L'Énigme des Invalides

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Message Publié : 21 Fév 2005 9:22 
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Inscription : 14 Déc 2002 16:30
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un extrait d'un livre du docteur Sue (père du romancier) intitulé "Anthropotomie Ou l'art d'injecter, de disséquer, d'embaumer et de conserver les parties du corps humain, &c".
Paris, 1765 :



pp. 178 sq.

"Chapitre Second

SECTION I
De l'embaumement

On trouve dans les temps les plus reculés des exemples de l'embaumement des cadavres. La vénération que les anciens conservaient pour les Rois et les Grands du Royaume, même après leur mort, avait introduit chez eux cette pratique. Ils croyaient par là témoigner à leurs parents ou à leurs amis l'amour qu'ils avaient pour eux.
La tradition nous apprend que de tous les peuples qui avaient cet usage, les Egyptiens étaient ceux chez qui il était le plus en vogue. Il y avait peu de personnes, de telles conditions qu'elles fussent, qui ne crussent manquer à la religion et au respect dû aux morts, s'ils n'avaient soin de faire embaumer le cadavre de leur parent, ou de leur ami.
Dans la suite cette coutume a passé chez les autres nations, commençant par les Romains ; et même de nos jours on sait que cette opération est en usage parmi les Grands.
Comme ce sont les Chirurgiens qui sont chargé de la pratiquer, nous allons donner, en faveur des Étudiants en Chirurgie, un abrégé de ce que l'on doit observer pour y réussir.


SECTION II
Ce que c'est que l'embaumement

On définit l'embaumement une préparation particulière de plusieurs sortes de drogues qu'on insère dans toutes les parties d'un cadavre, pour le préserver pendant long temps de la corruption.
Cette préparation est une composition de diverses liqueurs spiritueuses, de différents baumes, de gommes, et de plusieurs plantes aromatiques mises en poudre. Le mélange de tous ces différents ingrédients regarde particulièrement l'Apothicaire : cependant, suivant le célèbre M. Dionis, il est nécessaire qu'un Chirurgien non seulement soit instruit de la manière dont il faut s'y prendre pour embaumer un cadavre, mais encore qu'il soit en état de préparer lui-même tout ce qu'il faut pour cette opération, afin qu'il puisse suppléer au défaut de l'Apothicaire. Ces sortes d'occasions peuvent tous les jours se rencontrer, comme sur la mer, dans les armées, ou même à la campagne, lorsqu'un Seigneur vient à décéder dans son château, et qu'on est obligé de le faire transporter dans la sépulture de ses ancêtres, qui se trouve souvent dans des lieux fort éloignés.
Nous avons déjà fait remarquer que les drogues qui doivent entrer dans la composition de l'embaumement sont de différentes espèces, savoir, des liqueurs spiritueuses, des baumes, des gommes, des plantes aromatiques, et des sels.
Les premières et les secondes de ces drogues sont propres à faire un liniment pour frotter l'extérieur du corps, et pour en mettre dans l'intérieur des parties, afin de les mieux conserver.
Les autres sont propres à êtres mises en poudre pour être employées par couches dans les intervalles des parties, parce qu'elles forment une espèce de mastic qui garantit considérablement de la putréfaction.


