La résistance des Cadets de Saumur: mythe ou réalité ?

Les Totalitarismes à l'assaut de l'Europe !

La résistance des Cadets de Saumur: mythe ou réalité ?

Message par BRH » Lundi 03 Août 2009 10:48:11

Le rapport du colonel Michon (version originale) :

http://sd-1.archive-host.com/membres/up ... Michon.pdf

Récit donné dans la Revue des 2 mondes :

LES COMBATS DE SAUMUR

https://www.revuedesdeuxmondes.fr/wp-co ... 884930.pdf

Juin 1940
Depuis plusieurs semaines, en juin 1940, la vie de la célèbre Ecole de Cavalerie est toute troublée pour les huit cents élèves qui demeurent encore à Saumur. Il y a environ trois cents élè- ves du train et cinq cents élèves de la cavalerie, les E. A. R., élè- ves aspirants de réserve, venus des groupements spéciaux d'ins- truction de Tours, Montauban et Rambouillet. Tous de classes jeunes, n'ayant jamais vu le feu, ils sont répartis en trente-sept brigades : dix du train, vingt-sept de cavalerie, commandées chacune par un officier instructeur. Les deux-tiers de ces bri- gades, devenues motorisées, ont adopté la fière devise :
A pied ne daigne, A cheval ne puis, Porté je suis.
Les détachements chargés de garder les ponts de Saumur, de Montsoreau et de Gennes sont renforcés. Des avions ont déjà bombardé la gare, incendiant un entrepôt de grains, lâché des chapelets de bombes sur Souzay, sur le viaduc du chemin de fer. Des patrouilles circulent continuellement dans la campa- gne contre les parachutistes dont on a la hantise, dans les rues de la ville pour ordonner la circulation. Car celle-ci s'accroît terriblement.
Le 14 juin, l'armée allemande entrait dans Paris d'où le gouvernement était parti le 9 pour s'installer à Tours que, dès le 15, il quittait pour Bordeaux. On conçoit l'encombrement des
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routes. Une véritable migration humaine déferle vers le sud, prise de panique, n'ayant qu'une idée : franchir la Loire à tout prix, mettre le grand fleuve entre elle et les avant-gardes alleman- des. On s'attend d'ailleurs à une résistance sur ce peint et on est si loin de concevoir notre désastre qu'on espère encore r.n arrêt de la bataille sur le fleuve, qui permettra la mise en ordre de nos réserves ; au moment opportun, elles entreront en ligne et, par une manœuvre d'ailes habile, repousseront l'ennemi hors de France, réalisant ainsi un second « miracle > de la Marne, le miracle de la Loire.
Dès le samedi 15 juin, le colonel Michon, commandant l'Ecole, prépare l'évacuation des chevaux : huit cents bêtes, la plupart de splendides pur-sang, la fierté et la gloire du fameux Cadre noir. Cinq cents hommes et six officiers en assureront la conduite sous les ordres du colonel de Laissardière, un blessé de l'autre guerre. La petite troupe avec les fourragères et les voitures se mettra en route le lundi : elle formera une colonne de quatre kilomètres que les Allemands, du côté de Confolens,
finiront par distancer et faire prisonnière pour la conduire à Poitiers, et, un mois après l'armistice, la relâcher sur Montauban.
L'après midi du samedi, le capitaine Marzolf, le commandant du 2" escadron, réunit ses hommes dans le grand amphithéâtre de l'Ecole et leur annonce la suspension des cours, la conversion des escadrons en escadrons de guerre. Le colonel Michon, suppo- sant bien que l'Ecole se défendra, met la dernière main au plan de résistance, préparé dès la fin du mois.
Le dimanche, la circulation est invraisemblable sur les ponts et dans la grande rue. On y compte une moyenne de mille voitures à l'heure. Les files d'autos doublent des files de voitures à chevaux : convois lamentables de ces pauvres évacués de toutes les régions de la France envahie. Il en arrive encore de la Somme et de la Champagne, puis des départements du Loiret, d'Indre-et-Loire, de la Sarthe, même du Maine-et-Loire. Et cela inquiète certains Saumurois qui se mettent discrètement à pré- parer leur voiture pour partir au petit jour ou dès la première alerte de nuit d'un bombardement.
Le lundi, à midi trente, la voix lointaine et douloureusement grave du maréchal Pétain se fait entendre à la radio : « C'est le cœur serré que je vous dis aujourd'hui qu'il faut cesser
le combat. Je me suis adressé cette nuit à l'adversaire pour lui demander s'il est prêt à rechercher avec moi, entre soldats,

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après la lutte et dans l'honneur, le moyen de mettre un terme aux hostilités... ». A l'Ecole, les élèves frémissent. Les "visages sont contractés. Des groupes se forment en silence. Puis des voix impatientes s'élèvent : « Nous battons^nous ? Que faisons- nous ?» Le colonel, d'accord avec le général Pichon, comman- dant la « ligne de la Loire », ordonne la résistance. Il défendra la Loire, de Gennes à Montsoreau, avec ses huit cents élèves (1).
ORDRE DE RÉSISTANCE
Se battre, mais comment ? Les élèves, nous le répétons, ne sont jamais montés en ligne, ne connaissent pas le feu autrement qu'à l'école de tir et leur instruction militaire, commencée il n'y
a guère plus d'un mois, demeure fort incomplète. D'autre part, ne possédant aucune véritable artillerie, que cinq chars Hotchkiss de passage et récupérés par le groupe franc du capitaine de Neu- chèze, Lis ont peu de mitrailleuses, peu de canons antichars, seulement des mousquetons, des revolvers qu'ils décrochent dans les chambrées. Qu'importe ! Les officiers, les maréchaux de logis, en toute hâte, expliquent, une dernière fois, le mécanis- me des armes automatiques, particulièrement aux E.A.R. du train que leur fonction ne destinait pas à combattre. Les chefs n'ont même pas besoin d'encourager ces enfants que la fièvre du combat déjà transporte et qui, impatiemment, attendent les
ordres.
Ils sont bientôt donnés et exécutés. Le secteur de Saumur confié à l'Ecole de cavalerie comprend quatre points de franchis- sement de la Loire : le pont de Montsoreau, le viaduc du chemin de fer, les deux ponts en ligne de Saumur, le pont de Gennes. Ce sont ces endroits que les élèves ont organisé défensivement et qu'il importa de renforcer. Au pont de Montsoreau prend position la brigade de cavalerie Trastour ; au viaduc, la brigade
(1) L'Ecole se trouvera renforcée, avant et pendant la bataille, par une compagnie de tirailleurs nord-africains et une section de mitrailleuses venues du dépôt de Vernantes, par un détachement du 19* dragons sous les ordres du commandant Hasquard, par un groupe franc sous le commande- ment du capitaine de Neuchèze, par un escadron d'éléments récupérés sous les ordres du capitaine Gobbe. L'ensemble comprendra un effectif de 2.190 hommes dont 800 élèves avec un armement de 132 fusils mitrailleurs, 11 canons de 25, 3 canons de 37. 7 mortiers de 60, 4 mortiers de 81, 20 mitrailleuses,-7 groupes de mitrailleurs, 8 chenillettes, 3 autos mitrailleuses de reconnaissance, 5 chars Hotchkiss. Deux compagnies d'élèves aspirants de réserve d'infanterie de l'Ecole de Sa>nt-Maixent, commandées par île capitaine Bleuze, seront affectées au secteur le jeudi 20 juin.

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de la Lance et la brigade du train Noirtin, toutes les trois flan- quées d'une section de tirailleurs. Devant le pont des Sept-Voies un mur en ciment est dressé. Dans l'île Offard s'installent la
LES ACCÈS DE SAUMUR
brigade de cavalerie du lieutenant de Buffévent et une section de tirailleurs. Le lieutenant Périn de Saint-André commande les groupes de cavalerie affectés à la défense de la ville même ; un canon de 25, un mortier et deux mitrailleuses sont pointés dans l'enfilade des deux ponts ; une brigade du train surveille, à la hauteur de la place du Chardonnet, la pointe ouest de l'île ; la brigade du train du lieutenant Coadic s'embusque devant le Théâtre, tandis qu'un groupe occupe, en face, l'hôtel Budan et que quelques hommes braquent une mitrailleuse, au delà du monument aux morts de la guerre 14-18. Un vieux canon de 90 est même traîné aux abords du pont Cessart, derrière un camion qui servira de chicane. Des brigades motorisées de cavalerie et du train vont renforcer le poste de Gennes. Deux pelotons partent, en « side J>,en reconnaissance: direction de Tours, par la rive gauche ; direction de La Flèche et du Mans. Le colonel Michon établit son P.C. du côté du Château, dans la villa « Les Grandes Brises », qui domine la ville. Le commandant Lemoine, avec les capitaines Delmotte et le lieutenant Gaillard de Lavaldene comme
adjoints, interprétera ses ordres.

LES COMBA TS DE SAUMUR 215
Il fait un temps magnifique. Au matin, tout au plus, le vent d'est pousse quelques nuages formés d'une brume annonciatrice de chaleur. Le ciel bientôt reprend sa limpidité.
La journée du mardi 18 se passe dans l'anxiété et l'angoisse. Le défilé des voitures el le flot des réfugiés continue sans arrêt, aussi denses. Les nouvelles les plus invraisemblables circulent
sur la position de nos armées et les intentions du gouvernement. M. Roussel, le directeur de l'usine, prend soin de faire vider les gazomètres. Les boutiques se ferment dans la ville. Des habitants se joignent aux fuyards. D'autres vont reconnaître les abris col- lectifs, aménagés par la défense passive, la plupart profonds et spacieux, telles les caves du coteau de Notre-Dame de Nantilly. Des soldats commencent d'apparaître, dans un état lamentable, quelques-uns sans armes, d'autres blessés ou exténués. Mais voici des troupes qui se replient à peu près en ordre : artilleurs avec leurs longs convois de canons ; fantassins, le fusil à la bretelle, que commandent leurs officiers. Des autos à fanion passent, rapides ; des motocyclettes vont, viennent, ouvrent la marche à travers les colonnes des réfugiés, portent les ordres. Ordres de repli : aucune troupe ne doit rester à Saumur, chaque unité franchira au plus tôt la Loire, prendra la direction du sud.
A midi, un ordre parvient du service sanitaire : évacuer tous blessés et malades transportables, ne garder qu'un nombre restreint de médecins et d'infirmiers : un H.O.E.I. (hôpital d'éva- cuation primaire) est formé, en vue de la bataille de la Loire, à l'hôpital de Cholet (1) ; il fonctionnera sous les ordres du médecin-commandant Foucault. A l'hôpital complémentaire du
médecin-commandant Challamel, près de l'église de Nantilly, les blessés légers, les convalescents sont évacués. Les grands blessés, les malades sont transportés en camionnettes à l'hôpital mixte du médecin-capitaine Richou, chirurgien, dont les blessés, tous dans un état grave et repliés déjà, particulièrement des ambulan- ces de Versailles, demeurent à Saumur. Un poste de secours s'installe au château de Marson.
PRÉPARATIFS DE COMBAT
Pendant ce temps, les élèves s'apprêtent à combattre. En veste et en houseaux, l'écusson vert ou bleu marine à la vareu-
(1) Il ne sera pas pratiquement constitué, car, dès le mardi soir, le docteur Foucault recevait un ordre de repli sur Saint-Jean-d'Angély.

