L'offensive de juillet 18 : quelques citations...

1ère guerre mondiale et ses conséquences, jusqu'à la Grande Crise.

L'offensive de juillet 18 : quelques citations...

Message par BRH » Lundi 02 Juillet 2012 10:51:15

Dans l’historique du 124eme Régiment d’infanterie Française, on lit :

Dès les premiers jours de juillet, les préparatifs d’attaques n’échappent pas à notre aviation. Un calme impressionnant et anormal règne sur toute la ligne. On ne voit ni avion, ni ballon d’observation ennemi. Chaque nuit, notre artillerie exécute sur les arrières des tirs extrêmement nourris qui allument des incendies et font exploser des dépôts de munitions.

De nombreux coups de main sont ordonnés. Les renseignements fournis par les prisonniers Allemands s’ajoutent à ceux recueillis par l’observation aérienne et terrestre et permettent de fixer la date de l’attaque Allemande vers le 14 juillet.

Le commandement décide alors d’abandonner les Monts. La résistance se fera plus au sud, sur la ligne intermédiaire située à une distance de 2500 à 3000 mètres. On ne laissera dans la première ligne que des observateurs et quelques gradés et hommes résolus chargés de faire croire à l’occupation normale de la position. Ils lanceront des fusées-signaux lorsque l’infanterie Allemande sortira de ses tranchées. Ce dispositif, dit “de grande alerte”, est pris à partir du 13 juillet.

Cette conception hardie, due à la lumineuse clairvoyance du général Gouraud, sera couronnée d’un succès magnifique.

Le 14 juillet au soir, le bataillon Nicolas est en ligne. A la tombée de la nuit, il laisse deux sections et des observateurs au Cornillet et va occuper, au sud des Monts, “la ligne avancée de la Position intermédiaire”. Cette ligne, située hors de la portée des minenwerfer, est destinée à dissocier les vagues d’assaut qui doivent venir mourir sur la position intermédiaire occupée par les bataillons Clertant et Martin. Là, l’ennemi ne doit pas passer. Dans un ordre du jour communiqué le 9 juillet, le général Gouraud donne l’ordre que, sur cette ligne de dernière résistance, il faut vaincre ou mourir. Du fond de leurs tranchées, ses soldats lui en font le serment.

Il ne reste plus qu’à connaître l’heure de l’attaque. Des Allemands, capturés le 14 juillet à 22 h 00, fournissent ce renseignement. La préparation d’artillerie Allemande commencera à 0 h 10, les vagues d’assaut Allemandes sortiront à 3 h 45.

Mis immédiatement au courant, le général Gouraud fait déclencher à 23 h 30 un tir formidable de contre-préparation. La montagne de Reims est embrasée. Des batteries Allemandes de tous calibres viennent seulement de se dévoiler. Nos hommes ont un moral extraordinaire et c’est avec une confiance absolue que chacun attend à son poste le choc de l’ennemi.

Le 15 juillet, à 0 h 10, un roulement infernal se fait entendre soudain derrière les Monts. De Reims à l’Argonne, des milliers de canons Allemands vomissent du fer et du feu. Il semble que des forgerons géants assènent sur les Monts des coups de marteau d’une puissance inouïe.

La première position est pilonnée par obus et par gros minens.

L’air est infecté par les gaz, il faut garder constamment le masque.

Pendant toute la durée de la préparation, les observatoires “Cyclope” et “Lechaud” ne cessent de téléphoner au colonel pour l’informer de la situation. “Cyclope” renseignera jusqu’à cinq heures. La poignée de braves qui occupe la première ligne lance des fusées-éclairantes.

A 3 heures 30, une explosion formidable domine le bruit des éclatements; le tunnel du Cornillet vient de sauter : les Allemands ne l’utiliseront plus.

En même temps, une fusée V.B. blanche à parachute s’élève dans la fumée : l’infanterie Allemande sort de ses tranchées et escalade les Monts. Précédée d’un puissant barrage roulant, elle s’élance à l’assaut des premières positions Françaises volontairement abandonnées. La surprise doit être grande ! Dans les abris déserts, l’infanterie Allemande ne trouvera plus que des gaz asphyxiants.

Vers 6 H 15, les vagues d’assaut Allemandes se présentent devant l’avancée de la Position intermédiaire. Le bombardement intense a voilé la plaine d’un nuage de poussière. Les Français montent sur le parapet pour mieux distinguer l’ennemi.

Les vagues d’assaut Allemandes sont reçues par les unités du bataillon Nicolas qui se défendent avec un entrain admirable. Si les Allemands ont du mordant et sont décidés à passer coûte que coûte, les Français ont juré de leur opposer une résistance farouche. Les compagnies Bruyère, Claudet, Bréard et Jeanpert infligent d’énormes pertes à des troupes Allemandes quatre fois supérieures en nombre et animées d’une foi absolue dans le succès.

