La bataille de la Seine

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La bataille de la Seine

Message par BRH » Mardi 31 Juillet 2012 17:23:46

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LA BATAILLE DE LA SEINE
Conférence de M. Buffetaut Yves
Docteur en histoire
Le 29 mars 2008

Après la rupture du front de la Somme, les 5 et 6 juin 1940, la dernière phase de la bataille de France s’engage. Pour les Alliés, il devient essentiel de se rétablir sur la Seine pour tenter d’arrêter les Allemands. C’est pourquoi une armée est créée de toutes pièces pour tenir le front de la Basse Seine. Ses effectifs sont disparates et ne sont pas encore tous en place alors que les Allemands se présentent dès le 10 juin au nord du fleuve et le traversent dans la foulée
dans le secteur de Portejoie, Saint-Pierre-du-Vauvray et Venables. Rapidement la ville de Louviers, défendue par des troupes françaises et britanniques, se trouve en première ligne.
Monsieur Buffetaut, éditeur et auteur de très nombreux livres et articles sur les deux guerresmondiales retracera dans sa conférence cette bataille de la Seine. Nous allons reproduire ci-après
un texte de Monsieur Buffetaut paru dans le numéro spécial N° 64 de MILITARIA.

La rupture définitive de la ligne Weygand sur toute son étendue entraîne un déferlement des armées allemandes sur le territoire français. Le franchissement de la Seine, dans la foulée, ne laisse augurer aucun sursis. Est-il encore possible de sauver quelque chose ?

Le 9 juin 1940 au soir, la 10e armée du général Robert Altmayer reçoit l’ordre de tenir la Basse Seine, de Vernon exclu à son embouchure. Il s’agit en fait d’une deuxième 10e armée, puisque la première a été démembrée la veille et l’avant-veille, avec d’une part l’encerclement du 9e corps à Saint-Valéry-en-Caux, d’une part avec le rattachement des 10e et 25e corps à l’Armée de Paris. Altmayer installe son PC à Vaucresson, à six kilomètres à l’ouest du pont de Saint-Cloud. Pour le moment, il ne dispose d’aucun élément, à part son QG. Il va pouvoir compter sur les effectifs de la 3e région militaire du général Duffour, du 3e corps du général de la Laurencie et du corps de cavalerie motorisé Langlois.

Altmayer s’inquiète par ailleurs de la présence d’autres troupes françaises dans son secteur, ainsi qu’il l’écrit dans un livre publié juste après la guerre, La Xe armée : «Pendant l’après-midi du 9 juin, le général Petit, directeur des étapes de l’armée, venu à Vaucresson, fit connaître la présence dans la région d’Evreux de plusieurs dizaines de milliers de rescapés de Dunkerque, arrivés d’Angleterre, après y avoir été désarmés, mais encadrés. Je dis au général Petit de transmettre à leur chef l’ordre du commandant de l’armée, d’aller à 50 kilomètres au moins d’Evreux, à l’ouest de la Touques, pour qu’il n’y ait pas le moindre contact entre eux et les troupes de la 10e armée et le moins possible avec les services de l’armée. J’appris le lendemain qu’il s’agissait d’effectifs destinés à renforcer le 16e corps d’armée ».

On le constate, le général Altmayer craint un effet de contagion de la part d’unités démoralisées par la bataille des Flandres et la difficile évacuation de Dunkerque.

Le 10 juin, Altmayer et son état-major réduit quitte Vaucresson pour Saint-Aubin d’Écrosville, à côté du Neubourg, dans le département de l’Eure. Partis à 2 heures du matin de Vaucresson, ils n’arrivent à Saint-Aubin, via Versailles, Dreux et Conches, qu’à 8 heures, en raison de l’encombrement des routes par les civils en exode. Ils s’installent dans le beau château Louis XIII, où se trouve déjà le général Duffour, chassé de Rouen par l’arrivée des Panzer le 8 juin. Ils sont rejoints par les généraux de la Laurencie et Langlois, qui font part des effectifs dont ils disposent. « Le compte-rendu fut décevant » écrit Altmayer.

Les effectifs de la 10e armée :

Concrètement, le général Duffour dispose, dans ce qui va prendre le nom de corps d’armée D, des éléments suivants :
- 236e division légère d’infanterie, du général Deligne, dont ne sont arrivés qu’un régiment d’infanterie et un groupe de 75 ;
- des restes de la 17e division légère d’infanterie du général Darde, c’est-à-dire d’un état-major, d’un régiment d’infanterie et de sept canons ;
- de quatre groupes francs de cavalerie motorisée. Chacun est théoriquement composé de la sorte : un capitaine, quatre automitrailleuses, un peloton de motocyclistes, deux groupes de mitrailleuses, deux canons de 25 mm, deux canons de 47 mm ;
- d’un bataillon du 131e RI ;
- de deux bataillons de dépôt ;
- d’un bataillon de douaniers ;
- de deux groupes de 75 et deux groupes de 220 ;
- de la « division » britannique Bauman, constituée en fait de trois bataillons formés avec du personnel des services de la 51 st Highland Division (encerclée), de la base britannique du Havre et du service des communications.

Le général de la Laurencie, avec son 3e corps d’armée, n’est pas beaucoup plus riche :
- la 237e division légère d’infanterie (général François) dont ne sont arrivés, le 10, qu’un régiment d’infanterie, deux groupes de 75, un groupe de reconnaissance de division (GRDI) réduit ;
- la 3e division légère de cavalerie du général Petiet, venant de la Somme ;
- quelques pelotons de chars légers de la 1st Armoured Division (général Evans), venant de la Somme ;
- un bataillon de pionniers venant de la première 10e armée.

Comme le note Altmayer, «ces deux pseudo corps d’armée n’ont pas d’artillerie de corps nid’autres éléments organiques de corps d’armée. »

Le corps de cavalerie motorisée est, au moins sur le papier, plus solide :
- 1ère DLM du général de Beauchesne ;
- 2ème DLM du général Bougrain, qui ne rejoindra en fait jamais la 10e armée ;
- 3ème DLM du général Testard ;
- l’artillerie du corps d’armée.
Il faut aussi ajouter des unités d’artillerie d’armée, un régiment de 155 long et un groupe de 220, sous les ordres du général Peillon.
Ces DLM, nous allons le voir, sont trompeuses, car elles n’ont pas les effectifs des unités de même nom engagées au début de l’offensive allemande. Ce sont des unités reconstituées.