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se (1), casqués, jugulaire au menton, chargés du masque à gaz, du bidon, de la musette, du mousqueton et de quarante cartou- ches, ils s'activent, démolissent les garde-fou en pierre des quais pour permettre les tirs, traînent à pied d'œuvre les mortiers de 60 et 81, pointent les canons de 25 et de 37. Des artificiers du génie vérifient les charges de dynamite des ponts. La population regarde, effarée. Des civils interpellent les soldats :
— Vous allez vous battre ? Mais pourquoi faire ? Le maire a déclaré Saumur ville ouverte. L'armistice est demandé. Vous nous ferez tuer et bombarder nos maisons sans aucun résultat.
Les soldats ne peuvent qu'obéir aux ordres reçus. Ils ont d'ailleurs les nerfs à bout et ne cherchent en somme qu'à les détendre dans cette bataille ultime que leurs chefs leur demandent de livrer pour l'honneur de l'Ecole d'abord, pour protéger ensuite la retraite de nos armées.
A 20 heures, l'alerte est donnée à tout le dispositif. Les vivres de réserves sont distribués. «L'ennemi, annonce le lieu- tenant Rézel, ne serait plus qu'à 20 kilomètres». La reconnais- sance, partie en direction de Tours, revient et confirme l'approche des Allemands. Le 12° escadron du dépôt de cavalerie n° 9 qui cantonnait à Gizeux a franchi la Loire sous les ordres du maré-
er
chal des logis Robert Méhu, et un détachement du 1
des cultivateurs d'un excellent esprit combattif que commande le lieutenant de Rouffignac, s'apprête à détendre chèrement le pont de Bourgueil. L'élève Jacques Cailleton dont la brigade est en réserve, placidement, finit par s'abandonner au sommeil, couché entre l'aile et le capot d'une auto. Sommeil de courte durée car, vers minuit, le pont des Sept-Voies qui relie l'île Offard à la rive droite saute dans un grand fracas. Deux heures après, deux nouvelles et violentes détonations retentissent : le pont de Montsoreau et le viaduc du chemin de fer que le génie détruit. Une odeur de poudre flotte lourdement sur la ville dont les rues demeurent silencieuses et désertes. La section de gendarmerie se replie, par ordre, sur Thouars et Parthenay. Les civils qui n'ont pas quitté leur maison s'abritent dans les refuges. Vaille que vaille, deux cents femmes, enfants et vieillards du faubourg
Petit-Puy s'entassent dans les vastes caves de l'immeuble Guibert. Et voici que nos mitrailleuses, embusquées dans l'île, ouvrent le feu : rafales rapides qui soulèvent de longs échos dans la vallée. L'ennemi ne répond pas.
(1) Ecusson de l'Ecole de Cavalerie de Saumur : grenade surmontée d'un galon or et rouge et placée sur fond marine pour da cavalerie, sur fond vert pour le train.
cuirassiers,

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Il talonne la reconnaissance expédiée en side-cars sur La Flèche et Le Mans, reconnaissance que commande le lieutenant Garnier et qui, sur ordre, a fait demi-tour. Elle arrive par la route de Baugé, a l'instant même où le pont s'effondre. Les élèves n'ont pu se faire reconnaître à temps, bien qu'un trom- pette ait sonné des refrains de marche française. Ils ren- contrent, sur la berge, deux élèves du train, Quéré et Béraud, qui ont mandat d'abriter la population dans les tranchées de la gare. Ceux-n, îeur mission n'étant pas terminée, refusent de
suivre leurs camarades décidés à franchir la Loire à Gennes. Les deux élèves, guidés par les agents au brassard blanc de la défense passive, ont d'ailleurs fort à faire avec les réfugiés demeurés sur la rive droite et qu'il faut à tout prix éloigner, car l'arrivée des Allemands n'est plus qu'une question de mi- nutes. Quéré et Béraud finiront par gagner une tranchée et, de chaque côté de la route de Rouen, avec le mousqueton, héroï- quement, feront le coup de feu, jusqu'à l'épuisement de leurs cartouches (1).
Entre temps, dans la nuit, la 22* brigade est appelée au Breil, à 3 kilomètres en aval de Saumur. Il paraît que les posi- tions tenues par les Enfants de troupe de La flèche ont été enfoncées et que les Allemands franchissent à cet endroit la Loire. Il n'en est rien. Les jeunes soldats exténués, absolument rendus, ayant cru apercevoir des silhouettes et des barques, ont donné l'alerte. Les élèves organisent des patrouilles dans les fourrés et les roseaux, tiraillent, à tout hasard, sans rencon- trer personne. L'ennemi demeure toujours sur la berge. Tou- tefois, on entend distinctement le bruit du moteur de ses chars, de ses autos blindées, de ses side-cars. Des clapotements se perçoivent également à travers les remous du fleuve. A la faveur du clair de lune, des observateurs, avancés jusque dans l'eau, distinguent, sur la « terrible » rive droite, « pleine de mystère », comme des masses d'ombre qui bougent. Et bientôt, le long du fleuve, jaillissent les fusées de signalisation.
LE COMBAT DANS SAUMUR
L'ennemi ainsi marque le pas sur la rive droite. Sept de ses chars et deux autos blindées ont été démolis, dans la nuit à l'entrée de Saumur, par nos canons de 25. La puissante artil-
(1) Quéré et Béraud furent faits prisonniers. Un officier de cavalerie motorisée allemand, qui fréquentait les concours hippiques et appréciait
l'Ecole de Saumur, tint à les féliciter de leur cran.

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lerie allemande, massée à la Croix-Verte et au carrefour de la
Ronde, se déchaîne : 77, 105, 150.
L'Ecole de cavalerie ne paraît pas visée. Mais le quartier des ponts, le centre de la ville constituent les principaux objectifs. Des salves balayent toute la côte de Bournan, à la sortie de Saumur, route de Cholet ; le sergent Beaulieu du 91" régiment d'infanterie régionale, envoyé en reconnaissance vers un groupe
de D.C.A., les évite de peu. De grandes gerbes de fumée et de plâtras s'élèvent. La terre tremble à chaque instant. Les siffle- ments sinistres, les éclatements formidables se succèdent sans interruption. Au-dessus de ce tintamarre, domine l'aboiement infernal du canon allemand auto-moteur qui crache ses obus à raison de deux coups par seconde. Des maisons s'écroulent. Les voûtes de la chapelle de la Visitation s'effondrent. L'église SainNNicolas est touchée. Le collège Saint-Louis reçoit une quarantaine d'obus. Le clocher de Saint-Pierre s'effrite. Un fu- sant fait sauter la corniche du théâtre. Trois percutants tra- versent la pharmacie Béai, rue d'Orléans. Des 150 tombent sur l'hôpital complémentaire dont les quelques malades et blessés qui restent, égaillés dans le parc, finissent par se réfugier dans les caves des Etablissements Ackermann. Des incendies s'allu- ment un peu partout. Tout un quartier de l'île flambe comme une torche, dont la maison du photographe Decker, les magasins «A la Châtelaine», l'immeuble du docteur Astié. Des avions passent très bas. Des stukas exécutent de redoutables piqués sur le champ d'aviation de Terrefort. Un gros obus éclate dans une rue du quartier du Pressoir et foudroie quatre civils im- prudents qui fuyaient leur abri pour gagner une cave plus solide. A l'hôpital, un enfant naît sous les bombes. La terreur règne dans la ville.
Les élèves, belle et ardente jeunesse dont c'est le baptême du feu, demeurent impassibles, héroïques. C'est à peine s'ils baissent la tête sous la mitraille et tremblent. La volonté de se battre les domine et l'atmosphère de la bataille les transporte. Qu'importe le drame, l'aventure ? Là où les chefs les ont placés, ils tiennent, les petits, et font le coup de feu magnifiquement. Au bombardement de l'artillerie, ils répondent comme ils peu- vent, à coups de mortiers, de canons de tranchées, de mitrail- leuses, de mousquetons. Il y a des tués, — on en comptera six parmi les officiers, — des blessés. On transporte ceux-ci, grâce à des moyens de fortune, au poste de secours et à l'hôpital mixte, dont les médecins et infirmiers se dévouent. Un obus décoiffe

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l'hôtel Budan, où, du premier étage, le cadet Léon Darmaillacq surveille, avec le groupe qu'il commande, les mouvements de l'adversaire. Les lignes du central téléphonique sont détruites. L'île Offard disparaît totalement sous la fumée. Mais notre feu est si intense, si précis, tend un tel rideau de balles que les Allemands ne passeront pas la Loire à cet endroit. « Les tirs de notre artillerie, écrira un journal allemand, Der Vormarsch, du 3 juillet 1940, ne peuvent arriver à paralyser la résistance de l'adversaire au courage duquel nous rendons hommage >.
Cependant les munitions des hommes du lieutenalnt de Buffévent s'épuisent. Craignant à un certain moment d'être en- cerclé, le lieutenant ordonne la destruction du pont Gessart. L'explosion fait trembler toute la ville, démolit les maisdns voisines. La plupart des cavaliers, défenseurs de l'île, profitant des épaisses fumées, à la nage et par barques, regagnent la rive. Il est 19 heures.
Que va faire l'ennemi ? Tentera-t-il un débarquement ? Essaiera-t-il de tourner la ville ? Les élèves organisent tout de suite de nouvelles positions aux abords de Saumur. Officiers, soldats sont admirables. L'ordre est de tenir. Ils tiendront jus- qu'au bout. La nuit se passe dans la plus affreuse inquiétude.
LE COMBAT DE GENNES
Avant l'aube, la canonnade reprend. Et c'est sur Gennes que l'ennemi porte d'abord son principal effort.
La veille, le mercredi, il s'est accroché durement aux bri- gades des E.A.R. qui, depuis le 17, renforcent les. éléments char- gés de la défense des ponts.En tout cinquante élèves de la cava- lerie, cent élèves du train, auxquels se sont joints une section des tirailleurs du dépôt de Vernantes, sous les ordres de l'adju- dant-chef Ritter, et la reconnaissance du lieutenant Garnier qui, trouvant le pont de Saumur coupé, est rentré sans encombre dans
e
nos lignes à Gennes. A 16 h. 30, le 6 génie faisait sauter le pont
de la rive droite à l'instant où l'ennemi parvenait aux Rosiers. Détonation effroyable. Les vitres des maisons volent en éclats. Un morceau de fonte de quarante kilos crève le toit de l'hôtel de la Loire. Les mitrailleuses de la 11° brigade installée dans l'île entrent en action. Le lieutenant Jacques Desplats, un « as » sorti second de Saint-Cyr en 1937, premier de Saumur en 1938, commande cette formation résolue. Les Allemands répondent par leurs armes automatiques, leurs mortiers, leur artillerie. Le bom- bardement dure deux heures. Et aussitôt, l'ennemi tente, à plu-

