) ont exclu la possibilité que Naundorff puisse être considéré comme étant Louis XVII. Les échantillons des Habsbourgs étudiés (et particulièrement Anne de Roumanie) n'ont aucune mutation dans la séquence HVR1; ainsi, peuvent-ils appartenir au vaste paragroupe ADN mt H*; l'échantillon osseux de Naundorff, ayant au moins la mutation 16250T, était clairement exclu de toute ascendance Habsbourg.
Mais les auteurs (1) ont longuement évoqué les difficultés rencontrées pour obtenir des séquences ADNmt reproductibles à partir de l'humérus de Naundorff (un humérus droit? extrait du cercueil pendant la restauration de sa tombe en 1950 à Delft). Dans notre propre expérience, sur la base de résultats reproductibles obtenus sur l'ADN mt extrait de deux cheveux authentiques de Naundorff, nous avons trouvé la mutation 16298C dans les séquences HVR1, mais pas le variant 16260T.
Bien qu’analogue pour la mutation 263G de HVR1(et pas de mutation au site 194), la séquence ADNmt de Naundorff extraite de l'humérus est différente de celles des cheveux pour les mutations 72C, 152C et195C. Il en résulte que les séquences ADN mt sont clairement différentes entre les échantillons de l'os et des cheveux. La mutation 16298C de HVR1pour les échantillons des cheveux, à elle seule, justifie son assignement au sous-haplogroupe ADN mt HVO. Comparée aux séquences obtenues précédemment pour tous les individus Habsbourgs, les séquences HVR2 des cheveux de Naundorff sont identiques pour les mutations 263G et 153C, mais la mutation 72S n’est pas trouvée chez les Habsbourgs, le site 194C, non-muté dans les échantillons de cheveux de Naundorff, est variable selon les échantillons Habsbourgs : [la mutation 194T est présente dans l’échantillon extrait du cœur présumé de Louis XVII et de ceux de Johanna-Gabriella et d’Anna de Roumanie, mais celui (l’échantillon) de Marie-Antoinette a la mutation 194C. Note : correction proposée par Christian Crépin]. La mutation 195C, présente dans les cheveux de Naundorff est absente chez les Habsbourgs.
Les dessins différentiels de variation HVR2 observés dans les séquences ADN mt entre les cheveux de Naundorff et les échantillons Habsbourg semblent en accord avec la diversité rapportée dans les populations modernes sud-allemandes (9), où 40% des individus appartiennent au groupe général HV. Parmi eux, deux individus ont été assignés au sous-haplogroupe HVO. Dans cette base données de profils HV (ADN mt HVR1 et HVR2), la mutation 263G est ubiquiste et la mutation 152C
trouvée dans deux individus H*, dans trois H5 et dans un H6 (mais la mutation 194C n'a pas été trouvé dans la base de données). Les profils publiés (1) des deux individus vivants : Anne de Roumanie (échantillon sanguin) et André de Bourbon Parme (échantillon capillaire) sont sûrs, car confirmés par deux laboratoires indépendants ; mais il y a sept générations de transmissions d’ADN mt féminine entre Marie-Antoinette et Anne de Roumanie et André de Bourbon Parme, avec une possibilité, non négligeable, d’événements rares de mutations qui ont pu arriver entre eux. Jehaes et al(1) relatent longuement dans leur publication les difficultés rencontrées pour obtenir des résultats reproductibles concernant les séquences
HVR2 de Marie-Antoinette (la mère de Louis XVII), aux sites 73, 143, 146, 195 et 199 et pour les mutations 152C, 194 T et 263G. C'est la raison pour laquelle nous travaillons actuellement sur des cheveux authentiques de la Duchesse d'Angoulême (la sœur de Louis XVII) afin de clarifier le point important de la reproductibilité des résultats obtenus de cheveux contemporains à ceux de Naundorff et de Louis XVII.
CONCLUSION
Les résultats rapportés dans la présente publication concernant les séquences ADN mt HVR1 et HVR2 à partir de cheveux authentiques de Naundorff établissent que :
1/ Cinq mutations ont été obtenues (16298C en HVR1 ; 72C, 152C, 195C et 263GenHVR2) ; le sous-haplogroupe ADN mt correspondant est HVO.
