Albertuk: 1- Il y a de nombreux signes d'un empoisonnement à l'arsenic (ou d'une intoxication chronique fatale). Certains signes sont communs à d'autres maux, donc peu intéressants, et d'autres sont spécifiques à l'arsenic. Ces signes spécifiques sont notamment: a- de trouver de l'arsenic dans les cheveux, b- de noter les fameuses lignes de Mees dans les ongles, et quelques autres. Or les empoisonnistes se sont focalisés sur la seule présence d'arsenic dans les cheveux et ne retiennent pas les autres signes incontournables. C'est la raison pour laquelle Kintz et Bismuth ont tous deux admis que, sans ces signes, il était impossible d'affirmer que Napoléon était mort par empoisonnement ou intoxication à l'arsenic.
Alors, c'est mal poser le problème, car Napoléon n'est pas mort simplement d'une intoxication à l'arsenic. Je pense qu'il faut sortir de cette "querelle arséniale" parce qu'on oublie complètement le sirop d'orgeat, administré à Napoléon en mars et avril 1821...
Enfin, Mme Bismuth elle-même a confirmé que les symptômes suivants appartiennent bien à une intoxication chronique à l'arsenic:
-difficulté à se tenir debout; -tachycardie; pouls faible, maux de tête; sueurs; anxiété; -plaintes constantes relatives au froid aux extrémités et demande de bains chauds en permanence; -inappétence, abattement.
Par contre, 3 symptômes n'ont jamais été constatés:
-pas de mélanodermie -pas de bandes de Mees sur les ongles -pas de kératinisation des pieds.
Quant aux autres ci-dessus décrits, elle affirme qu'il sont communs avec le cancer digestif et l'insuffisance cardiaque terminale.
Cependant, rappelons que les professeurs Lucien Israël et Henri Pujol, cancérologues de réputation internationale, ont rejeté la possibilité d'un cancer digestif évolué.
Principalement et avant tout, parce que l'environnement périgastrique n'est pas celui d'un cancer de l'estomac évolué.
2- Personne ne conteste néanmoins cette présence d'arsenic mais, comme elle ne peut point être l'origine du trépas de Napoléon, et donc exclut tout acte criminel, alors on peut sans doute rechercher des causes variées de cette présence. Des mesures ont été faites depuis longtemps mais l'intérêt de l'approche Kintz est de démontrer que TOUTES les mesures antérieures doivent être considérées comme nulles et non avenues. Pourquoi? Deux raisons: a- avant sa méthode, on ne pouvait dissocier l'arsenic d'une autre substance comme l'antimoine et donc, les mesures précédentes cumulaient les taux arsenic+antimoine, et non arsenic seul; de plus, b- on ne savait pas dissocier de l'arsenic ingéré par rapport à l'arsenic reçu par contamination externe. Bref, toutes les mesures antérieures à celles de Kintz sont démontrées étant inutiles. Alors il faut se contenter des mesures récentes.
Admettons la nullité des mesures antérieures. Il n'en demeure pas moins qu'il est très imprudent de conclure que l'arsenic ne peut pas être à l'origine du trépas !
Dans la mesure où il était présent de manière chronique, son association avec le sirop d'orgeat était de nature à provoquer l'apparition d'un sel de mercure (cyanure de mercure), très nocif pour l'estomac et qui ne pouvait qu'aviver l'ulcère dont souffrait Napoléon.
3- C'est pour cette raison, je pense, que Weider avait demandé à Kintz de faire des tests en vue d'éliminer la part externe de la présence d'arsenic car, sans cela, les antagonistes avaient beau jeu de dire que l'arsenic présent dans les cheveux de Napoléon provenaient de contaminations externes quelconques. Le problème est ensuite le nettoyage utilisé par Kintz. Celui-ci trempe les cheveux pendant 4 heures pour décontaminer ceux-ci de l'arsenic externe. Est-ce suffisant? On peut en douter car une expérience menée par d'autres chercheurs (Munich) après Kintz a montré qu'un tel nettoyage n'avait réussi à éliminer que 40% de l'arsenic de cheveux volontairement contaminés pendant 10 jours. Notez que je n'ai jamais affirmé que je supposais que les mèches utilisées par Kintz avaient dû être trempées dans de l'arsenic pendant 200 ans ! Je disais simplement que la méthode (ou durée) de nettoyage avait été contestée par d'autres experts qui en ont déduit que la preuve de Kintz n'était pas suffisante. D'ailleurs Kintz l'a ensuite aussi affirmé en 2002, quoiqu'il reste sur sa conviction personnelle, mais non prouvée de façon scientifique, qu'on a bien affaire à une intoxication chronique chez Napoléon. Mais, voire point 1, il admet que cette intoxication n'a absolument pas pu être fatale à cause du manque des fameux signes complémentaires d'une mort par arsenic.
