L'Énigme des Invalides

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Message Publié : 08 Sep 2022 10:37 
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Il semble bien qu'à Düben, Napoléon a eu un temps d'hésitation. Sans être anti-napoléon, on peut dire qu'il a au moins perdu une journée, avant de donner l'ordre de gagner Leipzig ! Ce temps perdu lui a coûté la victoire... :bouhou:


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Message Publié : 07 Oct 2022 15:14 
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Inscription : 14 Déc 2002 16:30
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En fait, non. Napoléon n'a pas hésité à Düben. Jusqu'au 11 octobre au soir, il veut passer l'Elbe, en tout cas, détruire Bernadotte et Blücher, même s'il pressent que ce dernier se retire pour éviter tout combat. Aux 1ère heures du 12 octobre, il apprend que Blücher s'est retiré sur Halle, qu'il pourra ainsi s'abriter derrière la Saale et descendre vers Leipzig. Instantanément, il rappelle toutes ses troupes pour marcher vers Leipzig. Problème : Reynier, Souham et Mac-Donald sont déjà trop loin pour revenir prestement.

https://www.napoleon-histoire.com/corre ... re-1813/4/


Düben, 11 octobre 1813, trois heures du matin.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Düben.

Mon Cousin, accusez au duc de Tarente la réception de sa lettre de Falkenberg. Réitérez-lui l’ordre de partir aujourd’hui à six heures du matin et de passer de bonne heure sur la rive droite; que toute l’armée ennemie paraît centralisée à Dessau ; que mon intention est de marcher par la rive droite sur les ponts de Roslau; que l’ennemi a une quantité immense de bagages.

Donnez ordre au général Bertrand de partir à la pointe du jour, de s’assurer que le pont de Wartenburg est levé, d’y laisser des obser­vateurs, et de se diriger du côté de Wittenberg aussitôt qu’il se sera bien assuré que le pont est levé.

Faites connaître au général Sébastiani la nécessite de partir au­jourd’hui, de bonne heure, pour pouvoir passer dans la journée sur la rive droite, à Wittenberg.

Écrivez au prince de la Moskova et au général Reynier qu’il est nécessaire que le général Reynier et le général Dombrowski soient de bonne heure à Wittenberg et passent sur-le-champ sur la rive droite, afin de faire place au général Bertrand, au duc de Tarente et à tout le reste de l’armée, qui s’y porte également. Vous ferez con­naître au prince de la Moskova que je pense qu’il est nécessaire qu’il reste aujourd’hui à Graefenhaynchen, pour observer les routes de Dessau, de Raguhn, de Jessnitz et Mühlbeck; que, pendant ce temps, les généraux Reynier et Dombrowski, Bertrand et le duc de Tarente, passeront la rivière ; que je me porte à Kemberg, et que toute ma Garde s’y réunit et sera en position de le soutenir.

Donnez ordre au duc de Raguse de passer aujourd’hui la Mulde, aussitôt que Düben sera désencombré. Il laissera les généraux Lorge et Normann sur la rive gauche, et leur donnera pour instruction de faire courir des partis sur Delitzsch et Bitterfeld. Le duc de Raguse dirigera avec cette cavalerie, sur Bitterfeld, l’infanterie nécessaire pour obliger l’infanterie ennemie à évacuer cette position. Il dirigera l’opération et fera partir des troupes une heure avant le jour, de ma­nière à savoir de bonne heure l’intention de l’ennemi sur Bitterfeld et Jessnitz.

Donnez ordre au général Latour-Maubourg de partir aujourd’hui, à six heures du matin, pour se rendre à Kemberg.

Faites-moi connaître l’heure à laquelle le grand quartier général, l’équipage de pont et le parc sont arrivés à Laussig. Donnez ordre que l’arrière-garde que le général Curial a laissée à Wurzen y reste aujourd’hui pour garder le pont de Wurzen. Recommandez que cette troupe se garde militairement.



Düben, 11 octobre 1813, trois heures du matin.

Au général comte Drouot, aide-major de la Garde impériale, à Düben.

Écrivez au général Curial de donner l’ordre à l’arrière-garde deux bataillons qu’il a laissée à Wurzen d’y rester aujourd’hui tout la journée, en prenant une position militaire et en s’éclairant du côté de Grimma. Le commandant de cette arrière-garde ferait connaitre tout ce qu’il arriverait de nouveau de Leipzig.

Donnez ordre que les quatre divisions de la jeune Garde et vieille Garde se tiennent prêtes à partir. Faites-moi connaître à quel distance l’une de l’autre il serait nécessaire qu’elles partissent, afin de ne point s’encombrer sur les routes.

Faites mettre en mouvement, à six heures du matin, le parc de réserve pour se rapprocher de Düben et marcher avec la vieille Garde. Donnez ordre au général Ornano de rester en position à Schkœna, en s’éclairant du côté de Bitterfeld, pour savoir ce que l’ennemi a à Bitterfeld et sur les autres points.

Faites connaître au général Lefebvre-Desnoëttes qu’il arrive aujourd’hui de Leipzig à Eilenburg un grand convoi, et que mon intention est qu’il tienne la campagne pour protéger ce convoi, composé d’artillerie, de munitions, etc.; qu’il le dirige sur-le-champ d’Eilenburg sur Laussig. Il est nécessaire que ce général se maintienne toute la journée en communication avec Leipzig.

