Dahomey et rois noirs : esclavage, milliers de sacrifices

Période de la Colonisation florissante et de la Belle-Epoque.

Dahomey et rois noirs : esclavage, milliers de sacrifices

Message par Auguste » Lundi 06 Juillet 2020 08:21:35

Le Royaume du Dahomey et ses rois nègres : esclavage, décapitation, sacrifices par dizaines de milliers…

06 Juil 2020 Jean-Paul Saint-Marc Esclavage, Histoire, Les dégénérés

Le Royaume du Dahomey et ses rois nègres : esclavage, décapitation, sacrifices par dizaines de milliers…
Illustration : panneau d’un circuit sur la route des esclaves au Bénin.
Les Africains sont bien au courant, s’ils le veulent…

https://resistancerepublicaine.com/2020 ... -milliers/
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L’histoire, pour ceux qui veulent la connaître, leur apprend qu’elle est émaillée tant d’horreurs que de réalisations et de faits merveilleux.
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Le Romains, une magnifique civilisation, n’étaient pas des tendres. Jusqu’à 1/3 de la population de l’Empire dans sa gloire était des esclaves sur lequel s’établissait la puissance et la richesse romaine… La répression des révoltes était sans pitié. La conquête d’un nouveau territoire aussi… La Gaule l’a payé très cher d’autant que depuis Brennus la rancoeur s’était accumulée…
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Plus loin de nous, aux Amériques, la civilisation Aztèque s’est illustrée par une cruauté sans borne, jusqu’aux sacrifices humains en série, pour satisfaire une religion du soleil. En même temps que la puissance, la guerre en était la raison… Ainsi Cortès trouva-t-il des alliés chez les peuples victimes ; pour vaincre, sa petite troupe n’aurait pu y suffire ! Pourtant, la civilisation Aztèque était brillante par bien des aspects…
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Le bon Carolus Magnus était lui aussi sans complexe… Les Saxons en surent quelque chose, entre déportations de prisonniers vendus aux musulmans, un commerce très lucratif tant pour les marchands que l’Empire, et le massacre à Verden de ces 4500 Saxons qui avaient apostasié leur conversion au christianisme en 772.
C’est notre Histoire, à côté de ces ignominies, de belles choses… Nous prenons le tout sans forfanterie ni indifférence à la violence du passé, et… nous en tirons les leçons !
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Au sud de l’Europe, l’Afrique elle aussi recèle un passé aux aspects tout aussi noirs !
A croire la discrétion qui entoure l’Histoire africaine, il n’y aurait pas grand chose à dire, d’ailleurs guère -voire pas du tout- de traces écrites des peuples noirs !
Certes, la traite arabo-musulmane est évoquée, mais du bout des lèvres. Quant à la traite intra-africaine, pour la découvrir dans sa réalité, il faut avoir des capacités de devins ! Bien sûr un jeune journaliste du nom de Clemenceau avait rapporté le récit d’un explorateur, un esclave vendu pour être découpé… Cela était-il un épisode lié à une famine ?
Sans ce Behanzin de pacotille qu’est le leader de la LDNA, je n’aurais jamais été attiré par le passé ignoré du Royaume du Dahomey… Assurément, dépasse-t-il dans l’horreur le comportement dernièrement évoqué des Soninkés « traorérens »…
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L’essentiel est résumé dans l’article ci-dessous, il en donne l’ampleur. Les détails en sont très documentés par ailleurs. Pour ceux qui sont apostrophés par l’indicible, ils trouveront d’autres liens en fin d’article.
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Sacrifices humains au Dahomey
« Le texte qui suit montre, s’il en était besoin, que l’esclavage, la barbarie n’ont pas été le fait des seuls Européens. Paru dans la revue Le Tour du Monde de 1863, il est extrait de :
Voyage au Dahomey, par M. le Dr Répin, ex-chirurgien de la Marine impériale. 1860.
Texte et dessins inédits.
Documents complémentaires et postérieurs au voyage de M. Répin.
P 101 et s.
Sacrifices humains lors des obsèques et de l’avènement d’un roi.
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A cette occasion, il est d’usage que tous les grands et les résidents européens des sarames, ou factoreries, offrent des présents considérables. L’ensemble de toutes ces cérémonies s’appelle la grande Coutume par excellence, pour la distinguer des autres cérémonies ou anniversaires qui portent aussi ce nom.
Jamais la soif du Moloch africain ne se manifeste plus qu’en cette solennité. Des centaines, des milliers de victimes humaines sont alors immolées, sous le prétexte d’envoyer porter au feu roi la nouvelle du couronnement de son successeur. Avec de l’argile pétrie dans le sang des victimes, on forme un grand vase de forme bizarre, dans laquelle le crâne et les os du feu roi sont définitivement enfermés et scellés. A de certains jours, le roi régnant vient rendre ses devoirs à cette urne funéraire, dans laquelle, à travers des ouvertures ménagées à dessein, il répand des libations d’eau-de-vie et des offrandes de cauris. Ce dernier article a pour objet de subvenir aux besoins du défunt dans l’autre monde et de l’empêcher de faire honte à son successeur en contractant des dettes.