Le sous-lieutenant Delamarche tombe mortellement blessé, debout sur le parapet, en dirigeant le feu de ses mitrailleuses.

Le mitrailleur Létang vient de faucher les vagues Allemandes : la rapidité du tir a rougi sa pièce, mais il veut “que ça marche quand même” et, avec sa dernière bande, il abat quatre Allemands arrivés à quelques mètres de lui.

Parti pour porter un ordre, le soldat Joffard se trouve brusquement en face de quatre Allemands, il tue le premier, en blesse un second et met en fuite les deux autres.


L’adjudant Lebatteux, debout sur la plaine, encourage ses hommes sans souci des balles qui sifflent autour de lui.

Le fusilier-mitrailleur Pilon, avec un sang-froid admirable, se sert d’un piquet de réseaux comme appui et, debout, fauche les vagues Allemandes.

Arrêtées net dans leur élan brutal, les vagues Allemandes perdent de leur assurance. Elles hésitent, fléchissent et finalement décollent du barrage qui continue à avancer, suivant l’horaire établi.

Après de violents combats allant jusqu’au corps à corps, débordées par le nombre et risquant d’être tournées, les unités du 3eme bataillon reçoivent l’ordre de se porter au sud de la position intermédiaire.

Le repli s’effectue en ordre et en combattant.

Le lieutenant Crouillebois se comporte magnifiquement.

Par des mises en batterie en terrain découvert, le lieutenant Dufour et l’aspirant Guittet arrêtent la progression des Allemands.

Non content de maintenir les Allemands, le bataillon Nicolas exécute des retours offensifs.

A la tête de sa section, le sous-lieutenant Gabrielli fonce sur les Allemands et les oblige à reculer.

Le lieutenant Bréard entraîne sa compagnie à la contre-attaque avec un mépris absolu du danger, il tombe mortellement frappé.

Le lieutenant Bruyère et le lieutenant Brunet luttent avec la dernière énergie. Momentanément isolés, ils maintiennent leurs positions, font subir aux Allemands des pertes très élevées et permettent le retour offensif d’unités voisines.

Le capitaine adjudant-major Le Falher et le lieutenant Jeanpert voient un léger mouvement se produire. Ils montent sur le parapet et, durant dix minutes, servent de cibles aux balles qui pleuvent de toutes parts. Ce geste magnifique suffit pour ranimer les courages.

Le 3eme bataillon a superbement rempli sa mission. Grâce à sa résistance acharnée, les vagues Allemandes se présentent sans cohésion devant la position intermédiaire, défendue par les bataillons Clertant et Martin.

Dès que l’ennemi est aperçu, les coups de feu crépitent tout le long de la tranchée Française. Les mitrailleurs Français mettent en batterie et commencent un feu meurtrier.

Presque tous les soldats Français sont debout sur le parapet, certains s’élancent au devant des groupes ennemis qui ont pu s’approcher de nos fils de fer. Dans les tranchées et boyaux, par lesquels les Allemands cherchent à s’infiltrer, des combats à la grenade s’engagent.

Remarquablement dirigés par le sergent Charles, les canons J.D. contribuent efficacement à la défense de la position Française.

Partout, les Allemands sont repoussés. Désormais l’attaque Allemande est brisée. Les unités des 1er et 2eme bataillons ont été superbes d’entrain et de bravoure.

Un cheval d’officier Allemand s’échappe jusqu’à nos lignes pour finalement mourir sous nos balles. Le soldat Richard va, sous la mitraille, chercher le harnachement et les papiers. Ils fournissent des renseignements de la plus haute importance : une carte nous révèle les zones d’attaque des divisions Allemandes et les objectifs pour le premier jour; les Allemands doivent atteindre Chalons le 15 juillet!

Dans l’après-midi, le caporal Verwaede aperçoit cinq Allemands cachés dans un trou d’obus. Il se précipite sur eux, en tue trois, blesse les deux autres et les ramène prisonniers avec leur mitraillette. Médaillé militaire le soir même, ce brave sera malheureusement frappé à mort le 18 juillet au cours d’une contre-attaque.

Parmi les observateurs de la petite garnison laissée sur le Cornillet, quelques-uns ont pu regagner nos lignes en se faufilant à travers les vagues Allemandes, au risque des plus grands périls. Réussissent ces exploits : le sergent La Néelle, le caporal Robin et le soldat Ragot. Le sergent observateur Thouin est moins heureux, blessé par un éclat d’obus dans le dos, il se trouve pris entre deux vagues Allemandes. Envoyé en captivité en Silésie, il réussira à s’échapper quelques jours avant l’armistice.