La valeur des unités vue par Altmayer
Rien ne vaut la description par le général Altmayer, commandant de la 10e armée, des troupes sous ses ordres.
« Les divisions légères d’infanterie (DLI), de récente formation, n’avaient chacune que deux régiments d’infanterie (au lieu de trois) et deux ou trois groupes d’artillerie, deux groupes de 75 et un de 155 C (au lieu de cinq). Elles n’étaient pas « légères » par la nature de leurs éléments ; elles étaient « petites » ; c’étaient des « brigades mixtes ».
Le bataillon de pionniers fut une très bonne troupe.
Le bataillon de douaniers, déjà en place de Rouen à Harfleur, n’était pas préparé à des
opérations tactiques.
Les bataillons de dépôt étaient, par leur constitution, de valeur moyenne.
Le groupement Bauman avait une valeur de combat médiocre ; ses unités de troupes de communication persisteront à se singulariser par une manie de destruction de ponts à tort et à travers, et sans se soucier des unités françaises qui seraient encore entre l’ennemi et eux.
Le moral et l’encadrement de la 3e DLC (général Petiet) qui venait de combattre au sud de la Somme étaient très bons ; mais elle était déjà usée étant, sans aucun répit, au combat ou en marche depuis le 10 mai. Ses unités motorisées sont très réduites à la date du 10 juin.
Au corps de cavalerie, de formation récente avec du personnel et du matériel de bonne qualité, les DLM n’étaient pas des « divisions » puisqu’elles n’avaient pas d’artillerie organique. Chacune d’elle comprenait :
- Un régiment de découverte de cinq automitrailleuses de découverte et deux escadrons de motocyclistes ;
- Un régiment de chars d’un escadron de 12 Somua et d’un escadron de 12 chars Hotchkiss H-39 ;
- Et un régiment de dragons portés à deux bataillons.
L’artillerie du CC n’avait qu’un groupe de trois batteries de 75 et, en antichars, une batterie de 47 et une batterie de 25. De l’avis même du commandant du corps de cavalerie, chacune de ses divisions n’était guère comparable qu’à un fort groupe de reconnaissance de corps d’armée. »
Pour tout arranger, lors du passage des grandes unités sur le terrain de l’Armée de Paris, celle-ci se sert au passage, retenant notamment un des trois bataillons de la 237e DLI et la 2e DLM. Altmayer se plaint aussitôt au général Hering, qui libère le bataillon d’infanterie… mais garde la DLM.
Avec les éléments dont il dispose, le général Altmayer va devoir défendre un front d’une centaine de kilomètres, de la mer à Paris. Ceci serait possible avec trois vrais corps d’armée, disposant en tout de six à huit vraies divisions. Nous sommes donc loin du compte.
En face, les Allemands disposent, ou disposeront, car certaines unités sont occupées à réduire la résistance du 8e corps à Saint-Valéry, des unités suivantes :
- le 15.Armee Korps, avec les 5. Et 7. Panzerdivisionen ;
- le 2.Armee Korps, qui attaquera sur l’axe Elbeuf, Le Neubourg, Laigle, avec les 32. Et 12. Infanterie Divisionen en premier échelon et la 31. I.D. en réserve ;
- le 38.Armee Korps, sur l’axe Gaillon, est d’Evreux, Damville, avec les 6. 46. Et 27. Infanterie Divisionen.

Ceci représente donc trois corps d’armée, deux divisions blindées et sept divisions d’infanterie. L’infériorité numérique française est donc complète. En outre, contrairement à ce
qui avait pu se passer sur la Somme, les Français ne disposent d’aucun répit pour mettre en place une ligne défensive sur la Seine. Une seule consigne : « tenir »

Le général Altmayer dicte ses ordres immédiatement à ses trois généraux. Il résume d’abord la mission de l’armée :
« La mission de l’armée est d’interdire à l’ennemi de franchir la Seine ou de déboucher des points de la rive gauche où il a déjà pris pied si des contre-attaques ne réussissent pas à le refouler sur la rive droite.
Une seule consigne générale : « tenir ».
Nos effectifs ne permettent pas d’envisager deux positions d’armée. La ligne principale de résistance dominera la Seine et ses isthmes. »
Une position d’arrêt est placée légèrement derrière la Seine. D’ouest en est, elle passe par les hauteurs de la forêt de Bretonne, le secteur de Bourgtheroulde, le bord du plateau du Neubourg vers Louviers, les deux rives de l’Iton, et enfin l’Eure, de Heudreville à Pacy.

Altmayer installe son PC à Orbec, à la limite du Calvados et de l’Eure. Il dispose ainsi ses trois corps d’armée :
- le corps d’armée D : de l’embouchure de la Seine à Pont-de-l’Arche, afin de protéger Pont-L’Evêque, Lisieux et Bernay. Son PC est à Garcis, près de Bernay.
- le 3e corps : de Pont-de-l’Arche à Vernon (exclu) avec occupation solide des carrefours de Louviers, Gaillon, Autheuil, Evreux. Le PC est à Aviron.
- le corps de cavalerie est placé en réserve d’armée avec une division à Brionne, sur la Risle et l’autre dans la région de Beaumont-le-Roger, Conches. Le PC du corps de cavalerie est installé dans le château de Broglie.

Altmayer donne aussi des axes de repli, confidentiels, qui ne figurent même pas dans les ordres d’état-major pour éviter de donner aux troupes une idée de repli.
Pour le CA D, l’axe est Rouen, Bernay, forêt d’Écouves, à l’ouest de Sées. Ce massif forestier, le point culminant du massif armoricain, constitue une véritable barrière difficilement franchissable.
L’axe du 3e corps est jalonné par les villes d’Evreux, Verneuil, Mortagne-au-Perche. Il s’agit de rester en contact avec l’Armée de Paris. Notons que ces axes ouvrent une brèche énorme le long de la mer, en direction de Caen et Cherbourg.

Les Allemands ont déjà franchi la Seine
A peine a-t-il donné ses ordres que le général Altmayer apprend de l’état-major du général Duffour que les Allemands ont franchi la Seine à l’est de Louviers, dans le secteur de Portejoie, Saint-Pierre-du-Vauvray, Venables.
« Or, poursuit Altmayer, aucune unité importante de l’armée n’était déjà, au complet, en sa place de combat. L’exécution de la mission d’interdire à l’ennemi le passage de la Seine en aval de Vernon commençait mal ! Je devais, dès le début, penser à employer une partie de ma réserve d’armée, dès qu’elle serait arrivée, pour aider le 3e corps d’armée à régler l’affaire de Louviers. Quand je quittais Saint-Aubin, l’état-major Duffour se préparait à l’évacuer. »
Presque tous les ponts ont sauté….
André Soubiran est médecin au 3e régiment d’automitrailleuses, une unité de la 3e DLC. Il décrit un peloton de motocyclistes arrivé depuis peu sur la Seine :
« Des agents de liaison, huileux, poussiéreux, arrivent sans cesse. Ils posent leur moto et s’avancent avec une démarche vacillante d’ivrogne, avec des gestes de pantin. Quand ils enlèvent les lunettes qui mangent leur visage, on leur voit un masque dur, où se lit le combat, un visage intérieur qui est entre la vie et la mort. Ce sont les mêmes que j’ai vu partir, il y a un mois, avec de puissantes machines, à l’assaut des barrières luxembourgeoises. Un mois seulement ! Combien déjà sont morts, et, ceux qui restent, comme ils sont vieillis ! La peau colle à leurs pommettes, durcie, tannée, hâlée sauf à l’endroit où les grosses lunettes ont laissé un étrange cerne pâle. Dans leurs yeux, il n’y a plus la joie. Pourtant, ils brillent
toujours d’une flamme ardente. Leurs gestes sont là, mais ils se sont dépouillés, aguerris, ils n’ont plus que des réflexes utiles. Je ne regarde plus leurs uniformes déchirés, les cuirs brûlés, les draps déteints, toute cette détresse des choses qui se voit aussi sur leurs machines, couvertes de boue, disloquées, branlantes et qu’ils n’ont plus le temps d’entretenir. »
Soubiran raconte aussi comment les Allemands ont franchi la Seine et se sont heurtés aux Français :
« Avec quelques centaines d’hommes, la division doit tenir d’Elbeuf à Vernon, le long d’une ligne d’eau sinueuse, encombrée d’îles, aux rives couvertes de taillis. Hier, les Allemand ont traversé la Seine en canaux pneumatiques et en radeaux. Ils ont poussé vers Saint-Cyr-du-Vaudreuil et Saint-Étienne-du-Vauvray, où les chars de Madeline sont arrivés à propos pour soutenir les dragons portés, réduits à une centaine de combattants pour six kilomètres. Maugey et Depret les ont aussi aidés, sur l’éperon de terre entre Seine et Eure et, vers le soir, sur les ponts de l’Eure. Toute la nuit s’est passée au contact, dans le brouillard (c’étaient vraiment les stocks qui brûlaient), avec d’incessants accrochages qui ont peuplé ma nuit de garde de mitraillades proches. Sans la résistance des dragons portés et l’agressivité des chars qui, à la fin de la journée, avaient sur leurs blindages neufs plus de vingt points d’impact, nos craintes nocturnes risquaient fort de devenir une réalité. La brigade anglaise a disparu dans la nuit. ».

