Renaissance : rupture ou continuité ?

Message par A.Lionel » Vendredi 07 Septembre 2007 01:09:13

Bonsoir ou plutot bonjour Paul, je fais bref, je manque de temps et je dois terminer le petit sujet sur la Réforme (sous huitaine c'est promis :wink: ), en lisant le lien sur Le Goff, je me disais, finalement n'y eut-il pas plusieurs renaissances, une partie des historiens parlent d'une première renaissance avec les Carolingiens qui administraient et légiféraient à la manière de l'Antique Rome.
Tout cela vola en éclats aux Xème, XIème siècle, deux-cents ans d'immobilisme, je n'oserais pas dire de régression meme si je suis parfois tenté!
En Angleterre ou en Allemagne, les choses furent différentes et meme opposées s'agissant du pouvoir si on compare avec la France du Xème, XIème.

Le recouvrement ou la construction ou l'affirmation des autorités royales ou impériales en Europe mais encore la recherche de l'éfficacité politique par la concentration des pouvoirs meme au sein d'un parlement (je pense à l'Angleterre ici), la réunification des Etats d'Europe meme s'il sagissait de placages sur des bases féodo-vassaliques, l'émergence d'universités dans la partie occidentale de l'Europe aux XIIIème, XIVème siècle, ne contribuèrent-ils pas à une sorte de renaissance inspirée par Rome?

Bien à vous.
DDR
"Les vraies conquêtes, celles qui ne donnent aucun regret, sont faites sur l'ignorance."
A.Lionel
 
Message(s) : 285
Inscription : Mardi 30 Janvier 2007 12:41:26
Localisation : Paris - France.

Message par duc de Raguse » Vendredi 07 Septembre 2007 20:08:35

finalement n'y eut-il pas plusieurs renaissances, une partie des historiens parlent d'une première renaissance avec les Carolingiens qui administraient et légiféraient à la manière de l'Antique Rome.

Est-ce véritablement un argument pour qualifier la Renaissance ? :?
Dans ce cas on peut aussi tirer un fil des derniers empereurs romains aux premiers Valois, en passant par les basileus byzantins et les Carolingiens. Ainsi, il n'y a jamais de mouvement de "Renaissance".
Le Droit et l'administration territoriale s'inspirent forcément de Rome au Moyen-Age, que ce soit chez les Francs, comme chez les Byzantins.

Tout cela vola en éclats aux Xème, XIème siècle, deux-cents ans d'immobilisme, je n'oserais pas dire de régression meme si je suis parfois tenté!

Vous pensez que l'éclatement du pouvoir royal et impérial face à l'éclosion de puissantes seigneuries locales ont freiné la "Renaissance" (si on peu encore l'appeller ainsi) et ainsi plongé leurs contemporains dans un immobilisme politique, économique et culturel ?

Le recouvrement ou la construction ou l'affirmation des autorités royales ou impériales en Europe mais encore la recherche de l'éfficacité politique par la concentration des pouvoirs meme au sein d'un parlement (je pense à l'Angleterre ici), la réunification des Etats d'Europe meme s'il sagissait de placages sur des bases féodo-vassaliques, l'émergence d'universités dans la partie occidentale de l'Europe aux XIIIème, XIVème siècle, ne contribuèrent-ils pas à une sorte de renaissance inspirée par Rome?

Si je vous comprends bien - arrêtez-moi si ce n'est pas le cas ! :wink: - vous pensez que la quête de la restauration du pouvoir monarchique et impérial en Occident a davantage occupé les princes à la guerre qu'à autre chose. C'est ainsi que Rome leur a damé le pion dans le mécénat de savants et artistes divers.
Est-ce bien cela ? Pouvez-vous nous fournir les exemples sur lesquels vous vous appuyez ?

Bien à vous, :wink:

duc de Raguse.
duc de Raguse
 

Message par A.Lionel » Vendredi 07 Septembre 2007 22:52:41

Bonsoir cher Duc, "Est-ce véritablement un argument pour qualifier la Renaissance ?
Dans ce cas on peut aussi tirer un fil des derniers empereurs romains aux premiers Valois, en passant par les basileus byzantins et les Carolingiens. Ainsi, il n'y a jamais de mouvement de "Renaissance".
Le Droit et l'administration territoriale s'inspirent forcément de Rome au Moyen-Age, que ce soit chez les Francs, comme chez les Byzantins.
"

