L'énigme du "Haltbefehl"...

Les Totalitarismes à l'assaut de l'Europe !

Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Daniel Laurent » Dimanche 15 Juillet 2012 07:47:46

Bonjour,
Francois Delpla a écrit :à la suite de la publication en ligne de mon mémoire d'habilitation, la discussion rebondit sur ATF 40 :
http://atf40.forumculture.net/t5006p15- ... t-en-ligne

Attention, la discussion sur ATF40 est sur le fil au sujet du numéro 3 de Dernière Guerre Mondiale.
Ton mémoire d'habilitation est la :
http://derniereguerremondiale.net/indexDGM.php
Voir le Hors-série.
D'ailleurs, certains membres d'ATF40 ferait mieux d'aller le lire, ils comprendraient mieux certaines de tes thèses.
Cordialement
Daniel
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Daniel Laurent » Mercredi 18 Juillet 2012 05:19:55

Bonjour,
Daniel Laurent a écrit :D'ailleurs, certains membres d'ATF40 ferait mieux d'aller le lire, ils comprendraient mieux certaines de tes thèses.

Je me suis mal exprimé, je me dois de préciser ce que je veux dire par la :
D'abord, quand je parle de ATF40, je ferais mieux de parler de tous les forums ou F. Delpla avance sa thèse sur le Haltbehfel ou autres thèses un peu spéciales.
Ensuite, notez que je parle de certains membres, donc pas de tous.

Le problème avec FD c'est qu'il se lance sur les forums avec des messages pas nécessairement détaillés et qui donc sont de nature a être mal compris par ceux qui, mis a part sur le forum en question, n'ont pas lu les présentations plus détaillées des thèses en question dans ses livres ou autres documents. Phénomène très courant dans la mesure ou le tirage des livres de FD n'est pas mirobolant.

D'ou mon habitude, en particulier quand les documents sont disponibles sur la toile, d'aller citer des liens, DGM ou autres, pour que les intervenants y voient plus clair, quitte évidemment a ne toujours pas être d'accord avec les thèses en question.

Voila, rien de plus dans ces messages, et surtout pas une approbation globale de ma part de tout ce que FD écrit. Je ne participe guère aux fils ou il ferraille avec des gens qui ne sont pas d'accord avec lui, mais c'est juste parce que très fréquemment je n'aime pas la façon dont ça tourne.
Cordialement
Daniel
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Vendredi 20 Juillet 2012 06:16:53

Daniel Laurent a écrit :Le problème avec FD c'est qu'il se lance sur les forums avec des messages pas nécessairement détaillés et qui donc sont de nature a être mal compris par ceux qui, mis a part sur le forum en question, n'ont pas lu les présentations plus détaillées des thèses en question dans ses livres ou autres documents.


Tout en te remerciant des liens que tu mets et de tes efforts pour aider à la connaissance de mes analyses,je ne puis laisser dire cela.

Je suis moi-même sur le pont pour tout complément ou explication.

Depuis la Grèce antique au moins, l'homme réfléchit sur la meilleure manière de s'inscrire à contre-courant dans un débat. Y aller doucement, ou annoncer la couleur ? Il n'y a pas de solution-miracle. Les gens qu'on réveille de leur sommeil dogmatique ne sont jamais de bonne humeur et c'est humain.
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par BRH » Samedi 21 Juillet 2012 18:30:51

Pour Norodom, le haltebefehl s'explique par manque de carburant... Simple, mais il fallait y penser. Mais peut-être existe-t-il des archives prouvant cette carence ? En ce cas, effectivement, il faudrait mettre les pouces !

Norodom a écrit :Je ne vais pas entreprendre face à vous, pour la n_ième fois une croisade à des fins de vous convaincre... vous connaissez les détails de mes points de vue. Vous savez aussi que je ne me suis pas rallié aux vôtres, tant je considère que votre thèse n'est pas fondée sur des certitudes mais sur des hypothèses et qu'en plus elle est contraire à toute logique.