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sieurs fois, le passage du fleuve, mais sans succès. Les quelques
Feldgrauen qui prennent pied dans l'île en sont vite chassés à
la baïonnette. Il y a des pertes de part et d'autre. Les Allemands,
sans insister davantage, à la nuit, rompent le combat. A 23 h.,
une dernière salve d'artillerie est tirée et un obus, percutant sur
la fougasse de la mine, fait sauter le pont reliant l'île à Gennes.
e
La 11 brigade se trouve ainsi complètement isolée. Elle peut,
quand même, par barques, évacuer ses blessés ; ils gagnent le poste de secours du château de Rou-Maison et l'hôpital de Doué- la Fontaine ; parmi eux se trouve le brave adjudant-chef Ritter qui a reçu trois balles dans le pied. Le lieutenant Desplats blessé lui aussi demeure toutefois à son poste. La situation de sa bri- gade privée de tout ravitaillement, enfermée dans l'île, est trop critique ! Les quelques heures de répit laissées par l'ennemi, le courageux lieutenant, qui ne se fait aucun illusion sur le résultat du combat, les passe à réconforter ses hommes, à les préparer à recevoir l'ultime assaut.
Les ombres de la nuit ne sont même pas dissipées que, le jeudi 20 juin, des autos blindées à six roues débouchent sur la petite place des Rosiers. Nous n'avons aucune pièce d'artillerie pour gêner leur manœuvre. Peu d'instants après, le combat reprend des plus violents : déluge d'obus de 105 et de 150, fu- sillade nourrie sur l'île, sur Gennes, le coteau, le bois de la Roche- Foissard. Le château de Sous-le-Puy prend feu, la poste brûle, le clocher de Saint-Eusèbe s'abat. Le sol est jonché de branches d'arbres. Les balles claquent dans les rues.
Vers 4 h. 30, les Allemands, des cavaliers motorisés et pleins de mordant, franchissent la Loire sur de nombreux canots blin- dés, se précipitent sur l'île. Attaque fougueuse. Corps à corps
» furieux. La défense, hélas ! est de courte durée. Les nôtres sont écrasés. Le lieutenant Desplats tombe à son poste, déchiqueté par un obus. Le maréchal des logis Braillard est tué en se dé- fendant à la grenade. L'E.A.R. Brasseur s'affaisse. L'élève-aspi- rant Roland-Gosselin, un engagé de dix-huit ans, a la main en partie arrachée ; pour échapper à l'encerclement, il se jette à l'eau ; une balle l'achève et le corps roulé par les flots ira échouer sur la grève de l'Abbaye de Saint-Maur (1). L'E.A.R. Dunant, le
(1) L'aspirant Guy Roland-Gosselin était le neveu de l'Evêqué de Versailles. Son corps fut trouvé par les religieux et enterré dans le petit cimetière de l'Abbaye, près du tombeau de Saint-Maur. « La mort, écrit un témoin, semblait l'avoir surpris et figé dans le garde-à-vous : le casque sur lia tête était si fortement retenu par la jugulaire qu'on ne pût lé retirer ; un bras s'étendait le long du coté, l'autre relevait sur la poitrine la main blessée et légèrement pansée ».

LES COMBATS DE SAUMUR 221
fils du sculpteur, ne cesse de tirer au fusil-mitrailleur jusqu'à ce qu'un éclat d'obus lui emporte la tête. Les fusils sont enrayés ; les munitions s'épuisent. Toute résistance se manifeste inutile. Certains élèves tentent leur chance, traversent la Loire à la nage. Les autres, dont le séminariste de Farcy, sont faits prisonniers. Les Allemands les relâcheront plus tard et les féliciteront de leur héroïque conduite.
Dans le parc, au-dessous de l'église, la bataille fait rage, car le capitaine Foltz contre-attaque. L'élève Jean Roussel fait un bon travail sous les ordres du lieutenant Pasquet. Les lieu- tenants Roimarmier, Lofficier et 'Gaver se dépensent sans comp- ter. Mais ils ne peuvent empêcher les Allemands de gagner, à l'ouest de Gennes, la rive gauche. En vain s'opposent à leur avance les brigades des lieutenants Maure, de Galbert, de Parce- veaux. Le lieutenant Roimarmier, mousqueton à la main, debout devant ses hommes, trouve une mort glorieuse. L'élève-aspirant Félix Pineau tombe à la tête de sa patrouille. En chargeant un fusil-mitrailleur, l'E.A.R. Flandin, jeune homme plein d'avenir, est atteint par un obus ; il meurt après deux longues heures d'agonie, en prononçant ces mots : « Mon Dieu, pardonnez-moi ; aidez-moi... Papa, Maman... C'est pour la France (1). A l'entrée du pont, un jeune civil réfugié dans le pays blesse mortelle- ment le lieutenant Bonnin qui lui demandait à boire ; le meur-
trier est abattu par l'un des nôtres : et le lieutenant expire à Doué, après avoir exigé que ses hommes évacués soient pansés avant lui. Plus loin, l'élève-aspirant Jacques Defrenne, frappé à la tête, s'écroule sur la berge du fleuve, où il s'était tapi pour tirer plus sûrement. Est tué également l'E.A.R. Passebois ; il a
vingt ans.
Toute la journée, le combat est ainsi ininterrompu. L'en- nemi attaque sans arrêt. Sans arrêt, les élèves, inférieurs en nombre et mal armés, inlassablement, opposent leur poitrine. Le lieutenant de Galbert, admirable de calme, a groupé, avec son agent de liaison, A. de Changy, séminariste, son peloton près du pont, derrière des murs et des arbres, et tient tête...
A 18 h. 30, si l'ennemi a pu s'infiltrer dans notre dispositif de défense très dilué, il n'a pas encore fait céder les élèves cramponnés farouchement sur la rive.
(1) Didier Flandin était le neveu à la mode de Bretagne du Président P.-E. Flandin.

222 REVUE DES DEUX MONDES
ULTIME EFFORT DE NOS TROUPES
Du côté de Montsoreau, à l'est de Saumur, la lutte est sévère, dès le petit jour du jeudi 20. Le lieutenant Trastour a organisé la défense avec le lieutenant Martin, du 6* génie, qui fit sauter le pont l'avant-veille, pendant qu'un canon de 25 était monté et pointé par le lieutenant Lemaire à flanc de coteau. Deux chars Hotchkiss que conduisent des sous-officiers d'encadrement tirent, toute la matinée, sans arrêt, des hauteurs de la ferme d'Aunis. Une auto-mitrailleuse Panhard, dirigée par un aspirant résolu, fait, à toute vitesse, sur les quais, la navette entre Sau- mur et Dampierre, ne cessant de cribler la rive de ses balles. Des avions, volant très bas, envoient bombes et torpilles. L'artil- lerie allemande pilonne le coteau. La coupole de la vénérable église de Notre-Dame des Ardilliers s'écroule. L'ancien couvent des Oratoriens prend feu. La ferme Coiffard, les immeubles Colin, Lemoine et Foucher sont incendiés. Le vieux capitaine en retraite Bâcle a sa maison démolie ; il réussit quand même à sauver sa femme infirme et des voisins réfugiés dans la cave. Mais voici qu'à un certain moment les Allemands réussissent, en face de Villebernier, à mettre à l'eau radeaux, canots pneuma- tiques et à moteur blindés.
La brigade de la Lance, les tirailleurs du lieutenant de Saint- Germain, les autos-mitrailleuses du sous-lieutenant d'Englejean interviennent. Le chef de peloton Imbert est tué. Le lieutenant de Buffévent, resté dans l'île Offard, tente une reconnaissance avec l'E.A.R. Raveton, sur la rive droite ; ils sont repérés et
tombent criblés de balles. Plus loin, les soldats Diard et Cou- e
tances de la section du sergent Rocheteau, du 91 régiment d'in- fanterie régionale, sont tués.
Dans Saumur, les élèves, après avoir d'abord creusé quelques tranchées derrière le théâtre et le long du quai Mayaud, élèvent fiévreusement des barricades aux carrefours et dans le vieux quartier de Saint-Pierre. Quelques E.A.R., Régnier, Petit, Bour- dais, déchaussent les pavés des caniveaux. Leurs camarades, Dorsemaine et Jammot, avisent le lourd étal d'une boucherie et réussissent à le sortir. Les chaises d'une fromagerie servent de meurtrières. Un libraire fournit un grand comptoir. Des piè- ces d'étoffes retirées de la maison de tissus Hutrel-Bidault, et posées l'une sur l'autre, forment un excellent abri de mitrail- leuse. De la même façon, les caisses de médicaments de la phar- macie Béai constituent des blockhaus.

