"Dès le 10 mai 1940, obéissant aux ordres du lieutenant général Hubert Denis, ministre de la Défense nationale, plusieurs dizaines de milliers de jeunes hommes ont rejoint ou tenté de rejoindre, dans l'urgence et par leurs propres moyens, les Centres de Recrutement de l'Armée belge, communément appelés les C.R.A.B..
L'ordre fut donné aux hommes âgés de 16 à 35 ans par voie d'affiches signées par le ministre de la Défense nationale, par communiqués radio et dans la presse. Ils étaient près de 150 000 jeunes hommes concernés à se rendre, dans la plus totale désorganisation dans les Centres de Recrutement situés dans les cités du Hainaut et de Flandre-Occidentale. Ces Centres ayant été fermés le 13 mai 1940, ils reçurent l'ordre militaire de se rendre en France.
Au cours de longues marches forcées, ces jeunes hommes traversèrent à pied, en vélo ou en bétaillères ferroviaires pour les plus chanceux, les villes de Saint-Quentin, Abbeville, Rouen, Toulouse, Nîmes, Montpellier et bien d'autres, pour rejoindre les camps et cantonnements du Midi de la France.
Ceux qui ne furent pas enjoints de stopper par ordre de la gendarmerie française et qui atteignirent les camps prévus, y furent alors commandés militairement. La majorité d'entre eux reçut lecture des lois militaires. Beaucoup d'entre eux furent affectés au bénéfice de la Défense et des administrations publiques ou engagés par des civils. D'autres furent envoyés en première ligne pour renforcer et aider le génie militaire français à creuser des tranchées.
Le 28 mai 1940, ils ne furent pas touchés par la reddition de l'Armée belge combattante. Les C.R.A.B. ont ainsi vécu plus d'un trimestre consignés dans les cantonnements, sans aucun confort, mal logés, mal nourris, avec leurs vêtements et chaussures en lambeaux. Alors que les militaires qui les encadraient étaient en uniforme, portaient des casques et de grosses chaussures, étaient armés, ravitaillés par l'intendance militaire, accompagnés d'équipes médicales et percevaient leurs soldes, les C.R.A.B. étaient, quant à eux, en vêtements civils, sans protection contre la pluie, sans défense ni aucune sécurité, sans percevoir de solde et avec une aide médicale ou alimentaire déficiente. Une autre différence entre les militaires et les C.R.A.B. était que les premiers portaient une médaille sécable d'immatriculation, alors que les C.R.A.B. n'étaient aucunement identifiables. Étant donné que les compagnies furent créées à la hâte et que les C.R.A.B. provenaient de régions diverses, il est arrivé que personne ne puisse donner le nom d'une victime membre des C.R.A.B.
Parmi les victimes de l'offensive allemande figurent des centaines de C.R.A.B., tués dans les bombardements ou dans les escarmouches, soit encore fusillés par les Allemands (parce qu'ils étaient soupçonnés d'être francs-tireurs) ou enfin décédés des suites de leurs blessures, d'épuisement, de malnutrition ou de maladies infectieuses contractées dans les camps et cantonnements insalubres du Sud de la France.
Ces jeunes gens dans les camps furent constitués en « compagnies », chargées, par réquisition de l'armée française, de creuser des tranchées au Nord de Paris où certains furent mitraillés, bombardés, blessés ou tués. D'autres, suite à l'avancée rapide des troupes allemandes passèrent la frontière suisse et furent internés pendant près d'un an.
Selon les hasards des rapatriements, les C.R.A.B. restèrent dans les cantonnements de 3 à 4 mois. Le moment du retour en Belgique fut, pour beaucoup, la seconde quinzaine du mois d'août 1940."
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D'ores et déjà, un bref commentaire: il s'agit de camps organisés pour recevoir les C.R.A.B, encadrés -si j'ai bien compris- en partie par des militaires belges, mais soumis à la discipline française (j'ai crû un instant qu'il s'agissait de camps pour les familles belges réfugiées en France !

Qu'il y ait eu des abus et des carences, c'est probable et même certain. Cependant -dans ce contexte- l'allusion aux "pyjamas rayés" semble excessive, pour ne pas dire déplacée.
La logique aurait voulu que ces recrues de l'Armée Belge soient instruites, habillées et armées. Il n'en fut rien car l'Armée Française n'était même pas en mesure d'armer convenablement ses derniers appelés. La classe 1940 ne fut même pas appelée sous les drapeaux (hormis les natifs des mois de janvier, février, mars 1920) !