Archives de Michel Jaboulay

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Message par BRH » Mercredi 14 Septembre 2011 08:58:33

1°) La dernière fois que l’on soit certain qu’il s’agit bien de Louis XVII se situe très exactement le 3 juillet 1793 à 23h00, quand il est arraché à sa famille. Après, on ne peut plus parler que de l’enfant du Temple (ce qui ne présume en rien de son identité). Tout auteur qui traite de Louis XVII après cette date doit au préalable prouver qu’il s’agit bien du petit Roi, ce que Philippe Delorme s’abstient de faire (comme la plupart des auteurs d’ailleurs !).

2°) Le squelette exhumé au cimetière Sainte-Marguerite à l’endroit indiqué par le fossoyeur Bertrancourt a été examiné en 1894 par un groupe d’éminents médecins (que le docteur Petrie qualifie lui-même de «fine fleur de la médecine parisienne à l’époque»). Cet examen a retrouvé les traces d’une part des atteintes scrofuleuses aux endroits signalés par le rapport d’autopsie du 9 juin 1795 et d’autre part les traces de scie (y compris l’échappée de scie) décrites par le docteur Pelletan, qui officiait. En outre, cet examen à prouvé qu’il s’agissait d’un adolescent mâle âgé au minimum de quatorze ans (alors que Louis XVII n’en avait que dix à l’époque). Continuer d’affirmer donc que Louis XVII est décédé au Temple le 8 juin 1795 et que sa dépouille a été jetée dans la fosse commune où on ne peut plus la retrouver consiste à nier une vérité scientifiquement démontrée.

3°) Pelletan fait au fil de ses témoignages des déclarations contradictoires au sujet du «pieux larcin», disant d’une part qu’il ne courait aucun risque (p.30 : sa déposition de 1817 et p. 48 : à la duchesse d’Angoulême), mais d’autre part que le docteur Lassus l’a «félicité de sa témérité» (p. 103 : le 13 juin 1816), pour finir par déclarer «Vous savez qu’il pouvait y aller de ma vie» (mai 1817, dans une lettre au docteur Dumangin). Pelletan n’est pas un témoin crédible : il n’apporte aucune preuve qu’il se soit réellement emparé du cœur de l’enfant autopsié. Professeur d’anatomie (p. 31), il possédait chez lui une collection de pièces anatomiques conservées au départ, comme toujours à l’époque, dans l’esprit de vin.

Qui plus est, Pelletan ment effrontément en parlant de ses visites à l’enfant au Temple (p. 124 : dans Préliminaire du Mémoire de 1814, et p. 102 : dans son Exposé du 13 juin 1816), alors que ses dires son démentis par l’historien De Beauchesne (Louis XVII, Plon, Paris, Tome II, Livre XVIII, pp. 316 à 326) : Pelletan est un faux témoin.

Or l’existence même du cœur dit de Pelletan ne repose que sur ses dires : il n’existe aucune preuve matérielle que le cœur dit de Pelletan ait été prélevé sur l’enfant qu’il a autopsié devant ses trois confrères le 9 juin 1795.

4°) Philippe Delorme invoque les témoignages de ceux qui ont assisté à l’autopsie.

Le docteur Jeanroy n’a laissé aucune déclaration à ce sujet (p. 38).

Le gardien Lasne, interrogé par l’historien De Beauchesne, dans les années 1830, a refusé de croire à l’authenticité du cœur dit de Pelletan, en précisant (p. 30) qu’il «avait assisté à l’autopsie, et n’avait pas quitté un seul instant l’opérateur». Mais lors du procès de 1874, Maître Jules Favre démontra à la Cour que Lasne était un faux témoin (Louis XVII, plaidoirie de Maïtre Jules Favre, Librairie Internationale, Paris, 1891, pp. 191 à 208).

Dans son Mémoire de 1816, Pelletan dit (p. 36) : «J’osai soustraire le cœur et je n’en fis part qu’à M.Lassus». Mais le docteur Lassus est décédé le 7 mars 1807, à Paris (Cercle d’Études Historiques sur la Question de Louis XVII, Cahiers Louis XVII, N° 10 Spécial, janvier 1997, p. 34) et ne s’est jamais exprimé à ce sujet.

Dans une note datée de 1817, annexée à ses «Preuves Authentiques de la mort du jeune Louis XVII», en page 39, l’historien A. Antoine de Saint-Gervais cite le docteur Dumangin : «M.Dumangin atteste qu’à la fin de l’opération il a vu M.Pelletan envelopper soigneusement quelques chose qu’il mit dans sa poche …. Il est moralement convaincu de la vérité du fait». Mais dans une lettre à Pelletan, en date du 1er mai 1817, son confrère Dumangin écrit : «dans l’instant où vous dites avoir soustrait une partie précieuse du jeune roi». La première déclaration reste dans le vague sur la pièce soustraite par Pelletan, mais la lettre met le fait carrément en doute. La différence entre les deux déclarations est que la première était faite devant un tiers sous la Restauration (et une négation aurait pu faire accuser alors Pelletan non seulement de tentative d’escroquerie, mais de crime de lèse-majesté), tandis que la seconde est d’ordre strictement privé. Qui plus est, et comme Pelletan, les déclarations que fait Dumangin sur ses visites au Temple sont mensongères : Dumangin est, lui aussi, un faux témoin.

Dans sa déposition du 6 août 1817, l’ex-commissaire Damont déclare (p. 37) : «Je priai M.Pelletan de me donner des cheveux». Mais il est plus précis (p. 38) dans sa déposition du 16 août 1817 : «Il le pria de lui donner quelques uns de ses cheveux ; ce qu’il fit, en prenant des précautions pour que son action ne fut pas remarquée de M.Dumangin». Ce qui prouve que Dumangin n’a rien vu et que l’attestation citée par A. Antoine de Saint-Gervais est de pure complaisance. Selon Philippe Delorme, ce serait à la suite de ces dépositions que Damont serait venu trouver Pelletan pour lui demander «une authentification de ses reliques capillaires» (p. 38), et il présente cette requête (p. 38) comme «une reconnaissance au moins implicite des prétentions du docteur», alors qu’il constate plus loin que «ni Lasne, ni Damont n’ont vu Pelletan s’emparer du précieux viscère». Comment Damont pourrait-il donner une reconnaissance, même implicite, d’un geste de Pelletan dont il n’est pas témoin ?

Signalons en outre que De Beauchesne mentionne trois autres personnages qui ont assisté à l’autopsie (Louis XVII, op. cit., p. 328) : le commissaire Darlot, ainsi que Bigot et Bouquet. Pelletan n’en fait pas mention. Il serait pourtant étrange que sur huit témoins il n’y en ait pas un seul pour avoir remarqué son geste !

En résumé, sur les huit témoins ayant assisté à l’autopsie, deux sont décédés sans avoir rien dit à ce sujet, deux sont des faux témoins, les autres n’ont rien vu. Nous sommes en plein délire !

5°) Philippe Delorme cite encore les témoignages de ceux qui ont vu le cœur.

Nous venons de voir que Pelletan dit en avoir fait la confidence (p. 103) à son confrère Lassus, mais d’une part il ne dit pas lui avoir montré l’organe, et d’autre part Lassus est décédé en 1807 sans avoir rien dit.

Pelletan s’exprime ainsi (p. 42) au sujet de Tillos : «Les grands orages de la révolution étant calmés, j’eus l’imprudence, un jour, de montrer ce cœur, en même temps que d’autres pièces que mon tiroir renfermait, à un M.Tillos, mon élève particulier».

Dans une note datée du 15 juillet 1836, l’abbé Lafont d’Aussone déclare (p. 135) : «Le docteur Pelletan, bien avant la chute de Bonaparte, m’avait montré le cœur de Louis XVII».

Enfin, Pelletan a écrit (p. 127) : «Madame la comtesse de Clermont-Tonnerre a vu ce cœur».

À part Lassus qui n’a peut-être rien vu et n’a en tout cas rien dit, de quelle preuve les trois autres témoins ont-ils disposé pour identifier ce cœur comme étant celui de Louis XVII, ou même simplement comme celui de l’enfant autopsié ? Exclusivement de propres paroles de Pelletan qui, nous l’avons vu, est lui-même un faux témoin.

6°) Pelletan dit (p. 43) avoir proposé à la veuve Tillos un reçu pour disculper la mémoire de son mari. Mais d’une part, le médecin n’avait pas osé réclamer le cœur à son élève (p. 43), et d’autre part la veuve Tillos ne lui demandait rien, d’autant que cette restitution se déroulait en cercle privé. Le geste charitable du médecin visait en réalité un tout autre but : c’est la première fois que ce cœur a une existence matérielle, concrète, et qu’il est présenté par écrit comme celui de Louis XVII.