La position tenue par le 124eme régiment d’infanterie Française forme une avancée (le saillant Watebled) dans la ligne générale de bataille.

Le soir même de cette glorieuse journée, à 22 heures, un violent bombardement précède un nouvel assaut formidable mais sans résultat. Les vagues Allemandes viennent se briser de nouveau contre la résistance de nos braves poilus.

Cette journée du 15 juillet est une belle victoire pour le 124eme régiment. Il a eu à soutenir le choc entier de l’une des meilleures unités de l’armée Allemande, la 3eme division de la Garde Prussienne identifiée par cadavres et prisonniers.

Le 16 juillet, vers 9 heures 30, les Allemands tentent un nouvel effort, ils cherchent à nous déborder par les ailes en utilisant tranchées et boyaux. Encouragés par leurs succès de la veille, les Français se battent avec un entrain merveilleux. La fusillade fait rage, les grenades volent en l’air. Les Allemands ne peuvent progresser.

Le capitaine Le Borgne, le lieutenant Billerot, le sous-lieutenant Néquille, officiers d’un cran remarquable, obtiennent de leurs mitrailleurs Français les plus beaux actes de courage.

Dans la journée, le général Gouraud envoie, dans un ordre du jour, ses remerciements à la 4eme Armée.

Le 17 juillet, l’ennemi se contente d’arroser nos tranchées de projectiles.

Combattant toujours debout sur le parapet, le soldat Lefèvre a l’oeil gauche crevé par un éclat d’obus. Il va se faire panser et vient aussitôt reprendre son poste de combat. A son chef de section, il répond par ces paroles héroïques : “un oeil suffit pour tuer du boche.” Il est évacué par ordre de son officier.

Le 18 juillet, au petit jour, le martèlement de nos lignes recommence avec une intensité croissante. L’ennemi veut réduire notre saillant à tout prix. Les vagues d’assaut Allemandes sont précédées de nombreux flammenwerfers. Surpris un instant, les nôtres fléchissent légèrement, mais bientôt des contre-attaques s’organisent sur toute la ligne du régiment.

A droite, la compagnie Gondon rejette complètement les Allemands, pénètre dans l’ouvrage Monténégro et s’y barricade solidement. Au cours de ce combat, le caporal Ducrot et le soldat Lenormand bondissent, à coups de grenades, sur les porteurs de lance-flammes et entraînent leurs camarades par leur bravoure.

A gauche, les éléments des compagnies Pradaud, Coffin et Claudet chassent les Allemands de l’ouvrage Watebled, leur infligeant des pertes sévères et faisant des prisonniers.

Voyant l’ennemi s’infiltrer dans nos lignes, la compagnie Coffin en réserve, contre-attaque spontanément. Ses deux officiers, le lieutenant Brisset et le sous-lieutenant Duchemin, tombent mortellement frappés.

Sa section étant en réserve, le soldat Richard ne peut résister au désir de se battre, il rejoint par la plaine la ligne de tirailleurs et tue trois Allemands de sa main.

Décoré la veille de la légion d’honneur, l’adjudant Larup se bat avec un courage magnifique. Blessé grièvement, il abat, dans un dernier effort, deux Allemands et s’évanouit.

Complètement isolé dans son îlot avec sa section, le lieutenant Marcoux résiste farouchement. Tour à tour les hommes tombent. Resté seul avec deux soldats, il est lui-même mis hors de combat

La compagnie Pradaud s’est montrée, comme toujours, une unité d’élite. Un de ses sergents, Richard, avec trois hommes seulement, met les Allemands en fuite, reconquiert son îlot et capture plusieurs Allemands. Chargé de la garde d’un boyau, le soldat Mauduit est assailli par une avalanche de grenades : il recule de 50 mètres, va chercher quelques camarades à l’aide et disperse les Allemands.

Très brillante dans la contre-offensive, la compagnie Thévand fournit aussi des exemples magnifiques de bravoure : tel le caporal grenadier Raviart, celui-ci fonce furieusement sur un groupe de vingt Allemands, en blesse plusieurs, ramène deux prisonniers et met les autres en fuite. Apercevant huit soldats Allemands emportant deux de nos mitrailleuses, les grenadiers Vial et Perruchot montent sur la plaine et s’élancent à leur poursuite. A coups de grenades, les deux grenadiers Français en tuent deux, en blessent deux autres et ramènent deux prisonniers ainsi que les deux mitrailleuses.