LES COMBATS DE SADMBR 223
Une jeune fille intrépide, repliée de Cherbourg, qui la veille, soignait les blessés, ne cesse de courir de barricade en barricade, en pantalon et en chandail bleu, une bouteille d'eau de rie à la main. Avec le sourire, elle verse à boire et réconforte les défenseurs de la cité.
Cependant les Allemands ont fini par débarquer snr la rive sud. Ils bousculent nos brigades qu'ils font en grande partie prisonnières, laissant toutefois l'un des leurs entre les mains du lieutenant Coadic, puis, en début d'après-midi, s'emparent de Saint-Vincent. Leur artillerie se déchaîne alors sur le piton d'Aluns. Un même obus tue, dans an champ de blé, le lieutenant Gand et les E.A.R. Prat et Bodet. Plus loin, Hervier est blessé et les élèves Courtois, Proharam, René Duramois sont tués. Un conducteur de char, Michel Humbert, tombe foudroyé. Le lieute- nant Pitiot, de son côté, est décapité dans son char. La ferme d'Aunis dont les caves abritent des blessés est attaquée. Les Soldater der Sturmabteilungen (soldats des sections d'assaut) — troupe d'élite, gonflée à bloc — hardiment se faufilent à travers les vignes, parviennent dans les vergers et n'hésitent pas, pour mieux viser, à grimper dans les pommiers. Les nôtres, des gars à cran, sous les ordres du capitaine de Saint-Blanquat, résistent jusqu'au bout, avec un courage splendide. Le dernier défenseur tombe enseveli sous les décombres de la ferme qu'un nouvel obus anéantit. Plus au sud, vers Chaintre» deux compagnies d'élèves- aspirants de l'Ecole de Saint-Maixent, lancés en contre-attaque par le capitaine Bleuze, se font tuer en chargeant à la baïon- nette, mais dégagent les survivants de l'escadron Saint-Blanquat.
LES ALLEMANDS OCCUPENT SAUMUR
Saumur est débordé. L'ennemi, infanterie mordante et ma- nœuvrière, ne tarde pas à pénétrer dans Bagneux. Deux canons de 75, détériorés et qui n'ont pu envoyer que quelques obus, sont retirés à temps du carrefour de Bournan où ils se trouvaient en position. Et la 22* brigade, qui s'était repliée du Breil au Pont-Fouchard, prévenue par l'agent de liaison, l'élève Caille- ton, s'échappe de justesse, avec l'escadron du capitaine Gobbe tout en tiraillant dans les roseaux du Thouet.
Le colonel Michon dont le P.C. a été porté la veille en fin de journée au café Marsoleau, derrière les hauteurs de Terrefort, donne l'ordre de retraite sur Doué-Ia-Fontaine et Montreuil-Bel- lay : on rejoindra Monitauban, en principe via Poitiers.

224 REVUE DES DEUX MONDES
Le décrochage s'opère, adroitement, vers 21 heures. Les élèves du train, qui défendaient la ville et n'ont pas d'engins motorisés, s'emparent de toutes les bicyclettes de dames, d'hom- mes, qu'ils peuvent trouver ; il y en a de tous les modèles, de toutes les époques : l'élève Garcia monte une machine de bou- langer dont les deux paniers longs lui servent à ramasser vivres et munitions. Tout ce monde s'égaille à travers la campagne et, grâce au crépuscule, la plupart évitent l'encerclement (1).
Vers la même heure, l'ordre de retraite parvient aux défen- seurs de Gennes qui, avec un beau courage, combattent dans les rues. Les unités se replient une à une. Un tirailleur oublié dans l'île continue à tirer. Les Allemands lui font comprendre que la bataille est finie. Et le tirailleur de s'expliquer :
— Mon lieutenant m'a dit : toi pas flancher, alors moi pas flancher !...
Gennes est entièrement occupé. Un officier allemand s'ap-
rae
proche de l'hôtelière, M Barrau, qui contemple son restaurant
à moitié démoli :
— Quelles sont les troupes qui défendaient les ponts ?
— Les élèves et les officiers de Saumur avec quelques sol- dats nord-africains.
— Madame, soyez fière d'eux. Ce sont des héros !
Le capitaine Foltz a fini par grouper ce qui lui reste de son escadron au hameau de la Lande-Elevée, près de Doué où se rallient également quelques éléments des unités combattantes de Saumur.
Pendant ce temps, M. Rollin, épicier au Petit-Puy (banlieue S.-E. de Saumur), se dirige vers les Vorposten (avant-gardes allemandes). Une jeune fille l'accompagne, qui lui sert d'inter- prète, M"* Marthe Guibert. A l'officier, revolver au poing, qui précède ses troupes, elle assure qu'aucun soldat français n'est demeuré dans la ville et qu'il convient de ne pas la bombarder.
(1) Toutefois un certain nombre d'élèves de la cavalerie et du train furent encerolés dans la forêt de Fontevrault et faits prisonniers le samedi matin, 22 juin, au château de Chavigny, près de Lerné. Le colonel avait pu échapper à l'encerclement avec l'étendard et l'escorte, laissant île commandement au chef d'escadron Launay. Les Allemands conduisirent la petite troupe à Saumur et ila libérèrent en raison de sa conduite héroïque, £este chevaleresque d'un adversaire qui savait apprécier la valeur militaire. e 4 juillet, les élèves traversaient Loches au pas cadencé, dans un ordre impeccable, et entraient en zone libre. Le jeudi 2 juillet, le général Pichon les passait en revue dans la cour d'honneur du château de Saint-Cyran-
du-Jambot, dans l'Indre-et-Loire, et les félicitait.

Le résumé des opérations fait à l'époque est donné ici:

http://www.anac-fr.com/2gm/2gm_99.htm

Il est fait mention à plusieurs reprises de "blindés" allemands.

Mais la 1ère division allemande de cavalerie (c'était la seule de ce type), ne disposait pas de blindés.

Sauf des canons automoteurs et des 15 automitrailleuses de son escadron de reconnaisance et de découverte.

Ce n'était donc pas des panzers.

Reste que les 600 cadets de Saumur ont brillamment défendu les 40 km des rives de la Loire qu'ils avaient reçu l'ordre de tenir de part et d'autre de Saumur.

Ils n'étaient pas seuls: 2 compagnies des aspirants de réserve de Saint-Maixent, les éléments de l'école d'application du Train vinrent leur prêter main forte, ainsi qu'une compagnie de tirailleurs algériens (on note aussi un escadron de 200 hommes récupérés d'unités diverses).

Ils disposaient aussi de 4 automitrailleuses, de 5 chars H.35 et de 7 chenillettes.

En somme, 2 190 Français firent face à 6 000 Allemands. La disparité des moyens n'étaient donc pas aussi grande qu'on a pu le dire. On doit noter qu'aucune unité d'artillerie ne vint prêter main-forte aux défenseurs de Saumur, ce qui est la cause principale de leur échec relatif.

Ps: on note aussi la présence d'un escadron du 1er GRDI venant d'Evreux, mais tous les organigrammes disponibles ne le citent pas toujours.


Dans tout le Secteur, les pertes de l’Ecole ont été lourdes : 4 officiers, 1 sous-officier, 79 élèves ont été tués.
Celles des autres unités, Corps Franc notamment, Saint-Maixent, Train, Tirailleurs, l’ont été aussi (15 tués). Globalement, 101 tués, 149 blessés.
Les Allemands avouent 132 tués, et 200 à 300 blessés.
Tant que les Français constitueront une nation, ils se souviendront de mon nom !

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Re: La résistance des Cadets de Saumur: mythe ou réalité ?

Message par eliedurel » Dimanche 20 Décembre 2009 17:24:34

Ci-après, des extraits de mon livre (Elie Durel, "Mémoire d'un résistant" chez Geste édition, en format poche). La résistance héroïques des Cadets de Saumur (où je suis né) est bien une réalité.

Même l’adversaire reconnut la bravoure et le sens de l’honneur des futurs officiers de l’École. L’extrait du texte d'un correspondant de guerre allemand est éloquent à cet égard.
« Alors qu'il y a quelques jours, la tête des colonnes de poursuites allemandes s'approchait de Saumur, que les restes démoralisés des divisions françaises battues sur la Somme et la Seine s'enfuyaient sans s'arrêter par les ponts de la Loire, et que le maire voulait déclarer Saumur " ville ouverte", le Commandant de l'École de Cavalerie s'opposa à ce projet et mit la ville en état de défense avec ses cinq cents cadets, aspirants et élèves cavaliers.
Le pont sur la Loire sauta immédiatement devant les premières troupes d'assaut allemandes. Des coups de fusil partirent alors de toutes les maisons du rivage sud, à l'ouest et à l'est de la ville sur une étendue de plusieurs kilomètres, de toutes les crêtes couvertes de buissons, de tous les autres bastions naturels, de la ligne de crête descendant vers le fleuve.
Les aspirants et les cadets de l'École de Cavalerie française se défendirent opiniâtrement avec leurs mitrailleuses et les mortiers. Toute une nuit et toute une journée, ils lutteront sans espoir, dans une situation désespérée, pendant que, déjà, à leur gauche et à leur droite, s'écoulait le flot de la débâcle.
Le feu d'artillerie ne put paralyser cette courageuse résistance. Dès que celle-ci se taisait un instant, de l'autre rive repartaient les mitrailleuses françaises qui retardèrent considérablement la traversée du fleuve, mais ne purent l'empêcher à la longue.
La courageuse persévérance des élèves de l'École de Cavalerie de Saumur restera toujours une page glorieuse que la Division attaquante ne se refusera pas à reconnaître.
Il nous semble intéressant de noter que la Division qui prit l'École de Cavalerie de Saumur était une Division de Cavalerie.
»

En fait, ce sont sept cent quatre-vingt-six élèves officiers qui, avec l’appui de quinze cents fantassins, s’opposeront à une division de cavalerie allemande, soit plus de dix mille hommes.


Le journal des opérations.

MARDI 18 JUIN

Le P.C. de combat du Commandant de secteur s'installe au Moulin sur la crête à 800 mètres l’est du Château de Saumur.
Chef de gare signale de fortes colonnes ennemies composées d'éléments blindés et motorisés.

MERCREDI 19 JUIN

0 h 20 :

Le pont nord de Saumur est détruit sur l'initiative de l'Officier chargé de la défense de l'Ile de Saumur et qui a délégation du Général commandant la défense des passages de la Loire.
Le contact est pris avec l’ennemi et la bataille s’engage.
L'ennemi déclenche des tirs de « mienen » et de canons d'engins embrasés de part et d'autre du pont ; réplique de nos éléments de défense.

2 heures :
Le pont de Montsoreau est détruit après contact avec des éléments motocyclistes ennemis qui mitraillent et grenadent nos vedettes placées au nord du pont.

3 heures :

Le pont du viaduc est détruit sur ordre. Pendant toute la nuit à intervalles irréguliers l'ennemi continue à harceler par ses tirs l'île de Saumur.
Au lever du jour l'activité ennemie est constatée de l'observatoire du P.C. dans la région de la gare de Saumur et sur la rive nord de la Loire face au terrain du Breil.
Le Groupe MONTCLOS est chargé de l'organisation de la défense sur le Thouet (pont de Saint-Florent, Pont-Fouchard et pont de la voie ferrée de Nantilly), il est soutenu par deux pièces de 75 placées en antichars en batterie à la côte de Bournand,
Le pont sud de Saumur saute sur ordre. Les défenseurs de l'Ile restent sur leur position.

