Des Vergès pour se faire battre !
Le respect dû aux morts, qui avait été refusé l’an dernier à Raymond Aubrac, le jour même de son décès, par une petite frange hélas influente http://www.delpla.org/article.php3?id_article=543 , ne saurait exempter l’historien du devoir de mettre le holà aux contre-vérités. Pour ma part, n’étant pas né de la dernière pluie, j’ai tout de même été surpris de la tonalité générale des commentaires après la mort, le 15 août dernier, de Jacques Vergès. On croirait que Robin des bois nous a quittés ! Les antichambres du nazi Genoud ou de l’aventurier Carlos sont promues à la dignité d’une forêt de Sherwood, d’où un isolé intrépide aurait défié les puissants. La propension française à préférer les voleurs astucieux aux gendarmes balourds trouve cependant ici sa limite.
Ce brave type aurait assumé le sale boulot, indispensable en démocratie, de la défense des indéfendables. Il suffit pour nuancer le propos de constater qu’il les choisissait dans des catégories restreintes et typées, et glissait peu à peu de la défense des nazis à celle du nazisme, et de la dénonciation de certaines pratiques israéliennes à un robuste antisémitisme.
Concernant la mise en accusation des Aubrac pour défendre Barbie, dont il fut le pionnier en 1983, en relayant les montages alors confidentiels d’un nommé Gérard Hisard avant de trouver lui-même des relais, je ne me contenterai pas de trouver surprenante l’idée que tous les coups sont permis pour sauver un accusé. L’avocat avait en effet joué les prolongations alors qu’il ne pouvait plus rien pour son client, en lui faisant endosser un tissu d’affabulations intitulé « testament de Barbie », et transmis aux journaux, en 1991, le lendemain du décès de l’ancien SS. Cela s’appelle une prise de position personnelle, et une infamie assumée en son nom propre.