Aucun des détails hideux que nous venons d’énumérer, d’après un témoin oculaire, n’a fait défaut aux funérailles du roi Ghézo, décédé à la fin de 1858, et au sacre de son successeur, Bâhadou. Dans chacune de ces solennités, le nouveau roi s’est montré ce qu’il avait apparu à M. Répin, comme héritier présomptif, le digne chef du parti conservateur des us et coutumes de la monarchie dahoméenne.
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« A la mort de Ghézo, écrit de Wydah un missionnaire catholique français, l’aristocratie dahoméenne se trouva partagée en deux partis: les uns voulaient le maintien des anciennes coutumes, exigeant chaque année l’immolation de milliers de victimes; les autres en voulaient l’abolition. Je m’abstiens de dévoiler le mystère qui donna la victoire aux plus méchants. L’intronisation du prince Badou (Bâhadou) fut le triomphe des anciennes lois, qui reprirent toutes la rigueur sanguinaire réclamée par les féticheurs. Il ne faut pas croire que la boucherie humaine se borne aux grandes fêtes; pas un jour ne se passe sans que quelque tête tombe sous la hache du fanatisme; car la soif du sang paraît dévorer ceux qui s’en abreuvent. Dernièrement l’Europe a frémi en apprenant que le sang de trois mille créatures humaines avait arrosé le tombeau de Ghézo: hélas! s’il n’y en avait eu que trois mille ! »
« Le 11 juillet 1860, a dit de son côté un missionnaire protestant, je fus invité à me rendre de Wydah à Abomey. Après deux jours de marche, je rencontrai sur la route un homme qui se dirigeait vers Wydah, porté dans un hamac et préservé du soleil par un vaste parasol. Il était bien vêtu du costume des marins dahomyens, et une suite assez nombreuse l’accompagnait. Ce pauvre homme, une fois arrivé à Wydah, devait être précipité dans la mer, en même temps que les deux gardiens des portes du port, afin d’être prêts à ouvrir ces portes à l’esprit du roi défunt, quand il lui plairait de prendre un bain de mer.
Nous trouvâmes à Canna le nouveau roi lui-même, qui se disposait à partir pour sa capitale, où il nous donna rendez-vous pour le 16. Quand nous l’eûmes rejoint, il nous fit tous asseoir; puis, nous montrant un homme dont les mains étaient liées et la bouche bâillonnée, il nous dit que c’était un messager qu’il envoyait porter de ses nouvelles à son père. Et, à ce titre, le pauvre homme, dirigé aussitôt vers la ville, fut en effet, comme je l’ ai appris plus tard, immolé sur la tombe du feu roi. Une heure après le départ de ce malheureux, on amena devant Bâhadou quatre autres hommes, accompagnés d’un daim, d’un singe et d’un gros oiseau. Toutes ces créatures, à l’exception d’une, eurent la tête tranchée sur-le-champ, avec mission d’aller annoncer aux esprits ce que le pieux monarque se préparait à faire en faveur de son père. Un des hommes devait aller le raconter aux esprits qui fréquentent les marchés du pays, le second aux animaux qui vivent dans les eaux, le troisième aux esprits qui voyagent sur les grandes routes, et le quatrième aux habitants du firmament. Le daim devait s’acquitter de la même mission auprès des quadrupèdes qui parcourent les forêts, et le singe grimper jusqu’au sommet des arbres pour en instruire ses pareils. Quant à l’oiseau, plus heureux que ses compagnons, on lui rendit sa liberté, afin que, s’élevant dans les airs, il racontât les mêmes choses aux êtres qui les habitent.
Ces sacrifices accomplis, Bâhadou se leva de son trône, et, tirant son épée: « Maintenant, dit-il, que je suis roi de ce royaume, je mettrai sous mes pieds tous les ennemis du feu roi, et j’irai à Abdéokuta venger sur ses habitants la défaite de mon père. » Deux de ses principaux ministres, nommés Mingah et Mévu, prirent après lui la parole pour répéter à peu près les mêmes choses; puis tout le monde se mit en marche pour entrer enfin dans la ville.
Le 17, le roi fit battre le gong pour annoncer que la Grande Coutume commencerait sous peu de jours. Ce terme rapproché contraria vivement les Européens qui se trouvaient dans la capitale, mais ils ne purent faire autre chose que de s’y résigner.
Cette sinistre cérémonie s’ouvrit le dimanche 22. Dès le point du jour, cent hommes furent mis à mort, et, à ce qu’on m’assura, à peu près autant de femmes massacrées dans l’intérieur du palais. Le roi sortit, au bruit de la mousqueterie; quatre-vingt-dix officiers et cent vingt princes ou princesses vinrent le saluer, en lui présentant chacun plusieurs esclaves (de deux à quatre) pour être sacrifiés en l’honneur de son père. Deux ou trois résidents portugais les imitèrent. Ils offrirent, si je suis bien informé, une vingtaine d’hommes, et, en outre, des boeufs, des moutons, des chèvres, des volailles, des cauris, de l’argent, du rhum, etc. Le roi s’attendait évidemment à ce que cet exemple serait suivi par d’autres Européens; mais, heureusement, ceux-là furent les seuls à commettre ces détestables actions.

