L'énigme du "Haltbefehl"...

Les Totalitarismes à l'assaut de l'Europe !

Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Mardi 02 Novembre 2010 18:11:06

que d'humour, cher Roger !

Mais il est peut-être un peu trop simple d'ironiser sur le fait qu'un journal de marche n'a pas à parler d'arrêt avant qu'il ne se produise, ou est souvent aussi crédible qu'un rapport sarkozyen sur une rixe banlieusarde.

Reprenons calmement l'hypothèse "Rundstedt", telle qu'elle s'est imposée (avec une quantité de variantes à donner des migraines aux lecteurs attentifs) chez la majorité des historiens quand ils eurent été obligés, à partir de 1947 et des premiers échos publics du journal de Halder, de remarquer cet arrêt, alors que nul ne l'avait fait auparavant -ce qui n'était pas fait pour les contraindre à le passer au crible de leurs cellules grises.

Rundstedt est censé s'être inquiété pour ses chars, soit (on entre ici dans la variété des variantes) parce qu'ils étaient à bout de souffle, soit parce que les lignes de ravitaillement s'étiraient dangereusement, soit parce que le terrain aux approches de Dunkerque était jugé par lui moins favorable, soit parce que l'ennemi était jugé capable de se manifester brusquement en tant que tel, après dix jours de quasi-passivité ou de retraite éperdue.

Si on admet une ou plusieurs de ces prémisses (combinées en quantités infiniment diverses dans les études en question), une remarque de bon sens tombe sous le mien et j'espère aussi sous le vôtre : n'était-ce pas autant de raisons de fermer la pince plus vite, plutôt que plus lentement... ou de la laisser indéfiniment ouverte ? Remarque qui vaut pour tel ou tel point de résistance rencontré le matin du 24 par l'avant-garde de Guderian (lesquels points fournissent aussi leur contingent d'explications militaires de l'arrêt, avec là encore des dosages infiniment variés, entre ceux qui n'en parlent guère et ceux qui en font LA cause de l'arrêt, comme notre cher Alain Adam sur mon forum : http://www.delpla.org/forum/viewtopic.p ... 27&start=0 ).

Mais surtout, dans le journal de marche du Hgr A comme dans ceux des unités subordonnées, on devrait voir se manifester toute la matinée du 24 des commandants de blindés affolés, disant qu'on va dans le mur et qu'il faut pour le moins lever le pied. Or rien, ce qui s'appelle rien, et au contraire, dès que l'ordre tombe à 12h 30, l'incrédulité puis la colère sont générales.

Si les documents n'établissent pas noir sur blanc les motivations de Hitler (ce qu'ils ne font presque pour aucune de ses décisions depuis 1933 et même, disons, depuis sa sortie de prison en 1924), en revanche ils établissent on peut plus clairement l'absence totale de motivation des officiers, y compris Rundstedt. S'il est vrai que ce dernier endosse l'ordre, conditionnellement et finalement pendant deux petits jours, la visite de Hitler lui est absolument indispensable pour le concevoir.

En d'autres termes, je constate que les zélateurs d'une explication militaire de l'ordre d'arrêt se fondent toujours sur des raisonnements généraux, dans une inattention très grande aux réalités du moment précis de l'ordre, et des heures immédiatement antérieures.
Francois Delpla
 
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par norodom » Mercredi 03 Novembre 2010 19:22:18

@F.Delpla

Je ne saisis pas très bien votre théorie selon laquelle les raisons qui ont pu être évoquées par von Rundstedt dans son rapport à Hitler à Charleville, auraient dû le pousser à "fermer la pince la pince plus vite, plutôt que plus lentement".....

Car les inquiétudes de Rundstedt sont un ensemble et non à admettre séparément (là je me réfère à l'énumération que vous en faites). Je note que vous n'écartez pas leur combinaison.

Vous citez:
"Mais surtout, dans le journal de marche du Hgr A comme dans ceux des unités subordonnées, on devrait voir se manifester toute la matinée du 24 des commandants de blindés affolés, disant qu'on va dans le mur et qu'il faut pour le moins lever le pied. Or rien, ce qui s'appelle rien, et au contraire, dès que l'ordre tombe à 12h 30, l'incrédulité puis la colère sont générales."