En rappelant à tous que nous sommes ici sur un fil qui traite du Haltbefehl, je dois à ceux qui suivent ce fil, quelques explications sur les raisons de mes convictions.

Celà fait 67 ans qu'est née ma passion pour l'Histoire de Dunkerque.
Celà a commencé par le recueil de témoignages (de visu) de militaires gradés, qui ont connu l'évènement sur le terrain. Je suis resté longtemps sur la seule idée que l'arrêt des chars était due à une pénurie passagère de carburant.
Et puis j'ai lu beaucoup de récits dont pour un grand nombre le côté fantaisiste ne m'a pas échappé. J'ai dû me livrer à un tri sélectif qui n'a pas été simple.

A la fin de l'année 1967, un récit a particulièrement retenu mon attention au point qu'il est resté parmi mes documents de référence...
Il s'agit du récit du général Walther K. Nehring, chef d'état-major du général Guderian.

Voici quelques extraits en rapport avec notre sujet de débat:

<< L'avant-garde de la 1ère division de panzers atteignit l'Aa, au nord de Gravelines, le soir du 23 mai. Le lendemain, l'attaque de Gravelines et du fort côtier de Philipe échoua _ les Français se défendirent courageusement _ peut être parce que Dunkerque constituait maintenant le seul lien possible entre l'armée assiégée et le monde extérieur.
Du fait que les alentours de l'Aa fourmillent de fossés et de canaux et se prêtent par conséquent fort mal à une attaque d'infanterie ou de blindés, on ne put établir , pour servir de tremplin au combat décisif du lendemain matin, qu'une série de têtes de pont sur l'autre rive de l'Aa, et nous subîmes d'importantes attaques aériennes ennemies.
Puis le soir du 24 mai, le corps reçut l'ordre de ne pas traverser l'Aa et de rester sur les positions déjà occupées. On ne justifia pas cette décision et nous supposâmes, Guderian et moi, que la capitulation des Alliés était imminente _ opinion que confirmaient les instructions reçues de la Luftwaffe "Dunkerque doit être laissé à la Luftwaffe. Si Calais n'est pas tombé le 26 mai, la Luftwaffe s'en chargera également."
Cette phrase concernant Calais nous vexa quelque peu, parce qu'elle sous-estimait les possibilités de notre 10ème division de panzers. Toutefois, il nous apparut que la Luftwaffe pouvait eviter l'effusion de sang, inciter l'ennemi à capituler et donner un peu de répit à nos hommes. >>

Dans ce récit, on relève encore que le 20 mai, Guderian se trouvait avec la 1ère division de panzers, aux portes d'Amiens, pour soutenir un bataillon d'infanterie légère motocycliste, en difficulté face à une violente résistance.
Parti ensuite à la rencontre de la 2ème division de panzers, Guderian décida qu'Abbeville devait tomber le même jour, mais faute de carburant, les blindés durent s'arrêter aux portes de la ville.

Alors, au lu de celà, comment ne pas comprendre les soucis de de Von Rundstedt ?
Il est permis de supposer qu'il s'est montré plus lucide que Brauchitsch, et que si différend il y a eu, Hitler a tranché en retenant la solution de Goering.

Par la suite, il y eut bien une bataille des généraux, une bataille de prestige.... avec pour cible désignée _ Hermann Goering !

Encore un extrait du récit:
<< Si les généraux de l'armée de terre pouvaient s'attribuer seuls, le mérite de la victoire, le prestige du Fûhrer en Allemagne serait irrémédiablement ébranlé. On ne pouvait éviter cette fâcheuse extrémité que si c'était la Luftwaffe et non l'armée qui remportait la bataille décicive. >>

Tant que les Français constitueront une nation, ils se souviendront de mon nom !

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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par norodom » Lundi 23 Juillet 2012 21:46:55

@ BRH

Mon cher Bruno, là vous vous mélangez complètement les pinceaux !...
Ma citation que vous rapportez ici n'a pas été écrite ici, mais sur un autre forum, et de surcroît les deux premières lignes ne s'adressait pas à vous, mais à Mr François Delpla.