S. Vous viendrez, à six heures du matin, me faire connaître si les routes sont désencombrées, et si les parcs des 3e et 7e corps, etc., sont passé.


Düben, 11 octobre 1813.

Au maréchal Marmont, duc de Raguse, commandant le 6e corps de la Grande Armée, à Lindenhayn.

Le major général vous donne des ordres pour passer aujourd’hui sur la rive droite, aussitôt que Düben sera désencombré. Vous lais­serez votre cavalerie sur la rive gauche, pour maintenir libre la route d’ici à Leipzig et observer les mouvements de l’ennemi. Avant de repasser sur la rive droite, mon intention est que vous fassiez marcher sur Bitterfeld 4 ou 5,000 hommes de toutes armes, et les échelonnant de manière à forcer l’ennemi d’évacuer cette position et à bien savoir ce qu’il y avait à Jessnitz. Mettez cette colonne en mouvement avant le jour, afin qu’on sache promptement à quoi s’en tenir.



Düben, 11 octobre 1813.

Au maréchal Ney, prince de la Moskova, commandant le 3e corps de la Grande Armée, à Graefenhaynchen.

Mon Cousin, l’ennemi avait beaucoup de monde à Jessnitz ; il n’y a plus personne ce matin. Je suppose que vous êtes à Graefenhaynchen. Le duc de Tarente sera ce soir à Rackith. Je pense qu’il serait convenable que vous eussiez du monde à Oranienbaum, pour couvrir la route de Dessau à Wittenberg et connaître ce qui se passe. Quelques renseignements porteraient à penser que l’ennemi lèvera ses ponts et restera sur la rive gauche, vis-à-vis Roslau. Si cela est, où est-ce qu’il faudrait marcher pour l’attaquer, s’emparer de Dessau et le bloquer sur sa tête de pont ? J’aurai ici un équipage de pont avec lequel en peu d’heures on pourrait jeter cinq ou six ponts. Donnez-moi des renseignements là-dessus.

Mandez au général Reynier de tâcher d’envoyer des partis sur Coswig et Zahna, afin d’avoir des indices sur ce que veut faire l’en­nemi; qu’il prenne position en avant de Wittenberg, aussitôt qu’il aura chassé les cinq ou six bataillons qui observaient la place; qu’il fasse passer la cavalerie de Latour-Maubourg et tout ce qui se présentera , et qu’il place tout cela en avant. Il paraît que nous n’avons point de ressources vis-à-vis de Wittenberg; qu’il y a beaucoup de grains, à la vérité, mais peu de farines et peu de moyens de mou­ture. Recommandez bien au général Reynier d’envoyer vis-à-vis l’embouchure de l’Elster, afin d’obliger l’ennemi à lever ses ponts de Wartenburg, et qu’on fasse sur-le-champ raser ses têtes de ponts.

J’attends encore à Düben, où je me trouve plus à portée des nouvelles. Peut-être dans la nuit me porterai-je à Kemberg.

N’avez-vous aucune nouvelle des partis que vous avez envoyés sur Dessau et sur les autres points de l’Elster?



Düben, 11 octobre 1813.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Eilenburg.

Monsieur le Duc de Bassano, je reçois votre lettre du 10 à midi. Je suppose qu’à l’heure qu’il est le convoi de Leipzig sera arrivé. Faites-moi connaître de combien de voitures il se compose et ce qu’il porte.

Donnez ordre que les équipages du 6e corps se dirigent sur Düben. Donnez ordre qu’on réunisse les hommes isolés appartenant aux dif­férents corps d’armée; qu’on y mette des officiers et qu’on les dirige sur Düben.

Dites au général Curial que, puisqu’on a appelé des Bavarois à Eilenburg, il faut qu’il ait soin de ce poste important et qu’il four­nisse tout ce qui y sera nécessaire; le général Lefebvre-Desnoëttes en avait été chargé; il fournira la cavalerie nécessaire pour couvrir ce poste.

Je suppose qu’il n’y a plus rien à Wurzen. Envoyez-y un de vos jeunes gens pour s’en assurer, afin que, si je fais évacuer ce poste, on n’y laisse rien.

Je suppose que vous avez des nouvelles de Leipzig; je n’en ai pas depuis celles que m’a apportées l’auditeur Maussion, et c’est pour en attendre que je reste ici.



S. J’ai pensé que le roi avait besoin de repos ; je vous écrirai ce soir pour son départ de demain. Je n’ai pas reçu la lettre du roi.


Düben, 11 octobre 1813, midi.

Au général comte Reynier, commandant le 7e corps de la Grande Armée, à Wittenberg.

Je reçois votre lettre. Il parait que la place de Wittenberg a beaucoup de blé, mais pas de farine et peu de moyens de moudre. Je suppose que la division qui bloquait la place s’en sera allée; chassez-la bien loin, afin de requérir des farines de tous les points de la rive droite et de la rive gauche.