Or sur quoi repose ce reçu délivré par le médecin ? Une fois de plus sur la seule parole de Pelletan, parole qui, nous l’avons vu, n’a aucune valeur ! À la fin du reçu, Pelletan ajoute : «Le procès-verbal de l’ouverture et autres pièces qui y sont relatives fourniront la preuve de ces faits». Ce sont là les parole d’un escroc. Les pièces dont il parle prouvent seulement qu’il a participé à l’ouverture du corps, ce que personne n’a jamais nié. Par contre, elles n’apportent aucune preuve que Pelletan se soit emparé du cœur, ni que le garçon autopsié ait été Louis XVII.

Ce qui n’empêche pas Philippe Delorme de présenter cette mascarade comme une preuve d’authenticité du viscère.

7°) Il est par ailleurs remarquable que ce reçu soit daté (p. 128) du 23 avril 1814. Dans sa Narration à Mgr de Quélen, datée de 1828, le médecin écrit (p. 135) : «Madame la duchesse d’Angoulême devait paraître la première».

Or ceci est faux. En effet dans ce texte à Mgr de Quélen, Pelletan dit que la duchesse d’Angoulême serait arrivée la première à Paris, ce que dément la chronologie des événements : le 6 avril 1814, le Sénat appelle Louis Stanislas Xavier de Bourbon sur le trône de France. Il ne quitta sa résidence d’Hartwell, en Grande-Bretagne, que le 20 et s’installa à Compiègne le 29 avril : la duchesse d’Angoulême ne l’avait pas quitté depuis Mittau, en 1799, et elle entra à ses côtés à Paris le 3 mai 1814 (G. Bordonove, Louis XVII, Pygmalion, Paris, 1989, pp. 131 à 141). Le comte d’Artois, nommé Lieutenant Général du Royaume par son frère, était pour sa part arrivé à paris dès le 12 avril (J.Orieux, Talleyrand, Flammarion, Paris, 1970, p. 582).

Une fois de plus, nous prenons Pelletan en flagrant délit de mensonge sur cette chronologie. Il écrit en effet cette Narration en 1828 et il ne s’est écoulé que 14 ans depuis les événements.

Mais ce qui est grave, c’est que Philippe Delorme ne se donne même pas la peine, qu’exigerait un minimum de respect pour ses lecteurs, de vérifier les faits et les dates. Ceci est inadmissible de la part d’un homme qui se présente comme historien.

8°) Déposé à l’Archevêché de Paris, après avoir été refusé par la famille royale, le viscère disparaît lors du pillage par des émeutiers (p. 58) en date du 29 juillet 1830. Pelletan fils, lui aussi médecin, le retrouve par hasard quelques jours plus tard (p. 66) et le reconnaît : «Il avait encore conservé son odeur d’esprit de vin». Belle preuve que voilà ! Toutes les pièces anatomiques de l’époque étaient conservées dans l’esprit de vin et nous savons que Pelletan père, professeur d’anatomie (p. 31), possédait ses propres collections anatomiques, et notamment dans son tiroir (p. 42).

S’agit-il toujours du cœur de 1814 (dont rien ne prouve qu’il provenait de 1795) ? Rien ne le prouve.

9°) Le cœur remis à Don Carlos, Frohsdorf, fit l’objet d’une décharge, accompagnée d’une note décrivant minutieusement l’urne, en date du 22 juin 1895.

Sur les photos de l’époque (Revue rétrospective, 1894), on voit très bien en effet l’organe très haut dans le vase, tout contre le couvercle. Les morceaux de cristal de l’urne d’origine (brisée lors du sac de l’Archevêché de Paris) sont parfaitement visibles, reposant sur le fond du vase.

Sur les photos publiées en avril 2000 par Philippe Delorme (p. 136), les morceaux de cristal ont disparu. Le cœur est situé beaucoup plus bas dans l’urne et l’on voit nettement un petit cylindre attenant au couvercle, auquel il est suspendu par un fil ténu. Qui plus est, la forme du cœur lui-même n’est plus la même : il est plus oblong qu’en 1894. Or, il est impossible qu’un organe «devenu aussi dur que le bois» se soit pareillement déformé sous l’influence de son propre poids.

Ces constatations proviennent du travail minutieux effectué par Madame de La Chapelle. Il est curieux de constater que Philippe Delorme s’abstient de reprendre dans son livre la photo de 1894 !

Enfin, cet auteur parle (p. 90), de «la tâche délicate de disjoindre les deux hémisphère du vase de cristal, qui ont été hermétiquement scellés - sans doute vers 1975, époque du retour du reliquaire en France». Il découle de cet écrit de Philippe Delorme que quatre-vingts ans durant (de 1895, date de l’arrivée de l’urne à Frohsdorf, à 1975) cette urne n’a pas été scellée.

On croit faire un cauchemar ! Qui peut en effet dans de telles conditions assurer qu’il n’y a pas eu de substitution du viscère ?

10°) Les héritiers de Pelletan font contacter M.Barrande, ancien précepteur du comte de Chambord, à qui ils font remettre une notice à ce sujet, en date du 5 juin 1883 (p. 69). Mais le comte décède le 24 août 1883, sans avoir pris de décision. Le comte de Chambord n’a jamais reçu le cœur dit de Pelletan.

Madame de La Chapelle rappelle une lettre du Père Bole, confesseur du comte de Chambord, à son collègue le Père de Boilesve, en date du 17 octobre 1885 : «Ce cœur, Monseigneur l’a reçu après avoir fait examiner toutes les pièces et documents qui en constatent l’authenticité».

Philippe Delorme prétend que le verbe recevoir peut aussi avoir le sens d’accepter, et que d’autre part le Père Bole a pu se tromper et penser que les tractations de 1883 avaient abouti, ce qui, nous venons de le voir, n’est pas le cas (Forum Révolution Française, sur le site Internet Forum Histoire de France, en date du 20 mai 2001).

Le comte de Chambord n’aurait jamais conduit de telles négociations du vivant de la duchesse d’Angoulême sans son accord. On peut donc situer l’événement entre 1851 et 1883.

En français, les mots ont un sens. Le dictionnaire Robert donne pour le verbe recevoir les définitions suivantes : «I. (Sens passif). Se voir adresser (quelque chose). II. (Sens actif). Laisser entrer ou venir à soi, donner accès». Il s’agit là de personnes ou d’objets matériels. Le sens d’accepter ou d’agréer ne s’emploie qu’au niveau des idées ou, dans le judiciaire, pour une requête à un tribunal.

Le cas qui nous occupe concerne un cœur, donc un objet matériel. Le texte du Père Bole est donc sans ambiguïté : le comte de Chambord a bien reçu matériellement un cœur, présenté comme celui de Louis XVII, et qui n’est pas le cœur dit de Pelletan. Il est même vraisemblable que le prêtre, confesseur du prince, a lui-même vu ce cœur. Il n’a donc pu se tromper, d’autant qu’il écrit deux ans après la mort du prince et que ses souvenirs étaient donc tout frais.

Malgré les dénégations de Philippe Delorme, il y a bien eu un cœur, dit de Louis XVII, et qui n’est pas celui de Pelletan, à Frohsdorf avant 1895.

11°) Dans sa relation des événements, Damont déclare (p. 37) : «C’est là, présent à l’opération, que je priai M.Pelletan de me donner des cheveux … ce qu’il m’accorda». Dans sa deuxième déposition, il précise (p. 38) qu’il «reçut de M.Pelletan une touffe de cheveux qu’il a enveloppée dans un journal de ce temps-là». Après la Restauration, Damont est venu trouver Pelletan (p. 38) «afin d’obtenir de lui une authentification de ses reliques capillaires».

Or Damont a voulu offrir ces cheveux à la famille royale. Il raconte en détail sa démarche dans sa déposition du 16 août 1817 au ministère de la Police Générale (R.Chantelauze, Louis XVII, Fimlin-Didot, Paris, 1884, Appendice, pp. 462 à 466). Il fut donc convoqué chez le duc de Grammont, «capitaine des gardes du corps de S.M.». Celui-ci «à l’examen des cheveux, prétendit que ce n’était point les cheveux du Dauphin ; qu’ils étaient d’un blond plus clair ; qu’il avait eu l’occasion de le bien connaître, sa belle-mère ayant été gouvernante des Enfants de France».

Chantelauze ajoute en note : «Le duc de Grammont aurait dû savoir, ce qui n’est ignoré de personne, que les cheveux blonds d’en enfant peuvent passer au brun le plus foncé, à mesure qu’il avance en âge, et que ce changement se produit très fréquemment».