Soubiran n’est pas très juste avec les Britanniques. Il suffit de visiter les différents cimetières des villages voisins de la Seine pour constater que leurs pertes ont été sensibles et semble-t-il égales à celles des Français. Le 11 juin, la pression allemande redouble, afin d’étendre la tête de pont qui existe entre Seine et Eure. Le front allié n’est tenu que par des éléments de la 3e DLC et des troupes britanniques, appartenant soit à la division Bauman, soit à la 1st
Armoured Division. La bataille est acharnée, ainsi que le raconte André Soubiran :
« En fin de journée (du 11 juin), l’ordre de repli arrive. Le groupement, réduit à six chars, deux blindés de découverte et moins de quatre-vingts dragons, a tenu un front de six kilomètres. Pourtant, l’ennemi, malgré ses efforts n’a pas marqué de progrès sensibles. Le point d’appui de Saint-Cyr du Vaudreuil a été tenu. A Louviers, des combats acharnés se sont livrés dans le quartier de la gare avec l’appui incessant de Maugey et de Depret. Maugey a même poussé audacieusement jusqu’à Acquigny en remontant l’Eure et de là, a fait une pointe jusqu’à Heudebouville, jusqu’à la Seine. Là, il a pris avec les Allemands un contact brutal et leur à causé des pertes qui ont soulagé les défenseurs de Louviers.
Au nord de Louviers, à Incarville, une contre-attaque appuyée par les chars de Depret a rétabli la situation. Cette nuit, aux Damps, l’ennemi s’est infiltré grâce au terrain boisé et marécageux, le peloton Genevray, envoyé pour arrêter la progression, a trouvé là un pont imparfaitement détruit par le génie. Genevray, encore un tout jeune sous-lieutenant, a décidé de faire sauter le pont complètement, mais d’en face les Allemands guettaient. A trois heures
du matin, il a fait mettre un bateau à l’eau et, avec deux hommes, Degois et Gauthier, il s’est approché du pilier, y a fixé quatre mines de cavalerie pendant, que d’en face, on essayait de l’atteindre. A 4 h 30, le pilier a sauté, mais le pont, soutenu par l’autre pile, restait encore debout et c’est en plein jour, sous le feu incessant de l’autre rive, qu’ils parvinrent à fixer une nouvelle charge au deuxième pilier et à le faire sauter à 5 h 30. Le pont s’est écroulé sur
plusieurs mètres. Les chars allemands ne passeront pas aux Damps aujourd’hui. Le 131e régiment d’infanterie vient nous relever au 3ème jour de cette bataille. »

Plus loin dans son livre, J’étais médecin avec les chars, Soubiran donne d’autres détails sur les combats du 11 juin, notamment près de Venables. Il raconte ainsi un dialogue entre lui-même et le lieutenant Hallard, « le seul polytechnicien de la cavalerie française », en appui
avec son peloton auprès du 6e Dragons et de la brigade à cheval : « - Tu vas voir le capitaine Weygand ?
- Oui, dès mon retour d’évacuation.
- Tu lui diras qu’hier, dans la boucle des Andelys, en fonçant dans le brouillard pourreprendre Venables, la voiture de Lebeschu a été touchée par le premier coup parti du village et a pris feu tout de suite. Tu lui diras que le maréchal des logis Lebeschu, le brigadier Gerbault, les automitrailleurs Baudin et Hallman sont morts bravement. Tu lui diras aussi que le peloton de Parseval a été détruit, que le peloton Loffroy a disparu, que Boutry et ses motards sont perdus dans la nature et qu’il ne reste plus que ma blindée. »

Avec les artilleurs
Le 1er groupe du 72e régiment d’artillerie, qui appartient lui aussi à la 3e DLC, tient le secteur de Pont-de-l’Arche. Le lieutenant Maurice a rédigé l’historique de son unité. Celui-ci parle endétail des combats dans le Nord et sur la Somme, beaucoup moins de la bataille de Normandie. Il est vrai que le groupe tire peu :
« 18 jours (du 8 au 25 juin) physiquement épuisants pendant lesquels on tira peu car, à la vitesse où se déroule cette guerre, nos moyens de liaison sont totalement déficients. Cependant, à Pont-de-l’Arche, à quelques kilomètres au sud de la Seine, nous resterons deux jours en position pendant lesquels nous exécuterons des tirs sur la rive nord. Une lueur d’espoir viendra alors nous visiter. On nous a lu l’ordre du jour du général Weygand du 9 juin : « Tenez 24 h de plus et la France sera sauvée. ». Stupéfaits par cette déroute à laquelle nous n’arrivons pas à croire, toujours prêts à accepter les miracles surtout s’ils comblent les voeux de nos coeurs, nous croyons encore une fois à l’impossible redressement. Hélas, le 11 juin à 10 heures, arrive l’ordre de repli. De Montaure, nous mettons à nouveau en batterie, mais cette fois, face à l’est ! Nous tirons sur Louviers. Les Allemands ont donc franchi le fleuve. Cette fois, tout est bien fini. »
Cette impression de découragement frappe aussi les hommes de la 3e DLC, même si elle n’est que fugace. Nous retrouvons Soubiran :
« Vers minuit, la relève est terminée. Les fantassins sont en place. Mais personne ne se fait guère d’illusion. Jusqu’à la Seine, chacun était optimiste et les plus hébétés gardaient confiance. Trois jours de combat, la Seine traversée, l’Eure n’est même plus un obstacle ! Une seule coupure possible maintenant, la Loire, la lointaine Loire. Et l’espoir renaît ! A l’homme, il faut toujours des mirages. »