Je suis assez surpris que vous puissiez penser à un affolement de l'état-major allemand dû à quelques déconvenues rencontrées dans les jours ou les heures qui précédèrent l'évènement qui nous intéresse. La machine de guerre allemande était une puissante force mécanique prête à affronter l'adversaire dans toutes les conditions, favorables ou pas.... les parades à tout échec étaient programmées à l'avance... Dunkerque était un échec à prévoir... au pire !.

On sait comment les choses se sont passées mais on ignore comment elles auraient pu se dérouler à partir d'une stratégie différente.
Certes l'ordre d'arrêt des blindés fût déploré par plusieurs généraux...
Pour certains tel Halder, dès l'instant, pour d'autres à postériori... car à postériori, lorsque l'on sait que le succès ne fût pas celui attendu on peut comprendre les regrets.
A postériori, Guderian a déploré cet ordre qui n'avait pas permis de remporter une victoire totale, alors qu'au moment des faits, il s'était montré plus nuancé en hésitant à hasarder les blindés sur une zone peu favorable à leur évolution.
Une remarque intéressante... celle de Alfred Jodl :
"La guerre est gagnée, il n'y a plus qu'à la terminer. Inutile de sacrifier le moindre char, si la Luftwaffe peut le faire au plus juste prix"

Vous connaissez mon opinion, je n'y reviens pas....

Pour terminer je voudrais attirer l'attention sur le déroulement de l'avance des blindés en territoire soviétique à partir de juin 1941, laquelle se présenta sous la forme d'une "blitzkrieg"
Qu'il s'agisse de l'attaque de la poche de Minsk ou de celle de Smolensk et plus tard lors de la percée vers Léningrad... à chaque fois les blindés durent être stoppés en raison de circonstances à peu près identiques à celles qui furent rencontrées à Dunkerque.
Suivez bien la chronologie des combats lors de l'opération "Barberousse", vous verrez combien on y apprend bien des choses.
norodom
 
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Jeudi 04 Novembre 2010 07:44:47

je suis déçu !

vous ne voulez pas en venir au fait : le matin du 24, strictement personne ne songe à un arrêt ni n'en réclame.

Le caprice hitlérien de midi prend tout le monde à contre-pied. Ce qui invalide complètement toute explication militaire de celui-ci.
Francois Delpla
 
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par norodom » Jeudi 04 Novembre 2010 17:20:33

Mais... ne soyez pas déçu mon cher François car si vous m'avez lu très attentivement (et là c'est moi qui devrais être déçu), vous aurez compris mon analyse sur l'évènement du 24 mai, laquelle analyse ne peut rejoindre la vôtre qui présente une décision comme étant, selon votre citation:
"Le caprice hitlérien de midi prend tout le monde à contre-pied."

Soyons sérieux, nous ne jouons pas aux soldats de plomb là !...
Rétablissons l'ordre des choses_ l'ordre d'arrêt n'a pas été donné à 12 h 30 mais dans la soirée du 24.
Ce qui permet de penser que Hitler, qui selon Halder, était nerveux depuis plusieurs jours, tant sa propre réussite l'inquiétait, n'est pas allé à Charleville pour donner un ordre d'arrêt d'entrée de jeu, mais pour s'entretenir de la situation avec Rundstedt.

Personnellement, je m'appuie sur ce que j'ai appris depuis plusieurs décennies et que, grâce à vous, j'ai dû revoir dans le détail, pour écrire que je suis convaincu que la rencontre prit la forme d'une réunion d'état-major. L'inquiétude du Führer a été confortée par la suggestion de Rundstedt d'immobiliser les blindés sur l'Aa, et c'est à l'issue de cette concertation que l'ordre a été donné. Je crois à cette inquiétude, compte tenu du déroulement des combats au cours des 48 heures qui précédèrent.

Alors, lesquels exactement furent pris à contre-pied ?
Principalement, Franz Halder qui notait au matin du 26 que "ces ordres venus d'en haut sont parfaitement incompréhensibles" et que "les tanks sont arrêtés comme s'ils avaint pris racine."
Sachant qu'entre Hitler et Halder, ce n'était pas le parfait amour, même à l'époque, quit peut être surpris !.
Brauchitsch, sur l'intant, mais ne rechignant pas outre mesure par la suite...

Reste les autres dont le général W.K. Nehring rapporte dans son témoignage, que la plupart des généraux allemands de l'état-major n'avaient pas cru vraiment possible une action décisive des panzers.