Il est exact que beaucoup d’enfants naissent blonds et que leur chevelure devient châtain, voire châtain foncé, lorsqu’ils grandissent. Mais cela n’est pas le cas pour les vrais blonds, tels que l’étaient Madame Royale et Louis Charles qui tenaient leur chevelure blond cendré de leur mère. Et cela, Chantelauze ne pouvait pas l’ignorer : sa remarque n’a donc aucune valeur en ce qui concerne Louis XVII.

Il en résulte que les cheveux conservés par Damont depuis l’autopsie ne provenaient pas de la tête de Louis Charles et cet élément à lui seul est une preuve que l’enfant autopsié le 9 juin 1795 n’était pas Louis XVII.

Ce qui réduit à néant les «arguments» de Philippe Delorme.

12°) Mais l’affaire des cheveux ne s’arrête pas là !

Sur le Mémoire de la main de Pelletan en date du 4 décembre 1818 (p. 135), se trouve en dernière page une note écrite par l’abbé Lafont d’Aussone, historien de la Reine, en date du 15 juillet 1836. Cet ecclésiastique était le neveu de la marquise de Talaru auquel Pelletan avait confié son Mémoire pour le communiquer à la duchesse d’Angoulême. L’abbé écrit : «Je déclare, en outre, que le docteur Pelletan, longtemps avant la chute de Bonaparte, m’avait montré le cœur de Louis XVII et sa jolie chevelure d’un blond cendré, toute bouclée».

D’où proviennent ces «cheveux de Louis XVII» ?

Philippe Delorme pose bien cette question (p. 136), mais se révèle incapable d’y répondre autrement que par des hypothèses, contredites par les dires de Pelletan lui-même.

En page 116 en effet, nous lisons : «Le sieur Damont … me pria de lui donner une poignée de cheveux ; ce que je fis …. À la condition de m’en rendre la moitié : je ne réclamai pas cette moitié, ayant le cœur en ma possession. Le sieur Damont est venu réclamer mon certificat pour … appuyer la vérité, en déposant entre les mains de S.A.R. Madame la poignée de cheveux que je lui avais donnée et que j’ai fort bien reconnue».

Cette déposition de Pelletan est très claire :

- Pelletan n’a pas pris de cheveux lors de l’autopsie ;

- Il n’a pas réclamé à Damont la moitié des cheveux de l’enfant autopsié que celui-ci était censé devoir lui rendre ;

- La poignée de cheveux présentée par Damont au duc de Grammont est complète et Pelletan l’a reconnue.

Or cette poignée de cheveux a été refusée parce qu’elle n’était pas de la teinte de cheveux blond cendré du Dauphin.

La conclusion est claire : Pelletan est un trafiquant de pseudo reliques royales.

En page 68, parlant du fils Pelletan, Philippe Delorme écrit : «Quelle récompense chimérique peut donc espérer le détenteur des pauvres restes de Louis XVII ?». Cette fausse naïveté ne peut tromper personne. Du temps même de la révolution, les reliques de la famille royale ou les objets divers provenant du pillage des châteaux royaux se monnayaient à prix d’or à Paris. Leur cote n’a pas baissé depuis, ainsi qu’en témoignent les montants atteints lors d’enchères publiques. Ce n’est sans doute pas une récompense honorifique, mais elle est sonnante et trébuchante !

13°) En page 12, Philippe Delorme écrit : «À Versailles, aux Tuileries, Louis Charles rayonnait de vitalité». C’est exact, mais cette vitalité n’a pas pris fin le 10 août 1792. Au Temple encore, il était parfaitement sain et vif : durant le «préceptorat» de Simon - et encore conviendrait-il, avant tout, de prouver que l’enfant confié à Simon était bien encore Louis XVII ! -, il courait en tout sens, riant, chantant, jouant au vu et au su de tous. Le 19 janvier 1794, les commissaires de la Commune de service au Temple, dont Lorinet, officier de santé, délivrèrent au couple Simon une décharge où l’enfant était déclaré «en bonne santé».

On ne peut donc parler d’une éventuelle maladie de Louis XVII qu’après le 19 janvier 1794. Et là, encore faut-il prouver au préalable qu’il s’agissait bien de Louis XVII !

Or le procès-verbal d’autopsie (De Beauchesne, op. cit., Livre XVIII, page 330, note 1) termine par cette conclusion : «Tous les désordres dont nous venons de donner les détails sont évidemment l’effet d’un vice scrofuleux existant depuis longtemps, et auquel on doit attribuer la mort de l’enfant». La scrofule, forme de tuberculose, est une maladie à évolution lente. Un délai de 16 mois est absolument incompatible avec la conclusion des médecins.

Cette constatation est encore une preuve que l’enfant autopsié le 9 juin 1795 n’était pas Louis XVII. Il est donc parfaitement abusif de parler de la maladie de Louis XVII.

En page 12, Philippe Delorme écrit : «Le 9 mai (1793), le docteur Thierry prescrit aussitôt un traitement antiscrofuleux». L’historien De Beauchesne nous donne pour les mois de mai, juin et juillet 1793 les ordonnances du docteur Thierry pour le «fils de Marie-Antoinette» (De Beauchesne, op. cit., Documents et pièces justificatives, VII, pp. 492 à 495) : on y relève force petit lait clarifié, du miel de Narbonne, une médecine «composée de follicules mannes choisis, coriandre, et sel de Glauber», des baies de genièvre, un bouillon «avec cuisses et reins de grenouille, avec addition de sucs de plantes, et terre foliée minérale», un lavement «avec carraline de Corse, suc de citron et huile d’olive», et du sirop vermifuge.

Tout ceci n’a rien à voir avec la scrofule, mais relève exclusivement de la diététique.

Un de mes ancêtres, l’abbé François Rozier, né en 1734 et décédé en 1793 (nous descendons en ligne féminine directe de son frère aîné Jacques Matthieu Rozier), fut un agronome et savant très connu et estimé au XVIIIème siècle (on l’appelait le Columelle français), membre ou associé ou correspondant d’un grand nombre d’académies en France et à l’étranger. Entre autres œuvres, il a laissé un Cours complet d’Agriculture, compilation sur nombre de sujets non seulement agricoles, mais aussi scientifiques, et notamment médicaux.

Dans le Tome IV, édité en 1786, en page 137, il traite de la scrofule et des écrouelles. Il dit notamment : «Je dirai que le lait, dont on abuse dans certains pays froids et humides, surtout s’il est grossier, contribue beaucoup au développement de cette maladie». Citant des médecins qui ont été ses correspondants, il conseille comme remèdes : l’onguent de tabac, l’emplâtre de savon camphré, le cataplasme à la mie de pain, avec de la racine de bryone, les feuilles de ciguë, les frictions mercurielles, l’usage des eaux de Barèges, les gommes résolutives, la scille, la rue, l’alcali fixe végétal, et comme remontant le quinquina tonique.

Dans le Tome III, édité en 1783, il traite de la constipation. Il constate que cette affection peut occasionner de violents maux de tête, et même des coups de sang. Il préconise pour cette affection les lavements émollients, avec les décoctions de son, de graine de lin, de poirée, de pariétaire et de miel. Il y ajoute le petit lait, l’eau de poirée, de laitue, l’eau de veau légère, et la dissolution de 2 ou 3 onces de manne, avec un gros de crème de tartre, dans une pinte des boissons susdites.

Le docteur Thierry, de mai à juillet 1793, a tout simplement soigné un jeune garçon sujet à la constipation.

Il n’a a pas eu de «maladie de Louis XVII». Cette affirmation erronée sort tout droit du livre du docteur Petrie (J.H.Petrie, op. cit., chap. 6, pp. 59 à 69).

14°) Le procès-verbal d’autopsie dit : «…un enfant qui nous a paru âgé d’environ dix ans, que les commissaires nous ont dit être celui de défunt Louis Capet …» (De Beauchesne, op. cit.). Cette procédure est tout simplement légale : le médecin légiste n’a pas à se prononcer sur l’identité du cadavre qu’il autopsie. Il reprend simplement ce qui lui a été dit. Cette déclaration ne prouve donc strictement rien quant à l’identité du cadavre.