Le général Latour-Maubourg doit arriver ; faites-lui passer sur-le-champ le pont. Avec la cavalerie saxonne, les Polonais et Latour-Maubourg, on peut battre la plaine et avoir quelques indices de ce que fait l’ennemi à Dessau. A-t-il quelques projets de repasser sur la rive droite et de livrer bataille, ou se propose-t-il de replier son pont et de rester sur la rive gauche ? Si l’on pouvait aller sur Coswig, on aurait beaucoup de renseignements.

Faites marcher aussi du côté de Wartenburg, afin d’obliger l’en­nemi à lever ses ponts. Ordonnez qu’on travaille aussitôt à raser la tête de pont. Le général Bertrand a dû s’y porter directement. Cette opération faite, le général Bertrand passera aussi le pont. Le duc de Tarente croit ne pas pouvoir aller ce soir plus loin que Rackith; si sa cavalerie est devant, écrivez- lui de passer le pont. Aussitôt que vous serez éclairé, prenez position en avant de la ville, afin de faire place à tous les corps qui, dans la nuit et dans la journée de demain, vont passer.

Toute la Garde est en marche et sera ce soir près de Wittenberg.



Düben, 11 octobre 1813, trois heures après midi.

Au maréchal Ney, prince de la Moskova, commandant les 3e, 4e et 7e corps de la Grande Armée, à Graefenhaynchen.

Des agents sûrs donnent la nouvelle qu’à Raguhn il n’y avait rien hier, à huit heures du soir, personne, et qu’il y avait peu de monde à Dessau. L’ennemi paraissait s’être retiré sur Cœthen et Radegast. Envoyez de fortes reconnaissances sur Raguhn et Dessau pour avoir des nouvelles positives.



Düben, 12 octobre 1813, trois heures du matin.

Au maréchal Ney, prince de la Moskova, commandant les 3e, 4e et 7e corps de la Grande Armée, à Graefenhaynchen.

J’ai reçu votre lettre de Graefenhaynchen le 11, à cinq heures du soir. Tous les renseignements que je puis avoir disent que, dans la journée du 10, le général Blücher s’est dirigé sur Halle; que le quartier général de l’armée ennemie était près de Radegast, et qu’il y avait beaucoup de bagages à Cœthen.

Wittgenstein a eu un combat à Borna avec le roi de Naples. Witt­genstein a été battu. Le 11, à onze heures du matin, Wittgenstein et les Autrichiens du prince Schwarzenberg s’étaient mis en retraite sur Frohburg. Dans cette situation des choses, je désire que le gé­néral Reynier et le général Dombrowski poussent vivement sur Roslau. Le duc de Tarente est à Rackith; il sera demain de bonne heure à Wittenberg. Si l’ennemi oppose de la résistance à Roslau, il passera pour appuyer le général Reynier; si, au contraire, l’ennemi n’oppose point de résistance, il ne passera pas. Je n’ai point de nou­velles du général Bertrand, qui a dû se porter sur Wartenburg; son opération faite, il pourra se rapprocher de Dessau. Il n’y avait certainement, le 11 au matin, à Dessau, que 5 à 6,000 hommes, et personne à Raguhn et à Jessnitz , où les ponts étaient brûlés. Je pense qu’il est convenable que vous vous portiez de bonne heure sur Des­sau, avec le 3e corps et la cavalerie qui est à votre disposition, pour occuper Dessau et la tête de pont. Aussitôt que le général Reynier, maître de Roslau, aura rendu celle tête de pont intenable, vous ferez raser la tête de pont, occuper la ville en force, et faire deux ponts.

Si votre cavalerie peut déboucher dans la plaine de Dessau, je pense qu’elle fera beaucoup de mal à l’ennemi, qui paraît entièrement occupé de ses opérations offensives. Vous pourrez attirer à vous le général Bertrand, quand il aura fini son opération sur Wartenburg, et s’il n’était pas nécessaire sur la rive droite. Le duc de Reggio res­tera à Graefenhaynchen et observera Raguhn, qu’il fera occuper par une avant-garde, ainsi que le point de Jessnitz.

Je dirige le duc de Raguse du côté de Delitzsch, afin d’être en mesure d’observer Halle et Leipzig. Le duc de Trévise se trouve à deux lieues en deçà de Kemberg; je ne lui ordonne aucun mouvement pour cette journée, vu que je pense que, si l’ennemi continue à se disséminer, j’aurai besoin de ma Garde pour marcher sur lui avec le duc de Raguse. Le général Sébastiani passera à Wittenberg pour battre la rive droite. Le général Latour-Maubourg restera à Kemberg jusqu’à ce que j’aie de plus amples renseignements sur tout ceci, afin de le faire revenir si cela est nécessaire.



Düben, 12 octobre 1813, quatre heures du matin.

À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Eilenburg.

Monsieur le Duc de Bassano, le roi de Naples a eu le 10, à Borna, une affaire avec Wittgenstein : Wittgenstein a été battu. Le Roi me marque qu’hier à onze heures du matin le prince Schwarzenberg et Wittgenstein se mettaient en retraite sur Frohburg. Il paraît assez constant que de ce côté-ci la plus grande partie de l’armée alliée était en marche dans la direction de Halle et de la basse Saale. Les généraux Reynier et Dombrowski ont passé hier soir l’Elbe à Witten­berg et se portent sur Roslau. Le prince de la Moskova se porte sur Dessau. Le duc de Raguse est entre Leipzig, Dessau et Halle, pour observer ce qui se fait. Le roi et le quartier général ne feront aujour­d’hui aucun mouvement. Le général Curial doit continuer à occuper Wurzen par son arrière-garde.

