L'Énigme des Invalides

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Message Publié : 20 Oct 2005 16:41 
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:salut: Il est clair que Napoléon en éxil et mort bien seul ainsi que son fils emprisonné, ne pouvaient que susciter les plus vives émotions, il ne manquait que la plume des poètes et le talent des conteurs pour raviver la flamme. :ange:

"Casimir Delavigne écrit ses premiers poèmes dont on imagine mal aujourd'hui le retentissement"

Pardonnez mon inculture mais je ne le connais pas. :bah:

Merci en tout cas pour tous ces récits post impériaux qui sont passionnants.
:2:


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Message Publié : 20 Oct 2005 22:50 
Les chansonniers de l'époque sont sans doute moins connus que leurs oeuvres. :ah!?:
Il n'en reste pas moins vrai que c'est en grande partie grâce à eux que la légende impériale prit son essor et se perpétua de génération en génération.


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Message Publié : 20 Oct 2005 23:11 
En 1827, Victor Hugo, converti au bonapartisme, compose sa célèbre"Ode à la colonne" :

- O monument vengeur ! trophée indélébile !
Bronze qui tournoyant sur ta base immobile,
Semble porter au ciel ta gloire et ton néant;
Et, de tout ce qu'a fait une main colossale,
Seul es resté debout; ruine triomphale
De l'édifice du géant !

Dans le culte de Napoléon , il puise de nouvelles sources et publie, en 1828, cet admirable poème intitulé "Lui", qui traduit bien l'obsession créée par la légende .

Toujours lui ! Lui partout ! ou brillante ou glacée,
Son image sans cesse ébranle ma pensée.
Il verse à mon esprit le souffle créateur.
Je tremble, et dans ma bouche abondent les paroles,
Quand son nom gigantesque, entouré d'auréoles,
Se dresse dans mon vers de toute sa hauteur.

Après les journées de Juillet qui marquèrent la fin du règne de Charles X et l'avènement de Louis-Philippe, alors que personne ne songeait sérieusement à offrir la couronne au fils de l'Empereur dont l'existence semble comme ignorée, tant la cour de Vienne s'efforce de l'isoler de ses compatriotes en le gardant captif à Schönbrunn, le sentiment napoléonien, contenu par les Bourbons, explose et se répand partout.
"Qui se fût promené dans Paris en regardant aux vitrines des marchands de gravures et de statuettes, en feuilletant les brochures, en écoutant les chansons populaires ou les harangues de carrefour, eût pu supposer que la révolution de 1830 venait de restaurer la dynastie impériale !"
Le prince d'Orléans, qui est monté sur le trône le 7 août 1830, tient à se concilier tous ceux qui ne cessaient de rêver au petit chapeau et à la redingote grise; il ne les craint pas.
"La grande ombre de Napoléon, a écrit Pierre de la Gorce, qui s'est projetée sur toute la Restauration, continue à hanter les imaginations; de là une force singulière pour qui s'abritera sous cette prestigieuse mémoire."
Il est certain que l'opinion bonapartiste bénéficie des souvenirs qui parlaient profondément aux entrailles du peuple, car le peuple aime à se souvenir de ce qui flatte son orgueil. Aussi, assiste-t-on, sous la monarchie de Juillet, au complet épanouissement de la légende.

(A suivre)


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Message Publié : 22 Oct 2005 0:29 
Un des premiers gestes de Louis-Philippe, en accédant au pouvoir, est de prêter serment sur le drapeau tricolore, "emblème vivant de la gloire impériale, tout autant que de la gloire républicaine", ce drapeau qui avait fait condamner Béranger à trois mois de prison, "ce divin drapeau qui flotte partout", écrivait Edgar Quinet au retour d'un voyage en Allemagne.
Un général expliquera plus tard que s'il avait servi la révolution de Juillet avec un dévouement particulier, c'est qu'elle ramenait "ce drapeau tricolore avec ses couleurs fascinantes pour un officier qui les avait si souvent suivies à la victoire".
La réapparition de ce drapeau, c'est le signal du réveil du sentiment napoléonien qui, assoupi pendant les dernières années de la Restauration, retrouve toute sa vigueur au cours des journées de Juillet; pour les vétérans de la Grande Armée, quel bonheur de saluer le drapeau auquel il ne manque que l'aigle !
La littérature, grande et petite, bonne et moins bonne, cherche son inspiration dans les souvenirs napoléoniens et trouve dans l'épopée des thèmes épiques que certains exploitent avec bonheur.
A son tour, le théâtre s'empare de la légende, et en l'espace de dix ans, on jouera pas moins de quatre-vingt-dix-sept pièces à la gloire de Napoléon.
A l'Ambigu, Benjamin Constant fait dire par l'acteur Talma à Mme de Staël :