SECTION III
De tout ce qui est nécessaire à l'embaumement

Lorsqu'il s'agit de faire un embaumement dans toutes les formes, on se sert de deux sortes de poudres, une fine, et l'autre plus grossière. Celle-ci sera composée de diverses plantes aromatiques prises les unes des racines, les autres des feuilles ou du bois, d'autres enfin des fleurs ou des fruits. Celles dont on prendra la racine, sont :
L'iris, lb ij
Le calamus aromaticus,
Le flambe, ou glayeul,
L'angélique,
L'aristoloche,
L'impératoire,
Le gingembre, II lb j [...]
Le tout sera mis en poudre. On y ajoutera quelques livres de sel marin avec du tan. Le tout mêlé doit faire environ la valeur de trente livres pesant. Cette poudre sera destinée principalement à remplir les grandes cavités, et à être mise par couches dans les intervalles des viscères qu'on mettra dans un baril, comme je l'expliquerai plus bas.
Pour ce qui est de la poudre fine, elle est beaucoup plus odoriférante, et plus conservative que le première. Cette poudre sera faite avec
L'aloès, lb ij.
L'oliban,
Le benjoin, [...]
Le tout sera bien préparé et bien pulvérisé pour le passer au travers d'un tamis fin, après quoi on le mettra dans quelque vaisseau pour le garder jusqu'à ce qu'on s'en serve.
Comme cette poudre est plus subtile que la première, on n'en prépare qu'environ dix à douze livres. On la met dans l'interstice des chairs pour remplir les scarifications qu'on est obligé de faire dans toutes les parties.
Quant au liniment, on le compose avec
De l'huile d'aspic, lb j.
De l'esprit de vin, IV pintes,
De l'huile de laurier, lb B. [...]
Le tout mêlé formera un liniment. Il est nécessaire que le Chirurgien soit présent lorsque le Plombier et le Menuisier prennent la mesure du corps pour faire le cercueil, afin qu'ils le fassent beaucoup plus grand. Il doit aussi être présent, lorsqu'il s'agit de faire le baril ou coffre qui doit renfermer les viscères. On met le coeur dans une boîte de plomb faite exprès. Le cercueil, le baril, et la boîte doivent être plus longs et plus larges que le corps et les autres parties, sans quoi il pourrait arriver que l'embaumement fait, ils ne seraient pas capables de contenir le corps et les autres parties, dont le volume est beaucoup augmenté par la quantité des poudres et l'épaisseur des bandes, lesquelles sont au nombre de cinq, et doivent avoir la longueur et la largeur nécessaires pour entourer toutes les parties du corps. Les deux premières auront quatre à cinq aunes de long et trois doigts de large. Elles serviront à entourer les extrémités supérieures. Les deux suivantes auront six ou sept aunes de long sur quatre travers de doigts de large, et sont destinées pour les extrémités inférieures. La cinquième bande enfin sera fort large et beaucoup plus longue que les quatre autres, et destinée à envelopper tout le reste du corps.


SECTION IV
De l'opération de l'embaumement.