Le vendredi 1° août, le roi vint en personne procéder aux funérailles de son père. On ensevelit dans le sépulcre royal soixante hommes, cinquante moutons, cinquante chèvres, quarante coqs et une grande quantité de cauris. Les soldats des deux sexes firent ensuite de grandes décharges, pendant que le roi faisait à pied le tour du palais. Quand il fut revenu devant la porte, on tira de nouveau de nombreux coups de fusil, et là encore on massacra cinquante esclaves. Il avait plu à Sa Majesté de faire grâce à dix autres.
Le lendemain, le roi jeta dans les rangs de la foule des cauris et divers effets d’habillement, pour se procurer le plaisir de la voir se disputer ces largesses.
Durant ce premier acte de la Coutume, les visiteurs du roi lui firent d’énormes présents. Plus de trois semaines furent ainsi employées, et nous restâmes là environ deux mois sans pouvoir obtenir la permission de nous en aller. Je l’obtins enfin le 1° septembre, mais à la condition expresse de revenir le 12 octobre pour assister à la suite des cérémonies.
… A peine de retour à Abomey, nous fûmes appelés au palais. Près de la porte, nous vîmes quatre-vingt-dix têtes humaines, tranchées le matin même; leur sang coulait encore sur le sol comme un torrent. Ces affreux débris étaient étalés de chaque côté de la porte, de manière que le public pût bien les voir. Quand nous fûmes assis en présence du monarque, il nous montra les présents qu’il allait envoyer à l’esprit de son père: c’étaient deux chariots, des roues, trois plats, deux théières, un sucrier, un pot à beurre, le tout en argent massif; un somptueux coussin placé sur une sorte de brouette, que devaient traîner six amazones; trois superbes hamacs en soie avec des rideaux de même étoffe, etc., etc.
Trois jours après, nouvelle visite obligée au palais et même spectacle: soixante têtes fraîchement coupées, rangées, comme les premières, de chaque côté de la porte, et, trois jours plus tard, trente-six. Le roi avait fait construire, sur la place du marché principal, quatre grandes plates-formes, d’où il jeta des cauris au peuple, et sur lesquelles il fit encore immoler environ soixante victimes humaines. J’estime que, pendant la célébration de ces horribles fêtes, plus de deux mille êtres humains ont été égorgés, les hommes en public, les femmes dans l’intérieur du palais.
Etant tombé malade le lendemain, je passai trois jours sur mon lit, sans que personne me donnât une bouchée de pain ou une goutte d’eau; mais cette maladie me servit d’excuse pour quitter la capitale, tandis que les autres visiteurs appelés furent obligés d’y séjourner encore. »
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Pour situer la période, il s’agit de la mort du roi Ghézo (1818-1858) et du couronnement du roi Glélé (1858-1889). Le successeur de Glélé fut Behanzin (1890-1894) renversé par les Français, et ce qui n’est pas étonnant, aidé par d’autres peuples noirs comme le fut Cortès par d’autres amérindiens voisins des Aztèques même si les Français, parfois en difficultés, avaient une situation plus solide que les conquistadors. Le chef de la LDNA qui prétend lutter contre l’esclavage a pris le nom du cruel et sanguinaire esclavagiste Behanzin... A noter que les festivités pour l’avènement de Béhanzin furent plus « modestes », la présence française qui l’oppressait, les peuples noirs s’étant placés sous la protection des troupe coloniales.
Auguste
 