Il eut été plus séant de rappeler ce que j'ai écit sur le présent forum le Mercredi 14 Juillet 2010 14:23:00

En voici un extrait en relation avec votre précédente entrée en matière de ce samedi 21 juillet 2012...
Mais prenez quand la peine d'en relire la totalité...

<< J'ai été persuadé pendant longtemps, que l'arrêt des blindés devant Dunkerque était lié à un problème de ravitaillement en carburant.... pourquoi...
Au début de l'année 1945, j'étais au 1er RIC à Toulouse et peu de temps avant que mes copains rejoignent le bataillon "Armagnac" à la Pointe de Grave, j'ai été le témoin d'un exposé sur les moyens de protection contre les engins blindés.
Assistaient à l'évènement, des témoins, pour la plupart gradés, qui ont vécu les combats dans la région de Dunkerque et bien évidemment il fût question de la situation de l'époque...
Une phrase est restée gravée dans ma mémoire << ils ont eu du pot que les chars manquent de carburant >> une fois... bon !... un autre témoignage dans le même sens... tiens,tiens ! et puis plus tard dans d'autres circonstances... comment ne pas être amené à réfléchir... c'est ce que j'ai fait et qui m'a permis, à la lumière d'autres témoignages, de faire la relation avec les difficultés que présentait le terrain...
Pour la petite histoire, j'ajoute qu'à mon grand désarroi, j'ai dû me contenter d'assister au départ de mes copains, restant tristement sur le quai de la gare.... je n'avais pas 17 ans... récusé! >>

Cette mise au point était nécessaire.
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par BRH » Mardi 24 Juillet 2012 11:50:37

Cher Roger,

Je vous ai adressé un MP samedi, mais vous ne l'avez pas consulté :

Envoyé le : Samedi 21 Juillet 2012 18:34:22
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par norodom » Mardi 24 Juillet 2012 14:15:05

Bonjour Bruno

Erreur réparée à l'instant même...
Je vous renouvelle ici toutes mes excuses, pour cette négligeance de ma part.

Trés cordialement,
Roger
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par BRH » Lundi 30 Juillet 2012 13:50:39

Nous commettons tous des négligences (on ne se souvient pas toujours de ce que l'on a écrit sur différents forums). Je redonne ceci :

Il est invraisemblable que le président Lebrun évoque officiellement une demande d'armistice sans être informé des offres de paix allemandes. Le 25 mai, les Allemands n'ont pas dépassé la Somme et l'Aisne et nos meilleures divisions sont encore au combat dans le Nord...

Page 4 du compte-rendu du Comité de guerre du samedi 25 mai 1940 :

"Le Président de la République intervient alors pour demander au général Weygand comment il voit la situation du gouvernement si les armées françaises venaient à être dispersées ou détruites. selon la possibilité envisagée par le général. Quelle serait alors la liberté d'examen du gouvernement français si des offres de paix venaient à lui être adressées ? Cette liberté d'examen ne serait-elle pas plus grande avant la destruction des armées françaises ? "Certes, continue le Président de la République, nous avons signé des engagements qui nous interdisent une paix séparée. Nous devons toutefois si l'Allemagne nous offrait des conditions relativement avantageuses les examiner de très près et délibérer à tête reposée."