Par ailleurs, nombre d’historiens se sont accrochés à l’âge «d’environ dix ans» attribué par les médecins à l’enfant. C’est ne pas tenir compte des faits. Tout un chacun en France savait que le petit duc de Normandie était né en 1785. Lui donner un autre âge - fut-il évident ! - après l’avoir désigné comme «le fils de défunt Louis Capet», c’était signaler une supercherie et, par conséquent, prendre un billet direct pour l’échafaud. Et ceci d’autant plus que les médecins avaient tout lieu de penser que personne ne serait jamais en mesure de vérifier leurs dires, ce qui, malheureusement pour eux, s’est produit et a révélé le mensonge. Faite dans ces conditions, l’indication de l’âge ne prouve rien.

Toute autopsie commence par un examen minutieux externe du cadavre. Les médecins ont réalisé cet examen avec soin. Notons d’ailleurs que parmi eux se trouvait le docteur Lassus qui était professeur de médecine légale (De Beauchesne, op. cit., p. 329). Ils ne notèrent aucun signe corporel significatif sur le cadavre de l’enfant. Or Louis Charles possédaient des marques corporelles (voir message à ce sujet sur le Forum Louis XVII) dont certaines étaient connues et que les médecins ne pouvaient pas ne pas chercher. S’ils ne les ont pas notés, c’est qu’ils n’existaient pas sur le cadavre.

Au sujet de ces marques corporelles du Dauphin, il faut préciser :

- Louis XVI avait fait inoculer ses enfants contre la petite vérole (maladie alors souvent mortelle et que l’on appelle aujourd’hui la variole). Il avait voulu en faire un exemple et tous les médecins de l’époque étaient au courant, surtout des sommités comme ceux qui ont pratiqué l’autopsie de l’enfant du Temple. Ils ne pouvaient donc pas ne pas en rechercher les traces.

- Le naevus maternus était parfaitement connu du docteur Jeanroy qui avait dit à ce sujet qu’il ferait identifier le Dauphin entre dix mille. Il était aussi vraisemblablement connu du docteur Lassus qui était professeur de médecine légale. En outre cette marque était parfaitement visible de par sa nature même et située à surface intérieure de la cuisse gauche. Or le texte même du procès-verbal d’autopsie souligne que les médecins ont vu à cet endroit des traces de putréfaction. Ils ne pouvaient pas ne pas remarquer ce signe s’il avait existé sur le cadavre qu’ils autopsiaient.

- Il est possible qu’ils n’aient pas remarqué les dents de lapin (deux incisives alignées en avant), placées à l’intérieur de la bouche, ni la longueur anormale des lobes des oreilles, surtout la droite.

- En ce qui concerne la cicatrice de morsure de lapin, cet incident avait été signalé par la presse (L’Observateur du 11 mars 1790). Mais l’incident datait déjà de cinq ans et les médecins pouvaient fort bien l’avoir oublié. Néanmoins la présence de la cicatrice correspondante aurait dû être notée, car dans une autopsie toute cicatrice peut avoir son importance pour déterminer la cause de la mort (ce qui est le but essentiel de toute autopsie), et le procès-verbal d’autopsie prouve que les quatre médecins se sont livrés à un examen minutieux externe du corps. Ce procès-verbal devrait donc mentionner cette petite cicatrice, ce qui n’est pas le cas.

Nous avons là une preuve supplémentaire que l’enfant autopsié le 9 juin 1794 n’était pas Louis XVII.

Remarquons en outre que les docteurs, connaissant leur existence sur le vrai Louis Charles, auraient fort bien pu les imaginer : ayant relevé déjà des marques de putréfaction «au ventre, au scrotum et au-dedans des cuisses» (cette dernière indication prouve qu’il ont regardé l’intérieur des cuisses, donc de la cuisse gauche), ils n’auraient couru aucun risque. Ces marques se trouvant dans les chairs et non dans les os auraient disparu en quelques jours. Ils ont eu l’honnêteté de ne pas le faire, alors que personne ne leur aurait reproché ce mensonge.

Le but d’une autopsie consiste certes essentiellement à définir les causes du décès, mais elle doit aussi enregistrer toutes les caractéristiques qui pourraient servir, le cas échéant, à vérifier l’identité du défunt. Et il s’agissait quand même - soi-disant ! - du fils de Louis XVI !

Ce qui n’empêche pas Philippe Delorme de considérer ce procès-verbal d’autopsie comme une preuve d’identité du jeune défunt avec Louis XVII.

15°) Lors des analyses d’ADN ayant porté sur l’os prétendu de Naundorf, le professeur Cassiman a déclaré avoir isolé l’ADN de l’impératrice Marie-Thérèse (et non celui de sa fille Marie-Antoinette). En réalité, d’après le rapport même du professeur Cassiman, de forts éléments de doute subsistaient dans les résultats des recherches sur cet ADN (Philippe A.Boiry, On tue encore Louis XVII, Presses de Valmy, Paris, 1998, pp. 296 à 298).

Le docteur Pascal, qui menait une recherche parallèle en France, a formulé par écrit ses doutes sur la validité de cet ADN (Philippe A.Boiry, op. cit., pp. 186-187).

En définitive, les opérations dirigées par Philippe Delorme se résument à cela :

- On a extrait de l’ADN d’un cœur d’enfant dont on ignore la véritable origine ;

- On a comparé l’ADN ainsi obtenu à un ADN de référence de qualité non scientifiquement prouvée.

Et on nous annonce à grand son de trompes médiatiques que c’est bien le cœur de Louis XVII et que celui-ci est donc bien mort au Temple le 8 juin 1795.

Cette annonce, qualifiée par ses auteurs comme étant «le verdict de la science» n’a strictement aucune valeur. Elle ne prouve qu’une chose : malgré leurs rodomontades, ses auteurs sont incapables d’apporter la moindre preuve convaincante de ce qu’ils prétendent.

On peut remarquer pour terminer que même si ce cœur comportait un ADN semblable à celui de l’impératrice Marie-Thérèse, cela ne prouverait qu’une chose : c’est qu’il s’agit du cœur d’un Habsbourg. Pour arriver à la conclusion qu’il s’agirait de celui de Louis XVII, il faut encore apporter impérativement la preuve qu’il s’agit aussi d’un Bourbon, preuve qui fait totalement défaut.

Pour terminer, il est curieux de remarquer que la méthode suivie par Philippe Delorme est la copie exacte de celle adoptée depuis 1990 par le docteur J.H.Petrie. L’un comme l’autre affirment que leur livre est un ouvrage historique et même scientifique (J.H.Petrie, op. cit.). L’affirmation par Philippe Delorme que c’est bien Louis XVII qui est mort au Temple le 8 juin 1795, ainsi que les affabulations sur la prétendue maladie de Louis XVII, sont reprises directement du livre du docteur Petrie.

Une autre ressemblance entre les ouvrages de Philippe Delorme et du docteur Petrie n’échappe pas à l’examen : ces deux livres sont accompagnés de notes abondantes, mais qui sont rejetées en fin de volume. On sait que nombre de lecteurs, dans ce cas, ne va pas les lire. Or il est fréquent que ce qui est précisé dans ces notes contredise ce qui est écrit dans le texte. Cette façon de procéder est donc particulièrement habile, mais trompe le lecteur.

Philippe Delorme déclare en page 79 que le docteur Petrie a réuni «des preuves convaincantes selon lesquelles Louis XVII est bien mort au Temple». L’ouvrage du docteur Petrie est en langue néerlandaise : Philippe Delorme peut-il lire le néerlandais ? En réalité, malgré certaines recherches, le livre du docteur Petrie est un florilège d’erreurs, de mensonges avérés, d’affirmations sans fondement, de choix arbitraires de faits et de témoignages, de fausses naïvetés, ce qui lui ôte toute crédibilité. La collusion entre les deux hommes est évidente.

