L'Énigme des Invalides

AU NOM DE L'HONNEUR !

Je ne veux faire ce soir que trois observations :

1/ Chateaubriand ( et tant d'autres avec lui )n'emploie pas le mot "assassinat" dans son sens étymologique mais dans son sens juridique , c'est à dire comme synonyme de " meurtre prémédité " ( je rappelle que le duc d'Enghien n'avait pas encore comparu devant ses "juges" que déjà sa tombe était creusée dans les fossés de Vincelles).

2/ Le duc d'Enghien n'est pas un traître : il faut accepter l'idée ( je ne dis pas la partager ) que pour les légitimistes , à l'époque de la Révolution , la patrie n'est pas seulement un territoire et un peuple dont on se doit de servir le maître quel qu'il soit :pour eux , la France est là où est le Roi , et cette idée , qui fait leur honneur et donne un sens à leur combat , ne peut pas objectivement être niée pour les ravaler au rang de traîtres ( elle peut l'être subjectivement , mais on entre alors dans une optique exclusivement partisane et non plus historique ) .

3/ Le duc d'Enghien n'était pas un conspirateur. Il était un combattant et il le revendiquait car c'était son honneur comme je viens de le dire , mais il a nié pendant le peu de temps qu'on l'a laissé s'exprimer toute implication dans un quelconque complot comme indigne de ses principes . Et à cet égard , le dossier est complètement vide , et Bonaparte le savait comme tous ceux qui l'ont assisté dans cette sinistre affaire qui coupa l'Empire de la droite de l'époque ( les catholiques royalistes que le Concordat avait en grande partie gagnés ) et l'ancra à gauche ( avec les révolutionnaires qui étaient des alliés de circonstance et contre nature ).Surtout , ce drame bouleversa la situation internationale du Consulat , renforça la position de l'Angleterre , dressa contre lui la Prusse , la Russie et l'Autriche , et , en définitive , provoqua la coalition suivante.

Depuis bientôt 200 ans que ce forfait a été commis , il n'a pas manqué de volontaires pour tenter de salir le duc d'Enghien sur le chapitre de l'honneur . Aucun n'y est parvenu.
Le plus simple est de donner la parole au général HULIN qui présida la commission chargé de le "juger".Jusqu'à sa mort , ce brave homme resta hanté par le souvenir de ce à quoi il avait prêté la main , et il écrivit une justification où le duc d'ENGHIEN apparaît dans toute la pureté de son âme :

" Je procédai à l'interrogatoire du prévenu . Je dois le dire , il se présenta devant nous avec une noble assurance , repoussa loin de lui d'avoir trempé directement ou indirectement dans un complot d'assassinat contre la vie du premier consul . Mais il avoua aussi avoir porté les armes contre la France , disant avec un courage et une fierté qui ne nous permirent jamais , dans son propre intérêt , de le faire varier sur ce point , qu'il avait soutenu les droits de sa famille , et qu'un Condé ne pourrait jamais rentrer en France que les armes à la main.Ma naissance , mon opinion , ajouta-t-il , me rendent à jamais l'ennemi de votre gouvernement.
La fermeté de ses aveux devenait désepérante pour ses juges. Dix fois , nous le mîmes sur la voie de revenir sur ses déclarations , toujours il persista d'une manière inébranlable : [/i]Je vois , disait-il par intervalles , les intentions honorables des membres de la commission , mais je ne peux me servir des moyens qu'ils m'offrent.Et sur l'avertissement que les commissions militaires jugeaient sans appel : Je le sais , me répondit-il , et je ne me dissimule pas le danger que je cours.Je désire seulement avoir une entrevue avec le premier consul."

Il n'y a pas de place chez un homme de cette trempe pour la moindre bassesse.Mais il est vrai qu'à plusieurs reprises il réclama cette entrevue avec Bonaparte , ajoutant qu'une conversation de quelques minutes suffirait à dissiper tout malentendu : son âme sans tache faisait même le crédit à celui qui voulait sa mort de le croire sensible au seul contact d'un homme d'honneur. Que Napoléon , à partir de là , se soit imaginé que le duc d'Enghien voulait lui proposer de devenir son aide de camp...Je crois vraiment que cette interprétation n'était pas à son honneur...

Roy-Henry
Colonel



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Posté le: Jeudi 28 Fév 2002 22:28 Sujet du message:

Triste scène que cette exécution dans les fossés de Vincennes, à la sauvette, suite à un "jugement" bâclé, précipité...

Le coeur se serre à évoquer de telles scènes: un jeune duc courageux, follement romantique, héritier d'un des plus grand de France... Ah! c'est comme Arcole étouffant le souvenir de Rocroi!

Napoléon avait sans doute ses raisons pour agir ainsi... Je ne le condamne pas, je ne l'absous pas. Cette page est odieuse et pourtant... elle existe!

Quel était ce mystérieux prince qui devait débarquer sur les côtes françaises? Le comte d'Artois (futur Charles X)?