Faites connaître au général Lefebvre-Desnoëttes toutes les nou­velles que vous avez des Cosaques : c’est à lui à en purger le pays.

On n’a envoyé de Leipzig qu’une partie du convoi; le plus impor­tant, qui était les 31,000 paires de souliers, a été retenu à Leipzig; chargez un peu Rumigny de voir pourquoi : y aurait-il là-dessous quelque projet de friponnerie ?

Donnez les nouvelles au roi de Saxe. Nous aurons aujourd’hui les plus grands développements sur toutes les opérations de l’ennemi.



S. Faites passer la lettre ci-jointe au duc de Padoue.


Düben, 12 octobre 1813, quatre heures du matin.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Düben.

Mon Cousin, donnez ordre au duc de Padoue de diriger sur Eilenburg tous les gardes d’honneur et tout ce qu’il y a à Leipzig appartenant à la Garde, infanterie, cavalerie et artillerie. À moins d’événe­ment à Leipzig, tout cela partira aujourd’hui.



Düben, 12 octobre 1813, quatre heures du matin.

Au général comte Reynier, commandant le 7e corps de la Grande Armée, à Wittenberg.

Le 11 au matin il n’y avait que 5 à 6,000 hommes à Dessau, sur les deux rives se trouvaient toute l’artillerie et les bagages l’armée ennemie. L’ennemi avait évacué Raguhn, Jessnitz et Bitterfeld; ses colonnes ont défilé toute la journée du 10 pour se porter, de Raguhn, de Jessnitz et de Bitterfeld, dans la direction de Halle. Le quartier général de l’armée ennemie était près de Radegast. Le prince de Schwarzenberg et Wittgenstein étaient près de Borna. Des colonnes légères s’étaient dirigées du côté de la haute Saale. Le 10, Wittgenstein avait eu à Borna un combat où le roi de Naples l’avait battu. Le 11, à midi, l’armée autrichienne paraissait s’être mise en retraite sur Frohburg.

J’espère que votre cavalerie aura déjà battu la rive droite. Cepen­dant je n’ai pas encore de renseignements. Je m’attendais que dans la journée du 11 vous auriez battu la rive droite et m’auriez envoyé des nouvelles importantes.

L’ensemble des dispositions de l’ennemi me fait penser que Roslau n’est pas gardé en force, et que, si vous marchez avec votre corps et Dombrowski, vous vous emparerez des ponts de l’ennemi et de beaucoup de bagages. Le duc de Tarente est au pont de Wittenberg; il vous appuiera. Mon intention est qu’il ne passe qu’autant que vous auriez devant vous des forces qui s’opposeraient à votre opération. Quant au général Sébastiani, je lui donne ordre de passer, afin que vous ayez de la cavalerie pour battre toute la plaine de la rive droite.

Portez le désordre partout et emparez-vous des bagages. L’ennemi peut bien avoir compté sur l’incursion de quelques partis sortant de Wittenberg, mais il n’a pas prévu une opération sérieuse. Si vous ne trouvez pas de forces supérieures aux vôtres, je désire que le duc de Tarente ne passe pas, afin qu’il puisse se porter ailleurs. Le prince de la Moskova se porte sur Dessau.



Düben, 12 octobre 1813, quatre heures du matin.

Au maréchal Oudinot, duc de Reggio, commandant les 1e et 2e divisions de la Jeune Garde, à Graefenhaynchen.

Faites occuper Raguhn par une avant-garde d’infanterie, de cavalerie et d’artillerie, et faites-y rétablir le pont. Que le général Ornano fasse battre la plaine, et envoie de fortes patrouilles à Jessnitz pour en chasser l’ennemi ; il pourra même y tenir un poste fixe de cavalerie let d’infanterie.

Pendant l’opération que fait le prince de la Moskova, tenez-vous en communication avec lui. Ne faites du reste aucun autre mouvement, afin que vos troupes soient disponibles pour se porter où les circonstances l’exigeraient, suivant les mouvements de l’ennemi.



Düben, 12 octobre 1813, quatre heures du matin.

Au maréchal Marmont, duc de Raguse, commandant le 6e corps de la Grande Armée, à Lindenhayn.

Choisissez une position d’où vous puissiez couvrir à la fois Düben, Jessnitz et Leipzig. Vous pourriez peut-être vous couvrir de la branche de la Mulde qui passe à Delitzsch, si toutefois elle n’est pas guéable; alors vous vous trouveriez en communication avec le duc de Reggio, qui a une avant-garde à Raguhn et à Jessnitz. Vous couvririez parfaitement Düben, dont vous vous placeriez à trois lieues, et vous seriez à portée de vous rendre, en une petite marche, sur Leipzig, et surtout de tomber sur le flanc du corps qui marcherait de Halle sur Leipzig. Votre corps, baraqué ainsi dans une bonne position, serait d’un effet très-avantageux. Il ferait le prolongement de la ligne de Dessau par Jessnitz jusqu’à Borna, où se trouve le roi de Naples.