Le chirurgien chargé de l'embaumement commencera par séparer le coeur des autres parties, et le mettra dans un vaisseau rempli d'esprit de vin, dans lequel il le laissera tremper, jusqu'à ce que les autres parties soient embaumées. Puis aidé de ceux qu'il aura choisis, il se mettra en devoir d'exécuter son opération.
Il fera d'abord approcher le baril du sujet. Après avoir mis dans le fond une bonne couche de la première poudre, il ôtera tous les viscères de la poitrine et du bas ventre, et après avoir bien lavé le canal intestinal, tant en dehors qu'en dedans avec l'esprit de vin, il le mettra avec les autres viscères lavés de même dans le baril, ayant soin de mettre dans les intervalles, en forme de couches, quelques poignées de la première poudre, ce qu'il continue jusqu'au niveau du baril.
S'il se trouvait trop grand, il faudrait alors le faire couper, afin que le baril étant couvert et soudé, les parties renfermées ne ballottent point lorsqu'on les transportera d'un lieu à un autre. Les cavités du tronc étant vidées, on absorbe le sang avec des linges ou une éponge : on les lave avec de l'esprit : puis on les remplit de la poudre grossière mêlée avec des étoupes. Il est assez indifférent par laquelle des trois cavités on commence. Cependant l'ordre semble demander qu'on commence par la tête, ensuite le col, puis la poitrine, et enfin le bas ventre.
Si l'on commence par la tête, on remplit le crâne de la poudre avec des étoupes et du crin, et on mettra par-dessus la calotte osseuse que l'on avait enlevée, et sur laquelle on verse de la liqueur et de la poudre balsamique, le tout soutenu par les lambeaux qui seront cousus. On versera aussi dans la bouche et dans les narines de la liqueur dans laquelle on aura trempé du coton destiné à remplir ces deux cavités, ce que l'on observera aussi pour les oreilles. On frottera le visage avec le liniment dont j'ai parlé plus haut, et dans lequel on trempera un pinceau ou du linge doux. On fera ensuite quelques incisions vers les tendons des muscles crotaphyres, entre les masséters et les buccinateurs, pour avoir la facilité de mettre dans les incisions et sur toute la face, de la poudre. On enveloppera la tête avec une espèce de coiffe de nuit que l'on arrêtera sous le menton, au moyen d'un petit ruban ou d'une bandelette. On fera la même opération dans toutes les parties antérieures du col.
On embaume ensuite les capacités de la poitrine et du bas ventre. Après en avoir ôté les viscères, on remplira chacune de la poudre mêlée avec des étoupes ou du crin, lequel est moins susceptible de corruption.
Ces deux capacités étant remplies, on rabaisse le sternum sur les côtes, et on verse de la liqueur spiritueuse entre elles et les téguments. On y met aussi de la poudre fine, et on fait enfin des coutures, dont la première, que l'on commencera au-dessus du sternum, finira au pubis, et les autres seront pratiquées sur les incisions transversales qui commencent aux régions lombaires, et vont joindre la première à l'ombilic.
[...]
Le coeur est la dernière partie que l'on embaume. Il faut d'abord avoir l'attention de bien le laver avec de l'esprit de vin ; puis on remplira les gros vaisseaux, les ventricules, et les oreillettes, de la poudre balsamique. Sa surface extérieure sera aussi recouverte de la même poudre mélangée avec le liniment. On a ensuite une poche de toile cirée et à peu près de la figure du coeur, dans laquelle on le met, et que l'on serre au moyen d'un ruban ou d'une ficelle, en conservant autant qu'il est possible, à ce viscère sa forme naturelle. Enfin on le mettra dans une boîte de plomb faite exprès, et dont la structure et la figure soient à peu près les mêmes. Cette boîte sera exactement soudée.
Nota que souvent l'on met le coeur dans une boite d'or, d'argent, ou de quelque autre métal, ce qui dépend de la volonté des parents ; au reste cette boîte, de quelque manière qu'elle soit, doit toujours avoir la figure du coeur qu'elle doit contenir."

FIN (p. 291).


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 Sujet du message :
Message Publié : 21 Fév 2005 10:38 
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Docteur
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Inscription : 09 Nov 2003 16:05
Message(s) : 1375
Localisation : Belgique
Bravo, Bruno vous m'avez devancé sur ce coup-ci!!
Je devais consulter cet ouvrage concernant les liqueurs aromatiques.
C'est donc chose faite! :2:

_________________
L'art d'être tantôt très audacieux et tantôt très prudent est l'art de réussir. N.


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 Sujet du message :
Message Publié : 23 Fév 2005 9:59 
Cela démontre encore une fois que Napoléon n'a pas été embaumé.

Citer :
On définit l'embaumement une préparation particulière de plusieurs sortes de drogues qu'on insère dans toutes les parties d'un cadavre, pour le préserver pendant long temps de la corruption.


Ca n'a pas été fait.

Les poudres et les produits, je ne sais pas.

Citer :
il ôtera tous les viscères de la poitrine et du bas ventre, et après avoir bien lavé le canal intestinal, tant en dehors qu'en dedans avec l'esprit de vin, il le mettra avec les autres viscères lavés de même dans le baril, ayant soin de mettre dans les intervalles, en forme de couches, quelques poignées de la première poudre, ce qu'il continue jusqu'au niveau du baril.


Ca non plus, ça n'a pas été fait.


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 Sujet du message :
Message Publié : 23 Juin 2005 22:14 
Qui aurait avancé, que Napoléon, aurait été embaumé ?


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 Sujet du message :
Message Publié : 27 Juin 2005 9:14 
Des personnes qui ne peuvent expliquer autrement l'excellente conservation du corps.


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