Je reviens sur ce que vous me reprochez de ne pas admettre:
"le matin du 24, strictement personne ne songe à un arrêt ni n'en réclame."
Je ne crois pas à une argumentation suffisamment étoffée qui vous permette d'être aussi affirmatif, François... il n'y a pas lieu de s'attarder sur le "silence" des journaux de marche, avant la décision.
norodom
 
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Jeudi 04 Novembre 2010 18:08:46

norodom a écrit :Rétablissons l'ordre des choses_ l'ordre d'arrêt n'a pas été donné à 12 h 30 mais dans la soirée du 24.


je suis stupéfait.

S'agit-il d'une coquille pour "23" ?
Mais si nombre d'auteurs confondent (à leur grand tort) l'ordre de ralentissement (Aufschliessbefehl) du 23 et le Haltbefehl, personne ne le situe dans la soirée du 23.

Il me semble d'autre part que vous ne lisez guère de près les documents, du moins lorsque vous rédigez vos posts, et que nous discuterions plus utilement si vous en faisiez des citations plus précises.
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par norodom » Jeudi 04 Novembre 2010 21:05:14

Mais non!... François il ne s'agit pas d'une coquille pour le "23"

Pour en venir à l'essentiel de vos reproches, il ne fait aucun doute que vous n'avez pas compris le fondement de mes connaissances. Sur le sujet présent auquel, entre autres, je me suis intéressé de longue date, j'ai lu, et relu plusieurs thèses émanant d'auteurs divers (ne me demandez pas de vous les citer tous), parmi lesquelles j'ai du procéder à un tri sélectif.
A celà s'ajoutent les récits de témoins rencontrés, dont je dois avouer que sur ce sujet ils n'abondent pas, il s'agit bien plus de Dunkerque, mais j'en ai retenu l'essentiel.
Sur les témoignages écrits je me suis plus particulièrement intéressé à ceux des acteurs de l'époque bien plus que sur celui des historiens.
Je vais faire scandale si j'écris que j'ai lu des récits d'historiens tout à fait fantaisistes et d'ailleurs parfois contredits par d'autres... eh bien je l'écris!.
Ne me demandez pas là non plus de vous citer des exemples, je n'ai pas gardé trace de ce que j'ai jeté au pilon.
Puisqu'il vous en faut un, je vais choisir le témoignage du général Walter K. Nehring, car il s'agit du plus représentatif de la synthèse qu'il m'a été donné de faire au travers de toutes les données que j'ai consultées.
Voici ce que rapporte l'auteur:

<< L'avant-garde de la 1ère division de panzers atteignit l'Aa au sud de Gravelines, le soir du 23 mai. Le lendemain, l'attaque de Gravelines et du fort côtier de Philippe échoua_les français se défendirent courageusement_peut-être parceque Dunkerque constituait maintenant le seul lien possible entre l'armée assiégée et le monde extérieur. Du fait que les alentours de l'Aa fourmillent de fossés et de canaux et se prêtent par conséquent fort mal à une attaque d'infanterie ou de blindés, on ne put établir, pour servir de tremplin au combat décisif du lendemain matin, qu'une série de têtes de pont sur l'autre rive de l'Aa et nous subîmes d'importantes attaques aériennes ennemies.
Puis le soir du 24 mai, le corps reçut l'ordre de ne pas traverser l'Aa et de rester sur les positions déjà occupées. On ne justifia pas cette décision et nous supposâmes, Guderian et moi, que la capitulation des Alliés était imminente_opinion que confirmaient les instructions reçues de la Luftwaffe : "Dunkerque doit être laissé à la Luftwaffe. Si Calais n'est pas tombé le 26 mai, la Luftwaffe s'en chargera également"
Cette phrase concernant Calais nous vexa quelque peu, parce qu'elle sous-estimait les possibilités de notre 10ème division de panzers. Toutefois, il nous apparut que la Luftwaffe pouvait éviter l'effusion de sang, inciter l'ennnemi à capituler et donner un peu de répit à nos hommes......>>

NB: Il convient de rappeler que le général Nehring était le chef d'état-major de Guderian.