Le 19 juillet, au petit jours, dans les mêmes conditions, l’ennemi renouvelle l’attaque de nos positions. Il a encore recours aux liquides enflammés. Cette fois nos hommes ne se laissent pas surprendre. Grâce à leur héroïque attitude, à la puissance du barrage d’artillerie et des feux de mitrailleuses Françaises, cette dernière tentative des Allemands échoue complètement

Le commandant Martin, calme et prévoyant, veut sans cesse se rendre compte de la situation. Sous la mitraille, il observe complètement à découvert et il est grièvement blessé par éclat d‘obus.

Comme les jours précédents, le sous-lieutenant Grandperrin s’est brillamment comporté. Il sort constamment de son abri en plein bombardement, alerte judicieusement sa troupe et par des mises en batterie rapides à découvert, arrête la progression des flammenwerfers et inflige aux Allemands des pertes sanglantes.

Pendant ces journées du 15 au 20 juillet, le 124eme régiment a montré une fois de plus sa résistance dans la défensive, son énergie dans l’attaque.

Bien sur, le 124eme régiment d’infanterie Française est cité à l’ordre de la 4eme Armée :

“Sous le commandement du colonel Birot, chef accompli, doué des plus réelles vertus militaires a affirmé, une fois de plus, ses belles qualités combatives au cours de dures journées; soumis à un bombardement d’artillerie de longue durée et d’une violence inouïe puis attaqué, sans aucun répit, par des forces Allemandes puissantes, plusieurs fois supérieures en nombre et résolues à percer coûte que coûte, a résisté avec un acharnement et une abnégation héroïque à la poussée de l’ennemi et, par une brillante défense et de furieuses contre-attaques, maintenu dans leur intégralité les positions qu’il avait reçu l’ordre de conserver à tour prix."






Le 330eme régiment d'infanterie Française :




Dans l’historique du 330eme Régiment d‘infanterie Française, on lit :


De très nombreux indices ont laissé voir depuis quelques temps l’intention agressive des Allemands: leurs observateurs de première ligne se multiplient, des bruits de voitures et de tracteurs se font entendre chaque nuit, les prisonniers Allemands refusent de répondre, l’aviation signale des camouflages nouveaux et des amas de matériaux considérables.

Dès le 7 juillet, le général Gouraud a alerté son armée par son ordre fameux “ l’assaut sera rude ! Personne ne reculera !...”

Le régiment travaille avec plus d’ardeur que jamais, a organisé son terrain et, derrière les premières lignes, les compagnies passent toutes les nuits à établir sur la position intermédiaire la barrière suprême où coûte que coûte on doit arrêter les Allemands.

Le 14 juillet, à 20 heures, le 366eme régiment d’infanterie Française (lieutenant Balestier) exécute un coup de main et ramène des prisonniers Allemands qui se décident à parler : l’attaque Allemande est prévue pour le lendemain, la préparation d’artillerie doit commencer à minuit juste. La nouvelle en arrive à peine un quart d’heure avant, les compagnies sont au travail. On n’a que le temps de les prévenir, tout le monde se rassemble et chacun se rend à son poste.

Les ordres du général Pétain sur le dispositif en profondeur sont immédiatement appliqués : la 14eme compagnie ne laisse en ligne que la section du sous-lieutenant Leleu, les trois autres avec le sous-lieutenant Bétat se retirent à la Chaussée Romaine. La 15eme compagnie laisse en ligne la section du sous-lieutenant Rousseau et se replie à son tour avec son chef, le capitaine Lamy, au Bois des marmites. Tout est prêt.

Un peu avant l’heure dite, notre artillerie lourde, en éveil depuis longtemps et copieusement fournie de munitions, déchaîne sa contre-préparation. Le bombardement ennemi formidable commence et, de Château-Thierry à la Mainde-Massiges, la terre tremble, le ciel est en feu. Tout le monde a mis son masque, les obus toxiques se mêlent aux percutants de tout calibre. Les tranchées sont retournées et bouleversées, les pertes sont déjà sévères, mais on tient bon. Les deux sections laissées en première ligne ont pour mission de faire croire à une occupation dense en lançant des fusées et de prévenir, le moment venu, de l’attaque de l’infanterie Allemande.

Jusqu’à 3 h 30, sous le martelage infernal du tir ennemi, les fusées montent et sur les positions intermédiaires les compagnies travaillent à renforcer leurs défenses. Les réseaux ont maintenant douze mètres de large, les brèches sont bouchées à coup de chevaux de frise, les boyaux et les pistes sont barrées et obstruées. A 4 h 05, dans le jour qui se lève, la section Rousseau, sur la droite, lance une fusée chenille. C’est le signal convenu, l’infanterie Allemande sort de ses tranchées et vient se coller à terre tout contre la première ligne. Le barrage roulant commence d’une violence extrême et les vagues Allemandes s’avancent.

