Les 1ères insurrections en Vendée furent-elles spontanées ?

Les 1ères insurrections en Vendée furent-elles spontanées ?

Message par Baron Percy » Jeudi 08 Février 2007 23:43:28

Les causes qui conduisirent aux premiers mouvements insurrectionnels dans les régions de l'Ouest méritent qu'on s'y attarde.

Hostiles à la Révolution, les paysans s'étaient, jusqu'ici, révoltés isolément, par pays, pour des motifs variables, qui tenaient à la situation particulière des paroisses.
Or, à partir de juillet 1792, ces paysans, les jeunes surtout, furent tous confrontés, au même moment, à une mesure qui les concernait : l'enrôlement pour l'armée.
Première mesure qui touchait tous les jeunes à un moment identique et qui les rassemblait aux mêmes endroits.
Toutefois, ces insurrections ne furent pas seulement une protestation contre l'enrôlement, mais plus largement, une protestation contre toute une politique. Elles se produisirent en effet dans des circonstances particulières.
La guerre entre la France et l'Europe était déclarée depuis avril 1792. Cette décision eut de graves conséquences : craignant une invasion et se méfiant du roi, les patriotes abolirent la monarchie.
Vaincue sur la frontière belge, l'armée française semblait incapable de reprendre une offensive. La population parisienne se méfiait du roi et des complots des aristocrates. L'Assemblée vota trois décrets : les prêtres seraient bannis, la garde du roi serait dissoute, un camp de 20.000 fédérés protégerait Paris.
Louis XVI opposa son veto au premier et au troisième décrets.
Affrontant une manifestation populaire, le 20 juin, aux Tuileries, le roi maintient son veto.
Comme les Prussiens alleint entrer en Lorraine, l'Assemblée, le 11 juillet, déclara la Patrie en danger, décret par lequel les fonctionnaires, les administrateurs et les gardes nationaux étaient en réquisition permanente.
Malgré le veto royal, des fédérés arrivèrent à Paris. Le manifeste de Brunswick, qui menaçait tous ceux qui porteraient atteinte au roi, déclencha l'insurrection du 10 août 1792 : le roi fut enfermé au Temple, le pouvoir exécutif fut confié à un Conseil exécutif provisoire, et l'Assemblée tomba sous la dictature de la Commune de Paris. La Révolution avait pris un tour nouveau, contre le roi, contre la noblesse, contre les réfractaires et contre la religion.

Les paysans se révoltèrent d'abord à l'occasion de la levée des volontaires qui avait été décidée en juillet 1792.
Ces révoltes rassemblèrent, cette fois, des milliers de personnes, convergeant de plusieurs paroisses vers le centre où devait avoir lieu l'enrôlement.
Des paysans, "des paysans d'un rang considéré soit pour leur fortune, soit pour les places publiques...", des notaires, des nobles et des prêtres menaient ces mouvements. Les révoltés insultaient les administrateurs, les rossaient, arrachaient les cocardes, déchiraient les listes des jeunes gens. Ils criaient : "Plus de tirement", mais aussi "Rendez-vous nos prêtres", "Vive le roi", "Le roi sur le trône".
Une première révolte importante se déclencha à Saint-Ouen-des Toits le 15 août 1792.
Tous les paysans n'étaient cependant pas unanimement du côté des révoltés. Des paroisses jacobines se dressaient contre des paroisses aristocrates: La Selle Craonnaire contre Bonchamps.
En Vendée, il y eut une vraie bataille.
Les royalistes du district de Châtillon-sur-Sèvre s'insurgèrent le 24 août. Plusieurs milliers de paysans, Baudry d'Asson à leur tête, prirent Châtillon et marchèrent sur Bressuire. Les patriotes les repoussèrent en amenant des canons et en livrant trois combats, au cours desquels 215 morts restèrent sur le champ de bataille.
Le mouvement reprit vigueur en mars 1793.
A l'occasion de la levée de 300.000 hommes, ce fut, cette fois, une explosion sans comparaison avec ce qui s'était passé auparavant.
Les insurgés arboraient la cocarde blanche, signe de rebellion.
Il ne s'agissait plus d'une révolte ou d'une insurrection limitée, mais d'une véritable guerre.
Le 10 mars, jour retenu pour le début de la grande guerre, à Saint-Florent-le-Vieil, les jeunes gens convoqués pour le tirage au sort refusèrent de tirer, s'emparèrent d'un canon, pillèrent le district.
C'est à ce moment qu'apparut un futur chef paysan de la Vendée, Cathelineau, qui déclara que "seule une révolte générale pouvait sauver ses frères de Saint-Florent".
Les mêmes faits se reproduisirent dans plusieurs autres localités.
Toutes les bourgades passèrent ensuite sous le contrôle des révoltés qu'on appelera désormais les Vendéens.
Ceux-ci se trouvèrent des chefs et, le 14 mars, ils attaquèrent Cholet.
L'attaque fit 300 morts, mais la prise de Cholet entraîna les plus timides.
Les Vendéens affrontèrent la troupe de ligne, le 18 mars, près du village de Saint-Vincent : les 1200 soldats du général Marcé s'enfuirent, pris de panique.
Sauf dans le Marais, où ils échouèrent devant Paimbeuf et Les Sables-d'Olonnes, les Vendéens avaient triomphé partout et contrôlaient désormais 900 paroisses.