Si l'on consulte d'autres documentations plus récentes et je cite, entre autres, celle de Philippe Masson dans son "Histoire de l'armée allemande", on relève des différences avec le récit ci-dessus:
<<Le 24 mai , en fin de matinée, au moment où les blindés de Guderian établissent des têtes de pont sur l'Aa, à une vingtaine de kilomètres de Dunkerque, le dernier port encore disponible pour les Alliés, intervient l'ordre célèbre d'arrêt des Panzer donné par Hitler, en dépit des protestations véhémentes de Brauchitsch et de Hadler.>>... çà ne colle pas!
Dans la suite de son texte, Masson dont la notoriété est indiscutable, utilise le conditionnel dans l'évocation des différentes versions, ce qui conforte dans les esprits la notion d'énigme à laquelle on persiste à s'attacher.
Je vais être brutal, celà sent la copie "passe-partout"... n'en déplaise à qui voudra je reste fidèle au récit de Nehring, pour la raison que j'ai donnée.

Pour ce qui en est de mon aptitude à lire des documents et à fortiori lorsque je rédige mes messages, Dieu merci, la sénilité de l'esprit n'a pas encore fait son oeuvre !. Si c'était le cas, dans bien d'autres circonstances bien plus sérieuses, je pense que je m'en serais apperçu et que l'on m'y aurait aidé.
Je n'ai rien à ajouter...
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Jeudi 04 Novembre 2010 21:47:51

Toutes les autres sources parlent d'un ordre émis en milieu de journée.

Nehring doit vouloir parler d'un rappel un peu ferme reçu le soir. Qu'en pensez_vous ?
Francois Delpla
 
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par norodom » Samedi 06 Novembre 2010 17:46:44

Francois Delpla a écrit :Toutes les autres sources parlent d'un ordre émis en milieu de journée.

Nehring doit vouloir parler d'un rappel un peu ferme reçu le soir. Qu'en pensez_vous ?

Bonsoir François,

J'ai déserté mon clavier pendant toute la journée d'hier et ce matin, aussi acceptez mes excuses pour avoir tardé à vous répondre.

Vous connaissez ma conviction sur le présent sujet, aussi vous admettrez que j'ai, jusqu'à nos jours, considéré l'heure à laquelle fût donné l'ordre, comme venant au second plan.

Mais je dois reconnaître que votre question est très troublante, dans la mesure où elle me rappelle des questions que je m'étais posées par le passé...

Ce qui m'avait intrigué, au premier chef, est le fait que l'ordre transmis en fin de matinée du 24, ait été donné en clair. Vous aurez lu dans mon message du 15 octobre sur ce fil, que j'avais abordé l'idée d'une ruse nazie.
Et puis, cet ordre ne fût probablement pas le seul... mais je vais y venir...

Alors l'heure?... certains, dont vous-même, ont avancé 12 H 30, Churchill dans ses mémoires se montre très précis, 11 H 42....
Ce message médiatisé comme s'il s'était agi de l'appel du 24 mai sur Radio-Berlin et surtout parcequ'il a été émis en clair, a été précieusement cueilli dans un réseau d'échanges de messages transmis par le canal des transmissions radio.

J'ai appartenu et opéré moi même dans les transmissions et je suis en mesure de vous confirmer que sur un théâtre d'opérations, même lorsqu'il s'agit d'une seule opération ciblée, les échanges radiotélégraphiques en morse, ou téléphoniques ne manquent pas.
Par exemple, pour se rapprocher du cas présent, il est tout à fait normal de réclamer un arrêt de blindés ou de l'infanterie afin de permettre une intervention de l'aviation, ou de l'artillerie lourde.

La première question est :
A quelle unité de panzers s'adressait cet ordre et pourquoi a-t'il été transmis en clair?

Plusieurs corps d'armée blindée (deux en un premier temps, plus deux ensuite venant de Belgique, ce qui doit se vérifier) lesquels représentaient plusieurs divisions, ont participé aux opérations dans zone des ports de la Manche. Il n'y avait donc pas qu'une seule unité sur l'Aa...
L'ordre en clair (on admettra qu'il fût le seul de l'espèce) était peut-être un ordre d'arrêt adressé à une unité en action au cours d'une opération précise (je pense à l'attaque de Gravelines et du fort côtier de Philippe), c'est ce qu'il serait précieux de savoir.

Alors, comme il faut admettre que ce n'est pas Hitler qui les a tous donnés... comme il convient de rendre à César ce qui appartient à César... j'y viens...
Je rappelle ce que j'ai écrit sur ce fil le mercredi 14 juillet:

"Et Hitler dans tout çà ?
Initialement il semblerait (j'emploie le conditionnel) qu'il ne fût pas l'instigateur de l'arrêt, mais il devait trancher sur une divergeance dans les ordres donnés par von Brauchitsch et von Rundstedt et s'appuyant sur l'avis de ce dernier, sa décision finale n'avait plus à être discutée."