La mission de sacrifice des deux sections restées en ligne est terminée, elles doivent regagner maintenant la position intermédiaire. Le sous-lieutenant Rousseau parvient à ramener une bonne partie de ses hommes. “ Son retour, dit le journal de marche, est un véritable épopée! “.

De la section Leleu, pas un seul ne revint ! Que la mémoire de ces héros reste à jamais sacrée. L’ennemi arrive aux réseaux et reste un instant décontenancé en trouvant la première ligne vide.

Les Allemands se ruent en avant et se heurtent à la 13eme compagnie (2eme et 4eme sections, sous les ordres du sous-lieutenant Van Driesten). La division lance sa fusée drapeau, il est 5 h 30. Sur tout le front, la fusillade éclate. Les 5eme et 6eme bataillons déclenchent brusquement leurs mousqueterie et les rafales de leurs mitrailleuses, les canons de 75mm chargés à mitraille rasent les têtes et vont jeter dans les rangs Allemands le désordre et la mort.

Pendant deux heures, jusqu’à 7 h 30, la lutte est effroyable. L’ennemi aborde la position intermédiaire par les quatre boyaux : le Bois Allongé, le Bois en T au centre, le Boyau 38 à droite et le Bois en Couloir. Les Allemands ont subi des pertes énormes mais leurs réserves, massées dans le Bois en T, ne cessent de renforcer les premières vagues.

Tous les engins de tranchée donnent à la fois. Au bois Allongé, limite gauche du sous-secteur, la 21eme compagnie reçoit l’attaque (capitaine Féronni). Deux pièces contre tanks “Édouard et Georges” lui prêtent leur appui. Devant le Bois en T, c’est la 23eme compagnie avec l’adjudant-chef Best, avec lequel le sous-lieutenant Extrêmé (21eme compagnie, 4eme section) est en liaison pendant que la 3eme section (adjudant Dupont) doit tenir coûte que coûte le Boyau du Bois allongé et que la 2eme section garde la limite gauche du sous-secteur. Au boyau 38, c’est la 22eme compagnie. Au Bois en couloir, la 13eme compagnie avec les trois sections de la C.M.4 et la pièce contre tanks “Nestor”, à droite du sous-secteur les 17eme et 19eme compagnie. Partout, à bout portant, on se bat à la grenade.

Les trois pièces contre tanks, servies comme à l’exercice, tirent chacune 300 obus et fauchent les colonnes d’attaque Allemandes. Devant cette résistance imprévue, les Allemands s’arrêtent, les uns refluent vers la ligne de départ, les autres se collent à terre. Il est 7 h 30. La plaine semble vide. Le tir des deux artilleries et des mitrailleuses continuent avec acharnement.

L’attaque Allemande reprend presque aussitôt et cette fois par infiltration, mais sans plus de succès. La 21eme compagnie, à gauche, résiste à tous les assauts Allemands et ne cède pas un pouce de terrain. La 3eme section de l’adjudant Best tient le débouché du Bois en T et le rend infranchissable, elle réussit même, par l’élan de son chef, à capturer trois prisonniers et une mitrailleuse.

Les 1ere et 3eme sections de la 22eme compagnie, voyant s’infiltrer aux abords du Bois en T, se précipitent d’un bond, tuent les premiers assaillants Allemands et forcent les autres à reculer de plus de cent mètres.

Le sous-lieutenant Fouches, de la 13eme compagnie, se tient au Boyau du Bois en Couloir, défend pied à pied le passage, contre-attaque sans arrêt et, avec la section voisine du sous-lieutenant Delmeule (19eme), ramène plusieurs prisonniers Allemands. A la 1ere section de la 13eme compagnie, la caporal Taranne se bat comme un lion, abat à coups de grenades les premiers soldats Allemands qui débouchent et tombe frappé en pleine poitrine en s’écriant “Pour la liberté du monde!”.

Les trois sections de la 4eme compagnie de mitrailleurs, au centre même de l’attaque, épuisent leurs munitions et sont magnifiquement dirigées par leurs chefs, les sergents Delangle, Lipsin, le caporal Mayeux. La 4eme section, en réserve au P.C. de bataillon, entre en scène à son tour.

A droite, la 19eme compagnie appuie la 13eme compagnie, la 17eme section des sergents Delplanque, Breuïl et Alexandre tient les Allemands en respect, aidée de la section de mitrailleuses du sergent Aldebert.