Michel Jaboulay (+)
Chercheur émérite sur la question de Louis XVII
Diplômé H.E.C.
Rallié à la thèse de l'exfiltration de Louis XVII, aux lendemains de la séparation avec sa famille.
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Re: Archives de Michel Jaboulay

Message par BRH » Jeudi 03 Mars 2016 10:45:41

A propos de David :



Ulysse Moussali écrit que David était présent à l'interrogatoire du 6 octobre 1793 et qu'il a apposé deux fois sa signature sur le procès-verbal.
Cette affirmation est fausse. Il confond la déposition de l'enfant du 6 octobre 1793 en présence de Hébert mais pas de David, et la double confrontation du 7 octobre 1793, contre Madame Royale puis contre Madame Elisabeth, qui se déroula en présence de David mais sans Hébert. La double signature des témoins mentionnée par l'auteur se trouve en réalité sur le procès-verbal du 7 octobre.
On peut facilement en déduire que l'auteur était davantage critique d'art que véritable historien. Néanmoins, tel qu'il est, ce texte fournit une base de discussion intéressante.
Donc, récapitulons :
1 - La déposition de l'enfant est du 6 octobre : Hébert était présent, mais pas David.
2 - La double confrontation est du 7 octobre : David était présent, mais pas Hébert.
La supposition qui est faite pour justifier la présence regrettable de David ce jour-là paraît plausible. En tout état de cause, qu'il en ait parlé ou non par la suite, sa présence ne saurait être niée car sa signature figure, nette et très lisible, au bas de chacune des deux confrontations. Certes, il est toujours gênant de voir cet artiste de talent fourvoyé dans une aventure aussi dégradante, et on comprend les efforts de certains pour l'en exonérer. Mais, sans aucun doute, il était présent.
3 - La signature de l'enfant est la même :
- sur la déposition du 6 octobre,
- les deux confrontations du 7 octobre et,
- sur la déposition du 26 octobre (fac-simile dans le Louis XVII de Xavier de Roche, p. 426), ce qui est fondamental, mais jamais évoqué. Or, le 26 octobre, il n'y avait aucune raison de violenter, de saoûler ou de droguer l'enfant. Ce qui prouve a contrario qu'il était dans son état normal les 6 et 7 octobre.
On remarque (voir ci-contre) que ces quatre signatures sont alignées ce qui exclut toute cosommation d'alcool ou de drogue par l'enfant.
4 - Ces signatures révèlent des différences fondamentales dans le tracé de plusieurs lettres et cette anomalie ne peut être attribuée à un enfant qui écrivait à la perfection, par réflexe, car son apprentissage de l'écriture était encore tout frais.
Le caractère hésitant du tracé, de même que la position insolite de certaines lettres notamment le p, révèlent l'illetrisme du signataire et vraisemblablement la connaissance de ce seul nom. Il faut noter en outre que le Dauphin écrivait d'une écriture penchée. L'enfant qui trace ces quatre signatures écrit droit : ce n'est pas la même écriture.
5 - Les minutes des confrontations montrent que l'enfant était totalement lucide et dans un état parfaitement normal. Il intervenait librement et à propos en prenant même un malin plaisir à contredire les femmes qu'il avait en face de lui et ce trait de caractère, qui n'appartient pas à Louis XVII, prouve que nulle contrainte n'était exercée sur l'enfant.C'est aussi le réflexe d'un enfant normal, chez un enfant assis dont les pieds ne touchent pas le sol, de balancer les jambes tel que décrit.
6 - Un enfant de 8 ans saoul ou drogué aurait été physiquement incapable d'assister, lucide, à trois heures de confrontation et encore moins de tenir une plume.
La cause est entendue : l'enfant qui a subi dépositions et confrontations n'était pas Louis XVII .
C'est la clef qui ouvre le mystère du Temple.
Mais pour tous ceux qui donnent la préférence à une autre solution, quelle qu'elle soit et quel que soit leur camp, il est impératif d'absoudre le fils de Louis XVI de cette abominable déposition et des confrontations qui ont suivi : d'où la nécessité de prétendre qu'il était saoul ou drogué, voire les deux. On cite à ce sujet une phrase prêtée à Madame Royale : A la fin il commençait à se désennivrer. Malheureusement, cette phrase ne se trouve pas dans les mémoires de Marie-Thérèse Charlotte de France, le seul texte de sa main où elle pourrait se trouver.
Qui plus est, la simple lecture des minutes des confrontations prouve à elle seule que l'enfant qui les a vécues était parfaitement lucide. Il suit parfaitement le déroulement de la conversation et intervient à plusieurs reprises de son propre chef, sans y être invité, et chaque fois pour contredire la femme qu'il a en face de lui. On a même ses mimiques en fin de confrontation avec Madame Royale : Il dit en la regardant…, et il oblige ainsi Marie-Thérèse à admettre qu'elle connaissait l'architecte Renard, ce qu'elle venait justement de nier.
Comment cet enfant pourrait-il être saoul, drogué ou même violenté ?
Reste une objection majeure provenant de Marie-Antoinette elle-même qui semble accréditer par son testament la présence de Louis-Charles au Temple à cette époque.
Ce sentiment provient d'une lecture superficielle : en réalité, le testament de la Reine ne prouve nullement la présence de son fils. En effet, on remarque, dans ce document émouvant, qu'elle dit mon fils quand elle parle des promesses que son père a exigées de lui parce que, dans ce cas, elle est certaine qu'il s'agit bien du Dauphin. Mais quand elle aborde la question de la déposition, elle n'emploie plus que cet enfant .
S'agit-il du même ? Rien ne le prouve. La Reine parle de pardon : pourquoi ne l'adresse-t-elle pas nommément à son fils, alors qu'il est la personne au monde qui en aurait le plus besoin si la déposition était vraiment de son fait ?
Et par la suite, elle ne le désigne plus que par il. Une mère peut-elle être plus évasive ?
Comment aussi parle-t-elle d'envoyer un courrier à Madame Élisabeth et un courrier à Madame Royale, sans être sûre de la réception et sans même envisager de s'adresser à son fils. C'est bien, au contraire, la preuve qu'elle savait parfaitement qu'il n'était plus au Temple, sans pour autant le compromettre.
Enfin, ajoutons que :
1 - La Reine, mieux que quiconque, sait que son fils est « le Roi ». D'après l'étiquette (même si elle n'est plus officiellement en usage) et protocolairement, c'est au Roi qu'elle doit s'adresser en premier. La Reine n'est pas femme à y manquer, elle qui s'est inclinée devant lui et l'a salué de ce titre le matin même où la tête de Louis XVI est tombée. Or, elle passe outre, ce qui tend à prouver qu'elle ignore où le joindre c'est-à-dire qu'elle sait qu'il n'est plus au Temple.
2 - Hébert a emporté avec lui la déposition de l'enfant le 6 octobre et l'a lue au tribunal le 14 octobre. Les minutes du procès de la Reine ne révèlent aucune mention de la double confrontation du 7 octobre. La Reine ignore donc cet événement. C'est pourquoi Marie-Antoinette parle de l'outrage subi par Madame Élisabeth, mais ne dit mot des réactions possibles de sa fille qui, autant qu'elle sache, ignore ces accusations. En effet, dans sa déposition, l'enfant met en cause la tante, mais pas la sœur (ce n'est d'ailleurs certainement pas un enfant de 8 ans qui a prononcé le mot copulation ).
Or Fouquier-Tinville n'a pas demandé cette confrontation qui n'a donc pas servi contre la Reine. Elle n'est pas davantage dirigée contre Madame Élisabeth car, le cas échéant, il n'aurait pas été nécessaire d'obtenir, moins de trois semaines plus tard, la nouvelle déposition du 26 octobre qui servira à charge contre elle. Elle n'a pas davantage été utilisée contre Madame Royale qui n'est jamais passée en jugement. La double confrontation n'a donc aucune justification judiciaire.
Elle fut donc imaginée dans un autre but. Lequel? Et qui en fut le maître d'œuvre?
A l'époque, le maître absolu du Temple, c'est Chaumette. Ce génie du mal a vite compris que l'assassinat du Roi ne suffisait pas à éradiquer la royauté. Le vrai germe tueur qu'il fallait introduire dans le sang de la vieille monarchie était le doute quant à la survivance de Louis XVII parce que, dès lors, les successeurs désignés par la loi salique, n'étant plus sûrs de leur légitimité, se condamnaient à l'insignifiance et à la disparition. C'est donc lui qui organisa cette mascarade dès le lendemain de la première déposition, afin de faire avaliser un substitué par la propre famille royale. Qui, après cela, oserait prétendre que cet enfant n'était pas le fils de Louis XVI ? Et alors, tout devient clair.
Simple machiavélisme ou démence, la supercherie germée dans les cerveaux révolutionnaires a atteint son but puisque personne n'a contesté l'identité de l'acteur principal, par candeur ou par intérêt.
C'est ce même procédé qui avait déjà été employé pour tromper sur l'identité du même enfant en le faisant visiter par une délégation du Comité de Sûreté Générale le 7 juillet 1793, cette même délégation qui autorisa enfin les promenades de l'enfant. Tous les chercheurs répètent, les uns après les autres, que Drouet en était, faisant mine de le considérer comme une garantie de l'identité de l'enfant. Pourtant, il suffit de relire avec attention le récit de l'équipée de Varennes pour constater que cet individu n'a jamais approché le Dauphin pendant ces sinistres journées. C'est donc un pur mensonge.
3 - La Reine a écrit qu'elle a appris par le plaidoyer que sa fille était séparée de Madame Élisabeth. Ceci ne prouve pas qu'elle avait connaissance de la double confrontation qui, rappelons-le, n'a reçu aucune exploitation judiciaire alors même que l'enfant avait obligé les deux femmes à avouer certains faits. Si même elle avait eu connaissance des paroles de sa fille, elle ne pouvait en inférer que les deux femmes étaient séparées. C'est l'évidence que les enquêteurs devaient interroger séparément les deux femmes s'ils voulaient les mettre en difficulté. Cette mention de la Reine ne peut donc provenir que d'une fausse interprétation de quelques mots prononcés au cours du plaidoyer. D'ailleurs, si les deux femmes avaient été réellement séparées les avocats de Marie-Antoinette se seraient empressés de l'en informer.
En conclusion peut-on dresser le portrait robot de l'enfant du Temple qui dut soutenir les séances des 6, 7 et 26 octobre ?
a) Physiquement, il ressemblait beaucoup au petit Roi. Marie-Thérèse écrit dans son Mémoire qu'il n'avait pas pris de taille mais beaucoup engraissé . Ce qui, en trois mois de temps, serait invraisemblable s'il s'agissait du même enfant.
b) Il était aussi intelligent que Louis XVII.
c) Il est probable, qu'entre le 3 juillet (date de l'enlèvement de Louis-Charles à sa mère) et le 6 octobre dont nous venons de parler, bien chaperonné surtout par Hébert et Chaumette, il a eu le temps de connaître le personnel du Temple.
d) Il n'aimait pas la famille royale et particulièrement les princesses. Cela transparait de son attitude à l'égard de Marie-Thérèse qu'il considère d'un regard mauvais en la mettant en difficulté à propos de l'architecte Renard.
e) Il connaissait le parler et les chants révolutionnaires. Il n'eut pas à les apprendre pour les brailler dès son arrivée au Temple. Certains des gardiens en étaient choqués... mais tout de même avec circonspection.
L'enfant fut donc choisi et préparé avec soin pour tenir le rôle qu'on lui destinait et qu'il tint brillament. Sans doute, en fut-il fier sur le moment, mais il ne pouvait pas échapper au pressentiment de son destin. C'est ce que semble confirmer l'historien Lenotre qui rapporte que l'enfant, intelligent et lucide, aurait dit à Simon : Emmène-moi, sans quoi ils me feront ce qu'ils ont fait à mon père .
Quand le petit Roi fût-il sorti du Temple ?
Les thèses sont multiples mais l'une d'elle l'emporte par sa logique, sa simplicité et sa cohérence. Elle sera bientôt exposée ici-même.
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Re: Archives de Michel Jaboulay