Vous couvririez par ce moyen Eilenburg, et le général Lefebvre-Desnoëttes pourrait se porter en avant pour éclairer votre gauche. En cas de nécessité, la Garde débouchera sur vous par Düben et par Eilenburg. Vous placerez des avant-gardes de cavalerie, artillerie et infanterie à une ou deux, lieues en avant sur les routes de Halle, de Cœthen et de Leipzig. Aussitôt que vous aurez choisi une position, et que votre corps se sera mis en mouvement pour s’y rendre, vous ferez connaître au duc de Padoue, avec lequel il faut que vous ayez une correspondance très-sûre et très-rapide.



Düben. 12 octobre 1813, neuf heures et demie du matin.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Düben.

Donnez ordre au prince de la Moskova de partir avec toutes ses troupes, au reçu du présent ordre, pour se porter sur Düben, passer la rivière et se porter sur Taucha, où il devra être arrivé le 14, mon intention étant d’y livrer bataille avec toutes mes forces réunies. En conséquence, il ne laissera rien derrière.

Ordre au duc de Tarente de se porter aussitôt que possible su Düben, où il est indispensable qu’il arrive le 14 dans la matinée.

Ordre au général Reynier et au général Dombrowski de revenir sur Düben, où il est nécessaire qu’ils arrivent le 13, pour être le 14 à Taucha, où j’ai intention de livrer bataille à l’ennemi.

Ordre aux généraux Bertrand, Sébastiani et Latour-Maubourg d se diriger aussitôt sur Düben.



Düben, 12 octobre 1813, dix heures du matin.

NOTES SUR LA REUNION DES DIFFÉRENTS CORPS D’ARMÉE A TAUCHA.

Je donne ordre à Ney de se porter sur Düben.

Ney ne recevra pas cet ordre avant deux heures de l’après-midi ses troupes se mettront en marche à trois heures; elles ne pourront passer le pont de Düben que demain 13 (la Garde alors l’aura passé) il peut être le 13 au soir, sans difficulté, à Taucha.

Latour-Maubourg étant à Kemberg, il n’y a non plus aucune diffi­culté.

Le duc de Tarente ne recevra l’ordre qu’à trois heures; s’il a passé le pont de l’Elbe, il lui faudra la nuit pour repasser; il ne sera à Düben que demain 13; et pendant la journée du 14 il se mettra en marche sur Taucha.

Le général Reynier, qui marche sur Roslau, ne pourra être que cette nuit à Wittenberg; il pourra être le 15 à Taucha. Celui-là peut venir par Eilenburg.

Il en est de même pour le général Sébastiani. Quant aux ducs de Trévise et de Reggio et à la réserve de la Garde, tout cela passe le pont de Düben aujourd’hui et sera demain à Taucha, de bonne heure.

Le Roi est aujourd’hui 12 à Crœbern ; il sera demain 13 à Leipzig . et à Taucha, où je serai arrivé demain avec Curial, la vieille et la jeune Garde et le duc de Raguse, près de 40,000 hommes; ce qui, l avec les 50,000 hommes du Roi, fera près de 90,000 hommes.

Ces 90,000 hommes seront renforcés dans la journée de de-I .main 13, où nécessairement l’ennemi ne peut pas attaquer, par Ney, Bertrand et Latour-Maubourg.

Le 15, toute notre armée sera réunie.

Demain 13, l’ennemi arrive à Crœbern. Il saura que la Grande Armée est arrivée. On passera la journée du 14 à se mettre en bataille. J’ai donc le 13 et le 14 pour réunir. Je dis plus : quand toute l’armée serait à Düben, elle ne pourrait pas arriver avant, à moins d’avoir cinq ou six débouchés.

Le roi de Naples est à Crœbern le 12, le maréchal Marmont à Lindenhayn; ils peuvent être demain 13 à Taucha, bonne position; ma Garde, aujourd’hui à Düben et à Eilenburg, sera demain facile­ment à Taucha; Oudinot et Mortier seront aujourd’hui à Düben avec Ornano, Walther et Latour-Maubourg.

Demain, tout cela à Taucha.

J’aurai donc demain à Taucha :

En première ligne, le roi de Naples, 50,000 hommes, y compris la garnison de Leipzig, qui y restera; Marmont, 20,000 hommes d’infanterie, 2,000 de cavalerie; la Garde, 30,000 hommes d’infan­terie, 8,000 de cavalerie; Latour-Maubourg, 3,000 hommes de cavalerie; total, près de 120,000 hommes demain à Taucha;

En deuxième ligne, le duc de Tarente, ce soir 12, à Kemberg, demain à Düben ; le prince de la Moskova, ce soir à Graefenhaynchen, demain à Düben; Bertrand, demain à Düben; Sébastiani, demain à Düben; Dombrowski et Reynier, le 13, demain, à mi-chemin de Düben.

Le 14, tout peut me rejoindre: Tarente, 20,000 hommes d’in­fanterie, 2,000 hommes de cavalerie; Moskova, 12,000 hommes d’infanterie, 2,000 hommes de cavalerie; Bertrand, 10,000 hom­mes; Sébastiani, 3,000 hommes; Dombrowski et Reynier, 20,000 hommes.

Ainsi : première ligne, près de 120,000 hommes; seconde ligne, 70,000 hommes; total, environ 190,000 hommes.