Certes, le désastre est prévisible. Va-t-on abandonner le combat quand il reste 90 divisions, si c'est pour accepter l'annexion de l'Alsace-Lorraine, par exemple ? Aucun gouvernement ne pouvait envisager un tel défaitisme ! Il faut donc bien que les conditions apportées par Nordling aient été connues de Lebrun. Il était impératif pour Reynaud de les communiquer au chef de l'état. C'est la tradition parlementaire: le président de la République est informé des grandes questions et des grandes décisions diplomatiques et militaires.
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par BRH » Mardi 31 Juillet 2012 21:05:56

On trouvera ici une partie du texte des mémoires de Nordling (publiés en 2002 et préfacés par Henry Rousso). La rencontre entre Nordling et Reynaud, le 20 mai, mise en doute par certains hypercritiques, est absolument démontrée (cf. pp. 59, 60 et 61).

http://books.google.fr/books?id=_swN3Au ... ud&f=false
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par BRH » Mercredi 01 Août 2012 21:18:48

Cette mise à l'écran est due à Louis Martel, sur le forum ATF40. Nous l'en remercions vivement.

Image

Ce récit de Nordling est quelque peu différent de ce que Benoist-Méchin a publié. Toutefois, il a été rédigé, d'après sa famille, en 1946. Soit six ans après les faits...
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Jeudi 09 Août 2012 05:01:27

AVIS

http://www.mapiledelivres.org/dotclear/ ... .&pub=1#pr

Danielll , un véritable amateur d’histoire de la Seconde Guerre mondiale, capable d’en commenter les historiens avec pertinence, s’est trouvé à la croisée des chemins et n’a pas choisi le meilleur.

Mon interprétation diplomatique du Haltbefehl a été élaborée en 1991-92 en même temps que celle, voisine, de John Costello, pour succéder à des décennies de décalque des explications militaires contradictoires de Hitler lui-même, dans des ouvrages généraux (aucun spécialiste ne s’étant vraiment attaqué de front à la question). Elle a été considérablement approfondie et étayée en 1997 dans le livre La Ruse nazie, passé quasiment inaperçu. Elle commence à être prise en compte aujourd’hui, notamment sur les forums, à la suite d’un article en ligne paru début juillet 2012 dans le magazine Dernière Guerre mondiale . Certaines objections intéressantes sont formulées, qui me font repartir en chasse et notamment réfléchir aux conséquences, encore plus étendues que je ne le pensais, du remplacement de Chamberlain par Churchill. Les auteurs principaux en sont Didier Houliez http://atf40.forumculture.net/t5059-eni ... haltbefehl et "Le lecteur" lui-même, dans quelques passages de la discussion qu'on trouvera en cliquant sur le lien ci-dessus.

Qu’il laisse encombrer les commentaires par des flots de haine et le témoignage d’un acharnement désormais trans-forums, mais dérisoirement groupusculaire, ne me dérange pas, bien au contraire. Mais qu’il m’empêche d’en redresser les contre-vérités les plus flagrantes en décrétant "hors sujet" ces mises au point et pratique une censure même pas régulée par une charte, n’est plus tolérable.

Si le débat doit se poursuivre, en ce qui me concerne ce sera ailleurs, par exemple ici même, ou encore sur mon forum : http://www.delpla.org/forum/viewtopic.php?f=11&t=843 .
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Dimanche 12 Août 2012 08:20:47

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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Mardi 21 Août 2012 18:42:56

Une discussion intéressante sur PH http://www.passion-histoire.net/n/www/v ... =a&start=0 .

Narduccio tire d'un fait intéressant (les Allemands ne se sont pas précipités pour transférer leurs aérodromes au rythme de la marche des troupes) une conclusion que je conteste : cela tend à prouver qu'ils ne s'attendaient pas à avancer aussi vite.

Les généraux, peut-être. Hitler, non. Il visait une paix rapide, ne voulait pas s'incruster en France et surtout se gardait au maximum d'inquiéter l'Angleterre, qu'une progression des bases de la Luftwaffe aurait tout autant menacée que la France.
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Mercredi 22 Août 2012 10:06:45

Je voudrais à présent esquisser un bilan des réactions à mon analyse du Haltbefehl parue début juillet.

Elles se répartissent en deux espèces :

1) La réaction bête et méchante, à base d'attaques personnelles en meute dont la quintessence s'est concentrée ici : http://www.delpla.org/article.php3?id_article=554


2) La réaction positiviste, passant par une étude qui se veut rigoureuse des documents, de ce qu'ils apprennent et surtout n'apprennent pas : on la trouve essentiellement sur le forum ATF 40.