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Re: Dahomey et rois noirs : esclavage, milliers de sacrifice

Message par BRH » Lundi 06 Juillet 2020 13:30:59

Le fait est -qu'en cette période de repentance exacerbée- il est utile de rappeler certaines vérités...

Behanzin est certainement le despote africain le moins sauvage de son époque, mais la comparaison n'est pas forcément flatteuse pour les autres royaumes sub-sahariens qui ont disparu dans la seconde moitié du XIXème siècle.
Tant que les Français constitueront une nation, ils se souviendront de mon nom !

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Re: Dahomey et rois noirs : esclavage, milliers de sacrifice

Message par Auguste » Lundi 06 Juillet 2020 15:59:47

Au musée Branly, aussi appelé "Chirac", on peut voir une collection de charmantes statuettes dorées du Togo, d’environ une quinzaine de centimètres, offertes vers 1936 à l’administrateur français de la colonie (confisquée en 1918 à l’Allemagne).
Cette touchante collection montre une émouvante cérémonie rituelle annuelle, qui exalte bien la richesse culturelle de ce continent.
Elle consiste en un merveilleux sacrifice religieux de jeunes hommes.
Ceux-ci sont ligotés sur des chaises que portent des esclaves, qui les amènent au bourreau. Ce personnage au rôle rituel crucial est lui aussi représenté, le sabre à la main, à côté d’une statuette représentant un esclave qu’il vient de décapiter. La tête de l’heureux supplicié gît par terre à côté.
La précision des détails est, on le voit, extrême, témoignant de la qualité de l’art africain, si injustement dénigré (oh, pardon!)
Pour ceux qui en sont curieux, ces statuettes se trouvent derrière la vitrine exposant les sculptures polynésiennes du peintre Gauguin (remarquables de puissance, en passant).
Oui, on peut voir quel crime contre l’humanité a été la colonisation, en particulier française, un véritable ethnocide qui a tué toute cette merveilleuse culture africaine en mettant fin à ses plus belles coutumes, comme l’ignominieuse abolition de l’esclavage TRADITIONNEL en 1905, encore une coutume culturelle volée à l’Afrique !
Auguste
 
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Re: Dahomey et rois noirs : esclavage, milliers de sacrifice

Message par BRH » Mardi 07 Juillet 2020 08:31:45

De plus en plus dans l'humour, Auguste...
Tant que les Français constitueront une nation, ils se souviendront de mon nom !