... Vous n'auriez aucun travers
Si vous n'aviez gardé rancune
Au grand héros qu'admire l'univers.

Toute cette littérature, toute cette imagerie flattent le sentiment populaire et entretiennent les rêves; la légende, inlassablement, poursuit son chemin dans les esprits et dans les coeurs. Ceux-là même qui redoutaient Napoléon croient qu'il est sans risque d'exalter sa mémoire : "le général et le consul Bonaparte, écrit un républicain de Lyon, ont trop fait pour la France pour que la France ne pardonne pas à l'Empereur."
On lit dans une brochure : "Napoléon est descendu dans la tombe, mais le bonapartisme n'est pas mort; il s'est fait républicain."
Il existe un ensemble de croyances, de souvenirs, de traditions et d'espoirs, une mystique de caractère napoléonien, mais non pas un parti bonapartiste. On l'a vu, personne, ou presque, ne songe au malheureux duc de Reichstadt.
Ainsi, peut-on s'expliquer que Louis-Philippe veuille étayer d'évocations impériales un trône fragile; notant tous ces signes, il forme le dessein, non de combattre la légende, écrira Pierre de la Gorce, "mais de s'approprier le nom de Napoléon; et pour ainsi dire d'en capter les rayons glorieux".
Le roi rend au vainqueur d'Austerlitz de multiples et solennels hommages. Il décide de rétablir la statue de Napoléon sur la colonne Vendôme.
Le 28 juillet 1833, date commémorative de la Glorieuse Journée, la nouvelle statue est inaugurée par Thiers, en présence du roi qui donne le signal des acclamations au moment où le voile, qui recouvrait le sommet de la colonne, glisse à terre; levant son chapeau empanaché, le roi s'écrie : "Vive Napoléon !"

(A suivre)


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Message Publié : 22 Oct 2005 5:23 
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:salut: le roi s'écrie : "Vive Napoléon !" , il aurait du dire "Vive l'Empereur!" :4:
:2:


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Message Publié : 23 Oct 2005 22:01 
Faut tout de même pas trop lui en demander !
Il a déjà fait un effort méritoire. :4:


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Message Publié : 23 Oct 2005 22:19 
C'est aussi en 1831 que la Monnaie frappe une série de 165 médailles commémorant les grands événements du règne impérial. Toujours à la même époque, un diorama installé derrière le Château d'eau, rue Samson, expose une composition de Daguerre représentant le tombeau de Sainte-Hélène. La foule des Parisiens s'y précipite; le roi, accompagné de la reine Marie-Amélie et de toute la famille royale, s'y rend également; guidé par un ancien officier de la Grande Armée, devenu aide de camp du souverain, le général d'Houdetot, et les journaux ministériels s'empressent d'annoncer cette visite comme un hommage rendu par les Orléans à la mémoire de l'Empereur. La reine Hortense, de passage à Paris, ne veut pas manquer un spectacle aussi émouvant pour elle et va rue Samson, accompagnée de sa fidèle Valérie Masuyer, qui racontera plus tard la scène :