Les sections Delplanque et Aldebert, un instant entourées, achèvent leurs munitions, bousculent l’ennemi et rejoignent leurs camarades; la 18eme compagnie (sous-lieutenant Dérieux) surveille le centre du Bois Clausse. Il est maintenant 10 h 30, sur tout le front du régiment les Allemands sont arrêtés. On en profite pour ravitailler la ligne en sacs de terre, en eau et en grenades.

Les sections de soutien comblent les vides que cette lutte acharnée a creusées dans nos rangs. L’ennemi se masse dans les boyau à 300 mètres de la position intermédiaire et l’on signale en arrière ses renforts qui montent en colonne par quatre. La préparation d’artillerie recommence. En même temps, après avoir échoué dans leur attaque de front, les Allemands cherchent à gagner du terrain par notre droite en s’infiltrant vers le centre Clausse, la 18eme compagnie les arrêtent. Au barrage du Boyau 38, un obus de plein fouet met hors de combat tous les défenseurs. Des volontaires se précipitent et les remplacent. Partout c’est la même vigilance et le même héroïsme.

A 15 heures, l’ennemi reprend son attaque avec un redoublement de violence. La 13eme compagnie, décimée, replie un instant sa droite. Les mitrailleurs de la C.M. 4 (caporaux Maignan et Mayeux, soldats Cantin, Désormaux, Roinbault) luttent avec un merveilleux courage et se font tuer sur leurs pièces.

Le 75 contre tanks “Nestor”, commandé par le maréchal des logis Borota, n’a cessé de tirer depuis le matin et décime les Allemands, mais un coup de 105 brise et tue ou blesse les servants : l’ennemi progresse, le moment est critique. Le 4eme bataillon, qui s’est intercalé au centre des deux autres, se lance à la contre-attaque : le capitaine Mussat (13eme compagnie), entouré de sa liaison et de quelques hommes qui lui restent, se jette sur l’ennemi. Les sous-lieutenants Bétat, Bourgier et Van Driesten, avec les éléments des 13eme et 14eme compagnie, engagent à la grenade un corps à corps furieux. Bétat tue de sa main un commandant de compagnie ennemi et chasse les Allemands du boyau donnant accès au Bois Couloir.

Le sous-lieutenant Delmeule (19eme compagnie), avec sa section, le sous-lieutenant Bourgeois, avec trois escouades de la 22eme compagnie, l’adjudant Lescaut, avec ses mitrailleuses, se précipitent tous au point menacé et parviennent à refouler les Allemands. La 18eme compagnie (lieutenant Dérieux), la 22eme compagnie (lieutenant Bertrand), la 3eme section de la 23eme compagnie (adjudant-chef Best) et les 3 sections en ligne de la 21eme compagnie ont, pendant tout ce temps, arrêté net les efforts des Allemands sur leur front. On s’est battu tout le jour et le soir tombe, il est 20 heures.

L’ennemi, que ses pertes énormes paraissent avoir épuisé, reste calme pendant la nuit.

Le ravitaillement n’a pu se faire, on mange sur place les vivres de réserve. L’artillerie tire toujours mais on s’efforce encore de refaire les barrages et d’améliorer les emplacements de combat.

Le matin, vers 7 heures, le bombardement reprend avec un intensité nouvelle. Les avions ennemis survolent nos lignes et les mitraillent à faible hauteur; on riposte. L’un des avions s’abat en flammes et chacun se dispute l’honneur de ce beau coup, le fusilier-mitrailleur Thomas de la 19eme compagnie et la section des mitrailleuses du sergent Aldebert sont déclarés les seuls vainqueurs.

A 9 heures, l’ennemi attaque, il porte d’abord son effort à droite et réussit à s’emparer d’un des îlots. La section de l’adjudant Flattot (14eme compagnie) et celle du sous-lieutenant Delmeule (19eme compagnie) contre-attaquent et rejettent les Allemands de cet îlot. Tous les éléments du 5eme bataillon contre-attaquent en même temps et empêchent l’ennemi de tourner la droite du secteur. Au centre, avec les 14eme et 19eme compagnie, la section du sergent Sauvage et la demi-section du sergent Négros se jettent sur les Allemands et les repoussent.

Sauvage est grièvement blessé. La 2eme section de la C.M.4, qui a perdu la veille tous ses chefs, se reconstitue sous les ordres du caporal Argentais et arrête, aux saillants des Dragons, la mise en batterie d’un canon ennemi. Au boyau du Bois en T, Best est toujours inébranlable à son barrage.