Les deux témoignages que nous avons cités donnent une excellente indication de la situation vue par les combattants et de leur état d’esprit. Elle ne donne pas de vision d’ensemble de la situation. Voici donc un aperçu général de la journée du 11 juin sur le front de la Seine.
A droite du front, le corps de cavalerie peine à endiguer les Allemands qui ont franchi la Seine à Vernon, dans le secteur de l’Armée de Paris. Il s’accroche à la forêt de Bizy et tient encore la lisière nord de la forêt de Pacy et les hauteurs de la rive droite de l’Eure. Cependant, en fin de journée, les Allemands enfoncent un coin dans les lignes françaises dans le secteur de Chambray-sur-Eure, en direction d’Evreux.
Au centre, la poussée allemande est freinée entre Seine et Eure, principalement à Autheuil et sur les hauteurs nord et sud de Saint-Vigor, c’est-à-dire au passage de l’Eure par la route Gaillon-Évreux. La brigade Maillard, de la 3e DLC, s’illustre particulièrement. Elle inflige de lourdes pertes à l’assaillant dans la vallée de l’Eure, sans céder un pouce de terrain, mais en souffrant elle aussi beaucoup, puisqu’elle perd au feu le tiers de son effectif engagé. Elle ne se replie que sur ordre, lorsqu’elle est débordée à la fois à droite et à gauche. Les Allemands atteignent alors la rive gauche de l’Eure.
A la gauche du 3e corps d’armée, le front est reporté à l’ouest de Louviers, comme nous l’avons vu, sur le plateau du Neubourg. Comme l’écrit le général Altmayer, « probablement, la situation eût été différente si tout le corps de cavalerie avait été à sa place de réserve d’armée, disponible pour une contre-attaque ou pour un retour offensif entre Seine et Eure. »
Enfin, le front est resté intact, parce que non attaqué, en aval d’Elbeuf et jusqu’à l’embouchure de la Seine. Il est vrai que dans ce secteur, le fleuve est beaucoup plus large et soumis à l’influence de la marée.
Notons que le même 11 juin, Altmayer apprend que le groupement Ihler est complètement encerclé dans Saint-Valéry-en-Caux et que sa situation est désespérée, les bateaux prévus pour aller le rembarquer ne pouvant pas intervenir.
Seule bonne nouvelle : l’arrivée de la 52nd Infantry Division, débarquée à Cherbourg, est annoncée. Elle devra se placer à droite de l’armée et sera incorporée au 3e corps d’armée.

Les combats du 12 juin
Au matin du 12, le front n’a pas bougé en aval d’Elbeuf, les troupes tenant les forêts de Brotonne et de la Londe. D’Elbeuf, le front passe par Montaure, au nord-ouest de Louviers et serpente ensuite à environ deux ou trois kilomètres à l’ouest de l’Eure. La ville de Louviers, bombardée par la Luftwaffe le 11 juin au soir, a brûlé toute la journée. Cette attaque aérienne n’était pas nécessaire, car les troupes alliées étaient déjà en plein repli quand elle a eu lieu. En outre, d’après les témoignages de certains vieux Lovériens, les Allemands auraient aussi incendié volontairement certaines maisons en entrant dans la ville. En tout cas, le centre-ville a été réduit en cendres, ce qui est d’autant plus regrettable que de nombreuses maisons médiévales de toute beauté ont ainsi disparu. Il est plus que probable queles Allemands se sont vengés de la résistance farouche de la 3e DLC devant la ville.

Le général Altmayer, sachant pertinemment que le front ne peut résister longtemps sur le plateau du Neubourg, forme une seconde ligne sur la basse Risle, qui forme une nouvelle coupure. Le secteur de Pont-Audemer est tenu par les douaniers et le bataillon de la 131e DLI, tandis que de Montfort-sur-Risle au Neubourg, ce sont les Britanniques, avec un bataillon de la division Bauman, avec un GRDI rescapé de Dunkerque et un bataillon de la 17e divisiond’infanterie.
Le gros du corps de cavalerie, qui devrait normalement servir de réserve d’armée, est toujours engagé à la gauche de l’Armée de Paris. La pression allemande est aussi forte que la veille. Le général Altmayer écrit :
« La lutte est pénible et difficile. L’impression du commandant de l’armée est que ses troupes se battent à un contre cinq en infanterie et en artillerie, à un contre vingt en matériel (aviation, chars, antichars). Sur tout le front, c’est le repli, en combattant, mais le repli ; et la situation est instable à la liaison avec l’armée voisine. Évidemment, la 10e armée n’a pas arrêté l’ennemi sur la Seine comme elle en avait la mission. Mais quand elle a reçu cette mission le 10 juin, les Allemands étaient déjà en bon dispositif au nord-est de la Seine, avaient déjà pu faire passer quelques éléments sur la rive gauche et avaient enfoncé la porte de Vernon (Armée de Paris). Le Haut Commandement connaissait ces circonstances et a certifié que la 10e a fait son devoir, honorablement. »

La tâche de l’armée a été rendue encore plus difficile par le fait que le corps de cavalerie a été soumis à des ordres contradictoires, ainsi qu’on peut le lire dans le journal de marche du corps : « plusieurs autorités donnent simultanément et directement des ordres contradictoires au corps de cavalerie ». Lorsqu’il est écrit plusieurs, c’est vraiment plusieurs ! Il en reçoit naturellement du général Altmayer et ne devrait d’ailleurs en recevoir que de lui, mais aussi du général Hering, de
l’Armée de Paris, du général Doumenc, major général, du général de la Laurencie « au nom du général Weygand » et même d’un officier de liaison d’un échelon très élevé du Haut Commandement. Comme l’écrit Altmayer, c’était « intolérable et dangereux ». Il doit en référer à son supérieur direct, le général Besson, commandant du 3e groupes d’armées, qui lui donne évidemment raison.

La reconstitution du 16e corps
Pendant que les combats font rage sur l’Eure, des dizaines de milliers de soldats, rescapés de Dunkerque, sont réunis à l’ouest d’Évreux. Ils sont progressivement réarmés et rééquipés, afin de former quatre nouvelles divisions d’infanterie :
- la 43e d’infanterie ;
- la 1ère division d’infanterie marocaine ;
- la 32e d’infanterie ;
- la 1ère division d’infanterie nord-africaine.
Ces quatre divisions forment un nouveau 16e corps, placé sous le commandement du général Falgade.

Le 12 juin, il place ses divisions sur la Risle. Un bataillon de la 43e DI est placé à la disposition du général Duffour, deux bataillons de la 1ère DIM sont prêtés au 3e corps d’armée. Mais le 16e corps dans son ensemble ne dépend pas de la 10e armée, bien qu’il se trouve sur son front, mais du GQG. Ce n’est finalement que le 14 juin qu’il passe sous le commandement du général Altmayer. Le 13 juin, une journée de répit. Manifestement fatigués par les efforts fournis du 10 au 12 juin, les Allemands lèvent le pied . La 236e DLI repousse une attaque sur le Neubourg. Des renforts arrivent, avec notamment une brigade la 52nd Infantery Division du général Laury, soutenue par trois groupes d’artillerie et quelques chars. Ils sont introduits à l’aile droite du 3e corps. Un groupe de reconnaissance arrive aussi en renfort, de même qu’un bataillon de mitrailleurs, dépourvu de moyens de transport. Enfin, la 237e DLI reçoit son deuxième régiment, formé depuis peu à Rivesaltes. Ceci permet de relever la 3e DLC, qui n’a pas cessé de combattre depuis 5 semaines.

Elle est alors réduite aux éléments suivants, d’après le général Altmayer :
- brigade à cheval : deux régiments à deux escadrons ;
- brigade motorisée :
- 4 AMD ;
- 9 chars Hotchkiss ;
- 4 AMR ;
- 3 petits escadrons de dragons portés, avec 4 AMR ;
- 3 batteries de 75 mm ;
- 2 batteries de 105 mm.