J'ajoute ceci (M de G - W.Churchill)
Brauchitsch avait transmis l'ordre à Halder de stopper les formations blindées et même de ramener en arrière celles qui étaient en pointe. Halder a refusé au nom de l'OKW, d'intervenir dans le mouvement du groupe d'armée Rundstedt, dont les ordres étaient sans ambiguïté d'empêcher l'ennemi d'atteindre la côte....... un ordre formel d'Hitler mit fin à la controverse...

Je dois vous faire l'aveu que rassembler les éléments des scénario évoqués de-ci, de-là, m'a laissé parfois perplexe.
Quoi qu'il en soit, il a existé au moins deux phases d'ordres... celle qui a provoqué le désaccord et la phase finale qui a tranché, celle d'Hitler.

Alors en supposant qu'il n'y ait eu que ces deux phases là...
la première à 12 H 30 (ou 11 H 42)...?
la deuxième ? dans la soirée comme l'a rapporté Nehring ?

Cordialement
norodom
 
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Samedi 06 Novembre 2010 19:23:08

L'ordre est bel et bien décidé par Hitler vers 12h 30, et transmis au cours de la demi-heure suivante, y compris en clair, à toutes les unités. Je rappelle que ce n'est pas, contrairement à une habitude de langage qui peut induire en erreur, un ordre d'arrêt à proprement parler, mais de non-dépassement d'une certaine ligne (dite "des canaux"). Les divergences d'une heure dans les proses anglaises, d'époque ou postérieures, s'expliquent par le décalage horaire.
Francois Delpla
 
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par norodom » Samedi 06 Novembre 2010 21:22:51

Puisque vous le dites.... mais encore une fois, pour moi ce fait est tout à fait secondaire...
Par contre je souhaiterais que vous m'éclairiez sur la relation Jacobsen-Burdick-Halder.
Voir mon message du Vendredi 15 Octobre 2010 14:54... Merci.
norodom
 
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Dimanche 07 Novembre 2010 04:30:28

Laissons tomber Burdick, simple collaborateur de Jacobsen dans l'édition du journal de Halder.
Halder a deux têtes de turc parmi ses collègues généraux, Rundstedt et Jodl.
Il a eu, notamment, du retard à l'allumage pour penser que le plan de Sedan pouvait marcher.
Ensuite, vers le 17 mai, comme il marchait fort bien, il s'emballe et veut diviser les blindés en deux, la moitié fonçant vers Paris et le reste continuant vers la Basse-Somme.

Or Jacobsen lui donne raison dans ces deux occasions et les archives montrent que l'influence du vieux général sur son analyse a été très directe, entraînant une paralysie de sa réflexion.

Il ne produit, notamment, aucune critique du livre très trompeur de Halder Hitler als Feldherr (1949), matrice des analyses de Hitler comme un chef militaire brouillon et fantasque.
Francois Delpla
 
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Dimanche 07 Novembre 2010 18:15:35

Je voudrais encore rappeler que faire de l'histoire, c'est proposer des solutions complètes... ou s'avouer impuissant à le faire.

Dans cette affaire, j'affronte (plus ou moins rudement suivant leurs moeurs) des gens qui ne s'avouent pas du tout impuissants mais (à l'instar de Norodom) sont tout à fait persuadés que l'arrêt répond à une logique militaire, et trouvent étrange qu'on puisse envisager autre chose.

Je rappelle brièvement mon explication du Haltbefehl devant Dunkerque : l'auteur de Mein Kampf cherche à harmoniser une offensive militaire très réussie (je m'inscris en faux contre les théories encore florissantes, et sans doute même encore majoritaires, suivant lesquelles il est surpris par la rapidité et l'ampleur de sa victoire) et une offensive diplomatique qui semble marquer le pas, en raison de la venue de Churchill au pouvoir, par une déveine inouïe, quelques heures après le début du mouvement militaire.

Hitler a fait une apparente entorse à Mein Kampf en faisant la guerre (un tout petit peu) à l'Angleterre, il entend y mettre fin au plus vite par une paix générale et "généreuse" sur le sable de Dunkerque (expression de Jodl).