A gauche, deux compagnie ennemies débouchant du Bois allongé et tentent d’enfoncer la 21eme compagnie (capitaine Ferroni). Devant leur échec, elles essayent une ruse et vers midi quelques Allemands déséquipés lèvent les bras pour se rendre “Kamerad”. Trente hommes, armés se dissimulent derrière eux. Le capitaine Ferroni ne tombe pas dans le piège et la 3eme section les reçoit tous ces soldats Allemands à coup de grenades. Ces dernières épuisées, c’est à coups de pierres que l’ennemi recule. Le tir efficace des V.B., réglé par le sergent Purifié, achève de combler de cadavres Allemands le boyau du Bois allongé. L’ennemi recule à plus de 400 mètres et ne bouge plus de ce côté. Vers 11 heures, à droite, une nouvelle ruse infâme devant le front de la 18eme compagnie : un groupe de faux infirmiers, portant le brassard de la Croix Rouge, cherche à franchir le réseau et à gagner vers le centre Clausse : une rafale de mitrailleuses les cloue sur place et de ce côté aussi c’est la fin.

Attaques et contre-attaques se poursuivent au centre du secteur jusqu’à 16 heures, les sous-lieutenants Bourgier et Van Driesten, l’adjudant Dayries du 4eme bataillon, rendent infructueux les derniers efforts des Allemands. C’est la fin, la grande offensive Allemande est brisée. Le sol est jonché de cadavres Allemands, les pertes du régiment s’élèvent à plus de 300 hommes. 30 tués, dont le sous-lieutenant Extrêmé (21eme compagnie), 176 blessés, dont les sous-lieutenants Bétat, Bourgeois et Rousseau et, enfin, 101 disparus, dont le sous-lieutenant Leleu.

Les actes de bravoure individuels sont trop nombreux pour qu’on puisse les citer tous. Il faut ajouter à tous ceux dont mention a été faite dans le récit de la bataille l’exemple des mitrailleurs qui furent admirables de sang-froid et de courage, de l’équipe téléphoniste, dont le chef, le lieutenant Joubert, voyant ses hommes décimés et intoxiqués, n’hésitait pas, au milieu des obus toxiques, à se porter lui-même décimés et intoxiqués, n’hésitait pas, au milieu des obus toxiques, à se porter lui-même aux points critiques et, après avoir secouru les plus blessés, assurait personnellement les communications. Les deux maréchaux des logis Lemne et Candella, commandant les pièces contre tanks “Edouard et Georges”, qui prêtèrent un si grand appui à leurs camarades fantassins et se firent tuer sur leurs pièces. Enfin de la section de la 21eme compagnie que commandait le sous-lieutenant Extrêmé, après que cet officier eut été mortellement atteint, trois sous-officiers prirent successivement le commandant de la section et furent blessés chacun à leur tour. Dans la seule journée du 15, cette section avait eu 6 tués, 14 blessés et le soir elle tenait toujours, assurant jusqu’au bout la liaison entre la section Best (23eme compagnie) et la section Dupont (21eme compagnie).

L’infanterie Allemande, épuisée par l’effort suprême qu’elle avait donné, ne fit les jours suivants aucune tentative. L’aviation seule se montra fort active et l’artillerie poursuivit, à grands renforts d’obus toxiques, ses tirs de harcèlement.

Le sous-lieutenant Rousseau, les sergents Brionne, Hourdeaux et Duffau, les caporaux Blanchet et Peysonneau, les soldats Jourdy, Battend, Borella, Euzen, Roullois, Derrien, Coat, Mien, Adin, Lebrec, tous de la 15eme compagnie sont cités :

“le 15 juillet 1918, laissés sur la première position pour prévenir l’attaque Allemande, sont restés héroïquement pendant quatre heures sous un bombardement des plus violents, sont rentrés après avoir rempli leur mission, en traversant les barrages Français et Allemands et ont recommencé à combattre sur la position de résistance.”

La 21eme compagnie : unité d’élite, sur une position attaquée avec acharnement et bien que cruellement éprouvée, a fait une défense magnifique à la bataille des 15 et 16 juillet et obtenu un succès complet.

Le servant-mitrailleur Aldebert et le fusilier-mitrailleur Thomas de la 19eme compagnie qui abattent un avion ennemi; le sous-lieutenant Bourgier; le soldats mitrailleur Lemoine; le caporal Bouix, qui reste seul valide dans son escouade et continue à tirer avec le fusil-mitrailleur d’un de ses hommes jusqu’à ce qu’il soit lui-même blessé; le soldat Pfeifer qui, attaqué par 20 hommes à la fois, leur tient tête; les soldats Percevault, Binault; le commandant Marmier (4eme bataillon) qui “par son activité prodigieuse s’est imposé à l’admiration de ses hommes”; le soldat Bardin qui met trente hommes en fuite; le sous-lieutenant Marc; le brancardier Lefèvre, d’un courage et d’une abnégation au-dessus de tout éloge, grièvement blessé au début de l’attaque, refuse de se laisser évacuer et travaille tout le jour à la relève des blessés sur des pistes battues par le feu de l’ennemi; les adjudants Dayries et Flattot; les sergents Miller et Verdier; le soldat Derouet; les caporaux Derecussy, Francart, Taramé,..., et une fois de plus l’adjudant Best qui “fait l’admiration de tous, entraîneur d’hommes par excellence, le héros dans toute l’acception du mot...”; la 13eme compagnie (capitaine Mussat); la 17eme; la 19eme (lieutenant Poupy); la 22eme (lieutenant Bertrand); la 23eme; la C.M.4; la 4eme section de la C.M.5