Si dans les deux cas, j'ai pu faire mon profit de remarques de détail, seule la deuxième approche me semble digne d'une réponse détaillée, que je vais esquisser ici, après avoir expliqué brièvement pourquoi je ne le fais pas, ou pas encore, directement sur le site en question.

Les conditions du débat permises par la modération dudit site, si elles semblent exclure la facilité du bannissement pour délit d'opinion (contrairement à Passion-Histoire, au "vert" et à aucun autre forum, en ce qui me concerne, à l’heure qu’il est), tendent tout de même fortement à favoriser les tenants d'un certain type de thèses, et j'ai besoin pour me lancer d'une atmosphère compréhensive. Plus précisément, les autorités locales font preuve de la plus grande intolérance devant toute considération d'ensemble sur le nazisme, ce qui est la plus sûre recette pour mal comprendre ses démarches, comme j'espère le démontrer ci-après.

Une brèche a été ouverte par John Costello en 1991 dans le béton des explications militaires, essentiellement au moyen d'un document unique en son genre et sur son sujet des archives de Paul Reynaud -dont l'unicité est à elle seule un fort indice d'ablation de toutes les pièces analogues, et d'oubli de celle-ci par les personnes qui ont effectué l’ablation.

Que nous apprend-il ? Que Göring, le 6 mai (date établie par ailleurs, sur pièces solides; et en tout cas avant le 10, jour du déclenchement de l'attaque -et de l'arrivée au pouvoir de Churchill), a, de la part de Hitler, entretenu Dahlerus de l'intention allemande de proposer une paix "généreuse" dans l'hypothèse où la guerre serait portée en Belgique et où l'armée allemande se rendrait maîtresse de la côte ainsi que de Calais. Le message est relayé auprès du gouvernement français par un autre Suédois, Nordling, qui vient en causer à Reynaud le 20 mai, en pleine débâcle impuissante des armées alliées piégées en Belgique.

Voilà qui s'inscrit à merveille dans ce que la démarche nazie a de plus essentiel. Elle consiste à faire contre la France une guerre courte avec l'objectif essentiel de ruiner sa puissance et son prestige militaires, de telle sorte qu'un tel allié ne soit plus utile pour l'Angleterre et que celle-ci soit placée devant un choix cornélien : soit continuer à empêcher l'Allemagne de régner sur l'Europe, et se donner une tâche au-dessus de ses moyens, conduisant à la perte de son empire et de son rang de puissance mondiale, soit agréer cette domination allemande et partager bon gré mal gré la vision raciste d'une "domination aryenne sur le monde", en gardant son empire et son rang de puissance mondiale d'une part, en participant activement ou passivement à l'étranglement de l'URSS et de son régime communiste, d'autre part.

Pour contester cette analyse, mes contradicteurs se lancent dans une démarche qu'on peut qualifier de positiviste, au sens péjoratif du terme, ou encore d'hypercritique :

-il pourrait s'agir d'une offre de paix faite à la seule France -ce qui est diamétralement contredit par le choix de Dahlerus, interlocuteur habituel de Halifax, comme dépositaire premier du message-, afin de la détacher de l'Angleterre, contre laquelle la Wehrmacht pourrait alors concentrer ses coups ;

-on n’a aucune preuve que l’Angleterre ait vu arriver les offres de Göring (ce que je conteste en faisant remarquer que son gouvernement discute le 23 mai au sujet d’une autre partie de la conversation Göring-Dahlerus du 6 ; et là, le fait que l’historien en est réduit à des bribes d’archives, après censure, est prouvé de la façon la plus claire).