Message par François » Jeudi 03 Mars 2016 19:43:27

Il est essentiel de rappeler que Madame Royale, seul témoin crédible parmi les survivants des événements d'octobre 1793, rapporte bien son interrogatoire et celui de sa tante dans ses mémoires, mais nullement une confrontation avec son frère. Elle dit seulement l'avoir rencontré très engraissé à son arrivée chez Simon, mais la mère Simon a aussitôt séparé les enfants. On comprend qu'il ne s'agissait pas de Louis XVII et que la mère Simon voulait éviter que Mme Royale eût le temps d'en prendre conscience.
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Message par BRH » Dimanche 03 Avril 2016 16:26:24

François a écrit : Madame Royale est la seule source crédible sur ces événements. Elle n’évoque à aucun moment une confrontation avec son frère. Donc,il n’y a pas eu de confrontation. Elle nous dit qu’elle l’a seulement rencontré en arrivant chez la mère Simon qui l’a empêchée de l’embrasser. De toute évidence, Mme Royale a spontanément identifié à son frère le garçon extrêmement engraissé qu’elle a entraperçu et la mère Simon a voulu l’empêcher de prendre conscience de la substitution. Il y a là des faits simples et clairs. On peut certes supposer d’autres faits mais ceux là sont les seuls avérés grâce au témoignage en tous points irrécusable de Mme Royale.
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Re: Archives de Michel Jaboulay

Message par BRH » Dimanche 03 Avril 2016 16:28:46

Le point de vue de François, réitéré ce jour, est incontestable. C'est à partir de là que toute recherche sérieuse sur Louis XVII doit débuter !
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Re: Archives de Michel Jaboulay

Message par BRH » Jeudi 07 Avril 2016 17:26:13

Charles Barbanès, sur le Cril17, cerne fort bien la question :


Comment se fait-il que dans le questionnaire remis à Turgy en 1817 par Madame la duchesse d’Angoulême il n’y ait aucune question sur sa rencontre avec » son frère » , alors que la 5 ème question fait référence à Simon ?

N’est-ce pas là un indice majeur que cette rencontre du 8/10/1793 n’a pas eu lieu ?

——-

Grâce aux archives mises à notre disposition par notre ami et archiviste du Roi Louis XVII, Christian Crépin, nous connaissons le degré de fiabilité de la traçabilité historique du document de police, extrait des archives du procès de Rouen de 1817, cité par Xavier de Roche dans son Louis XVII où on peut lire pp 217-218 :

» Questions données par une personne qui est est placée auprès de Madame et qui pendant le séjour au Temple, dit quel était chargé de la correspondance extraire ( en marge on lit Turgy NDLR )

1 ) Que se passa-t-il le 21 janvier, lorsqu’on entendit tirer le canon ? Que dit alors votre tante et que fit-on pour vous contre l’ordinaire ?

2 ) Où ramassiez-vous ma correspondance ? dans quelle chambre ?

3 ) Que m’avez-vous fait le jour de l’an, et comment, dans quelle pièce ?

4 ) Quel était votre moyen d’amusement ? Que faisiez-vous avec de l’eau de savon?

5 ) Qu’est-ce que Simon vous avait chargé de me remettre et que vous me donnâtes un jour que je vous coupais les cheveux ? ( *** Voir la note à suivre *** )

6 ) Qu’avez-vous dit un jour à votre mère parlant de Marchand ( garçon servant ) et commençant par : » maman, la fenêtre est ouverte » , à quoi elle répondit : » non mon fils vous vous trompez ». Quelle figure avait ce Marchand ?

7) Où étaient placés les droits de l’homme ? dans quelle pièce ?

*** NOTE préalable sur la question (5) :

Il est évident que, pris dans son sens strict, le libellé de cette question est absurde et ne peut correspondre à aucune situation ayant réellement existé.

Compte tenu du fait que le document de police d’où est extraite cette citation est le résultat d’une transcription écrite de questions posées par Madame la duchesse d’Angoulême et transmises par Turgy en premier et ensuite par deux personnes dignes de foi ( comtesse de la Tour d’Auvergne, abbé Bonnier ) , nous pensons être en droit de rectifier l’erreur logique commise par le fonctionnaire de police, auteur du rapport ; si on rapproche la question (5) de toutes les autres questions posées directement à celui qui, en 1817, faisait l’objet du procès de Rouen et qui prétendait alors être Louis XVII ( Mathurin Bruneau ) et afin que la question posée puisse correspondre à une situation réelle, force est d’admettre l’hypothèse vraisemblable suivante !

Si la transcription avait été correcte on aurait dû lire – nous semble-t-il – la formulation suivante :

5 ) » qu’est-ce que Simon vous avait chargé de me remettre et que vous me donnâtes un jour qu’il vous coupait les cheveux ? «

Une telle hypothèse ouvre une sous-hypothèse : celle des révolutionnaires qui voulaient montrer qu’ils avaient toujours Louis XVII en leur pouvoir, en faisant remettre une mèche de cheveux du vrai Louis XVII à sa soeur, alors qu’il se disait peu après le 3 juillet 1793, qu’on l’avait vu à l’extérieur du Temple !…

Quoi qu’il en soit de cette hypothèse et de la sous-hypothèse qui est ainsi ouverte – que nous chercherons à valider ou à abandonner – il n’en demeure pas moins que la réponse à la question (5) posée par Madame Royale lui aurait permis de dater la présence de son frère au Temple, sous la garde de Simon, après le 3 juillet 1793 !

Mais quel aveu quand on considère que les 6 autres questions concernent la période antérieure au 3 juillet 1793 l Cela ne signifie-t-il pas que Madame Royale s’interrogeait sur la présence même de son frère au Temple entre le 3 juillet 1793 et le 19 janvier 1794 ?

Il ne nous reste plus qu’à confronter maintenant ce document capital avec ceux que nous avons déjà présentés ici au cours d’échanges précédents : le PV du 7 octobre 1793 et le témoignage rendu par Madame Royale elle-même lors de son déplacement à Nantes, grâce à la petite fille au manteau rouge !