Napoléon
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Re: Dahomey et rois noirs : esclavage, milliers de sacrifice

Message par Auguste » Lundi 03 Août 2020 09:30:12

Il en faut dans un monde de brutes ! :mrgreen:
Auguste
 
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Re: Dahomey et rois noirs : esclavage, milliers de sacrifice

Message par Auguste » Dimanche 30 Août 2020 10:04:49

Horreurs coloniales par Georges Clemenceau.


L'illustration - 1891


Un " révérend Père " a visité en septembre dernier des villages de la rive droite de l'Oubanghi ( limite du Congo français ) et voici son récit de ce qu'il a vu :

On amène les esclaves sur le marché et celui qui ne peut pas se payer le luxe d'un esclave entier achète seulement un membre qu'il choisit à son goût. S'il choisit le bras, le client fait une marque longitudinale avec une sorte de craie blanche et le propriétaire attend qu'un autre client choisisse un autre bras et lui fasse la même marque. Chacun choisit ainsi les bras, les jambes, la poitrine etc..., et lorsque tous les membres ont été marqués, on coupe tout simplement la tête du pauvre esclave, qui est immédiatement dévoré sur place. Ces scènes sont atroces, mais s'expliquent après tout par la nécessité de satisfaire le plus respectable de tous les besoins : la faim.

Et puis, ce sont les moeurs des ancêtres. Quoi de plus vénérable que les traditions de famille ? Tous les jours dans les villages de cette immense Afrique noire, défendue contre la civilisation blanche par un soleil homicide, des scènes analogues se répètent depuis tant de milliers d'années qu'on n'en peut dire le nombre. Les autres continent de la planète, pendant cette interminable durée, ont offert des spectacles sans cesse renouvelés, qui n'ont guère différé que par la forme de ceux dont le récit nous paraît si choquant aujourd'hui.

Ce qu'il y a de plus curieux, c'est que nous ayons attendu jusqu’à nos jours pour éprouver cette louable répugnance. Ce qui est surprenant encore, c'est que l'horreur de ces atrocités ne nous révolte vraiment que si nous y sommes étrangers. L'anthropophage a bien des excuses. Il est si loin des bouillons Duval et de la Maison d'Or ! Il fait - tout comme nous mêmes - ce qu'il a toujours vu faire. Et s'il avait des juges, il ferait sûrement condamner comme anarchistes ceux qui lui parlent de faire autre chose. C'est une partie qu'il joue contre la destinée, comme fait partout l'homme jaune ou blanc se débattant plus ou moins heureusement contre la souffrance qui est sa loi de la naissance à la mort.

Je conviens qu'elles doivent être lamentables les réflexions du pauvre nègre, délicatement palpé par un camarade aux yeux luisants, aux dents aiguës, qui conclut en lui dessinant à la craie sur la poitrine le carré de côtelettes qu'il se réserve dans la boucherie de tout à l'heure. Mais il y a pas longtemps qu'il en fait lui même tout autant à d'autres frères, et il n'est pas surpris de l'aventure qu'un d'entre nous apprenant qu'il est atteint de cancer, de phtisie, de fièvre jaune ou de choléra. Et puis la sensibilité varie avec les races . l'Annamite, sa natte mortuaire sous le bras, marche au lieu de l’exécution dans la plus complète indifférence, s'arrêtant à la porte de ses amis pour leur dire un tranquille adieu, s'agenouillant sans liens pour recevoir le coup fatal, mourant sans protestation, sans un geste de révolte. Le nègre congestionné par le soleil a certainement le système moins affiné que le blanc. Et même dans notre race, que d'êtres stupéfiés par le malheur s'abandonnent passivement au destin !