21 heures :

Bombardement violent de l'île de Gennes et de la rive sud de la Loire,
Le pont nord de Gennes saute sur ordre.
Attaque générale sur tout le secteur plus spécialement sur Gennes et Saumur.
Puis les événements vont se précipiter et se localiser.
Un escadron est à Fontevrault, avec une mission de surveillance sur la Vienne, le sud de Candés et vers Saint Germain sur Vienne. La ligne générale de défense passe par Chacé, la route Chacé-Champigny/Veudes et Champigny/Veudes où elle sera maintenue jusqu'au soir, à l'heure où dans tout le secteur l'ordre de repli sera donné.
Le Général PICHON, en raison de la situation générale sur la Loire, et soucieux de ne pas faire massacrer inutilement dans Saumur toute l'élite de la jeune Cavalerie, demande au Commandant du Secteur, par l'intermédiaire d'un Officier, agent de liaison, d'envisager une manœuvre en retraite en direction de la Vienne. Cette manœuvre est commencée à 21 h 30. Dans tout le secteur, à Gennes, à Saumur et à Montsoreau, les pertes sont lourdes, toutes les réserves sont engagées, le manque d'artillerie s'est fait cruellement sentir, mais dans son ensemble, le secteur tient.
L'aviation amie ne s'est manifestée au cours des deux journées, que par deux passages d'un Potez 63, remontant la Loire, sans liaison ni action de feu, dans le secteur. L'aviation ennemie est apparue nombreuse, très active dans l'après-midi du 19. Elle s'est manifestée toute la journée du 20, mais sans intervenir comme action de feu, sauf par quelques tirs de mitrailleuses.


Elie Durel
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Re: La résistance des Cadets de Saumur: mythe ou réalité ?

Message par BRH » Dimanche 03 Septembre 2023 11:40:56


JMO groupement Pichon.lwp

SHAT 34 N3 dossier 5

Intervention de l’Ecole de Cavalerie de Saumur
dans la défense de la Loire
(1939-1940)
_________________________________

Journal des marches et opérations du groupement Pichon

Groupement Pichon
Adjoint au général commandant la 9e Région, le général Pichon constitue le 17 juin pour la défense de la Loire entre
Amboise et Ancenis, un groupement mis sur pied par les dépôts et écoles de la 9e Région, les éléments sont :
a / - 232e R.I. en formation (1)
- 1 bataillon de chasseurs du D. I. 92.
- groupements de tirailleurs N. A. des D.I. 92 bis (2 bataillons) et 93 bis (3 bataillons).
- 3 compagnies du 91e R.R.
- 4 escadrons mis sur pied par l’école de Cavalerie de Saumur (Lieutenant-colonel Pichon - groupement
Michon)
- le groupement du C.O.D.P. (10 escadrons) (groupement de Saint-Laumer, sauf 280 hommes récupérés par le
groupement de Brauer).
- 5 sections de chars.
- 21 pièces d’artillerie isolés.
b / les éléments ci-dessus sont renforcés le 17 et 18 juin par :
- la 5e B.L.M. (réduite) formée avec des éléments regroupés de la 3e D.L.M.
- 2 bataillons de marche de l’école de Saint-Maixent.
- 2 batteries de 5 pièces de 75 mises sur pied par les écoles d’artillerie.
- compagnie du Génie 100/1
P.C. du groupement : Saint Branche (S. E. de Montgazon)

(1) Eléments passés au groupement de Brauer.



SHAT 7U 1368 d.5

17 juin 1940
16 h 00 Secteur Saumur : Aux ordres du colonel Michon.
4 escadrons : Ecole de Saumur.
20 h 30 La compagnie du Génie 100/1, mise à la disposition de la 6e Région est donné au colonel Guinchard,
directeur du Génie pour les destructions (pièce n° 3 cf. p. 3).
18 juin 1940
15 h 30 b / les destructions des ponts en aval de Tours à la diligence du général Pichon (pièce n° 8 cf. p. 3).
18 h 30 % au sujet prise de commandement - délégation aux officiers commandant les ponts de l’ordre de mise en
œuvre des destructions (pièce n° 9 cf. p. 4)
20 h 00 Le général est avisé que l’Ecole de Saint-Maixent a mis sur pied 2 bataillons d’élèves qui sont poussés l’un à
Chinon, l’autre à Vihiers, où ils seront en réserve.
19 juin 1940 Contact sur les ponts dans la nuit.
7 h 10 Envoyé officier de liaison au colonel Michon donnant renseignements et confirmant ordre de faire sauter les
ponts.
9 h 00 Tous les ponts sautent, sauf Port Boulet où la destruction de mise à feu a raté.
11 h 00 Renseignements sur un contact sévère pris avec l’ennemi aux ponts de Saumur.
13 h 45 Reçu un message du colonel Michon signalant attaque assez sérieuse sur Saumur.
14 h 00 Accusé réception de ce message - Avisé colonel Michon que le général dispose de 5 pièces de 75 dont une
partie pourra être mise à sa disposition si nécessaire.
Confirmé ordre de détruire pont de Gennes sans attendre contact (pièce n° 16 cf. p. 4)
18 h 30 Colonel Michon signale par officier de liaison tirs sévères d’artillerie région de Saumur.
Tentatives d’infiltration - arrivée d’un équipage de pont - bombardement sur Saumur - bruit de chars, etc.
18 h 00 Ordre au capitaine Chanson, commandant le détachement d’artillerie de Chinon de pousser sans délai sur
Saumur (P.C. du colonel Michon aux Moulins) avec 3 pièces de 75 (pièce n° 20 cf. p. 5).
20 h 00 Ordre au capitaine Bleuse commandant le bataillon de Saint-Maixent de Chinon de diriger son bataillon
(E.M. - 2 Compagnies F.V. et C.A.) sur Bagneux à la disposition du colonel Michon en vue de renforcer
sans délai, au besoin de nuit, les ponts de la Loire entre Saumur et Gennes (pièce n° 21 cf. p. 5).
20 juin 1940
3 h 00 Ordre verbal aux éléments réservés de la 3e D.L.M. (colonel Duvigier) de se mettre en mesure d’envoyer
du secours au colonel Michon si sa situation devenait précaire.
11 h 00 Avisé le colonel Michon que le colonel Duvigier pousse sur lui quelques éléments de la 3e D.L.M.. Si la
résistance du front de Saumur était rendue inefficace par suite des infiltrations signalées ou d’une pénétration
profonde, par Gennes, le colonel Michon aurait à manœuvrer en retraite vers Chinon par le sud de la forêt
Fontevrault (pièce n° 23 cf. P. 5).
12 h 00 C.R. à l’Armée sur la situation entre Gennes et Saumur (pièce n° 24 cf. p. 6).
14 h 00 Retour du lieutenant Dujardin officier de liaison entre le général Pichon et le colonel Michon. Cet officier
rend compte qu’en fin de matinée les éléments allemands (valeur approximative 2 bataillons) avaient réussi à
s’infiltrer à l’ouest de Saumur et a y constituer une poche dans la région de Dampierre-Turquant. Une
contre-attaque menée par le bataillon de Saint-Maixent appuyé par de l’artillerie et 5 engins blindés n’a pu
réussir à réduire la poche. Nos engins blindés ont été détruits et le bataillon a éprouvé des pertes sévères.
19 h 00 C.R. du colonel Michon au général Pichon sur la situation annonçant son repli. Ordre d’opérations du
colonel Michon réglant le repli (pièce n° 25 cf. p. 6 et 25 bis cf. p. 7).
21 juin 1940
9 h 15 Envoyé officier de liaison au colonel Michon pour lui exposer la situation du P.C. et des éléments de la
3e D.L.M. (pièce n° 28 cf. p. 7 )
Directive gagner du temps et se remettre en ordre.
22 juin 1940
4 h 00 Inspection des tirailleurs. Aucune nouvelle du groupement Michon, ni du groupement Bouton.
11 h 00 A aucun moment dans la conversation, il n’est question de donner un commandement au général Pichon.
Celui-ci ayant demandé quel rôle il devait jouer dorénavant, le général La Laurencie, répond qu’il disposait
déjà de 5 ou 6 généraux sans troupe et que le général Pichon n’avait qu’à rejoindre le Q.G. Il précise même
que le Q.G. est à Montauban.
23 juin 1940 Le groupement Pichon est réduit à :
- 3 bataillons de tirailleurs.
- 1 bataillon de Saint-Maixent.
- 2 escadrons de Saumur.
Le groupement passe aux ordres du général Petiet (2) (groupement Petiet).
(2) Commandant la 3e D.L.C.

Page 2 sur 13
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Re: La résistance des Cadets de Saumur: mythe ou réalité ?

Message par BRH » Dimanche 03 Septembre 2023 11:43:51

JMO groupement Pichon.lwp

SHAT 34 N3 dossier 5

Pièce n° 3
Général Pichon à Colonel Guinchard
Direction du Génie à Tours
Le C.Q.G. a mis à disposition 9° Région.
La Compagnie du génie n° 100/1 pour les travaux de destruction et d’obstruction.
Vous pouvez en disposer.
Demande à adresser à E/M 9° Région - 1° Bureau à Tours (capitaine Trepeaux)

Copie à Capitaine Trepeaux.