En tout cas cette question s'est posée...
Le Moyen-Age n'est pas uniforme et la tradition romaine s'est perdue du 9ème au 11ème siècle, les Mérovingiens, donc du 6ème au 8ème siècle, n'y échappèrent pas : un pouvoir royal qui perd de son autorité, la persistance des lois non écrites d'origine barbares, une organisation sociale fondée sur la ruralité, la justice privée (entre autre la faide qui est un droit de vengeance), les liens personnels (horizontaux), les pressions voire meme les violences faites aux hommes libres les plus pauvres détenteurs de terres...Tout ceci fut combattu par les Carolingiens qui entendaient restaurer un pouvoir hiérarchique donc vertical qui ne l'était pas antérieurement, un système judiciaire moderne et équitable qui assure la paix sociale...Tout échoua fin 9ème comme chacun sait...
Peut etre que l'on est en désaccord avec la Renaissance sous les Carolingiens parce que l'édifice s'effondra pour retomber plus bas qu'avant les Pippinides et qu'il ne dura pas assez longtemps?

C'est un très long sujet vous savez, il serait peut-etre mieux de le traiter plus tard? Non?

"Vous pensez que l'éclatement du pouvoir royal et impérial face à l'éclosion de puissantes seigneuries locales ont freiné la "Renaissance" (si on peu encore l'appeller ainsi) et ainsi plongé leurs contemporains dans un immobilisme politique, économique et culturel ?"

Du 9ème au 11ème, on assista, en France, à un morcellement du pouvoir jamais vu en Europe, au niveau des villages. L'insécurité était grande, non seulement la France connut les invasions barbares mais les seigneurs vivaient quasiment en autarcie, pour autant la féodalité n'était pas un système anarchique, bien au contraire, le système s'équilibrait par les liens personnels qui se mirent en place entre seigneurs et entre seigneurs et hommes de potée, ce qui n'excluait pas les guerres privées qui faisaient rage (c'est l'époque de "la guerre de tous contre tous"). Avec un pouvoir si morcelé, un roi qui ne légifère plus et qui n'est plus le juge supreme, pas de développement artistique, pas d'économie générant des bénéfices supplémentaires pour entreperndre de grands desseins.

Vous remarquerez que dès le 13ème et surtout au 14ème, avec le recouvrement de l'autorité du Roi appuyé par l'Eglise (surtout au 12ème : Paix et Trève de Dieu), la France retrouva la paix intérieure et commença à batir des projets, nous évoquions les universités mais aussi une renaissance non pas dans le style mais dans la science de batir : l'art gothique est une architecture hautement savante...Il y a un lien entre le pouvoir, la science et la culture ne serait-ce que par les économies d'échelle ou le ou les buts que l'on s'est donné d'atteindre.

"Si je vous comprends bien - arrêtez-moi si ce n'est pas le cas ! - vous pensez que la quête de la restauration du pouvoir monarchique et impérial en Occident a davantage occupé les princes à la guerre qu'à autre chose. C'est ainsi que Rome leur a damé le pion dans le mécénat de savants et artistes divers.
Est-ce bien cela ? Pouvez-vous nous fournir les exemples sur lesquels vous vous appuyez ?"

Je ne pense pas que l'on peut généraliser, chaque Etat a eu sa propre histoire mais il est vrai que les cités italiennes qui développèrent une marine marchande puissante purent s'ouvrir au Monde par le biais du commerce bien avant les autres mais ce n'était pas une nouveauté!
Quand la France devint une des premières puissances européennes, peut-etre la première sous le règne de François 1er quel grand maitre italien vint à sa cour selon vous?

Bien à vous et bon week end.
"Les vraies conquêtes, celles qui ne donnent aucun regret, sont faites sur l'ignorance."
A.Lionel
 
Message(s) : 285
Inscription : Mardi 30 Janvier 2007 12:41:26
Localisation : Paris - France.

Message par Paul Ryckier » Lundi 10 Septembre 2007 23:17:12

Je veux d'abord remercier les deux Ducs pour leur apport intéressant dans la discussion.

En lisant parallèlement cinq livres pour apprendre plus sur la question je n'ai pas eu le temps de faire ni un résumé, ni une conclusion. En plus je voulais commenter les textes de vos remarques et demander des éclaircissements sur certains passages que je ne comprends pas très bien...

En plus je suis en train de lire un autre ouvrage sous la direction de Jacques Le Goff: "De wereld van de middeleeuwen" (le monde du moyen-âge). On a dans ce livre des essais des Français, Italiens, et d'un Polonais et un Russe. C'est en Néerlandais parce que c'es une serie de AGON, qui a aussi comme titres: Le monde de la Renaissance, le monde des Romains, le monde des Grecs et le monde des Egyptiens.

http://www.abebooks.fr/search/sortby/3/ ... DDELEEUWEN

Cordialement,

Paul.
Paul Ryckier
 
Message(s) : 483
Inscription : Lundi 29 Janvier 2007 17:18:36

Message par duc de Raguse » Mardi 11 Septembre 2007 17:47:01

Je réponds tardivement... :?