Cette rebellion fut-elle l'exécution d'un complot ? On l'a cru.
Des historiens, au contraire, montrent qu'elle se déclencha progressivement, se communiquant de proche en proche, "des rebellions sans lien, chacune visant ses ennemis locaux et qui ensuite fusionnèrent sur des thèmes communs" (Tilly).
Mais les conspirateurs qui peut-être n'avaient pas prévu le lieu et le jour de l'insurrection, n'avaient-ils pas préparé les populations ?
N'ont-ils pas offert rapidement des cadres et des thèmes de lutte aux insurgés ?
La question mérite à tout le moins d'être posée et je vous propose d'en débattre. :wink:
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Baron Percy
 
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Re: Les 1ères insurrections en Vendée furent-elles spontanée

Message par BRH » Vendredi 04 Novembre 2011 16:21:18

Comment tout cela a commencé ? Qui a "déclaré la guerre" civile à qui ? Quels étaient les enjeux pour les uns ; les enjeux pour les autres ? Qui étaient les instigateurs ? Qui était Charette ? Brigand ou Saint ? Et Cathelineau ? Un brave type instrumentalisé par un clergé et des aristocrates fanatiques ? Un fanatique lui-même ? ...



Cela a commencé par la constitution civile du clergé. Les résistances du roi, son veto et la journée du 10 août. Il en découlait logiquement l'obligation légale du serment pour tous les prêtres.

Mais Rome ne l'entendait pas ainsi. Il faut replacer ce refus dans le contexte de l'époque. Le nouveau statut du clergé en France pouvait s'apparenter à la création d'une église gallicane. La curie romaine (et pas seulement le Pape) ne pouvait alors l'accepter. A cela s'ajoutait le caractère illégal de l'usurpation de la Convention.

Les fidèles étaient divisés. Dans certaines régions, l'Ouest notamment (mais pas seulement), la majorité de la population restait fidèles aux prêtres non-jureurs. Quand on sait ce qui se passât ensuite, on ne peut pas leur donner complètement tort !

Sur la question de l'ouverture des hostilités, celle de la guerre civile, il faut ne pas oublier que les élections de l'été 1792 furent une farce, qu'il n'existait aucun pluralisme, aucun moyen de faire campagne ! On était des jacobins ou pas. Le choix se résumait entre les radicaux (la future montagne), représentés essentiellement par la commune de Paris, et les modérés (les Girondins). Toutes les autres tendances de l'opinion étaient exclues du jeu, les feuillants notamment, sans parler des royalistes !

Il n'y eût pas d'insurrection contre ce processus en août et septembre 1792. Etait-il approuvé pour autant ? Certainement non, et cela dans de nombreuses régions ! La révolte couvait, et elle ne tarda pas à gronder ! L'exécution du roi glaça d'effroi toutes les provinces françaises, sauf celles où les jacobins étaient majoritaires. Assez peu, au bout du compte.

L'étincelle, en Vendée, fut le recours à la conscription. Les paysans vendéens n'étaient pas habitués à voir partir pour la guerre leurs plus jeunes et leurs plus vigoureux garçons ! Mais dans d'autres régions, principalement en Bretagne et dans le midi, la question religieuse dressait un mur entre les autorités et les populations hostiles.

Par conséquent, si les premiers coups de feu partent de la Vendée, il faut bien admettre que la Convention n'a pas hésité à rendre la situation explosive ! D'ailleurs, les 1er coups de feu semblent avoir été tirés ailleurs qu'en Vendée, dès l'automne 92, sans avoir l'importance de la révolte vendéenne; Mouvements spontanés, en tout cas non-coordonnés et qui furent donc facilement réprimés.

Il ya bien eu un vaste complot pour embraser les provinces de l'Ouest: celui -désormais bien connu- de La Rouërie. Mais la mort prématuré de ce dernier fit qu'il ne fut pas mis à exécution. Le début de la révolte vendéenne est spontané; c'est l'expression d'un "ras-le-bol" populaire.

Evidemment, il sera très vite récupéré par les nobles et le clergé.
Tant que les Français constitueront une nation, ils se souviendront de mon nom !

Napoléon
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