Confrontation du Mémoire de Madame Royale rapportant » sa rencontre avec son frère en date du 8 octobre 1793 » avec le PV du 7 octobre 1793

Examinons successivement chacune des deux hypothèses qui s’offrent à la critique historique :

H 1 : Ce jour là ( 7 ou 8 octobre 1793 ) , Madame Royale a embrassé tendrement son frère !

Mais alors n’avait-elle pas un moyen infaillible de reconnaître son frère ou tout imposteur en lui demandant simplement comment s’était déroulée cette entrevue ? Comment peut-on expliquer un tel oubli à propos d’un tel événement au cours duquel elle a vu son frère pour la dernière fois ? Et pour se convaincre du caractère absurde d’un tel oubli inexplicable, il suffirait, si nécessaire, de lire tout le roman que Beauchesne a imaginé à ce propos dans un de ses livres !

H 2 Ce jour là ( 7 ou 8 octobre 1793 ) , Madame Royale n’a été confrontée ni à son frère, ni à un substitué !

Comme nous l’avons déjà expliqué, son témoignage n’est qu’un mensonge parfaitement compréhensible comme étant le prix à payer pour sa libération ( qui a d’ailleurs bien tardé ) , alors qu’on l’avait persuadée que son frère était décédé au Temple !

Dès lors l’absence, dans le questionnaire remis à Turgy, de toute mention de sa rencontre du 8/10/1703 n’est-elle pas d’une logique irrésistible qui obligerait à conclure, à elle seule ?

Mais ce n’est pas tout quand on considère l’année 1817 où ce document a été élaboré ! On dispose en effet d’une autre preuve qui montre que Madame Royale devenue Madame la duchesse d’Angoulême était tourmentée dès cette époque par le destin de son frère !

C’est la preuve apportée par l’abbé Jehan Durat, que nous devons à notre ami « chouandecoeur « et à des fidèles lecteurs de la Charte de Fontevrault, selon laquelle :

Lors de son séjour à Nantes les 19,20 et 21 septembre 1823, SAR Madame la duchesse d’Angoulême savait que son frère Louis XVII n'était pas mort au temple le 8 juin 1795 !


L'exfiltration à la date du 3 juillet 1793 n'en est que plus évidente.

Toutefois, nous ne partageons pas complètement l'observation sur la question n°5 ; il n'est pas impossible que Simon ait effectivement chargé Louis XVII de remettre quelque chose à Madame Royale, ce qu'il fit alors qu'elle lui coupait les cheveux. Bien entendu, cette scène ne peut s'être déroulée qu'avant le 3 juillet, puisque la soeur et le frère ne furent jamais mis en présence l'un de l'autre après cette date.

Surtout, aucune des questions de la duchesse d'Angoulême ne concerne la période postérieure au 3 juillet. CQFD...
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Re: Archives de Michel Jaboulay

Message par François » Samedi 09 Avril 2016 18:15:08

Le point 5 peut receler une information précieuse dès lors que nous avons la certitude que la duchesse d'Angouleme a eu le contrôle effectif de cette pièce . Auquel cas l'anecdote est authentique,ce qui veut dire que Mme Royale à été amenée à couper elle-même les cheveux de son frere.A partir de là plusieurs questions.Etait-ce envisageable du temps de la Reine?Sans doute non. On voit mal Marie-Antoinette ne pas accomplir cette tâche elle-même .D'ailleurs,on se demande bien pourquoi Simon aurait voulu joindre Mme Royale elle-même à l'époque de la présence de la Reine sans passer par elle.Donc,le fait s'est produit apres le 3 juillet.Ce qui signifie que les enfants auraient continué d'être réunis du temps de Simon sans que celui-ci pût approcher la princesse puisqu'il utilisait Louis XVII pour atteindre sa sœur( on pense à une initiative de la femme Simon pour lui faire parvenir du matériel de couture pour occuper la princesse?).S'il était établi que Louis XVII pouvait être autorisé à rejoindre l'appartement des femmes ,ceci ruinerait notre hypothèse selon laquelle il n'a pas rencontré sa sœur le jour de l'interrogatoire des princesses. En effet,dans ce cas,Mme Royale aurait suivi la croissance de son frere pendant les 3 mois suivant le départ de la Reine et il est impossible qu'elle ait pu le confondre en octobre avec un garçon extrêmement engraissé autre que lui-même .Par ailleurs,Simon ne peut désigner que le geôlier du Temple dans la bouche de Mme Royale. C'est ainsi qu'on le désigne dans la Famille Royale.Et il ne peut y avoir d'ambiguïté à ce sujet dans une liste de questions entre des initiés censés avoir connu la même personne dans les mêmes circonstances.Pour conclure,est il envisageable que Louis XVII ait pu continuer de rencontrer sa sœur apres le départ de la Reine?Je suis malheureusement coupé de ma documentation là où j'écris actuellement ,et en particulier du manuscrit de Mme Royale.
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Re: Archives de Michel Jaboulay

Message par BRH » Dimanche 10 Avril 2016 08:57:03

François a écrit :Le point 5 peut receler une information précieuse dès lors que nous avons la certitude que la duchesse d'Angouleme a eu le contrôle effectif de cette pièce . Auquel cas l'anecdote est authentique,ce qui veut dire que Mme Royale à été amenée à couper elle-même les cheveux de son frere.A partir de là plusieurs questions.Etait-ce envisageable du temps de la Reine? Sans doute non.


Votre "sans doute" amoindrit considérablement votre non, François. Il n'est pas établi que la reine coupait elle-même régulièrement les cheveux du jeune roi. Faut-il rappeler qu'il les avait longs ? Dès-lors, il n'est pas impossible que Mme Royale se soit exercée par jeu, justement à cet instant où Louis XVII lui aurait fait parvenir une pièce ou un objet quelconque.
On voit mal Marie-Antoinette ne pas accomplir cette tâche elle-même.


Pourquoi donc ? Encore une fois, l'opération devait être limitée et ne nécessitait pas une grande compétence.
D'ailleurs,on se demande bien pourquoi Simon aurait voulu joindre Mme Royale elle-même à l'époque de la présence de la Reine sans passer par elle.


Nul ne peut le dire avec certitude. Il pouvait être habile de passer par les enfants plutôt que par la reine elle-même. D'ailleurs, il faut tenir compte de la dernière remarque de Charles sur le cril17. Et si le Simon évoqué dans le questionnaire de Turgy, avait été -en fait- le député Simon à la Convention, compagnon de Hérault de Seychelles ? Cela accentue encore l'énigme ayant trait à ce point n°5.
Donc,le fait s'est produit apres le 3 juillet.


Voici une conclusion hâtive que je ne partage absolument pas. Rien, aucun document, aucun témoignage, ne permet de soutenir (en dehors éventuellement des fameux interrogatoires d'octobre), que Madame Royale et Louis XVII aient pu se rencontrer au Temple, autrement que furtivement et très brièvement. Et là encore, c'est plus que douteux et devra être démontré pièces à l'appui !

Ce qui signifie que les enfants auraient continué d'être réunis du temps de Simon sans que celui-ci pût approcher la princesse puisqu'il utilisait Louis XVII pour atteindre sa sœur( on pense à une initiative de la femme Simon pour lui faire parvenir du matériel de couture pour occuper la princesse?).S'il était établi que Louis XVII pouvait être autorisé à rejoindre l'appartement des femmes ,ceci ruinerait notre hypothèse selon laquelle il n'a pas rencontré sa sœur le jour de l'interrogatoire des princesses. En effet,dans ce cas,Mme Royale aurait suivi la croissance de son frere pendant les 3 mois suivant le départ de la Reine et il est impossible qu'elle ait pu le confondre en octobre avec un garçon extrêmement engraissé autre que lui-même.


Justement, cela n'a jamais pu être établi par les chercheurs "légalistes" pour prouver que Louis XVII était bien au Temple, après le 3 juillet. D'où l'intérêt et la justification des montages d'Hébert ! Si cela était, vous auriez raison.

Par ailleurs,Simon ne peut désigner que le geôlier du Temple dans la bouche de Mme Royale. C'est ainsi qu'on le désigne dans la Famille Royale.Et il ne peut y avoir d'ambiguïté à ce sujet dans une liste de questions entre des initiés censés avoir connu la même personne dans les mêmes circonstances.Pour conclure,est il envisageable que Louis XVII ait pu continuer de rencontrer sa sœur apres le départ de la Reine?Je suis malheureusement coupé de ma documentation là où j'écris actuellement ,et en particulier du manuscrit de Mme Royale.