Le Moyen-Age n'est pas uniforme et la tradition romaine s'est perdue du 9ème au 11ème siècle, les Mérovingiens, donc du 6ème au 8ème siècle, n'y échappèrent pas : un pouvoir royal qui perd de son autorité, la persistance des lois non écrites d'origine barbares, une organisation sociale fondée sur la ruralité, la justice privée (entre autre la faide qui est un droit de vengeance), les liens personnels (horizontaux), les pressions voire meme les violences faites aux hommes libres les plus pauvres détenteurs de terres...

J'en conviens, mais pourquoi tant lier le pouvoir royal et sa reconquête à un frein à la Renaissance ?

il est vrai que les cités italiennes qui développèrent une marine marchande puissante purent s'ouvrir au Monde par le biais du commerce bien avant les autres mais ce n'était pas une nouveauté!

Oui, mais en se faisant sans arrêt la guerre entre le XIème et le XVème siècle ! :wink:
duc de Raguse
 

Message par A.Lionel » Mercredi 12 Septembre 2007 15:51:49

Bonjour cher DDR "J'en conviens, mais pourquoi tant lier le pouvoir royal et sa reconquête à un frein à la Renaissance ?"

Aurais-je dis cela, au contraire, je lie les deux d'ailleurs si on ajoute au XVIème en France la contestation politique de l'Absolutisme par les Monarchomaques (la théorie du régicide) du coup dans la tentation de légitimer la monocratie du Roi par les arts et par les sciences (ce qui est plus discutable) la voie était ouverte à la contestation politique et religieuse qui ont accompagné la Renaissance et qui ont continué au-delà.

Bien à vous.
"Les vraies conquêtes, celles qui ne donnent aucun regret, sont faites sur l'ignorance."
A.Lionel
 
Message(s) : 285
Inscription : Mardi 30 Janvier 2007 12:41:26
Localisation : Paris - France.

Message par Paul Ryckier » Mardi 18 Septembre 2007 00:04:46

Re: Message 7sept. 20h.

Cher Duc de Raguse,

"Est-ce véritablement un argument pour qualifier la Renaissance? :? "

Oui, pourquoi pas "une renaissance carolingienne"?

Je vois peut-être l'histoire un peu simpliste? Pour moi l'histoire est l'épopée de l'humanité mondiale qui est venu dans une accéleration depuis six mille ans avec les ville-états sumériens et quelle a atteint momantanément un apogée (dans mon humble opinion :) ) dans la société dite "occidentale".

Et dans cette épopée je vois des petits ralentissements et des petites périodes d'accélération, comme cette "renaissance Otto-Clunienne" du 11ième, 12ième siècle.

J'ai toujours eu d'ailleurs des diffcultés avec la connotation ou le concept de la période de " la Renaissance proprement dite". Dans des "périodes historiques" qui d'après moi sont fortement liées l'un avec l'autre (on n'a, aussi selon moi, jamais des ruptures complètes et des cultures, qui sont nées à part, sont influencées l'un par l'autre), je ne vois que la progression de l'aspect: comment les humains voyaient leurs monde contemporaine. Et par ça j'ai des difficultés avec une connotation focusé seulement sur l'art.

Et il semble que je ne suis pas seul (je sais Wikipeida n'est pas la bible, mais parfois ils donnent des perspectives, qui peuvent être le départ d'une étude plus approfondie):
http://fr.wikipedia.org/wiki/Renaissanc ... graphie%29
http://fr.wikipedia.org/wiki/Renaissanc ... historique

Alors à la première vue, je ne vois que comme nouveau la position centrale de l'homme envers un Dieu, la mise en cause de l'autorité écclésiastique par la Réforme et l'accélération des copies des livres par l'imprimerie facilitant l'acces pour les lèttrés.

Hmm, déja une heure du matin...

Cordialement,

Paul.
Paul Ryckier
 
Message(s) : 483
Inscription : Lundi 29 Janvier 2007 17:18:36

Message par Paul Ryckier » Mardi 18 Septembre 2007 00:12:39

Paul Ryckier
 
Message(s) : 483
Inscription : Lundi 29 Janvier 2007 17:18:36

Re: Renaissance : rupture ou continuité ?

