L'Énigme des Invalides

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Message Publié : 27 Déc 2022 19:45 
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https://www.corsematin.com/articles/sto ... tum-135492


Au dey d'Alger réclamant 200 000 piastres pour respecter un traité de paix avec la France, Bonaparte réplique en menaçant "de détruire Alger et de s'emparer de toute la côte d'Afrique", réussissant là où Charles Quint a échoué

Le 28 décembre 1801 (7 nivose an X), un traité signé entre le Premier Consul et la Régence d'Alger, émanation de la puissance ottomane, garantit explicitement à la France la liberté de navigation et de commerce sur les routes maritimes de Méditerranée.

Cette paix conclue, les navires français reprennent la mer, leurs équipages estimant pouvoir voyager en toute confiance. Or, peu de temps après, ce traité est rompu brutalement par Mustapha-Pacha, le dey d'Alger. Les navires en provenance de Toulon à destination de Saint-Domingue sont arraisonnés par les corsaires et détournés.

Le pavillon de la République n'est plus respecté, son territoire non plus. Un bâtiment napolitain est capturé dans la rade d'Hyères, et un officier de la marine marchande frappé à coups de bâton par un raïs en rade de Tunis. Enfin, on reste sans nouvelles des 150 hommes d'un navire français échoué durant l'hiver sur la côte algérienne.

Ces actes de piraterie indignent le Premier consul qui demande réparation et des explications dans une lettre au dey d'Alger, indiquant notamment : « Si vous voulez vivre en amitié avec moi, il ne faut pas que vous me traitiez comme une puissance faible, il faut que vous fassiez respecter le pavillon français, celui de la République italienne qui m'a nommé son chef et que vous me donniez réparation de tous les outrages qui m'ont été faits. » (1) Cette lettre officielle fait suite à de précédents messages restés sans réponse, ne faisant qu'accroître la colère de Bonaparte.

Depuis le XVIe siècle, les Barbaresques ont changé de stratégie. S'ils ne viennent plus razzier comme au temps de Dragut les populations des îles et des côtes de Méditerranée, provoquant les expéditions punitives de Charles Quint, ils se livrent désormais à la guerre de course, ne se privant pas de capturer les navires marchands venant des ports français. « Le Consulat ne peut plus supporter de tels agissements qui compromettent les transports maritimes indispensables aux liaisons avec les théâtres des campagnes outre-mer, notamment en Égypte ou aux Antilles… Il importe donc de mettre la Régence d'Alger à la raison, par une action diplomatique de préférence à une expédition militaire. » (2)

Bonaparte hausse le ton en mêlant la menace à la diplomatie. Dans le rapport circonstancié établi par Talleyrand, ministre des relations extérieures, sur la situation vis-à-vis d'Alger, il est dit que « le chargé d'affaires demande satisfaction et ne l'obtient pas ; on ose lui faire des propositions injurieuses à la dignité du Peule français : on veut que la France achète l'exécution du traité ! »

Autrement dit, le respect par Alger du traité du 28 décembre 1801 exige du gouvernement de la France le versement d'une somme de 200 000 piastres. Procédé qui rappelle celui des Barbaresques ne libérant leurs captifs qu'en échange d'une rançon. Bonaparte ne manque pas de faire connaître l'attitude d'Alger auprès de Selim, sultan éclairé et réformateur, manière de solliciter les Turcs par une pression diplomatique.

« Je débarquerai 80 000 hommes sur vos côtes et je détruirai votre régence »

Le 27 juillet (8 thermidor) la crise est à son point culminant. Bonaparte depuis la Malmaison écrit au dey en menaçant de « détruire Alger et de s'emparer de toute la côte d'Afrique », proclamant en substance : « Je vous fais connaître également mon indignation sur la demande que vos ministres ont osé faire, que je paie 200 000 piastres. Je n'ai jamais rien payé à personne… Et si Dieu ne vous a pas aveuglés pour vous conduire à votre perte, sachez ce que je suis et ce que je peux faire. Si vous refusez de me donner satisfaction, je débarquerai 80 000 hommes sur vos côtes et je détruirai votre régence, car enfin je ne souffrirai pas que vous traitiez mon pavillon comme vous traitez celui des petites puissances du Nord et des petites puissances d'Italie… »

Le 6 août 1802, une escadre française aux ordres du contre-amiral Leisseygues se met en route pour Alger. Partie de Toulon, elle est envoyée par Bonaparte Premier consul, porteuse d'un message délivré par le lieutenant-commandant Hulin pour le dey d'Alger, Mustapha-Pacha.

Le 18 août, l'état-major de l'escadre descend à terre où il est reçu avec déférence par le dey dans le plus magnifique kiosque des jardins de la Régence. Le dey change de ton, présentant des excuses, affirmant « le désir de vivre en bonne intelligence avec la République française », répondant point par point aux objurgations du Consulat.

« Vous vous plaignez du raïs Ali-Tatar. Je l'ai arrêté pour le faire mourir. Au moment de l'exécution, votre consul m'a demandé sa grâce en votre nom, et pour vous, je l'ai délivré… Vous demandez la punition du raïs qui a conduit ici deux bâtiments de la République française. Selon vos désirs, je l'ai destitué ; mais je vous avertis que mes raïs ne savent pas lire les caractères européens… Vous demandez 150 hommes que vous dites être dans mes États ; il n'en existe pas un. Dieu a voulu que ces gens se soient perdus, et cela m'a fait de la peine. »

Enfin, le dey donne pour consigne à ses raïs de respecter le pavillon français : « Je punirai le premier qui conduira dans mes ports un bâtiment français. » Concernant la somme réclamée, Mustapha-Pacha fait profil bas : « Vous n'avez pas voulu me donner les 200 000 piastres que je vous avais demandées pour me dédommager des pertes que j'ai essuyées pour vous. Que vous me les donniez ou que vous ne me les donniez pas, nous serons toujours bons amis. »

Le dey ne précise pas de quelles « pertes » il s'agit en l'occurrence. Dès lors, les deux puissances vivront une période de paix, le Premier Consul s'étant montré persuasif auprès d'Alger. Cependant l'épineuse question de la piraterie rebondit, au moment où Napoléon déchu connaît l'exil à l'île d'Elbe. Le Congrès de Vienne reprend la lutte contre les corsaires algériens.

L'Angleterre, puissance navale, envoie une flotte considérable sous le commandement de Lord Exmouth qui arrive en rade d'Alger en avril 1816. Au nom des royaumes de Naples et de Sardaigne, l'envoyé anglais conclut une paix jugée bien trop onéreuse par les belligérants qui demandent à Londres de déchirer ces nouveaux traités.

En août 1816, une armada anglo-hollandaise se présente à nouveau devant Alger. Un ultimatum est remis au Dey exigeant l'abolition de l'esclavage des chrétiens et la délivrance de tous les prisonniers de cette religion. Sans réponse du Dey, la flotte ouvre le feu, provoquant destructions innombrables et pertes humaines.

Le 28 août, après un second ultimatum, le Dey accepte les conditions dictées par l'amiral britannique et fait ses excuses. Au final, les Algériens auront perdu 2 000 hommes dans l'incendie de leurs navires. Le recours à la force par Lord Exmouth a permis la libération de 1 200 esclaves chrétiens.


_________________
"Tant que les Français constitueront une Nation, ils se souviendront de mon nom."

Napoléon.


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Message Publié : 05 Jan 2023 12:46 
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Inscription : 09 Nov 2005 14:28
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Le rapport de forces : il n'y a que cela que les gens comprennent... :salut:


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