Enfin, le 330eme régiment d’infanterie Française est cité :

“ [....] Au cours de l’offensive Allemande de juillet 1918, a eu une splendide attitude au feu, repoussant, le 15, onze contre-attaques sur sa ligne de résistance qu’il a maintenue intacte malgré les assauts les plus violents de l’ennemi”

Le général Gouraud, fier de la IVeme Armée Française qui avait supporté sans faiblir le choc de 25 divisions, put féliciter ses troupes et leur dire : “c’est un coup dur pour l’ennemi, c’est une belle journée pour la France.”




Le 142eme régiment d'infanterie Française :



Citation:
Dans l’historique du 142eme régiment d’infanterie Française :


La journée du 14 juillet se passe dans l’attente. A 23 h 45, le régiment est alerté. Le 15 juillet, à minuit, la préparation d’artillerie Allemande commencera.

A 0 h 10, l’artillerie Allemande ouvre le feu. Toute la position avancée au nord de la Voie romaine est écrasée sous les obus de tous calibres. La position intermédiaire demeure intacte. Une grande proportion d’obus asphyxiants oblige les troupes Françaises à conserver le masque toute la nuit. Le barrage redouble d’intensité et, à 4 h 15, l’infanterie Allemande sort de ses tranchées. Malgré les bombardements effroyables qu’ils viennent de subir, nos éléments de surveillance exécutent ponctuellement leur mission; des fusées partent annonçant l’attaque, puis la progression de l’attaque.

Les vagues Allemandes déferlent sur nos positions. Pourtant accablés par quatre heures de bombardement, nos éléments avancés résistent au déferlement des Allemands. Tout en combattant avec le masque, les Français multiplient les faits d’armes individuels. Enfermé dans un groupe de combat, le lieutenant Trin défie toute attaque. Il tue de sa main une douzaine d’Allemands et conserve sa position. Blessé, il se rend au poste de secours et est fait prisonnier au cours du trajet par des éléments ayant tourné son groupe de combat.

Dissociée par l’admirable résistance de ces troupes Françaises de surveillance, l’attaque Allemandes se brise net sur la position intermédiaire, solidement tenue par les 1er et 3eme bataillons.

Commandant le 2eme bataillon (de surveillance), le capitaine adjudant-major Serret a tenu le chef de corps au courant des péripéties de la lutte par téléphone et par T.P.S. Son P.C., transformé en groupe de combat, a été le théâtre d’une lutte sanglante et opiniâtre. L’Allemand, essoufflé, s’arrête et, sur tout le front du régiment, la lutte paraît enrayée. Cependant, le régiment voisin de gauche a fléchi momentanément sous le choc, obligeant les éléments du 1er bataillon à faire face à gauche. L’ouvrage de la source est attaqué avec une rare violence par les Allemands, mais la défense Française est acharnée. Le lieutenant Broussy est là avec ses Stokes, ses 37mm et fait du bon travail.

Le sous-lieutenant Gauthe et ses mitrailleuses interdisent aux Allemands toute progression. Plusieurs officiers tombent, les sous-lieutenants Saint-Jean, Riche sont frappés à la tête de leur troupe. Mais c’est en vain que les Allemands essaient de mordre sur nos positions. La compagnie Compeyron, avec les sous-lieutenants Pain et Burle, repousse toutes les attaques Allemandes avec une vigueur qui ne se dément pas.

Les jours suivants, des combats locaux acharnés ont lieu sans que les Allemands ne puissent prendre à aucun moment pied dans nos positions.

Extrait de la citation obtenue par le 142eme régiment d’infanterie Française :

“ [...] Puis le 15 juillet 1918, en Champagne, où il a arrêté complètement, par la puissance et la précision de ses feux, grâce au dévouement, au devoir et à l’esprit de sacrifice de ses cadres et de ses soldats, la progression d’un ennemi mordant, décidé à percer coûte que coûte. [...] “

Tant que les Français constitueront une nation, ils se souviendront de mon nom !

Napoléon
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