Ceci pour atténuer l'horreur de l'anthropophagie, qui se défend après tout par son but utilitaire. le pauvre cannibale marqué d'avance à son tour pour le prochain massacre, peut très bien être un rêveur, un être doux et bon, un altruiste attendri partageant avec un moins fortuné le morceau de filet humain qui est sa propriété légitime, risquant sa vie pour un compagnon de misère, dévoué, désintéressé, exquis. Quel droit aurions nous au monopole de ces sentiments, nous qui vivons sans relâche des " frères inférieurs ", pour nous repaître de leurs substance ? Souffrent ils moins que le nègre recevant le coup fatal ? Ce n'est pas sûr, ils se lamentent bruyamment. Pensent ils moins ? Que cette réflexion nous rende indulgents pour l'antique anthropophagie de nos pères, continuée de nécessité par nos frères noirs.

Quelles leçons leur donnons nous d'ailleurs qui nous permettent de le prendre de si haut avec eux ? Qui est allé chercher des hommes sur la côte d'Afrique pour les enchaîner à la file et les livrer - contre argent - au fouet des planteurs d'Amérique ? Quelle torture leur fut épargnée ? Lisez dans les journaux des Etats Unis, avant 1880, les avis descriptifs des esclaves en fuite. Ce ne sont que marques au fer rouge, mâchoires fracassées, yeux crevés, membres mutilés ou scies. N'est ce pas l'oeuvre des blancs, des civilisés, des chrétiens ? Qui donc a épouvanté l’Amérique du sud du raffinement des supplices, qui donc l'a noyée dans le sang, sinon le conquérant catholique ? J'ai sous les yeux cinq photographies accusatrices prises dans la brousse de Bakel aux frontières du Sénégal et du Soudan. L'une est une exposition de têtes coupées, sous la garde d'un jeune nègre. Les quatre autres représentent des cadavres noirs amoncelés, effroyablement raidis dans la convulsion suprême. On peut compter les blessures. Pourquoi certains corps sont ils criblés de coups de pointes ? Pourquoi ces cadavres mutilés, ces têtes coupées ? Pourquoi ces hommes tués avec les mains liés derrière le dos ? Qu'on réponde si l'on peut et qu'on ose dire l'histoire des massacres. On connaît bien ces photographies au ministère des colonies. L'Illustration les a reproduites en 1891. Leur authenticité ne peut être l'objet d'un doute.

Voilà l'enseignement des blancs, fils du Christ, aux païens noirs. C'est une leçon de choses qui révolterait sans doute de dégout et d'horreur les anthropophages de l'Oubanghi. Des deux boucheries humaines, la plus explicable est assurément celle de l'homme qui a faim. Nos cannibales pensifs ne comprendront jamais les 30 000 parisiens de la semaine de Mai abattus sans que Gallifet, lui même, y ait mis la dent. On aura beau dire que c'est pour le plaisir des yeux, pour la pure satisfaction des âmes chrétiennes, ils répondront, eux, les barbares, que c'est pure sauvagerie. Voyez comme il est difficiles de s'entendre. On va donc détruire prochainement la boucherie humaine de l'Oubanghi. les noirs, au lieu d'être mangés, seront bientôt étendus dans la brousse, les mains liés derrière le dos, pourrissant fraternellement à coté de ceux qui, sans cet accident, seraient occupés peut être à la dépecer. C'est l'homme blanc qui passe, marquant sa route d'inutiles charniers.

Qui fera le compte de la douleur humaine accumulée dans toute l'étendue de la terre depuis l'apparition de la vie ? Qui sondera l'inépuisable réserve de souffrances dont l'humanité se prépare à faire l'avenir ? Mangez vous les uns les autres, frères de l'Oubanghi ! Après vous il y aura encore des mangeurs et des mangés .

G.Clemenceau ( la mêlée sociale )
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