Il reste donc 8 AMR Renault, 4 AMD Panhard 178, 9 chars Hotchkiss H-39, soit 21 blindés. D’après le décompte d’Altmayer, le régiment d’autos mitrailleuses comprendrait non seulement des AMD et des Hotchkiss, mais aussi 4 AMR, ce qui est étonnant, puisque les AMR sont normalement destinées au seul régiment de dragons portés. Peut-être a-t-il compté deux fois les 4 AMR survivantes.
En tout cas, la dotation théorique de la brigade légère motorisée était de 12 chars Hotchkiss, 12 AMD Panhard 178 et 20 AMR Renault, soit 44 blindés. En comptant les blindés de remplacement, appelés « de volant », la DLC pouvait aligner au mieux 55 blindés.

Le 13 juin ne marque pas la fin de la première bataille de Normandie, mais elle constitue un moment charnière, car dès le lendemain, il n’est plus question pour la 10e armée de tenir la Normandie mais de se replier vers la Bretagne qui offre l’avantage d’être en communication avec l’Angleterre.

Texte de Yves Buffetaut
publié dans Militaria N°64
Tant que les Français constitueront une nation, ils se souviendront de mon nom !

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BRH
 
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La bataille de la Seine : récits

Message par BRH » Mercredi 02 Septembre 2015 15:58:51

les 9 et 10 Juin sur le secteur de Gaillon :

Début juin 1940, le dépôt d'artillerie n°23 dépendant du 34 ème Régiment d'Artillerie est installé dans le parc du Château de Gaillon. Il est commandé par le Lieutenant Guyonnet qui reçoit l'ordre d'interdire aux troupes allemandes le passage de la Seine par le Pont de Courcelles.

Dans la nuit du 8 au 9, les derniers groupes de réfugiés et les restes des troupes françaises et anglaises en pleine déroute après la rupture du Front de la Somme traverse la Seine.

Dimanche 9 juin

Une section de 30 hommes sous le commandement du M.D.L Mecir se met en position en avant du pont de Courcelles avec 2 fusils-mitrailleurs. Une barricade sommaire est dressé et quelques mines sont posées et une barque est dissimulée pour l'évacuation de la section après la destruction du pont.

13h15. L'attaque allemande est déclenchée, le long des berges venant des Andelys et par la Route de Bouafles. Les soldats commandés par le M.D.L Mecir ripostent et se replient à cause du risque d'encerclement.

14h30. Le Lieutenant Tell, du Génie, fait sauter le Pont de Courcelles. Tandis que l'artillerie régimentaire se replie plus au sud. Une section de 10 soldats français renforce les défenses de la rive avec l'aide de deux chars anglais. Ils détruisent un char allemand caché dans un bâtiment de ferme à Courcelles.

15h. 6 hommes du dépôt d'artillerie n°23 traversent la Seine en barque sous le feu nourri des troupes allemandes et récupèrent les corps de leurs camarades tués plus tôt dans la journée.

Lundi 10 juin

9h. l'artillerie allemande entre en action et pilonne Aubevoye. Le P.C du Lieutenant Guyonnet situé dans les bâtiments de la CHARFA est atteint.

10h. Des troupes allemandes qui ont traversé la Seine plus à l'Ouest devant les positions du 236 ème R.I sont signalés à Sainte-Barbe-sur-Gaillon.

12h. Les munitions sont pratiquement épuisées. Le Lieutenant Guyonnet ordonne le repli à la trentaine d'hommes qui l'entourent d'abord vers Gaillon.

À 15 heure, le Lieutenant Guyonnet et ses hommes partent vers Acquigny puis vers Le Neubourg, où ils retrouvent le gros de leur unité d'Artillerie Régimentaire.

Sur les 80 hommes du dépôt n° 23 du 34 ème Régiment d'Artillerie, 30 trouvèrent la mort dans ce bref mais violent combat de retardement sur les Berges de la Seine, de part et d'autre du Pont de Courcelles.

En 1965, le Lieutenant Guyonnet et ses hommes obtiennent des « Pont et Chaussées », l'autorisation d'élever une stèle à l'entrée du nouveau pont. La stèle fut inaugurée le 12 juin 1966.

le 9 juin 1940 à Vernon :


Le matin le canon tonne au nord de la Seine.

à 7 Heure nouveau Bombardement qui parachève la destruction du quartier commerçant de Vernon

À 10 heure: l'armée évacue les hommes et les véhicules situés au « Parc du Matériel » et prend la direction de Chartres. Une section est affectée à la garde du dépôt de munitions en forêt de Bizy, non loin de la « Mare aux Princes ».

à 13h30: les premiers éléments des troupes allemandes s'approchent de Vernon ;

à 14h30: le pont de chemin de fer et le pont de pierre sautent. Quelques minutes plus tard, un premier char allemand vient s'embosser à l'extrémité nord du Pont de Pierre et balaie de ses mitrailleuses les berges de la Seine et la rue d'Albuféra.

Rive gauche, quelques éléments français, du 211ème Régiment d'Infanterie, du 44 ème et 53 ème R.I.C mixte sénégalais et 4 compagnies du 4ème Zouaves résistent sous la mitraille et les obus interdisant le franchissement de la Seine et permettent l'évacuation des troupes non affectées au secteur.

Jusqu'au soir et une bonne partie de la nuit, les obus allemands tombent sur la rive gauche. L'Etat-Major allemand est installé au Château de Civières et dirige sur Vernon les régiments de son 38 ème Corps d'Armée, soit un Régiment d'Infanterie, 3 groupes d'Artillerie, 1 bataillon du génie et le 27 ème Chasseur Cuirassiers.


le 10 juin 1940 à Vernon :


5 h du matin. Profitant des épais brouillards de l'aube, des troupes allemandes traversent la Seine sans opposition au niveau de l'Usine à Gaz et devant la plage de Vernon, abritées par l'île Corday.

À 5h30, ils surgissent à l'Hôpital, et somment le Directeur, Monsieur Ridou, de livrer tous les soldats Français qui s'y cachent. Ils fouillent les locaux en vain, puisque tous les blessées ont été évacués la veille.

À 7 heure des combats de rue, s'engagent: Avenue de l'Ardèche, Avenue d'Evreux. Les sections des Compagnies du 4ème Zouaves se replient en bon ordre.

À 8 heure. Violents affrontements dans le Parc du Château de Bizy, les Zouaves retranchés en haut de l'Avenue des Capucins résistent de longues heures avant d'êtres décimés. Bilan 16 soldats français et 11 soldats allemands y trouvent la mort.

À 10h. Contre-Attaque de la 5 ème Compagnie du 4 ème Zouaves dans le Quartier de Gamilly, où elle se maintient jusqu'à 15 heures, avant de se replier à travers champs, vignes et forêts en direction de Blaru.

À 11h. Les 6 ème et 9ème Compagnies du 4 ème Zouaves commandées par le Capitaine Mouriès tentent de dégager la Section Jais encerclée dans le parc du Château de Bizy. Elle parviennent jusqu'au mur d'enceinte Est du Parc mais les troupes allemandes les repoussent. Elles se replient par les layons forestiers vers les Fontaines de Bizy, abandonnant à leur sort leurs camarades qui résisteront jusqu'à midi.

À 13h. À la Demi-Lune, les Zouaves défendent une barricade établie à la hâte au sommet de la côte. Ils dispersent une forte colonne d'infanterie allemande, mais menacés d'encerclement, ils se replient à travers bois et débouchent devant Maulu, sous un feu meurtrier.

Le soir, il manque 120 hommes sur les 180 partie le matin en Contre-Attaque.

Il faut abandonner tout espoir de reprendre pied dans Vernon.

