rapatriement d'une question qu'un brouillon a soulevée en un mauvais endroit
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boisbouvier a écrit :Göring l'a dit à Goldensohn : "Nous ne manquions pas de moyens d'entrer en contact avec les Anglais. En Suède et en Espagne nous avions des relais".
J'ajoute qu'Hitler alla très loin dans l'humilité vis à vis des Anglais quand en Juillet 40 il fit des offres de paix publiques à la G-B. Celle-ci ne lui répondit même pas. Plus accommodant que le Führer tu ne trouves pas. Plus rigide que Churchill, tu ne trouves pas non plus.
Je passe sur les bons points à Hitler (ou Pétain) et les mauvais à Churchill que recèle le § 2, pour me limiter à la tentative de raisonner contenue dans le 1 : si Hitler voulait causer aux Anglais, il avait d'autres moyens que d'envoyer Hess en Ecosse, donc ce n'est pas lui qui l'a envoyé. Il se trouve que Michèle Cointet, en sa récente histoire de la Milice, a le mérite (qui en est hélas un) de citer un mien livre quand son propos l'appelle au lieu de le passer sous silence, mais le critique avec un argument du même type.
Je tiens, et démontre d'abondance, dans
Qui a tué Georges Mandel ? (L'Archipel, 2008), que le meurtre de l'ancien chef de cabinet de Clemenceau ne peut avoir été ordonné que par Hitler. Réponse de MC : s'il le détestait tant, pourquoi le faite tuer en France alors qu'il l'avait sous la main, en Allemagne ?
Michel comme Michèle ne semblent point prendre la mesure de la spécificité du nazisme. Hitler n'est pas un être d'instinct ou d'impulsion, mais un très froid calculateur de coûts et de profits. Et quand il veut quelque chose, il ne procède pas comme tout un chacun, en utilisant l'outil adapté ou la voie évidente. Ses calculs sont souvent compliqués. Les arguments ci-dessus sont faciles et, comme le sont souvent les solutions de facilité, particulièrement mauvais.
Le raisonnement de MC peut déjà faire l'objet d'une critique interne : ce n'est pas seulement le lieu, mais la date du meurtre qui sont illogiques s'il ne s'agit que de haine. Hitler non seulement pouvait tuer Mandel dès son arrivée en Allemagne, ou même en zone nord française, en novembre 1942, mais pouvait réclamer auparavant son exécution à Vichy qui, lors de certaines phases de lèche éhontée envers Berlin, n'aurait pas demandé mieux que d'obéir.
Il ne s'agit donc pas de cela, mais d'une démarche nazie banale, basique et quotidienne, celle de la prise d'otage. Lorsqu'il fait tuer Mandel, Hitler menace de faire tuer aussi deux autres captifs de haut rang, Paul Reynaud et Léon Blum. Le but est d'obtenir une parfaite docilité de Pétain, dans les semaines qui séparent le débarquement de Normandie et la libération de l'essentiel du territoire français. Le meurtre de Mandel a valeur d'avertissement : Pétain devra rester soumis, car à la moindre incartade il provoquera la mort des deux autres otages et ruinera la justification de toute son entreprise, consistant à prétendre qu'il limite les dégâts; en revanche, s'il est docile, le maintien en vie de Blum et de Reynaud sera le susucre du chien bien dressé.
Pour Hess, le problème n'est pas de dire aux Anglais que Hitler leur offre une paix blanche en échange des mains libres pour agresser l'URSS. Il est, excusez du peu, de présenter cette offre tout en renversant le gouvernement Churchill. D'autre part, il est particulièrement stupide de se fier là-dessus à Göring, qui précisément avait été tenu à l'écart de cette manoeuvre par Hitler aussi bien que par Hess, et ne pouvait que spéculer.