Je n'ai pas connaissance d'autres experts qui aient contesté les travaux de Kintz, sauf le pharmacien Yvan Ricordel, selon un protocole toujours non communiqué ce jour et dont on ne sait toujours pas qui a payé la facture...
C'est à la suite de cette contestation que Kintz a repris ses travaux qui ont donné lieu de sa part au rapport de 2005, où il note la présence incontestable d'arsenic minéral, autrement dit, la mort-aux-rats de l'époque...
4- Partant du principe qu'il n'a toujours pas été possible de séparer de façon indéniable l'arsenic ingéré de l'arsenic externe, on en reste au point précédent, à savoir que, compte tenu du manque de signes suffisants, on doit admettre que la plupart de l'arsenic trouvé dans les cheveux de Napoléon doit nécessairement provenir de contaminations externes depuis 200 ans, sans qu'il soit absolument nécessaire de connaitre lesdites causes de ces contaminations. Certaines causes ont pu trouver leur origine du vivant de Napoléon (par exemple contamination due à l'émanation de vapeurs arsenicales se fixant sur les cheveux de son vivant; ces vapeurs ont pu être causées par l'atmosphère d'étuve endommageant le papier peint de Longwood), et certaines causes ont pu trouver leur origine post-mortem (par exemple par la conservation depuis 200 ans dont, notamment, un trempage dans une solution de conservation même si celle-ci n'a eu lieu que pendant quelques semaines ou mois, et non 200 ans). On ne peut évidemment pas connaitre les causes externes exactes mais on ne peut que les admettre du fait des points précédents.
Ces arguties sont évidemment irrecevables au vu des analyses de Kintz en 2005. Sa conclusion est irréfragable: l'arsenic trouvé dans les cheveux et convenablement lavés cette fois, est bel et bien d'origine endogène et nulement EN AUCUN CAS, d'origine exogène. S'il a écrit le contraire, merci de m'en donner les références !
5- Y-a-t'il eu néanmoins une intoxication par de l'arsenic ingéré? Bien entendu elle a eu lieu, mais elle n'était pas criminelle et n'était pas suffisante à tuer Napoléon. Quelles sont les sources connues de cette ingestion? Dans le passé, on a cité les éléments possibles: a- les médicaments qu'avaient pris Napoléon (notons que Mme de Montholon qui en prenait aussi en quantité a elle aussi eu des cheveux avec un taux arsenic élevé et elle n'en est pas morte de cette cause pour autant), b- l'atmosphère d'étuve causant les émanations arsenicales du papier peint et autres, et donc causant à la fois une contamination externe (l'arsenic se fixant sur les cheveux) et une intoxication interne (l'arsenic étant inhalé), c- la longue histoire de Napoléon dans des campagnes militaires (l'arsenic se trouvant -apparemment- présent dans des munitions) ayant pu causer des inhalations dûes aux fumées arsenicales. Et il y a certainement d'autres possibilités compte tenu que l'arsenic se trouvait présent dans de nombreuses substances de cette époque. Mais toutes ces doses ne furent pas mortelles chez Napoléon (et Mme de Montholon) du fait du point 1 ci-dessus.
Voilà qui constitue une singulière contradiction avec le point 4 ? Napoléon a-t-il ingéré de l'arsenic, nous dit Albertuk, après avoir repoussé cette hypothèse ? Oui, mais cela pouvait être d'origine médicamenteuse...
Eh non, cela n'est pas. On n'utilisait pas l'arsenic minéral pour les préparations, même à cette époque. Enfin, Napoléon se défiait des potions et autres remèdes des charlatans (comme il appelait les médecins de son temps) !
Et puis, encore une fois, on oublie le sirop d'orgeat...
Je crois aussi fermement qu'il est inutile de se fatiguer trop à résoudre les points 2-5 sans avoir élucidé le point 1.
Je dois ajouter que, comme BRH, Weider et d'autres, je suis tout à fait partisan de l'ouverture du tombeau des Invalides pour en avoir le coeur net une fois pour toutes.
Je pense que les observations convenables ont été faites pour le point 1.
Pour le reste, je trouve la réflexion curieuse: si Napoléon n'a pas été empoisonné et que cela soit démontré, pour quelle raison ouvrir le tombeau ?
Voir si c'est bien lui ? Mais c'est une autre histoire...
Dernière édition par Bruno Roy-Henry le 20 Sep 2007 21:16, édité 1 fois.
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