P.O. Le Chef d’Etat-Major
Signé : Dubois

Pièce n° 8
Armée de Paris
Etat-Major
3° Bureau
N° 59-35/AP

Q.G., le 18 juin 1940 - 10h50.
ORDRE

I° - la 7° Armée à droite doit se replier sur la ligne du Cher pour assurer la défense.
L’Armée de Paris, liant son mouvement à celui de la 7° Armée, se portera d’abord sur la ligne
Blois-Romorantin et ultérieurement sur le Cher.
II Au cours de ce mouvement, le 25° C.A. restera en contact avec la 7° Armée, le 10° C.A.
s’efforcera de maintenir sa liaison avec le 25° C.A. . Sur la ligne du Cher, les C.A. s’établiront :
25° C.A. de Montrichard (exclus) jusqu’à la limite est de l’Armée (voir ci-dessous).
10° C.A. de Montrichard (inclus) à Tours (inclus).
Un ordre ultérieur précisera les conditions dans lesquelles le 10° Corps aura à assurer la
défense du passage de la Loire en aval de Tours et prendra sous son commandement les
éléments de la 9° Région qui assurent la garde des ponts.
Limite est de l’Armée : Meung s/Beuvron, Romorantin, Valencay, Ecuillé, Villedomain,
Chatillon s/Loire, Chauvigny.
Tous ces ponts exclus.
III Destructions
Les destructions des ponts sur la Loire seront effectuées comme suit :
en amont de Blois, par le général Cdt le 25° C.A. conformément à l’ordre de l’Armée n° 58
du 17 juin 1940.
entre Blois et Tours par le général Cdt le 10° C.A.
Jusqu’à nouvel ordre en aval de Tours, à la diligence du général Pichon, Cdt le groupe de
Subdivision de la 9° Région.
IV Postes de Commandement
10° C.A. : Loches.
dès réception du présent ordre
25° C.A. : Montrésor
Armée de Paris : Pleumartin
Le général d’Armée : HERING
Commandant l’armée de Paris
Signé : HERING
Destinataires
G.A. 3 - 25° C.A. - 10° C.A.
1° - 2° - 4° Bureau - Armée Intendance
Santé - Génie - Direction des Etapes
9° Région - D.A.T. - Archives
Général Pichon
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Message par BRH » Dimanche 03 Septembre 2023 11:45:43

SHAT 7U 1368 d.5

Pièce n° 9

Azay-le-Rideau, le 18 juin 1940 - 18h00.
ORDRE

I° j’ai pris à la date ce jour, le commandement du secteur de défense de la Loire en aval de Tours
(P.C. Azay-le-Rideau)
Ordre 5335/AP du 18 juin 1940 de l’Armée de Paris)
II En exécution du paragraphe III de cet ordre, les destructions en aval de Tours, sont faites à
ma diligence.
III Je délègue aux officiers commandant les Ponts le droit d’ordonner aux agents techniques la
mise en œuvre du dispositif de rupture en cas de nécessité, les ponts ne devant pas tomber
intacts aux mains de l’ennemi.
Ceci vise aussi bien le cas d’attaque par le rive nord, que l’attaque à revers par des éléments
ayant passé en barque.
IV Les officiers Commandant les ponts s’entendront avec les représentants locaux du Génie pour
que ces prescriptions soient appliquées avec le maximum de garantie et d’opportunité.
Le général de division Pichon
Commandant le secteur d’Azay-le-Rideau
Signé : Pichon

Pièce n°16

Azay-le-Rideau, le 19 juin 1940 - 14h00.
Général Pichon à colonel Michon à Saumur

I° Reçois à 14 heures votre message de 8h43.
2° Situation - Ponts Langeais, Cinq-Mars et Tours détruits, mais destruction Port-Boulet n’a pas
fonctionné.
Ennemi au contact en ce pont.
3° je dispose de 5 pièces de 75 servies et commandées région Chinon, destinées en priorité à
Port-Boulet - Une partie pourra être mise à votre disposition si besoin vraiment essentiel.
4° Prière faire connaître
a) situation devant Saumur.
b) point exact où pièces devraient être dirigées.
5° M’envoyer agent de transmission moto à Azay-le-Rideau
6° Détruire Pont de Gennes sans attendre contact ennemi.
P.C. Le Chef d’Etat-Major
Signé : Dubois
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Re: La résistance des Cadets de Saumur: mythe ou réalité ?

Message par BRH » Dimanche 03 Septembre 2023 11:47:33

JMO groupement Pichon.lwp

SHAT 34 N3 dossier 5

Pièce n° 20

P.C. Azay-le-Rideau, le 19 juin 1940 - 19h00
ORDRE

Le Commandant du détachement d’artillerie stationné près de Chinon dirigera
immédiatement 3 pièces de 75 sur Saumur à la disposition du colonel Michon commandant
le secteur Saumur (P.C. Villa Martine, Les Moulins, Tél 2-14 et 5-84) avec leurs servants et
le commandant de batterie.
Extrême urgence
Précéder pour reconnaissance
Le Général Pichon
Signé : Pichon

Pièce n° 21

P.C. Azay-le-Rideau, le 19 juin 1940 - 19h00
ORDRE

Le Capitaine Bleuse, commandant le bataillon de St Maixent stationné à Chinon, dirigera
immédiatement sur Bagneux, à la disposition du colonel Michon commandant le secteur
Saumur :
l’ E.M. du bataillon
les 2 Cies de F.V.
le C.A.
Mission se mettre à la disposition du Colonel Michon pour renforcer sans délai au besoin
de nuit, les ponts de la Loire entre Saumur et Gennes où il y a lieu de craindre un passage
du fleuve par bateau d’équipage.
Précéder pour reconnaissance
Destinataires
- capitaine Bleuse
- colonel Michon

Pièce n° 23

Le Général Pichon
Signé : Pichon

P.C. Azay-le-Rideau, le 20 juin 1940 - 11h00
Le général Pichon
au colonel Michon commandant la défense de Saumur

Le Colonel Duvivier pousse sur vous, pour plus ample reconnaissance de l’étendue et de la
force des éléments qui vous débordent, une unité de sa D.L.M.
S’il s’avère que la résistance de front face à Saumur est rendue inefficace et sans objet par
suite de pénétration profonde par Gennes, prenez vos dispositions pour manœuvrer en
retraite vers moi par le sud de la forêt de Fontevrault.
Jusqu’à nouvel ordre 1 position inchangée entre la Vienne et Tours
Signé : Pichon
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Re: La résistance des Cadets de Saumur: mythe ou réalité ?

Message par BRH » Dimanche 03 Septembre 2023 11:50:09

SHAT 7U 1368 d.5

Pièce n° 24

Azay-le-Rideau, le 20 juin 1940 - 12 heures
Le général Pichon
à Monsieur le général Cdt l’Armée de Paris

Le colonel Michon signale sa situation comme très grave des infiltrations nombreuses
s’étant produites entre Gennes et Saumur. Très forte pression sur cette ville qui souffre
considérablement de bombardements et d’incendies.
Les reconnaissances d’A.M.R. du colonel du Vigier ne me renseigneront pas avant
16 heures au plus tôt.
En attendant, je me cloisonne sur Chinon, l’île Bouchard et je fais savoir au colonel Michon
d’avoir - si le débordement rend sa résistance inefficace, à se replier sur moi par la forêt de
Fontevrault.
La fiction des “villes ouvertes” amène les Allemands à considérer que ces villes sont un
passage ouvert et, en cas de résistance extérieure, à les détruire.
Je continuerai à tenir sans me laisser influencer par cette considération.
Mais c’est une fiction désormais de compter sur la continuité et l’efficacité prolongée au
cloisonnement Loire - dans la partie qui couvre l’axe de Thouars.
J’ignore ce qui est plus à l’ouest, Je reste à Azay-le-Rideau sauf nouveaux ordres.
Je vous envoie cette situation sans plus attendre: La rapidité des mouvements adverses ne
permettant plus d’attendre une vérification toujours tardive.
Signé : Pichon

Pièce n° 25

Secteur Saumur

P.C. Marsoleau 20 juin

Le colonel commandant le secteur de Saumur
à Monsieur le général Cdt la défense de la Loire
Azay-le-Rideau
J’ai l’honneur de vous rendre compte de ce qui suit :
En exécution des instructions que m’a remises de votre part un officier de votre Etat-Major
aujourd’hui 20 juin, je dois me résigner à accepter d’entreprendre dès cette nuit, la manœuvre en
retraite en direction d’Azay-le-Rideau.
Je ne suis plus capable d'assurer la défense de Saumur face au nord, ne disposant plus de
réserves à engager dans une bataille qui me paraît devoir être décisive.
En effet, les combats où je me suis engagé depuis le 18 juin au soir ont été sévères. Je n’ai plus
d’essence ou peu s’en faut, des munitions insuffisantes, et j’estime que mes effectifs ont subi des
pertes graves.
En l’acceptant, je porterais la responsabilité de l’anéantissement des cadres de valeur dont
demain aura besoin.
Cependant, il ne saurait m’échapper que mon retrait engage les positions tenues à ma droite.
J’assurerai donc leur couvertures à l’ouest tant que cela sera nécessaire. Mais en raison de la
faiblesse matérielle de mon élément naturellement peu organisé pour le combat, je demande que
vous me releviez de cette mission dès que vous aurez pu la confier à d’autres unités.
Signé : Michon
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Re: La résistance des Cadets de Saumur: mythe ou réalité ?

Message par BRH » Dimanche 03 Septembre 2023 11:52:19

JMO groupement Pichon.lwp

SHAT 34 N3 dossier 5

Pièce n° 25 bis

Secteur Saumur

le 20 juin 1940

Ordre d’Opérations
1° Par ordre de la 9° Région les troupes du secteur de Saumur manœuvreront
en retraite par la direction du sud-est. Pour rendre ces opération possibles les divers
unités en seront décentralisées.
2° Le commandant Hacquart prenant à sa charge l’escadron Foltz et les moyens
supplémentaires du 1er groupe franc à lui attribués donnera les ordres nécessaires à ces
unités pour assurer sa retraite en concordance avec celles des éléments de l’Ecole
Nota de P.L. : Les articles suivants ne concernent pas les éléments du secteur Gennes

Pièce n° 28

P.C. 21 juin 1940 - 9 h 15 Le général Pichon commandant le Front de la Loire
à colonel Michon

1°/ j’ai bien reçu votre ordre d’opérations du 20 juin.
Le porteur de ce pli m’assurera si les événements n’y ont pas apporté quelques modifications.
2°/ Il vous dira également ma situation actuelle, il s’agit d’abord de gagner du temps et de
remettre en ordre.
3°/ J’ai noté votre manque d’essence et si je n’en ai pas envoyé, c’est faute de moyens Faites-moi savoir par le porteur ce qu’il vous en faut et garder les moyens d’aller en chercher
là où je pourrai l’envoyer.
4°/ Je vous fixerai sur la situation après retour des reconnaissances que j’envoie dans les
diverses directions.
Signé

Pichon
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Re: La résistance des Cadets de Saumur: mythe ou réalité ?

Message par BRH » Dimanche 03 Septembre 2023 11:53:27

SHAT 7U 1368 d.5

Note sur l’intervention de l’Ecole de Cavalerie dans la défense de la Loire (1940)
1 - Effectif et moyens de feu :
Dans l’île de Gennes :
Moyens de feu :

Défense des intervalles :
Entre Le Thoureil et Gennes
Moyen de feu :

- 1 brigade montée (brigade Desplats)
- 1 section de tirailleurs algériens.
1 G.M.
7 F.M.
1 canon de 25
1 mortier de 60
1 mortier de 81 (1)
Compagnie du Train Roimarmier
4 mitrailleuses ( Saint Etienne)
10 F.M. 1915

Entre Gennes et la Mimerolle Groupe Hacquard
Moyens de feu :

Unité de soutien.