Ceux qui ne sont pas d'accord sont priés de dire ce qu'à leur avis Hitler voudrait faire, pour éviter l'enlisement d'une guerre à l'ouest contraire à tous ses plans et à toute son idéologie. Je dis bien : voudrait faire et non aurait intérêt, d'après eux, à faire. (Coffrer les Anglais pour avoir une monnaie d'échange, merci, déjà dit sur 100 forums, ce n'est pas ce qu'il fait donc cela n'entre pas en ligne de compte).
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par norodom » Lundi 08 Novembre 2010 17:26:06

Francois Delpla a écrit :Je voudrais encore rappeler que faire de l'histoire, c'est proposer des solutions complètes...

C'est le premier cas
Francois Delpla a écrit :... ou s'avouer impuissant à le faire.

C'est le deuxième

Dans lequel vous situez-vous?

Puisque nous en sommes au stade des rappels, je veux insister sur le fait qu'il n'appartient à aucun d'entre-nous de faire de l'histoire. L'histoire, qui s'appuie sur les faits est écrite et libre à qui veut, de la commenter et à fortiori de l'enseigner.

La vocation d'un forum (ou d'une tribune) est de permettre la confrontation d'idées, d'opinions et même de certitudes. Celà peut contribuer à lever le voile sur des faits avérés dont les causes ont donné suite à des interrogations.

Apparemment vous me classez dans la catégorie des gens "tout à fait persuadés que l'arrêt répond à une logique militaire, et trouvent étrange qu'on puisse envisager autre chose."

Je ne trouve rien d'étrange, si ce n'est l'évidence que les avis contraires au vôtres vous dérangent.

Je ne réfute pas votre thèse diplomatique, d'autant que je ne possède pas les preuves qui pourraient me le permettre. Je constate que les arguments avancés pour l'étayer ne font pas le poids face à la logique sur laquelle s'appuie la thèse stratégique et militaire.
Vient un moment où il y a un choix à faire, le mien étant fait de longue date.
Il n'est toutefois pas superflu de s'intéresser à des explications allant dans un sens différent.
Sait-on jamais?.. à l'impossible nul n'est tenu. Pour l'instant je ne vois rien à l'horizon.
Il m'apparaît qu'à ce stade de nos échanges sur le sujet présent, nous avons atteint un "statu quo" qui n'engage guère à la poursuite de la discussion...
Nous ne sommes pas sur l'Aa, mais j'arrête mon char... Désolé !.
norodom
 
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Lundi 08 Novembre 2010 17:46:03

norodom a écrit :
Francois Delpla a écrit :Je voudrais encore rappeler que faire de l'histoire, c'est proposer des solutions complètes...

C'est le premier cas
Francois Delpla a écrit :... ou s'avouer impuissant à le faire.

C'est le deuxième

Dans lequel vous situez-vous?



Il me semble que je propose une solution complète : Hitler n'a engagé cette guerre que pour la finir au plus vite, une fois l'armée française écrasée sans perspective de revanche, pour ravir l'Ukraine à Staline après une pause plus ou moins longue. Cela colle et avec ses actes, et avec ses projets connus, et avec son idéologie.
L'arrivée de Churchill au 10 Downing Street est la déviation infime qui fait foirer une fusée à la trajectoire très bien calculée et à l'envol très réussi.
Mais Hitler est aussi quelqu'un qui ne s'avoue pas facilement vaincu.
Pour l'instant rien n'urge plus que de crééer une pagaille monstre au sein du cabinet britannique et d'obliger les gentlemen à faire leurs comptes, en ne consommant pas tout de suite l'écrasement de la BEF.
Il y a eu dans la hiérarchie militaire allemande des angoisses et des râleries devant l'audace des plans et des mouvements. Mais plus rien de cette sorte dans les heures précédant l'arrêt. Donc, pas la moindre justification militaire concrète, et au contraire une protestation unanime (à un Rundstedt, acheté par Hitler, près, et seulement pendant 48h) des spécialistes contre un ordre militairement absurde.
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Re: L'énigme du "Haltbefehl"...

Message par Francois Delpla » Dimanche 15 Juillet 2012 07:40:22

à la suite de la publication en ligne de mon mémoire d'habilitation, la discussion rebondit sur ATF 40 :
http://atf40.forumculture.net/t5006p15- ... t-en-ligne
Francois Delpla
 
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