Il était encore bien trop lâche pour s'y risquer! Or, si quelqu'un aurait dû être fusillé, c'est bien lui pour avoir "soldé" plus de cent brigands pour poignarder "le corse aux cheveux plats" (et son complice Pitt).

Je respecte Charles X! je déteste Artois... Comprenne qui pourra!

François:

Je lis des horreurs sur le forum à propos du duc d'Enghien ! Est-il possible qu'ici , on reproche à un homme la fidélité à l'honneur , à son droit , et à ses pères , pour n'en faire qu'un comploteur vulgaire intéressé à la défense d'intérêts matériels !
Reprocher à ENGHIEN son combat contre la Révolution , c'est reprocher à DENIKINE celui qu'il a mené contre Lénine !
Louis XVI , c'est Nicolas II , par sa vie , par sa mort , par son droit !
La Révolution , elle est la même partout : c'est l'envie du voisin qui a plus , la rage de le lui prendre , la haine qui fait de l'innocent un criminel !
Non , mes amis , il n'est pas possible que le remords qui atteint tous les protagonistes de l'assassinat du duc d'Enghien , y compris Napoléon lui-même ( "ce malheureux" , dit-il , en le désignant dans sa colère de la terrible scène du 28 janvier 1809 où il tente de rejeter la responsabilité du crime sur Talleyrand ) , il n'est pas possible que , deux siècles plus tard , vous y soyez vous-mêmes insensibles !


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François
Sergent



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Posté le: Samedi 09 Mar 2002 12:16 Sujet du message: ENGHIEN S'EST SUICIDE !!!


Si l'on suit bien votre logique , Florian , vous reprochez au duc d'Enghien de ne pas s'être comporté comme un lâche pour sauver sa vie ! Et même ,à vous suivre encore , ayant pris conscience tout à coup de l'opportunité inespérée qui s'offrait à lui , Enghien aurait choisi de mourir dans l'honneur pour se garantir un nom dans l'Histoire ! Tant pis pour cet hypocrite de "fils à papa " : il n'a eu que ce qu'il cherchait ! Je vous propose mieux encore , Florian : et si Enghien avait tout monté depuis son projet d'enlèvement jusqu'à son suicide camouflé en assassinat grâce à d'habiles manoeuvriers qui auraient manipulé d'un bout à l'autre Bonaparte et tous ses exécutants ?...Intéressant , non ? On s'essaye à démontrer ça ?...

François
Sergent



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Posté le: Samedi 09 Mar 2002 15:54 Sujet du message: Sang à bon marché et jugements à l'emporte-pièce...


Voilà plus de deux cents ans que la Révolution bourre le crâne de générations de jeunes Français en leur faisant croire qu'elle s'identifie à la France et que ceux qui prennent les armes contre la Révolution les prennent contre la France ! Lénine , Hitler , Staline , Mao et tant d'autres , ont repris ctte idée totalitaire à leur compte pour soutenir leurs régimes de terreur ! Alors que ce sont les révolutionnaires eux-mêmes qui sont responsables de ce que la "patrie devient errante " , selon le mot très expressif de Chateaubriand , pour tous ceux qui refusent leurs dictatures . Oui , Messieurs , que vous le vouliez ou non , la France est devenue errante avec son Roi à partir de 1792 pour toux ceux qui lui sont demeurés fidèles , et il faut être bien ignorant des traditions de l'ancienne France pour prétendre en remontrer à ces hommes-là sur le chapitre de l'honneur .

Quant aux Louis XVIII et aux Pétain , priez le ciel , jeunes gens , de n'en avoir jamais besoin pour vous épargner les neiges de la Sibérie !

Roy-Henry
Colonel



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Posté le: Samedi 09 Mar 2002 16:52 Sujet du message: Ou les sables d'Arabie!

Non, vraiment, mes chers camarades, terminons ce débat sur ce triste épisode qui revient sans cesse comme une ritournelle. Enghien a été fidèle à sa conception de l'honneur et à son Roi! On ne peut lui en vouloir et s'étonner à bon droit des formes extraordinaires employées pour le coucher dans le fossé de Vincennes.

Ceci étant -je le répète- Artois fut bien présomptueux d'armer le bras de cent sicaires pour venir à bout de Buonaparte. Il était fatal que celui-ci à son tour emploie des moyens que la morale réprouve pour mettre un terme à la scélératesse d'un assassinat tout de même peu glorieux pour ses concepteurs.

Louis XVIII -paraît-il- réprouva l'attitude de son frère...

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François
Sergent



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Posté le: Samedi 09 Mar 2002 17:19 Sujet du message: LA FAUTE A ROUSSEAU !


Je lis , dans Stanislas de Girardin , ce mot de Bonaparte à l'issue d'une visite à Ermenonville sur la tombe de J.J. ROUSSEAU , dans le jardin des Girardin ( 28 aôut 1800 ):

- C'est un fou , votre Rousseau ! Il aurait mieux valu pour le repos de la France que cet homme n'eût pas existé ! C'est lui qui a préparé la Révolution et nous a menés où nous sommes !

Et encore ! Il n'avait rien vu de la suite ![b]