Düben, 12 octobre 1813, dix heures du matin.

A Joachim Napoléon, roi de Naples, à Crœbern.

J’ai reçu votre lettre du 11 à neuf heures du matin, ainsi que la relation de l’affaire de Borna. Faites-moi connaître la perte que nous avons éprouvée. Le duc de Raguse avec la division Lorge prend po­sition entre Düben, Leipzig et Halle. J’ai déjà plus de 60,000 hom­mes sur la rive droite, qui marchent aujourd’hui sur le pont de Roslau, en même temps que je fais attaquer Dessau. On m’assure que l’ennemi est entre Halle et Dessau. Vous ne me faites pas connaître quelle est la force présumée des Autrichiens que vous avez devant vous.



Düben, 12 octobre 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Düben.

Mon Cousin, le duc de Reggio restera aujourd’hui à Graefenhaynchen et il enverra une avant-garde d’infanterie, cavalerie et artillerie, à Raguhn, où il fera rétablir le pont ; ce parti enverra des patrouilles à Jessnitz.

Le duc de Trévise ne bougera point de la position qu’il occupe, non plus que le parc de la Garde, la cavalerie du général Latour-Maubourg et la cavalerie du général Walther, de la Garde. Toutes ces troupes doivent se tenir prêtes à revenir ici, si elles en reçoivent l’ordre.

Le quartier général sera placé à Priestaeblich, ainsi que le parc d’artillerie et du génie et l’équipage de pont. Tout cela n’aura pas d’ordre de mouvement aujourd’hui. La division Priant, de la vieille Garde, restera aujourd’hui à Düben. La division Curial restera à Eilenburg, et continuera à occuper Wurzen par son arrière-garde. La division Lefebvre-Desnoëttes restera sur la rive gauche de la Mulde, et protégera le chemin d’Eilenburg et de Leipzig. Le duc de Raguse prendra une position entre Düben, Leipzig et Delitzsch.



Düben, 12 octobre 1813, trois heures après midi.

Au maréchal Marmont, duc de Raguse, commandant le 6e corps de la Grande Armée, à Delitzsch.

Je n’ai point reçu de nouvelles de vous aujourd’hui; j’espère ne pas tarder à en recevoir. Je suppose que vous vous serez placé à quatre lieues de Leipzig.

Nous nous sommes emparés des ponts de l’ennemi sur l’Elbe, et il paraît que l’armée de Berlin s’est portée sur la rive droite. D’un autre côté, le roi de Naples occupe la position de Crœbern, qu’il a prise ce matin; je lui mande de la conserver toute la journée de demain 13. Mon intention est que, ce prince conservant cette position, vous par­tiez à trois heures du matin, pour prendre une position sur la route de Düben, ayant votre gauche à Taucha. Je me mettrai en marche de Düben avec la vieille Garde pour vous rejoindre; la division Curial se mettra en marche d’Eilenburg avec la division Lefebvre; de [sorte que demain, vers midi, nous serons 70,000 hommes réunis à portée de Leipzig.

Toute mon armée se mettra en mouvement; dans la journée du 14 elle sera toute arrivée, et je pourrai livrer bataille à l’ennemi avec 200,000 hommes.

Faites-moi connaître les renseignements que vous auriez de votre côté sur l’armée de Silésie, et sur les positions que l’on pourrait à prendre contre cette armée et contre l’armée qui viendrait par Halle ou par Dessau.

Faites-moi bien connaître la position que vous occuperez et à quelle heure vous pourrez être rendu à portée de Leipzig.



Düben, 12 octobre 1813, quatre heures après midi.

À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Eilenburg.

Monsieur le Duc de Bassano, faites donner un cheval, n’importe lequel, à l’officier qui vous portera cette lettre, afin qu’il soit avant sept heures à Leipzig. Voici l’état de la question : le roi de Naples est en position à Crœbern ; il a devant lui des forces qu’il évalue à 60,000 hommes; s’il peut tenir avec ses propres forces toute la jour­née de demain 13, je me rendrai sur Leipzig et y livrerai bataille à l’ennemi. Dans ce cas, le duc de Raguse, qui est déjà entre Düben et Leipzig, s’approcherait dans la nuit jusqu’à Taucha, et je parti­rais, immédiatement après la réception de la réponse du Roi, avec ma Garde; de sorte que demain, dans la journée, j’aurais 80,000 hommes à Taucha, et, dans la journée du 14, tout le reste de l’armée arriverait. Si, au contraire, le Roi ne peut pas tenir, je réunirai toute mon armée sur la Mulde, le Roi formant la gauche à Grimma et Wurzen, et le reste de l’armée depuis Wurzen jusqu’à Eilenburg et Düben. Je manœuvrerai alors pour livrer bataille à l’ennemi.

Nous nous sommes emparés des ponts et de la tête de pont de Wartenburg. Le général Reynier et le général Dombrowski se sont à cette heure emparés de Roslau et de Dessau. Ainsi l’ennemi n’a plus de pont sur l’Elbe. On m’assure que le prince royal et toute l’armée de Berlin ont passé sur la rive droite; je recevrai avant minuit la confirmation de cette nouvelle, et alors, m’étant débarrassé ainsi de 40 à 50,000 ennemis, je me placerai avec toute mon armée su Leipzig et livrerai bataille à l’ennemi.