Les 10 et 11 juin 1940 à Crevecoeur et la Croix-Saint-Leufroy :


Lundi 10 juin 1940

L'Etat-Major du 38 ème Corps d'Armée allemand donne l'Ordre à sa 6 ème D.I de créer une tête de pont sur la rive sud de la Seine entre Gaillon et Heudebouville. Le groupe d'Artillerie n°114, le 41ème Bataillon du Génie et le 27 ème Chasseurs Cuirassiers la complètent.

Le fleuve est franchi en plusieurs point à Aubevoye malgré la destruction du Pont de Courcelles, à Saint-Pierre-du-Vauvray et aux Andelys.

En face de ces troupes allemandes aguerries et nombreuses, quelques éléments français disparates du 236ème R.I, 3 escadrons du 4ème Hussard, quelques pièces d'artillerie du 25ème et du 34 ème R.A s'efforcent de colmater les brèches et de retarder l'avance allemande.

Mardi 11 juin 1940

9h. le 2ème bataillon du 236 ème R.I installé à Villers-sur-le-Roule et à Heudebouville se heurte aux troupes allemandes et parvient à les contenir, mais tourné sur sa droite par des éléments motorisées allemands qui débouchent d'Aubevoye, il doit se replier sur Pinterville et la Vallée de l'Eure où il se réorganise pour résister.

13h. Plus au sud, les 3 escadrons du 4ème Hussards se sont portés sur la rive gauche de l'Eure entre Crèvecoeur et Cailly. Dévalant de Saint-Julien-de-la-Liègue et des hauteurs de Bimorel, les troupes allemandes sont bientôt au contact d'un peloton du 1er Escadron du 4 ème Hussards, maigre arrière-garde de quelques dizaines d'hommes qui protègent le repli de leurs camarades.

Un des officiers survivants raconte: « Epuisé et décimé, le 1er Escadron se replie le premier. Le Lieutenant de Beauregard se tient, avec son groupe de commandement, auprès de son dernier peloton. Sa marche est ponctuée par les salves de l'artillerie et des minenwerfer ennemis, qui des pentes sud de Bimorel, suivent à la vue les mouvements de nos colonnes. Son premier bond amène le petit détachement à la lisière des bois, où pris sous une rafale d'obus il se terre dans des excavations. La salve terminée, le Lieutenant de Beauregard ordonne un nouveau bon en avant. Il fait deux pas et, atteint à la tête par un obus, tombe en avant de tout son long, avec le bras allongé, tenant encore son revolver à pleine main. L'Adjudant Simard, magnifique soldat d'un dévouement et d'une fidélité incomparables, veut se porter vers lui: il est également tué, pendant que le Maréchal-des-Logis Chef Rousselard est à son tour mortellement atteint par une autre rafale. »

Décimé par les tirs de mortiers et de mitrailleuses, le peloton du 1er Escadron du 4 ème Hussards laisse 21 morts sur le terrain, tandis qu'une dizaine d'hommes parvient à s'échapper à travers bois en direction d'Irreville.

Le 11 juin 1946, les 600 habitants de La Croix-Saint-Leufroy, grâce à une souscription publique, ont tenu à commémorer leur sacrifice, en élevant au sommet de Crèvecoeur, le monument qui rappelle ce tragique épisode du Front de l'Eure.

Les Combats de La Heunière et de Brécourt le 11 juin 1940


Après les combats de retardement meurtriers du Mont-Saint-Eloi et de Berchaux, le 4 ème Régiments de Dragons Portés se retrouve enfermé le 28 mai 1940 dans la « Poche de Dunkerque ». le 1er juin après avoir détruit son matériel lourd, il est évacué vers l'Angleterre.

A la tête du 9ème Escadron, le Capitaine de Vandière de Vitrac ne ramène avec lui qu'une soixantaine de dragons sur les 167 qui composaient son unité à l'aube du 10 mai 1940. Le cargo sur lequel ils embarquent, malgré les attaques incessantes des Stuckas allemands, les dépose à Weymouth dans la soirée.

Le 7 juin, ils sont de retour à Cherbourg. L'effectif humain est complété et rééquipés sommairement à Saint-Rémy-les-Chevreuse, les 2 bataillons du 4ème Régiment de Dragons Portés sont immédiatement dirigés sur les points chauds du Front de la Seine.

Lundi 10 juin 1940. Depuis le matin, les allemands franchissent le fleuve et poussent leur offensive en direction de la vallée de l'Eure Les zouaves du 4ème Régiment de Marche les arrêtent quelques heures dans le parc du Château de Bizy mais submergés par le nombre ils doivent se replier sur Blaru. La route de Pacy est ouverte! Les allemands s'y engouffrent et, dès le milieu de l'après-midi, ils s'installent solidement à Douains et à La Heunière. Le même soir, les 2ème et 4 ème Escadrons du 2ème Bataillon de Dragons parviennent à Pacy pour colmater la brêche et tenter de rejeter les allemands au nord de la Seine. Le 2ème Escadron cantonne dans la ville de Pacy où s'accumulent déjà les décombres provoqués par les bombardements aériens allemands.

Par mesure de sécurité, le 4ème Escadron commandé par le Capitaine de Vandière de Vitrac est rassemblé dans les bois qui bordent la lisière sud de Pacy vers Chambines.

Mardi 11 juin 1940. Dans Pacy survolé par les escadrilles allemandes, le 2ème Escadron met à profit la matinée pour s'organier défensivement. Les carrefours et les abords du pont sont solidement tenus et les maisons qui les bordent se hérissent d'armes automatiques. Et l'attente anxieuse commence, ponctuée par les explosions des tirs de l'artillerie allemande.

15h30: Emanant du PC de la Division, l'ordre de contre attaque élaboré par l'état-major du Général Hassler parvient au Capitaine de Vandière de Vitrac:

« Attaque en direction de Vernon

Base de départ: Lisière nord de la forêt de Pacy

Aile droite du 4ème Escadron: la R-N 181

Aile gauche: 600 mètres à l'ouest, le long de la route Douains-Ménilles

Direction: Ligne La Haye-des-Granges

Pousser si possible jusqu'à la lisière sud de la forêt de Bizy »

Branle-bas général! Les 4 pelotons de dragons du 4ème Escadron gagnent leurs emplacements de départ, après une marche de près de 5 km qui s'achève à travers les taillis touffus de la forêt de Pacy. Malgré les canons de 105 allemands dont les obus fouillent le bois pour s'efforcer d'empêcher toute concentration de troupes, ils parviennent à leur but. Sous la chaleur lourde de cette fin d'après-midi, quoique sommairement équipés (beaucoup n'ont ni casque, ni havresac, ni caisse à munitions), les hommes peinent. L'heure de l'attaque fixée initialement à 16h est reportée à 17h puis à 17h30.

17h30: Les Dragons du 4ème RDP sont à peine arrivés dans le layon forestier de départ, à quelque 70 mètres de la lisière, que les 5 chars de soutien (3 Somua et 2 Hochtkiss) des Lieutenants Ville et Bourdon (2ème Escadron du 4ème Cuirassiers) démarrent. Malgré les tirs très denses de l'artillerie allemande qui coiffent la lisière, l'attaque se développe.

Sans prendre le temps de souffler, les Dragons s'élancent derrière les blindés. Le Capitaine de Vandière de Vitrac et son groupe du peloton de commandement courent, sous une fusillade drue, vers les boqueteaux intermédiaires entre la forêt de Pacy et les Fermes de La Heunière. Ils capturent au passage, 14 allemands, 2 mitrailleuses, 2 mortiers et 4 canons anti-chars.