Message par Paul Ryckier » Mardi 25 Septembre 2007 00:01:24

duc de Raguse a écrit :Mes chers compagnons,

Pendant de longues années l'historiographie européenne plaçait la période de la Renaissance comme une rupture majeure dans l'histoire des société occidentales - et même mondiales puisque l'une de ses conséquences fut les Grandes Découvertes et le début de la colonisation.
Les historiens jugeaient, en suivant ainsi les contemporains des XVème, XVIème et XVIIème siècles, ce moment comme une remise en cause totale de la période médiévale, un nouvel "âge d'or" de la civilisation après un millénaire de barbarie.
Il semblerait que depuis une trentaine d'années cette vision fut mis en pièces par certains historiens français et italiens (Jean Delumeau par exemple). En effet, dans de nombreux cas, la Renaissance et le mouvement humaniste n'ont fait que poursuivre les innovations médiévales (techniques de navigation, mathématiques, outils notariers de marchands...) et elle n'a pas empêché guerres et conquêtes "barbares" (celle de Trente Ans par exemple ou l'exploitation des Amérindiens), ni le maintien de pratiques obscurentistes (chasse aux sorcières ou encore maintien de l'astrologie comme science).
Plus récemment, les auteurs modernistes se sont intéressés à l'extension du phénomène humaniste de la Renaissance (Peter Burke par exemple) afin de souligner que les pays d'Europe ont "capté" ce phénomène en ne transposant pas directement le modèle italien ou flamand chez eux, mais en l'adaptant à leur culture propre, souvent en fonction de leur politique diplomatique, le laissant souvent coexister avec des idées et des arts très médiévaux - comme la Hongrie de Mathias Corvin.

Pensez-vous que la Renaissance soit le berceau de la civilsation occidentale moderne, du capitalisme, de l'esprit scientique moderne ou encore de la laïcité ? Ou bien au contraire, qu'elle ne soit qu'une simple phase de transition ?

Merci pour vos réponses,

duc de Raguse.


Cher Duc,

"la Renaissance? Ou bien au contraire, qu'elle ne soit qu'une simple phase de transition?"

Et bien je pense que oui, comme d'ailleurs le moyen-âge.

Quelques exemples du moyen-âge:

La Scolastique: sur son apogée dans le 13ième siècle elle était une méthode austère, qui appliquait rigoureusement les lois de la raison et stimulait la pensée originale. Ces méthodes devenaient du bien commun et même un Descartes devait beaucoup à ces méthodes. Et la Scolastique était pratiquée par des gens qui sont grandis dans les nouveaux centres urbains, des "intelectuels" indépendants qui vendaient les connaissances comme des vendeur de marchandises, mes des marchandises de la connaissance. Et dans des "universités". Et pourtant qu'ils étaient des Catholiques croyants, ils n'avaient pas peur de chercher le comment et pourquoi. On avait le "quaestio" et à la fin le "determinatio", mais pour comprendre le "quaestio" on avait le "disputatio" qui mène au bout du temps une vie à lui seul.

Les "intellectuels" de Chartres: l'homme était le but et le centre de la "Création". Et comme ça on venait à la science rationelle. L'humanisme était déja in statu nascendi.

Et on a déja une plus grande flux des connaissances Greco-Arabes via les "villes-états" de l'Italie, qui recevaient les réfugiés de Byzance, et la Reconquista de l'Espagne, comme par exemple l'Aragon. Un Petrus Venerabilis laisse le Coran traduire pour mieux combattre les infidéles, mais entretemps on apprend le Greque, l'Arabe et toutes les sciences et philosophies de l'héritage Greco-Romain enrichie par les penseurs arabes. Et même toute cette civilisation musulmane, comme j'ai lu chez
Robert Foissier dans deux chapitres élaborées, n'était elle pas aussi un pas vers la Rennaissance via l'intermédiaire de Byzance et les nouveaux états nés de la Reconquista en Espagne et n'oublions pas aussi la Sicile de Roger II et plus tard des empereurs de la sainte empire romaine?

J'ai lu maintenant pendant deux semaines des ouvrages sur le moyen-âge et je ne vois pas en quoi cette période diffère de toutes les autres de l'histoire de l'humanité dans sa quète de son destin.

Oops, déja une heure du matin en Belgique. Le reste est pour demain.

Cordialement,

Paul.
Paul Ryckier
 
Message(s) : 483
Inscription : Lundi 29 Janvier 2007 17:18:36

Précédent

Retour vers La Renaissance (1453-1589)

Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 2 invité(s)

cron