Faites donner un cheval à l’officier porteur de cette lettre, et tenez prêts deux autres chevaux pour les officiers qui vont revenir de Leipzig. Que ces deux chevaux soient tout sellés dans votre écurie, de manière qu’on ne perde pas un moment.



Düben, 12 octobre 1813, quatre heures après midi.

Au général Arrighi, duc de Padoue, gouverneur de Leipzig.

Monsieur le Duc de Padoue, je vous envoie ouverte la lettre que j’écris au roi de Naples : prenez-en connaissance. J’ordonne au duc de Bassano de tenir dans ses écuries, à Eilenburg, deux chevaux tout sellés. Le premier sera pour l’officier que vous m’enverrez une demi-heure après avoir reçu la présente lettre, pour me faire con­naître si, d’après les derniers renseignements que vous avez, vous pensez que le roi de Naples puisse garder sa position, et vous la ville de Leipzig, toute la journée de demain 13. Cet officier pourra être à neuf heures du soir à Eilenburg; il y trouvera, comme il a été dit, un cheval sellé dans les écuries du duc de Bassano et pourra être ici à onze heures.

Aussitôt que vous aurez reçu la réponse du roi de Naples, vous m’expédierez un autre officier, qui prendra à Eilenburg le second cheval tenu prêt dans les écuries du duc de Bassano. Faites en sorte que ce second officier arrive à Düben avant une ou deux heures du matin. Par le premier officier vous me ferez connaître à quelle heure est arrivé l’officier d’état-major, et à quelle heure arrivera l’officier que vous expédiez au roi de Naples.

Si vous êtes pour l’affirmative, il est convenable que vous envoyiez un officier sur la route de Düben pour instruire directement le duc de Raguse de ce qu’aura répondu le roi de Naples, puisqu’il se por­tera aussitôt qu’il la connaîtra sur Taucha.

Faites-moi connaître la double position qu’on pourrait prendre contre une armée débouchant de Halle et de Dessau, et contre celle qui débouche de la Bohême.

Je suppose que vous avez déjà fait palissader la tête de pont de Lindenau, et occuper en force ce débouché important et tous les ponts aboutissant de droite et de gauche sur la rivière.

Si vous deviez évacuer Leipzig, n’y laissez pas les 30,000 paires de souliers dont nous avons un si grand besoin.



Düben, 12 octobre 1813.

A Joachim Napoléon, roi de Naples, à Crœbern.

Le major général vous fait connaître mes intentions. Dans la journée de demain 13, je puis être à Taucha avec 70,000 hommes, et dans la journée du 14 toute mon armée peut y être réunie; je ne puis donc être dans le cas de donner bataille que le 15, en conser­vant Leipzig.

Pouvez-vous, sans vous compromettre, garder, toute la journée de demain 13, votre position et Leipzig ? Vous serez renforcé dans le courant de la journée dans votre position actuelle; ou bien, dans la nuit du 13 au 14, vous prendrez une position qui appuie votre gauche à Connewitz et votre droite vers Wurzen. Vous serez aug­menté de 80,000 hommes, que je vous amènerai, et, le 14, de tout le reste de l’armée. Nous aurons le 15 au matin 200,000 hommes.

Consultez le duc de Bellune, le général Lauriston et le prince Poniatowski. Je crois que toute l’armée de Berlin a repassé sur la rive droite, et qu’ainsi nous pouvons livrer bataille sans elle.

Si Vous ne pouvez pas garder votre position, faites votre mouve­ment sur Taucha et Wurzen.



Düben, 12 octobre 1813.

Au comte Daru, directeur de l’administration de la Grande Armée, à Düben.

Monsieur le Comte Daru, vous verrez par la distribution des sou­liers que j’en ai destiné une partie au 2e corps et une partie au 5e corps, lesquels se trouvent avec le Roi, du côté de Borna. Il ne faut pas qu’on fasse venir ces souliers ici, mais qu’on les leur envoie directement. Ce sera donc, sur les 31,000 paires de souliers, 21,000 paires à envoyer ici. Il est important que cela soit distribué sans délai.



Düben, 12 octobre 1813, sept heures du soir.

À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Eilenburg.

Monsieur le duc de Bassano, mes troupes sont entrées à Dessau avec tant de rapidité que le pont de la Mulde a été conservé. On a pris deux pièces de canon et fait 800 prisonniers. J’attends à chaque instant des nouvelles de la marche du général Reynier sur Roslau.

Le duc de Castiglione était hier soir à Weissenfels ; on l’attend aujourd’hui 12 à Leipzig.

Communiquez ces nouvelles au roi de Saxe.



Düben, 12 octobre 1813, huit heures du soir.

A Joachim Napoléon, roi de Naples, à Wachau.

Un adjoint d’état-major du général Belliard arrive; il est parti à trois heures après midi; j’ai reçu votre lettre écrite à neuf heures du matin. Cet officier m’annonce que le duc de Castiglione est arrivé.