2/ Cet haplogroupe est clairement différent de ceux publiés précédemment (1) pour un échantillon osseux
de Naundorff. Ainsi l'affirmation de l'exclusion édictée (1) que Naundorff ne peut pas être Louis XVII, basée sur ces critères, ne peut plus être maintenue.
3/ la comparaison des séquences ADN mt des cheveux de Naundorff et ceux d'Anne de Roumanie (une descendante vivante de la lignée des Habsbourgs) montre que les deux correspondent à des sous-haplogroupes ADN mt proches au sein du groupe général HV.
Liste des abréviations
a-DNA : ADN ancien ; mtDNA : ADN mitochondrial ;
HVR1
: Hypervariable Région 1 de l’ADN mt ;
HVR2
:
Hypervariable Région 2 de l’ADN mt ;
H :
haplogroupe le plus commun de l’ADN mt ;
H*
: Paragroupe de
H
;
HVO
: sous-haplogroupe de
H
;
HV
: Groupe général
H
; PCR : Réaction en Chaîne par
Polymérisation ; SEM-EDX : Microscope électronique
à balayage – Rayons-X analyse dispersive
d’énergie.
Remerciements
Nous remercions le Dr S.Leguiner-Lebeau (IGNA de Nantes) pour son aide dans la détection des séquences ADN mt HVR1 etHVR2 des cheveux de Naundorff. L’historien indépendant Bruno Roy-Henry est l’un de ceux qui sont à l’origine du projet. Cette étude entre dans le cadre de notre programme de recherches génétiques sur les Familles royales de France développées à l’Institut d’Anthropologie Moléculaire.
Références
1.
Jehaes E, Decorte R, Peneau A, Petrie JH, Boiry PA,Gilissen A, Moisan JP, Van den Berghe H,Pascal O, Cassiman JJ. Mitochondrial DNA analysis on remains of a putative son of Louis XVI, King of France and Marie-Antoinette.
European Journal of Human Genetics, 1998; 6: 383-395.
2.
Jehaes E,Pfeiffer H, Toprak K, Decorte R, BrinkmannB, Cassiman JJ. Mitochondrial DNA analysis of the putative heart of Louis XVII, son of Louis XVI and Marie-Antoinette. European Journal of Human Genetics, 2001; 9: 185-190.
3.
Lucotte G. A rare variant of mtDNA HVS1 sequence inthe hairs of Napoléon’s family .Investigative Genetics, 2010 ; 1: 1-4
4.
Andrews RM, Kubacha I, Chinnery PF, Lightowlers RN,
Turnbull DM, Howel N. Renalysis and
revision of the Cambridge reference sequence for hu
man mitochondrial DNA.
Nature Genetics
,
1999 ; 23 : 147.
5.
Rapport du Pr Locard (n°10. 176).
Ministère de l’Intérieur, Direction Générale de la
sureté
Générale ; Laboratoire de Police Technique de Lyon
(2 pages).
6.
Ackerman AB, KligmanAM. Some observations on dandru
ff.
Journal of the Society of Cosmetic
Chemistry,
1969 ; 20 : 81-101.
7.
Using The AmpFISTR Identifiler PCR amplification ki
t ( AmpFISTR Yfiller
TM
).
8.
Brandstätter A, Niederstätter H, Pavlic M, Grubweis
er P, ParsonW. Generating population data
of the EMPOP database- An overview of the mtDNA seq
uencing and data evaluation processes
considering 273 Austrian control region sequences a
s example.
Forensic Science International,
2007 ; 166 : 164-175.
9.
Brandstätter A, Klein R, Duftner N, Wiegand P, Pars
onW. Application of a quasi-median network
analysis for the virtualization of character confli
cts to a population sample of mitochondrial DNA
control region sequences from southern Germany (Ulm
).
International Journal of Legal
Medicine,
2006 ; 120 : 310-314.
Tant que les Français constitueront une nation, ils se souviendront de mon nom !
Napoléon