10 mitrailleuses
23 F.M.
3 mortiers de 60
5 chars H 39

Milly-le-Meugon
Escadron Foltz, 5 brigades, avec mission d’intervention éventuelle dans
le quartier de Gennes du Thoureil à Trèves-Cunault inclus.
Brigade Ravier
Brigade Bonnin
Brigade Pasquet
Brigade de Parcevaux
Brigade de Galbert
Moyens de feu :

145 hommes.

1 G.M.
13 F.M.
2 canons de 25
2 A.M.R.
1 A.M.D.

2 - Organisation du commandement des unités en ligne :
de Le Thoureil à la Mimerolle inclus

Chef d’escadron Hacquard
P.C. Chenehutte

3 - Action
Lundi 17 Juin

Aspirant Jouannic-Laborie Lucien « L’école de Cavalerie quittait ses bâtiments et se repliait vers le midi
(Montauban).
Le même jour à 16 heures, ordre nous était donné de nous équiper en tenue de campagne. Départ précipité
en cars en direction de Gennes (sur la Loire, 15 km nord-ouest de Saumur). Je pars comme agent de liaison
attaché au lieutenant Roimarmier commandant la compagnie du Train, des E.A.R. de Gennes.

Mardi 18 juin

Prenons positions sur nos emplacements de combat entre Gennes et Le Thoureil.
(plan organisation défensive et message de Roimarmier cf. p. 13)
Toute la journée on entend le canon du côté d’Orléans. Je fais la liaison avec le P.C. du colonel Michon
dans la matinée ».
13 h 30 L’escadron de soutien Foltz se porte à son emplacement de soutien.
Vers 21 h 00 Le chef de gare de Château du Loir téléphone au chef de gare de Saumur, qui nous prévient que de fortes
colonnes d’éléments blindés et motorisées allemandes se dirigent de Château-du-Loir sur
Château-la-Vallière.
Le chef de gare de Château-la-Vallière nous confirme ce renseignement peu de temps après, en nous disant
que la même colonne ennemie se dirige sur Noyant, par conséquent sur Saumur.
(1) ce mortier n’avait pas de percuteur.

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Re: La résistance des Cadets de Saumur: mythe ou réalité ?

Message par BRH » Dimanche 03 Septembre 2023 11:54:59

SHAT 34 N3 dossier 5

JMO groupement Pichon.lwp

Mercredi 19 juin
0 h 25 L’élément de Noyant se présente au pont de Saumur qui a été détruit à 0 h 20
Les élèves du train défendant l’île de Saumur, tirent par erreur à la mitrailleuse sur le détachement de
Noyant replié.
3 h00 Le détachement motocycliste qui n’avait pu franchir la Loire à Saumur passe à Gennes par le pont encore
valide.
5 h 30 Ordre est donné à l’escadron Foltz de glisser de Milly-le-Meugon à Beaucheron - Mouvement terminé à
11 h 00.
16 h 00 L’escadron Foltz se reporte à Milly-le-Meugon, comme il était prévu dans le dispositif général de défense.
Le pont nord de Gennes saute, l’ennemi ayant été signalé dans Les Rosiers.
Peu après, des éléments ennemis envoient des rafales de balles partant des Rosiers.
18 h 30 Liaison effectuée par le capitaine Foltz avec le lieutenant Desplats.
Observation du secteur, éventuelle intervention. Secteur calme.
20 h 00 Aspirant Jouannic-Laborie Lucien « L’ennemi nous attaque à la mitrailleuse, et au canon de 25, et au
mortier. Etant agent de liaison, je demande des ordres mais pendant tout ce combat, je n’en recevrai aucun,
c’est la raison pour laquelle je m’incorpore au groupe de combat de mon instructeur, comme voltigeur en
flèche sur la droite du côté de Gennes. Nous subissons aux environs de 22 heures un tir d’artillerie de 77, le
tir s’étendant sur tout le front - Plusieurs obus soufflants nous renversent mon camarade et moi.» .
21 h 00 Bombardement violent de l’île de Gennes et de la rive sud de la Loire, de part et d’autre de l’île par artillerie
de 77 et 105, tir des engins blindés embossés devant le pont et face aux extrémités de l’île - Tentative
passage en barque à l’est et à l’ouest de l’île, les tirs des F.M. et des mitrailleuses l’en empêchant. L’ennemi
est repoussé par la défense extrêmement forte du lieutenant Desplats, légèrement aidé par le feu des armes
automatiques des troupes de combat du Train, tirant de la rive sud de la Loire - L’engagement extrêmement
violent dure jusqu’à 23 h 30.
L’escadron Foltz pousse un peloton moto et 2 automitrailleuses sur Gennes. Ils n’ont pas à intervenir, le
reste de l’escadron est porté à la fourche Milly-Sarreau, Milly-Gennes, initiative se trouvant confirmée par
ordre du P.C. reçu par le capitaine Foltz à 24 h 00.
Le pont sud de Gennes saute sur ordre, isolant dans l’île de Gennes la brigade Desplats qui reste sur place.
23 h 30 L’élément ennemi cesse son action devant cette résistance à laquelle il ne s’attendait pas.
En fin de journée, toutes nos positions sont intégralement maintenues, toutes les tentatives de
franchissements sont repoussées par les armes automatiques et nos mortiers. Des brigades engagées ont
magnifiquement pris le dessus sur un ennemi mordant et puissamment armé.
Jeudi 20 juin
2 h 00 Le secteur de Gennes ayant été fortement attaqué la veille, l’escadron Foltz étant en partie engagé et sans
nouvelle du secteur à notre gauche dans la direction duquel on percevait un violent bombardement
ininterrompu, le bataillon de Saint Maixent reçoit l’ordre de se porter, une compagnie et section
d’accompagnement à Milly-le-Meugon, une compagnie et une section d’accompagnement à l’ouest de
Gennes pour renforcer la compagnie Roimarmier - Les 3 pièces de 75 doivent battre les Rosiers et l’île de
Gennes éventuellement.
Le mouvement est aussitôt commencé.
De 24 heures à 4 heures du matin : renforcement des positions de par et d’autre. Nous creusons des
tranchées plus profondes, nous organisons des positions de repli à 200 m en arrière, presque au sommet de
la crête située derrière notre position - Les allemands de leur côté reçoivent des renforts et tentent de réparer
le pont.
3 h 10 Ordre est donné par le Commandant du secteur au capitaine Foltz d’envisager son action sur Gennes de
la façon suivante :
1° ) - appuyer le peloton Desplats.
2° ) - contre-attaquer au besoin, pour rejeter à l’eau tout ennemi ayant pris pied sur la rive sud de la
Loire.
3° ) - interdire toute progression en direction des grandes rocades.
- Gennes - Chenehutte,
- Gennes - Coutures,
et des pénétrantes
- Gennes - Milly-le-Meugon,
- Gennes - Louerre,
4 h 00 Le capitaine Foltz rend compte que le mouvement de son escadron pour exécuter la mission donnée et en
voie d’exécution.
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Re: La résistance des Cadets de Saumur: mythe ou réalité ?

Message par BRH » Dimanche 03 Septembre 2023 12:00:14

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Combat à Port-Boulet

Message par BRH » Lundi 04 Septembre 2023 08:27:05

Article réalisé à partir d’extraits du Journal des Marches et Opérations du détachement de l’Ecole d’Application de l’Artillerie.