"Nous sommes à la veille du 5 mai, jour anniversaire de la mort du Grand Homme; cette date éveille chez la Reine un sentiment de curiosité pieuse et, malgré le risque qu'elle court d'y être reconnue, la pousse à s'aventurer dans cette salle, pour y voir le coin de terre où son père adoptif repose depuis dix ans. Le tableau n'est pas au-dessous de l'éloge fait par M. d'Houdetot. C'est la morne perspective de la vallée de Géraniums, à Sainte-Hélène : maquis profond, désert, dont les arêtes hérissées s'abaissent rapidement vers la mer... Pourquoi ce lieu et non pas un autre ? Qui donc aurait pu marquer d'avance ici l'achèvement de cette carrière ? Et quel sentiment de petitesse n'éprouve-t-on pas à voir couché sur si peu d'espace celui qui commandait au monde ? La foule qui nous entoure se livre sans doute à des réflexions semblables, car elle est grave et recueillie..."

Henri Heine écrivait qu'on ne se figurait pas à l'étranger combien le peuple français était encore attaché à Napoléon, nom magique qui l'éblouissait :

"Mille canons dorment dans ce nom aussi bien que dans la colonne de la place Vendôme, et les Tuileries trembleront si ces mille canons s'éveillent un jour. De même que les juifs ne prononcent pas sans nécessité le nom de leur Dieu, on désigne rarement ici Napoléon par son nom, on l'appelle presque toujours "l'Homme", mais on voit son image partout."

(A suivre)


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Message Publié : 24 Oct 2005 21:59 
Quelques mois plus tard, le 22 juillet 1832, le duc de Reichstadt meurt à Schönbrunn. Sa fin émouvante fournit une nouvelle occasion à la presse de proclamer la gloire napoléonienne. Bien qu'Apponyi écrive alors : "On pleure plus à Vienne le petit-fils de l'empereur d'Autriche qu'à Paris le fils de Napoléon", l'impression causée par la mort du jeune prince résonne douloureusement dans le coeur des Français et particulièrement dans les couches populaires. Le bulletin que "Le Temps" publiait depuis six semaines sur la lente agonie de l'Aiglon, réimprimé et vendu à un sou, excite la compassion.
Dans les chaumières, à côté du portrait de l'Empereur, on suspend celui de son fils et on entoure l'un comme l'autre de couronnes d'immortelles "comme la face du Sauveur durant la Semaine suivante".
Si certains avaient pu penser qu'à partir de cette date l'ombre de Napoléon, qui planait sur la Monarchie, allait s'évanouir à tout jamais, on s'apercevait qu'il n'en était rien comme le pressentait Metternich qui, peu de temps avant la mort du duc de Reichstadt, écrivait à son ambassadeur à Paris : "Je vous prie de rendre le Roi très attentif au personnage qui succédera au duc de Reichstadt; le jour du décès du duc, le jeune Louis Bonaparte se regardera appelé à la tête de la République française."
Or, lorsque la reine Hortense était venue à Paris quelques mois plus tôt, elle avait été accueillie avec bienveillance, bien que secrètement, par Louis-Philippe qui avait prononcé ces paroles encourageantes :"Le temps n'est pas loin où il n'y aura plus d'exilés. Je n'en veux aucun sous mon règne..."
Moins spectaculaitre, mais plus redoutable pour l'avenir, est la part que l'enseignement officiel accorde à l'épopée impériale, bien que les programmes d'histoire s'arrêtent à 1789.
Un "Manuel de l'Instituteur" édité en 1847, après avoir conté la chute de Napoléon 1er, ajoute : "Ainsi tomba du trône l'homme extraordinaire qui attacha si profondément son nom à un siècle et fit pendant vingt ans de la nation française la plus grande, la plus heureuse des nations."; un livre de lecture très répandu dans les écoles à la veille de la révolution de 1848, consacre deux chapitres à l'éloge de Napoléon : "Tous ces titres, il les a mérités par ses victoires et par le bien qu'il a fait à notre pays."


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Message Publié : 25 Oct 2005 11:02 
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:salut: Je me demande comment serait commenté ce "manuel de l'instituteur" aujourd'hui! :7:
:2:


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Message Publié : 25 Oct 2005 20:22 
Bonsoir,

Bravo Joker :prie: .

Amicalement


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