-les victoires allemandes entre le 10 et le 24 mai, inattendues de l’assaillant lui-même (thèse de base d’un livre bien en cour et à mon avis fort trompeur de Karl-Heinz Friser La Légende de la guerre-éclair -1995), rendent caduques les intentions exprimées auparavant et amènent naturellement l’Allemagne à durcir ses conditions… tant et si bien qu’il n’y aurait besoin d’aucun document pour le prouver ! Mais tout de même une preuve négative : Hitler annonce par Göring, le 6, qu’il fera une offre lorsqu’il aura pris la côte belge et Calais, et il ne le fait pas. L’idée de conditions généreuses est donc fort dépassée.

Cela fait, à mon avis, bon marché de la substitution de Churchill à Chamberlain à la tête du gouvernement britannique, après la conversation Göring-Dahlerus, et du comportement dudit Churchill, tel qu’on peut le percevoir de l’autre côté du front. Surtout si on considère un précédent, celui de 1918, qui est dans tous les esprits, même ceux des nazis. L’Angleterre avait été fortement tentée d’abandonner toute considération de solidarité interalliée lorsque Ludendorff avait attaqué en mars, et de laisser se former une brèche entre ses troupes et les françaises, ce qui aurait ouvert largement la route de Paris. Et ce, alors même que les Français se battaient bien, depuis quatre ans. Là ils se débandent inexorablement, sans la moindre amorce sérieuse de réaction, depuis dix jours… et les troupes anglaises restent à leurs côtés, sans loucher le moins du monde vers les ports, ni mettre en défense les voies de repli vers ceux-ci. L’interprétation la plus probable, même si on ne partage pas la paranoïa hitlérienne et a fortiori si on la partage, est que l’antinazisme churchillien inspire un comportement aussi irrationnel : Winston veut avant tout que l’Angleterre, confite comme tout le monde dans l’immobilisme de la drôle de guerre, se batte enfin, et aucun message ne serait pire à cet égard qu’un retrait du continent –quelque risque que la situation fasse courir à la quasi- totalité de ses troupes terrestres.
Hitler a donc de quoi être perplexe. Il ne s’est sans doute guère affolé le soir du 10 en apprenant le changement de gouvernement à Londres : « cet ivrogne de Churchill » était au contraire une victime de choix pour le tour qu’il mitonnait à Sedan et, devant les conditions « généreuses » que Dahlerus ne manquerait pas de transmettre, devrait s’incliner aussi vite qu’un Chamberlain, ou serait chassé. Mais ensuite rien ne se passe comme escompté. Tandis qu’à Paris, tout montre déjà la résignation de Reynaud : là aussi Churchill, venu notoirement à Paris le 16 mai, semble être l’homme du ménage.

Voilà qui explique largement que Hitler ne fasse pas, une fois à Calais, l’offre prévue. Il doit à présent compter avec un « Juif » résolu à sa perte et suspect de voir clair dans son jeu. De ce point de vue, des conditions généreuses, soit discrètement réacheminées, soit publiques, pemettraient à Winston de dire à ses ministres comme à ses alliés : « Mais enfin vous ne voyez pas où est l’arnaque ? ». En revanche, ce dictateur à la fois triomphant et affolé a un intérêt évident à stopper son avant-garde à quelques pas de Dunkerque, dernière porte de sortie pour l’ennemi avant l’encerclement : c’est autant de chances laissées à sa manœuvre diplomatique, visant la paix immédiate, pour aboutir.

On sait par le journal de Hassell que les nazis envisageaient une paix en deux temps : avec la France groggy, puis avec l’Angleterre qui, quelques semaines plus tard, aurait constaté qu’elle n’avait rien de mieux à faire. Sur ce point, de toute évidence, la venue de Churchill au pouvoir et son comportement dans la quinzaine suivante changent la donne : la paix visée, lorsque les blindés s’arrêtent sur la ligne des canaux, est visiblement immédiate et générale, « sur le sable de Dunkerque », comme le dira plus tard le général Jodl.
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par BRH » Mercredi 22 Août 2012 20:44:36

Allez donc faire boire des ânes qui n'ont pas soif...
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