https://artillerie.asso.fr/basart/artic ... rticle=574

Le 18 juin 1940, l’Ecole d’Application d’Artillerie de Poitiers, constitue avec du personnel de l’école, un détachement d’artillerie destiné à renforcer les troupes engagées sur la Loire. Le capitaine CHANSON, désigné comme chef de détachement, choisit son personnel parmi les officiers et élèves volontaires. Le même jour, il reçoit de la 9è Région, un ordre de mission le mettant à la disposition du commandant de l’Armée de Paris, pour être employé dans la région de Chinon. A vingt heures, le détachement quitte Poitiers en direction de Chinon, en passant par Lencloître et Richelieu. De Richelieu, le capitaine téléphone à 23 heures, au Q.G. de l’Armée de Paris, pour obtenir des renseignements sur la situation et des ordres complémentaires. Il reçoit à 24 heures, par téléphone, l’ordre de se présenter en personne le lendemain à 7 heures 30 à Pleumartin.
Il s’y rend immédiatement et reçoit, le 19 juin à 09h00, l’ordre de se porter à Chinon et de se mettre à la disposition du général PICHON. Revenu à Richelieu, il donne l’ordre de départ à la colonne et se porte en avant. A son arrivée à Chinon, il prend contact avec le capitaine BLEUSE, commandant le bataillon de l’E.M.I.C.C de Saint-Maixent en position à Chinon, puis se rend à Azay-le-Rideau où il se présente au général PICHON. Il reçoit l’ordre de laisser momentanément ses pièces en position de route, en arrière de Chinon, en prévision de la constitution d’un groupement mixte infanterie - artillerie aux ordres du capitaine BLEUSE.
A 16h, le capitaine reçoit, du général PICHON, l’ordre de mettre deux de ses pièces en position pour participer à la défense du pont de Port-Boulet, avec une compagnie du bataillon de Saint-Maixent commandée par le capitaine RAMAR. En outre il faut renforce une pièce de 75mm, déjà en position, au pont de Port-Boulet, en raison de l’importance capitale de cette pièce au point de vue de la défense. Le capitaine décide de remplacer le personnel par le sous-lieutenant Josselin et ses servants, tous volontaires pour servir cette pièce particulièrement exposée.
A 19 heures, le capitaine rentre au bivouac. A 20 heures, il reçoit du général PICHON l’ordre de se porter avec trois pièces à Saumur et de se mettre à la disposition du colonel MICHON, commandant la Défense de Saumur. Par un message, il confie au sous-lieutenant JOSSELIN le commandement de la fraction laissée à Chinon et Port-Boulet, soit 2 pièces, 3 tracteurs, 1 camion, 486 obus et 1 motocyclette. Il donne ensuite aux trois autres pièces l’ordre de départ pour Saumur, où il arrive lui-même en reconnaissance, à 24 heures.
Vers 20 heures 30, le sous-lieutenant JOSSELIN a effectué la relève du personnel de la pièce de 75mm, au pont de Port-Boulet. Cette pièce, qui est située à l’entrée du pont, est soumise depuis plusieurs heures à un tir de bombardement en provenance de Minenwerfer et de l’artillerie adverse. Vers 21 heures, une bombe tombe sur une caisse à munitions de la pièce, au milieu du personnel. L’E.O.R. MOUGEOTTE est tué sur le coup, le sous-lieutenant JOSSELIN est blessé par des éclats sur tout le corps et il perd abondamment son sang ; l’E.O.R. LEOST est blessé au bras, l’E.O.R. PIHOUEE au pied, et le canonnier TOUPIN est violemment commotionné ; la pièce de 75mm est hors d’usage. Le sous-lieutenant JOSSELIN refuse de se faire évacuer et donne des ordres pour déplacer les deux pièces restantes et les amener sur la route à un meilleur emplacement de combat. Les E.O.R. PITHOUEE, LEOST, ainsi que le canonnier TOUPIN sont évacués. Vers 23 heures, le sous-lieutenant JOSSELIN, perdant connaissance, est évacué sur Chinon et l’aspirant OUVRIE prend le commandement des deux pièces.
Le jeudi 20 juin, le capitaine est arrivé à Saumur vers 0 heure. Après deux heures de recherches, il se présente au P.C. du colonel MICHON et y reçoit l’ordre de mettre ses trois pièces en position dès que possible, pour agir par ses feux : sur l’Ile des Rosiers (à 16km à l’ouest de Saumur), sur la région des Rosiers, puis sur toute la rive droite de la Loire qu’il pourra atteindre. L’occupation de la position est effectuée dès l’arrivée des pièces, la liaison avec les troupes appuyées et les transmissions aussi. L’entrée en action de la batterie est prévue pour 7 heures 30. Mais à 6 heures 45, un officier de liaison du colonel apporte, à la batterie, l’ordre de revenir à Saumur et de se mettre en position pour empêcher tout débarquement et toute progression d’engins blindés.
A 7 heures 15, le capitaine donne l’ordre de mouvement et se rend au P.C. du colonel, à Saumur. Là, il est informé que des éléments ennemis ont franchi la Loire et s’infiltrent aux lisières Est de Saumur. Le capitaine BLEUSE, venu pendant la nuit à Saumur avec les éléments de son bataillon non engagés à Port-Boulet, est chargé de monter une contre-attaque pour refouler l’ennemi. L’appui de cette contre-attaque est demandé au détachement composé des trois pièces, mais le capitaine CHANSON estime, en raison des conditions d’engagement, qu’un appui d’artillerie est pratiquement irréalisable. Le détachement d’artillerie est alors chargé d’une mission anti-char aux lisières Sud - Est de Saumur. Entre 9 heures et 15 heures, les pièces occupent successivement plusieurs positions, afin de remplir au mieux cette mission selon la situation. En même temps, le capitaine poursuit l’étude des possibilités d’intervention au profit de la contre-attaque menée par les éléments de Saint-Maixent.
A Port-Boulet, pendant la nuit du 19 au 20, une nouvelle tentative a eu lieu pour faire sauter le pont, à l’aide d’une charge superficielle de mélinite placée par les élèves de Saint-Maixent. Au petit jour, l’échec de cette tentative est constaté. Le capitaine RAMAR demande à l’aspirant OUVRIE de tirer sur le pont, pour y faire une brèche. Constamment sous le feu des mitrailleuses ennemies, en dépit de l’appui de quelques mortiers et de quelques autos mitrailleuses, l’aspirant OUVRIE met une pièce en batterie à 300 mètres du pont, sur la berge du côté Est. Il tire 59 coups dont 56 touchent au but, mais sans causer de destruction appréciable. La pièce rejoint ensuite son emplacement de combat. Vers midi, sur le pont, se dévoile brusquement un canon allemand qui tire sur nos autos mitrailleuses. L’aspirant OUVRIE le prend immédiatement à partie avec sa première pièce (pointeur l’E.O.R. MARTIN) ; au deuxième coup il le fait voler en éclats. Les allemands ne tentent plus rien sur le pont. Ils essaient, dans l’après-midi, de franchir la Loire de part et d’autre, en radeaux. Les pièces effectuent quelques tirs. Dans la soirée, l’ennemi a réussi à franchir la Loire à droite et à gauche du pont. Vers 21 heures, le capitaine RAMAR transmet à ses troupes l’ordre de repli. L’aspirant OUVRIE sort ses canons de batterie et suit les troupes du capitaine RAMAR, rassemblées dans la forêt de Chinon, près de Cravant, avec des éléments de la 3ème D.L.M. qui se croient encerclées par l’ennemi.
A Saumur, rien d’important à signaler dans la situation des 3 pièces du détachement. Vers 20h15, le capitaine, s’étant rendu au P.C. du colonel, reçoit notification de l’ordre de repli des troupes de Saumur, sur Roiffé. Il rend compte au colonel de la présence de deux de ses pièces à Port-Boulet et de son désir de les récupérer. Le colonel lui indique alors que sa mission auprès de lui est terminée et qu’il doit, par conséquent, se rendre à Chinon, pour regrouper son détachement, et se remettre aux ordres du général PICHON. Le capitaine décide d’effectuer le repli jusqu’à Trois-Moustiers, avec les troupes de Saumur, et de se diriger ensuite sur le bois de Lamothe (entre Vézières et Guillegaudrie), pour y faire stationner ses pièces, pendant qu’il ira lui-même en reconnaissance à Chinon. La colonne du détachement arrive dans le bois de Lamothe vers 24 heures.
Le vendredi 21 juin le capitaine se rend à Chinon dès que les pièces sont arrivées. Il ne trouve pas âme qui vive, dans tout Chinon : pas une troupe, pas un civil. Des tirs de mitrailleuses sont entendus au Nord, paraissant venir de Port-Boulet. Il décide d’attendre le jour pour poursuivre plus avant sa reconnaissance, et rentre au lieu de stationnement de son unité (2 heures 30).
A 5 heures 45, il prend contact au passage avec le capitaine BLEUSE qui, de Saumur se rend à Chinon avec les éléments de son bataillon transportés en autocar. Il informe le capitaine BLEUSE de sa reconnaissance de la nuit à Chinon ; le bataillon poursuit sa marche.
A 6 heures, le capitaine prend contact avec le commandant LAUNAY, chef d’un détachement de l’école de cavalerie de Saumur, précédemment engagé à Saumur puis venu stationner à Vézières ; il lui rend compte de sa reconnaissance à Chinon.
Vers 7 heures, il part pour Chinon. S’estimant être protégé par le bataillon de Saint-Maixent, il part dans sa voiture de tourisme avec son chauffeur, l’E.O.R. MEYER armé d’un mousqueton, et se fait suivre d’un motocycliste (E.O.R. VALLET) armé également d’un mousqueton. Peu après. Avant d’arriver à Chinon, la voiture se trouve, dans un tournant, à 30 mètres d’une colonne motorisée ennemie venant en sens inverse. Il est impossible de faire demi-tour, alors l’E.O.R. MEYER, avec sang froid, engage la voiture sur un chemin de terre, qui se présente à gauche, à quelques pas de la tête de la colonne allemande. Sous un feu violent d’armes automatiques, la voiture atteint une ferme à 300 mètres de la route ; plusieurs balles l’ont endommagée sans blesser personne ; le chemin a pris fin. Le capitaine décide d’abandonner la voiture. Il brûle les papiers qu’il a sur lui et, avec l’E.O.R. MEYER, va tenter de rejoindre son unité. Cette tentative échoue peu après. Le passage est coupé par la colonne ennemie qui progresse, le capitaine et l’E.O.R. MEYER sont faits prisonniers.
Pendant que la voiture du capitaine était mitraillée sur le chemin menant à la ferme, le motocycliste VALLET réussit à faire demi tour sous le nez des allemands et, malgré le feu de l’ennemi, à repartir en direction de la batterie, qu’il rejoint peu après, sans être blessé, mais avec des traces de balles dans son ceinturon et sur le guidon de sa motocyclette. A son arrivée, il rend compte des évènements au sous-lieutenant BOIS, qui prend le commandement du détachement, donne des ordres préparatoires à un repli vers le Sud et prévient, en même temps, le commandant LAUNAY. Celui-ci donne l’ordre, peu après, d’assurer la protection du repli, sur Lerné, du détachement de l’école de cavalerie stationné à Vézières, puis de rejoindre ensuite Lerné (Château de Chavigny). En exécution de cet ordre, le sous-lieutenant BOIS met en position les trois pièces et les armes automatiques, pour former un point d’appui face au Nord et à au Nord-Est.
A 9 heures, des éléments légers ennemis apparaissent, ils se dispersent dans les bois sous le feu des mitrailleuses. A 9 heures 15, la durée de la mission étant écoulée, les éléments du détachement décrochent et rejoignent la Château de Chavigny, où le sous-lieutenant BOIS reçoit l’ordre d’abandonner ses armes et d’installer son personnel dans les bois environnant le château. Les trois pièces et les armes automatiques sont rendues inutilisables.
Le même jour, les 3 pièces de l’aspirant OUVRIE, qui ont quitté Port-Boulet la veille au soir, sont dans la forêt de Chinon, près de Cravant, avec le détachement de Saint-Maixent du capitaine RAMAR et des éléments de la 3ème D.L.M..
Vers 18 heures, ces troupes se mettent en route, se dirigent vers le Sud et, après plusieurs difficultés mécaniques vécues par la section, arrivent dans la nuit à Danger.
Le samedi 22 juin, l’ennemi a découvert les troupes stationnées au Château de Chavigny à Lerné et, vers 10h30 les a fait prisonnières. A Danger, la section de l’aspirant OUVRIE se met en batterie sur le pont de la Vienne. L’ennemi bombarde Danger. On fait sauter le pont et la section se place en position anti-char sur la route qui mène à la Haye-Descartes. Danger est toujours bombardé. Vers 21 heures, les unités décrochent.
Le 23 juin, après plusieurs incidents, la section arrive, vers 5 heures du matin, à 4km au Sud-Est de Poitiers. A 10 heures, elle repart sur Vivonne, toujours en compagnie de la 3ème D.L.M. et de l’unité du capitaine RAMAR. A Vivonne, la section se prépare à mettre en batterie, mais reçoit aussitôt l’ordre de départ pour la Rochefoucault, où elle arrive dans la journée du 24.
Le 25 à 1 heure, il y a cessation des hostilités. Vers 3 heures, la section part vers Thiviers.
Les 26, 27 et 28 juin, elle stationne près de Ribérac.
Le 29 juin, l’aspirant OUVRIE remet ses deux pièces au parc d’artillerie de Périgueux et, dans l’après-midi, rejoint les éléments de l’école d’application d’artillerie stationnés à Saint-Laurent de Gorre.
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