Non, votre raisonnement n'est pas évident. Si la scène décrite par la duchesse d'Angoulême a bien eu lieu au Temple, elle devait penser que le vrai Louis XVII ne se tromperait pas sur la réelle identité de ce Simon. Et en ce cas, elle s'est bien gardée de préciser "le député ou le conventionnel Simon". Un imposteur serait tombé dans le piège... Pour conclure à mon tour, il n'a jamais été établi par qui que ce soit que Louis XVII ait pu rencontrer sa soeur, que ce soit avant le départ de la reine ou après... Je dis cela avec prudence, car je n'ai pas une parfaite connaissance de cette période.

Nota : le député "Simon" serait Philibert SIMOND (1755 - 1794), né le 07/09/1755 à RUMILLY (HAUTE-SAVOIE - FRANCE) et décédé (guillotiné) le 14/04/1794 à PARIS (PARIS - FRANCE)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Philibert_Simond
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Re: Archives de Michel Jaboulay

Message par François » Dimanche 10 Avril 2016 11:45:18

Plaçons nous donc dans l'hypothèse où l'anecdote se situe du temps de la présence de la Reine. On se demande alors comment et pourquoi le savetier Simon peut bien utiliser Louis XVII pour correspondre avec Mme Royale.Et s'il s'agit du député Simond avec un d ( nous voyons bien qu'on tord encore un peu plus les faits ...) on se demande aussi pourquoi il utilise ce canal Louis XVII-Mme Royale . Et surtout comment chacun de ces deux hommes aurait un accès à Louis XVII plutôt qu'avec Mme Royale.Non l'hypothèse raisonnable c'est que nous avons un savetier Simon qui est le geôlier du Roi et qui l'utilise pour l'entremise dont il a besoin pour une raison x . Nous sommes donc apres le 3 juillet et les enfants se voient encore. La question principale demeure: le contrôle effectif ou non de la duchesse d'Angouleme sur la liste de questions et sa compatibilité avec le Mémoire de Mme Royale.
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Re: Archives de Michel Jaboulay

Message par BRH » Dimanche 10 Avril 2016 13:45:28

D'accord avec vous pour situer l'anecdote avant le 2 août 1793, date du transfèrement de la reine à la Conciergerie. Mais, entre le 2 août et le 3 juillet ? Si cela était, ça n'aurait pas été un cas unique. Madame Royale n'en dit rien dans son témoignage, bien au contraire. Tous les historiens sont unanimes : les enfants ne se sont pas reparlés pendant cette période. Pas un seul témoignage, pas un seul document pour en attester. Madame Royale dit apercevoir son frère de loin, voire l'entendre. Pas davantage. Ce ne peut donc être qu'avant la séparation du 3 juillet 1793 au soir.

Je reconnais qu'il est peu probable que le député Philibert Simond ait pu approcher le jeune roi. Il faudrait déjà prouver qu'il s'est rendu au Temple, de septembre 1792 à juillet 1793. Par contre, c'est bien le cas de Simon, qui connaît la famille royale, parle avec le roi, la reine, Mme Elisabeth et les enfants. Il a même fait échouer une tentative d'évasion. Il me semble même avoir lu (sous la plume de Lenôtre) que la reine aurait dit à son propos "qu'il n'était pas un si mauvais bougre que ça", avant le 3 juillet.

Pour l'instant, je reste convaincu que le petit roi a quitté le Temple le 3 juillet au soir. Et qu'un substitué lui ressemblant a pris sa place...
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Re: Archives de Michel Jaboulay

Message par François » Dimanche 10 Avril 2016 17:58:06

A mon humble avis,Simon n'a aucune raison de passer par Louis XVII pour joindre Madame Royale tant que la Reine est présente au Temple.On se demande bien pourquoi d'ailleurs il aurait cherché un contact direct avec la princesse à cette période?Ceci vaut aussi bien pour la période antérieure au 3 juillet que pour celle antérieure au 2 août.Les historiens sont d'accord pour admettre qu'il n'y a pas eu de contact entre les enfants après le 3 juillet,dites-vous.Mais les historiens ne sont que des chercheurs qui n'ont rien trouvé.Et il n'y aurait aucun document en ce sens,ajoutez-vous.Précisément:nous avons la liste de questions d'où l'anecdote est extraite.Ce qui nous ramène à l'interrogation essentielle dans cette affaire:quel est le degré de fiabilité de la liste de questions?La duchesse d'Angoulême l'a-t-elle ou non validée?Si la réponse est positive,cela veut dire que des contacts ont été permis entre leurs enfants par leurs geoliers après le 2 août.
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Re: Archives de Michel Jaboulay

Message par BRH » Dimanche 10 Avril 2016 19:39:49

Objection ! :wink:

Ni Madame Royale, ni plus tard la duchesse d'Angoulême n'ont prétendu avoir eu de contacts avec Louis XVII, passée la date du 3 juillet 1793. Madame Royale a seulement mentionné l'incident du 6 octobre, en déclarant que son frère était fort engraissé depuis trois mois. Comme absolument rien ne vient contredire cet état des choses, il faut bien en tirer des conséquences logiques. La scène décrite dans le questionnaire de Turgy s'est obligatoirement déroulée avant le 3 juillet 1793 !

Autre point incident : Hébert était-il -oui ou non- un agent royaliste ? Lenotre l'a supposé ; Philippe Delorme le croit vraisemblable (vous voyez, je n'exclus personne). Mais si l'on répond par l'affirmative, alors il faut admettre qu'Hébert était de la conspiration pour exfiltrer le roi. Et donc, qu'il serait celui qui aurait choisi et préparé le substitué, cornaqué ensuite par Simon...
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Re: Archives de Michel Jaboulay

Message par BRH » Mardi 12 Avril 2016 10:33:13

Charles Barbanès rend plausible le contact entre Simon et Louis XVII, avant le 3 juillet 1793 :


Et voici que nous découvrons -puissance des moteurs de recherche oblige – une information tout à fait anodine en soi que nous avions dû lire à TGV et que nous n’avions pas retenue, mais qui aujourd’hui prend pour nous une importance considérable car elle validerait à elle seule non seulement le questionnaire Turgy – Madame Royale mais aussi le modèle sur lequel il est construit !

=========

MUNICIPALITÉ DE PARIS

Du 3o avril 1793 an II de la République

Extrait des registres des délibérations du Conseil Général de la Commune

Appert par le procès verbal de ce jour que les citoyens Canon et Simon sont nommés commissaires pour vérifier six paires de souliers destinées aux prisonniers du Temple et savoir si dans leur couverture il n’existe rien de suspect

PACHE maire ; DORAT CUBIERES secrétaire greffier adjoint
Revue rétrospective, ou bibliothèque historique: 1837 ( pp 255-256 )
Jules-Antoine Taschereau
H. Fournier et cie, 1837

=========

Dès lors, serait-ce un fantasme d’imaginer, qu’après avoir inspecté les 6 paires de souliers, Simon en ait remis deux paires ( ou plus ) à Louis XVII en le chargeant d’en remettre une à Madame Royale, ce qu’il fit un jour de mai 1793 ?

Et comme on peut comprendre que Madame Royale, jeune adolescente de 15 ans en 1793, se soit souvenue en 1817 de ce jour, où elle reçut une nouvelle paire de souliers !

Mais par contre n’est-il pas invraisemblable et impossible que Madame la duchesse d’Angoulême ait omis d’évoquer sa rencontre avec son frère du 7 ou 8 octobre 1793, si cet événement avait réellement existé et si cela n’avait pas été un pur fantasme, imaginé par les révolutionnaires pour faire valider par Madame Royale en 1795, la présence à cette date de Louis XVII au Temple , en contrepartie de sa propre libération qui interviendra le 18 décembre 1795 ?


Toutefois, ceci implique évidemment que Madame Royale et la duchesse d'Angoulême étaient une seule et même personne ! Une nouvelle pierre dans la chaussure du Pr Lucotte...
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Re: Archives de Michel Jaboulay

Message par BRH » Jeudi 14 Avril 2016 10:01:45

Charles Barbanès ne comprend pas notre commentaire sur la chaussure du Pr. Lucotte :

http://cril17.org/2016/04/11/faisons-un ... ment-63037

C'est pourtant simple : le Pr a déclaré devant témoins que Madame Royale et la duchesse d'Angoulême n'étaient pas la même personne ! Autrement dit, que leur ADN mitochondrial était différent.
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Re: Archives de Michel Jaboulay

Message par BRH » Mardi 18 Février 2020 14:41:25

Un des témoins en question (en dehors de moi-même), c'est Christian Crépin, "archiviste du Roi Louis XVII", selon la formule heureuse du regretté Charles Barbanès. Ainsi que Mme de La Chapelle.
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