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De l'arsenic minéral, connu sous l'appellation populaire de "mort-aux-rats", a été découvert dans les cheveux de Napoléon par un toxicologue français, a annoncé, mercredi 1er juin, la Société napoléonienne internationale.
Cette annonce relance la piste d'une mort par empoisonnement, et non des suites d'un cancer de l'estomac, de l'empereur déchu, le 5 mai 1821, à l'âge de 51 ans. Les causes exactes de la mort de Napoléon suscitent une polémique depuis des décennies.
UNE CONCENTRATION TRÈS ANORMALE Cette étude a été menée par le Dr Pascal Kintz, président de l'association internationale des toxicologues de médecine légale, qui avait déjà mis en évidence, en 2001, une concentration très anormale d'arsenic sur des cheveux de l'empereur déchu. Elle sera présentée jeudi après-midi à Illkirch-Graffenstaden, dans la banlieue de Strasbourg (est), où exerce le Dr Kintz, en présence du représentant français de la Société napoléonienne internationale, Jean-Claude Damamme, qui a révélé une partie de ces résultats.
"La nature exacte de l'arsenic retrouvé est de l'arsenic minéral, la forme la plus toxique, connue sous l'appellation populaire de 'mort-aux-rats'", a-t-il indiqué, soulignant que pour "la première fois" les analyses avaient été pratiquées à l'intérieur des cheveux de Napoléon et non plus seulement sur leur enveloppe capillaire. "Lorsqu'on donne un poison aussi violent à un individu, ce n'est pas pour prolonger sa vie", a observé M. Damamme.
LA THÈSE PRÉCÉDENTE REJETÉE "L'arsenic est arrivé dans la 'moelle épinière' du cheveu, ce qui implique qu'il a été poussé par le flux sanguin et qu'il provient d'aliments ingérés", a-t-il poursuivi, rejetant ainsi la thèse, avancée notamment en 2002 par le mensuel français Science et vie, selon laquelle l'arsenic détecté était d'origine exogène et n'avait pas été absorbé par l'empereur.
Le mensuel français avait, entre autres, rappelé que l'arsenic était communément utilisé au XIXe siècle pour conserver les cheveux. La dernière étude sur cette affaire, publiée en mai par des chercheurs suisses, affirmait que Napoléon n'était pas mort empoisonné mais bien d'un cancer de l'estomac. La présence de l'arsenic était expliquée par la coutume des vignerons de l'époque de nettoyer leurs cuves avec cette substance et le goût de l'empereur déchu pour le vin.
A ce propos, M. Damamme a remarqué que les chercheurs suisses ne précisaient pas quel type d'arsenic utilisaient les vignerons, certainement pas, selon lui, de la "mort-aux-rats", beaucoup trop dangereuse. Toujours selon M. Damamme, l'empereur n'était pas, contrairement aux dires de ces chercheurs, un grand amateur de vin, n'en buvait pas plus d'un verre par jour et encore "coupé avec de l'eau".
Napoléon a bien été empoisonné
Epilogue d'une polémique vieille de quarante ans, les dernières analyses toxicologiques effectuées sur les cheveux de Napoléon confirment, de manière irréfutable, que l'Empereur a bien été victime d'un empoisonnement chronique à l'arsenic.
Des cheveux révélateurs (Afp) LA THÈSE de l'arsenic, décelé dans des mèches de cheveux de l'Empereur, a été avancée dès 1961 et étayée au fil des années par plusieurs autres analyses, notamment en 1995 et en 2000. Mais les tenants d'une autre théorie, selon laquelle Napoléon serait mort d'un cancer de l'estomac, n'ont jamais baissé les bras ; pour eux, l'arsenic retrouvé dans les cheveux ne signerait pas une intoxication, mais proviendrait tout simplement des produits conservateurs utilisés après la mort de l'Empereur. A la demande du président de la Société napoléonienne internationale, le Canadien Ben Weider, de nouvelles analyses ont été effectuées tout récemment par le Dr Pascal Kintz, toxicologue spécialiste du cheveu, et présentées lors de l'inauguration du laboratoire Chem Tox à Strasbourg. La spectrophotométrie d'absorption atomique électrothermique a permis de mesurer précisément les doses d'arsenic, supérieures de 7 à 38 fois aux doses naturelles. Surtout, l'analyse effectuée grâce au Nano-Sims a montré que l'arsenic se trouvait au cœur du cheveu, dans la médulla, et non pas autour de lui. Cela prouve que l'arsenic a été véhiculé par le flux sanguin, et non par une contamination exogène.
Mort-aux-rats. Il a été possible de déterminer la nature de l'arsenic retrouvé, de type minéral (AsIII) et non pas organique. En clair, il s'agissait de mort-aux-rats, vraisemblablement versée tous les jours à faible dose dans le vin consommé par l'Empereur. Toutefois, précise le Dr Kintz, « rien ne permet d'affirmer la théorie du vin, pas plus que d'autres produits : nos analyses sont irréfutables quant à l'arsenic utilisé et à l'intoxication mais n'expliquent pas son origine ». Elles ne désignent pas un coupable et les hypothèses restent entières. On a parlé notamment du comte de Montholon, un proche de l'Empereur à Sainte-Hélène, mais aussi du gouverneur de l'île, Hudson Lowe. Mais il ne sera jamais possible de le savoir. Si la science explique désormais les causes de la mort, elle confirme en outre l'origine des signes cliniques relevés sur Napoléon au cours des trois dernières années de sa vie. Un généraliste strasbourgeois, le Dr Bernard Charton, a étudié récemment tous les rapports et toutes les études et descriptions portant sur l'Empereur à Sainte-Hélène et a identifié plus de 80 symptômes mentaux ou physiques. « Pris séparément, explique-t-il, ils ne signifient rien, mais, ensemble, ils révèlent clairement une intoxication arsenicale. » Le Dr Charton, qui a publié ces observations et son diagnostic en 2003 (« Napoléon empoisonné à l'arsenic », éditions Résurgence), se félicite de la confirmation apportée par les toxicologues à ses hypothèses et rend hommage aux médecins et observateurs de l'époque, qui ont décrit avec la plus grande minutie les symptômes de Napoléon et mené des expérimentations sur de nombreuses substances toxiques entrées en contact avec lui. C'est grâce à eux, souligne-t-il, que les premiers soupçons ont pu être émis dès la mort de l'Empereur, bien avant le diagnostic toxicologique.
> D. D. B.
Le Quotidien du Médecin du : 07/06/2005
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