Plus à l'ouest, derrière les chars du Peloton Bourdon, les groupes du Maréchal des Logis Muller et du Lieutenant Falgas s'emparent de la Ferme de La Haye-des-Granges, puis utilisant les dénivellations du terrain, se défilent vers l'est en direction du parc du Château de Brécourt.

Quelques minutes de repos à l'abri d'un repli de terrain où l'on ne craint plus les mitrailleuses allemandes! Le temps d'évacuer vers l'arrière les prisonniers allemandes et les premiers blessés français. Et le Capitaine de Vandière de Vitrac relance l'assaut! Le groupe Mareville poursuit les allemands dans le parc du Château, tandis que le Maréchal des Logis Muller et ses hommes, par le fossé qui borde le R-N181 s'avancent jusqu'aux abords de Brécourt.

Simultanément, les chars du 4ème Cuirassiers atteignent la lisière sud de La Heunière et s'efforcent de contourner le village par l'ouest et en délogent les allemands qui sont retranchés dans les fermes. Un coup de canon déloge la mitrailleuse allemande qui se trouvait dans le clocher de l'église. Partout les allemands décrochent sauf à l'est où la résistance s'intensifie.

A gauche de la R-N 181, le Peloton Falgas essuie le mitraille allemande, une dizaine de dragons tombent et le Lieutenant Falgas est atteint par une balle qui lui traverse la cuisse droite. Le Capitaine de Vandière de Vitrac rassemble alors les 2 groupes les plus proches et utilisant le terrain, ils débordent l'ilot de résistance par la gauche, franchissent d'un bond la route Douains-Saint Vincent et attaquent les allemands par le flanc. Pendant qu'un fusil-mitrailleur arrose la façade du Café Léo Pouget, le Capitaine fait irruption dans la cour intérieure de l'établissement; dans le fond, à gauche s'élève une petite maison d'où tirent les allemands. C'est en voulant les capturer que le Capitaine de Vandière de Vitrac et le Brigadier-Chef Pomoty sont très grièvement atteint.

De son fossé où il vient de faire prisonniers deux allemands, le Maréchal des Logis Muller, prévenu du drame, accourt avec son groupe et, dans un assaut furieux, s'empare du point d'appui allemand. Onze allemands sortent du Café Léo Pouger, bras en l'air, tandis qu'à 200 mètres de là, les side-cars allemands refluent en direction de Vernon, canonnés par les chars du Lieutenant Thomas. L'insuffisance des effectifs engagés ne permet pas de les poursuivre plus loin. On s'organise donc défensivement sur la position conquise.

Sur une porte qui sert de brancard, le Maréchal des Logis Muller organise l'évacuation du Capitaine de Vandière de Vitrac jusqu'au char du Lieutenant Ville qui retourne à Ménilles faire le plein de munitions au PC. En cours de route, on charge le Lieutenant Falgas qui se traine avec sa balle dans la cuisse. Les traceuses allemandes encadrent le blindé dont les feuillages de camouflage prennent feu, les obus le pourchassent, mais le char parvient à regagner les lisières de la forêt. C'est la dernière vision qu'emporte avec lui le Capitaine de Vandière de Vitrac: très grièvement atteint au flanc droit, il meurt en cours de trajet.

Jusqu'à la tombée du jour, les dragons du 4ème Régiment de Dragons Portés repoussent les contre-attaques répétées. Puis, les munitions épuisées, l'Adjudant Chaiffre et le Maréchal des Logis Muller organisent le repli sur la forêt de Pacy.

Les Combats de La Heunière et de Brécourt sont des faits d'armes qui ont démontré, tout au long des funestes mois de mai et juin 1940 que la valeur militaire des soldats français est restée intacte, pour peu qu'ils soient encadrés par des officiers et des sous-officiers courageux.

Quelques jours plus tard, le 4ème Régiment de Dragons Portés, a reçu une citation à l'Ordre de l'Armée par le Général Weygand et le Capitaine de Vandière de Vitrac a été élevé à titre posthume, au grade de Chevalier de la Légion d'Honneur avec attribution de la Croix de Guerre avec palme.
Tant que les Français constitueront une nation, ils se souviendront de mon nom !

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La bataille de la Seine : les combats sur l'Eure

Message par BRH » Mercredi 02 Septembre 2015 16:32:29

LES COMBATS DE COCHEREL DU 11 ET 12 JUIN

C'est en ce paisible et riant village de l'Eure, à Cocherel ou naquit Aristide Briand, le démagogue de la paix, aux pieds même de sa statue, que devait se dérouler dans la journée du 11 et 12 juin 1940, les combats les plus sanglants de la campagne de l'Ile de France. Venons au faits.

Le 11 juin dans la matinée, le 1e escadron, commandé par le lieutenant Pottier, et dont le peloton (lieutenant Chaperon) est resté à la disposition du général commandant la division, reçoit l'ordre de se porter successivement sur Vaux, puis de pousser sur Cocherel, afin d'y assurer la défense du pont et de ses abords.
A Vaux, l'escadron prend liaison avec une patrouille du 6e cuirassier qui s'y trouve. Les renseignements recueillis sont très imprécis, des civils prétendent avoir vu des allemands à Jouy. Le lieutenant Pottier envoie immédiatement la patrouille du 6e cuirassiers dans cette direction. Puis une autre patrouille reçoit pour mission d'aller reconnaître Cocherel, dont la vue et cachée par un rideau d'arbres, à 500 mètres de là. Arrivé à proximité de ces bosquets, elle est arrêtée par des rafales d'armes automatiques provenant des hauteurs qui couronnent la rive droite de l'Eure et le village. Cependant, aucun ennemi n'est visible. Poursuivant la mission reçue, le lieutenant commandant, après avoir fait garer ses side-cars sous les arbres du village de Vaux, donne l'ordre au sous lieutenant Albert de se rendre avec sont peloton au pont de Cocherel, en utilisant les couverts de la rive gauche de l'Eure. Lui-même se porte avec le sous-lieutenant Carissimo et son peloton dans la même direction, mais en empruntant un itinéraire différent. Au cours de l'avance, des rafales passent de mitrailleuses très au dessus de hommes. L'ennemi devine plus qu'il ne voit, tir au jugé.

Bientôt, arrive le capitaine Baillet qui vient aux renseignements et qui accompagne le peloton Carrissimo jusqu'au pont. Ce dernier et désert, mais très exposé aux vues des crêtes environnantes. Des matériaux gisent à quelques pas, ils vont servir à élever des barricades. A ce moment, le capitaine Baillet, en se retournant aperçoit la statue d'Aristide Briand qui, avec ironie, semble présider aux travaux. « dire que c'est à cet apôtre-là que nous devons d'être ici », lâche avec écœurement le capitaine. Un F.M est mis rapidement en batterie au bord de la rive et dans l'axe du pont. Un groupe de combat a franchi la route et s'installe au nord ouest. Le maréchal des logis Joly, qui le commande, s'apprête à le rejoindre, à peine s'est-il élancé qu'une rafale de mitrailleuse, le cloue au sol. Son sang ira fouetter la statue. Une deuxième rafale troue le casque du capitaine Baillet, fou de colère, celui-ci s'empare d'un mousqueton et tire dans la direction de l'emplacement de l'arme ennemi. Le lieutenant Pottier, en fait autant avec un F.M et les hommes suivent leur exemple. Plus loin, le peloton Albert, ouvre également le feu sur des allemands qui ce retirent à travers de jardins de la rive droite. Le maréchal des logis Joly est évacué, le capitaine Baillet repart porter les renseignements au commandant Amanrich. A peine est-il quitté l'escadron que les 77 et les minenwerfers entrent en action. les obus viennent s'abattre autour du pont. L'ennemi qui, des hauteurs, a repéré, ajuste et amplifie sont tir. Le peloton Carissimo risque d'être anéanti sans pouvoir être employé efficacement. Le lieutenant Pottier décide de revenir aux bosquet situé en deçà de la voie ferrée. Le mouvement, pour échapper au vue de l'ennemi, se fait par l'Eure, dont le niveau et très bas. Quelques rafales viennent néanmoins frapper l'eau à peut de distance. L'une d'elle arrache le F.M des mains du lieutenant. Les balles font un bruit semblable à celui que feraient de grosses gouttes de pluie tombant dans un bassin. Personne ne manque sur la nouvelle position que vient de rejoindre le peloton Albert. Le repli est de courte durée. L'ennemi s'infiltre de tous les côtés et bientôt le combat reprend plus violent et plus meurtrier. Les hommes tirent sans arrêt. Le sous lieutenant Albert doit à son intervention personnelle le sauvetage d'un groupe de combat qui va être fait prisonnier. Deux blessés et deux disparus. Cependant l'effectif des deux escadrons font d'un gros tiers. Les blessés sont emmenés. A ce moment, un bruit de tonnerre ce fait entendre ; un Potez 63 passe comme un bolide à 20 mètres au dessus de nous, poursuivit par deux messerschmidt 109. lui aussi à chaud !!! le jour décline, passer la nuit à cette endroit, c'est la capture inévitable. Le peloton du sous lieutenant Bonnaud ( 3e escadron) est à 200mètres en arrière et occupe également une mauvaise position. Le lieutenant Pottier et le sous lieutenant Bonnaud décident de s'installer en point d'appui cerclé a Vaux, en mettant toutes leurs ressources en commun. Là, au moins, ont tiendra le coup

LES COMBATS DE COCHEREL DU 12 JUIN

Au cours, de la nuit du 11 au 12, le commandant Amanrich est venu se rendre compte de la situation et a donné l'ordre au lieutenant Pottier de reprendre coûte que coûte Cocherel et le pont le 18 escadron ( lieutenant Chaperon) rejoindra l'escadron 6 chars de Somua (lieutenant coupé) prendront part à l'attaque. L'opération doit se faire des que les renforts arriverons.
Au lever du jour, arrivent successivement , les chars et le 1e peloton. Le lieutenant Pottier, met au courant le lieutenant Coupé au courant de la situation, et lui demande de faire copieusement arroser les taillis au ours de la progression.

Les divers éléments d'attaque sont rapidement en place. L'ordre et donné ; les Somuas débouchent, l'escadron à pied les suit, en utilisant le plus possible les couverts existant. Le lieutenant commandant marche devant le peloton du centre est à proximité du char du lieutenant Coupé. Les deux Somuas de tête fouillent les buissons de leurs rafales de mitrailleuses. Aucune réaction de l'ennemi. Puis, ils abordent et pénètrent dans le village. Même silence de l 'ennemi.. l'infanterie approche, elle aussi est atteint le remblai de la voie ferrés puis le franchit. L'escouade de tête du lieutenant Chaperon est entrée dans le village et doit se trouver près du pont. Le lieutenant commandant, revolver au poing, s'apprête à bondir en avant. Tout à coup, à 30 mètres devant lui, derrière un muret de jardin, se découvre un groupe d'allemands encadrant une mitrailleuse. A peine a-t-il le temps d'esquisser un geste, que le lieutenant Pottier tombe grièvement blessé, sous une longue rafale de mitrailleuse ( 4 balles l'ont atteint au bassin. Comme si c'était là le signal convenu, immédiatement après s'abat sur l'escadron et sur les chars une grêle de balles et d'obus venant principalement des hauteurs avoisinantes et des maisons situés sur la rive droite. Nos chars répliquent : le 47 et la 7,5 crépitent, l'escadron utilise ses F.M au maximum .le peloton Chaperon réussit à atteindre son objectif, occasionnant de grosses pertes à l'ennemi, qui se replie de l'autre côté en lançant des grenades. Des deux côtés, ont entend des cris de rages et des hurlements de douleurs.

Au plus fort du combat, l'agent de transmission Couvreux narguant les balles, n'hésite pas, à se porter vers son lieutenant commandant, lui donne à boire, essaie de panser ses plaies, mais il à trop à faire. Il retourne à la bataille en lui promettant de le venger. Sur c'est entrefaites, le capitaine adjoint Bonamy est arrivé sur le terrain de combat, des renseignements sont nécessaires à son chef, il vient les chercher. Mais le 1e escadron, dont il vient de quitter le commandement pour prendre son nouveau poste. Son cœur reste attaché à ses hommes et le lieutenant Pottier ne l'a pas quitté depuis son arrivée au régiment. C'est vers lui qu'il se dirige aussitôt, méprisant les rafales qui s'abattent alentour. Parvenu à proximité, il lui prodigue des paroles d'encouragements et le félicite de sa conduite . Cependant l'endroit est terriblement exposé. Le lieutenant Pottier, étendu, reçoit encore une balle qui lui troue la poitrine. D'autre part, il n'y a plus d'officiers ; deux chefs de peloton, le lieutenant Chaperon et le sous lieutenant Carissimo sont tombés à leur tour, le second mortellement blessé, le sous lieutenant Albert a fortement à faire à l'aile gauche du dispositif où les baïonnettes des dragons font merveilles. Bonamy reprend de lui même le commandement de son ancien escadron. Il veut traverser la route pour donner des ordres à Gaumé, son adjudant, mais il s'écroule aussi, blessé à mort « m.... , ils m'ont touché », dira-t-il en tombant. En même temps que ses chefs, peu à peu l'escadron est décimé, mais il tient toujours, et il tiendra encore.... L'esprit du « grand Charles » et de son « terrible neveu» souffre en lui.(1), esprit de lutte et de sacrifice, l'escadron ne se repliera que lorsque, l'ordre lui en sera donné. Celui-ci est arrivé, il faut maintenant décrocher. Des hommes sont là, à proximité des blessés, ils s'interrogent du regard ; nos officiers ? un char se repli en tirant, par malheur il ne voit pas le lieutenant Pottier et se dirige sur lui. Va-t-il l'écraser ? non au dernier moment, rassemblant un peut de vie, le lieutenant lève son casque. Le chef de voiture l'aperçoit est fait stopper. Le portillon s'ouvre, alors sans fièvre, pieusement, au mépris des coups qui continuent à pleuvoir, l' adjudant Gaume, le maréchal des logis-chef Damien et des volontaires, saisissent les corps de leurs chefs, les déposent côte à côte, le capitaine et son fidèle second.

A Cocherel, le 1e escadron a lutté jusqu'au bout de ses forces : 10 tués, 45 blessés, sur un effectif de 78 hommes, contenant pendant vingt quatre heures un ennemis dix fois supérieur en hommes et en matériel de toutes sortes, occupant d'autre part, une position privilégiée, que les chasseurs d'Evreux connaissent bien...
Tant que les Français constitueront une nation, ils se souviendront de mon nom !

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