Organisez sur-le-champ le 5e corps de cavalerie, et faites connaître au général Pajol la confiance que j’ai en lui. Ce corps va se trouver fort de plus de 5,000 chevaux. Ayez soin que sur-le-champ toutes les Compagnies soient tiercées, afin que les anciens soldats soient avec les nouveaux. Le 5e corps a un régiment de marche de 1,000 chevaux avec le duc de Padoue ; ce régiment faisait partie de la division Margaron : faites-le dissoudre. Faites-moi connaître à qui vous donnez le commandement de la division de cavalerie légère. Le prince de la Moskova est entré à Dessau; il a pris deux pièces de canon et fait 7 à 800 prisonniers; les restes du Bataillon de la Vengeance en font partie. J’attends à chaque instant des nouvelles du général Reynier, qui marche sur Aken par la rive droite; tous les bagages de l’armée de Silésie sont sur cette rive.

Je compte que vous avez actuellement 60,000 hommes. Le duc Ide Raguse couchera cette nuit à quatre lieues de Leipzig; si je ne prends pas le parti d’y aller moi-même, je vous l’enverrai, ce qui vous fera 85 à 90,000 hommes; avec cela vous devez pouvoir gagner quelques jours. Une bonne ruse serait de faire tirer des salves en réjouissance de la victoire remportée sur l’autre armée. II faudrait aussi faire passer une revue d’apparat comme si j’étais là et faire crier : Vive l’Empereur! Il ne faut pas se dissimuler qu’il est d’une grande importance de conserver Leipzig. Cette nuit, vers une heure du matin, je recevrai mes rapports de tous côtés et je prendrai mon parti.

J’ai de bonnes nouvelles de Dresde : c’est Bennigsen qui est devant cette ville, avec un tas de recrues mal habillées et que nos gens ont déjà houspillées d’importance.

Je suppose que le duc de Raguse vous aura donné des renseignements sur ce qui peut se présenter du côté de Landsberg. Il parait que du côté de Zœrbig il y a eu le corps de Blücher; il y en a qui pré­tendent qu’il marche dans la direction de Rothenburg près Könnern, mais cela me paraît fort apocryphe. C’est pour lui en imposer que j’ai spécialement envoyé le duc de Raguse, comme tête de colonne, dans cette direction.

On dit que du côté de Schkenditz est la bonne position à prendre contre l’armée qui viendrait de Halle. Faites reconnaître le terrain.

Il est bon de faire un tambour en palissades au dernier pont du village de Lindenau, et successivement aux autres ponts.



Düben, 12 octobre 1813, minuit.

Au maréchal Marmont, duc de Raguse, commandant le 6e corps de la Grande Armée, à Delitzsch.

Je reçois votre lettre que m’apporte l’officier d’ordonnance Gourgaud; elle est datée d’aujourd’hui à neuf heures du soir.

Le prince de la Moskova s’est emparé de Dessau; il a fait 2,500 prisonniers dont 50 officiers. Il me mande, à trois heures après midi que le général Tauenzien a passé les ponts à Dessau pour aller du côté de Roslau, et qu’on voit sur la rive droite des colonnes immenses de bagages et de parcs qui remontent la rivière; et toutes les proba­bilités sont que l’armée de Berlin tout entière a passé sur la rive droite, aux ponts de Dessau et surtout à Aken. Le général Reynier, le général Dombrowski et le duc de Tarente avaient passé, à Witten­berg, sur la rive droite; à trois heures, nos avant-postes avaient passé Coswig. À quatre heures, on a entendu une canonnade très-vive qui a duré jusqu’à six heures ; je n’en connais point encore le résultat : c’était l’attaque du général Reynier et du général Dombrowski sur la rive droite, à Roslau. L’ennemi paraissait être dans une grande épouvante.

Le duc de Castiglione est arrivé à Leipzig; il a eu, il y a trois jours, une affaire avec Thielmann et Liechtenstein ; il a battu complètement ce dernier, l’a mis en déroute et lui a fait 1,200 prisonniers.

Le roi de Naples occupe la position de Crœbern, où il me mande qu’il tiendra toute la journée de demain 13. Mon intention est que vous vous mettiez en marche pour vous rapprocher de Leipzig, et que vous envoyiez demander des ordres au roi de Naples. Je compte donc que vous serez à sept ou huit heures du matin, comme vous 1e proposez, sur Hohenleina. Je vous écrirai du reste de nouveau. Votre réunion au roi de Naples lui complétera 90,000 hommes.

Si le général Reynier ne s’est pas emparé aujourd’hui de Roslau, cela me donnera !e temps de m’en .emparer demain, de bien battre l’armée de Berlin et de terminer toutes ces affaires-là.

Je suppose que les reconnaissances que vous aurez envoyées du côté de Halle vous auront enfin donné des nouvelles; envoyez de fortes reconnaissances dans cette direction.

Marchez de manière à pouvoir surtout secourir Leipzig, et envoyez demander des ordres au Roi pour entrer en bataille. Le moment dé­cisif paraît être arrivé ; il ne peut plus être question que de se bien battre.



Si vous entendez la canonnade du côté de Leipzig, pressez votre marche et prenez part à l’affaire.



Düben, 13 octobre 1813, minuit et demi.

À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Eilenburg.

Monsieur le Duc de Bassano, je reçois des nouvelles de Dessau à trois heures de l’après-midi. Nous y avons fait 2,100 prisonniers dont 50 officiers, tous Prussiens du corps de Tauenzien; nous étions maîtres de la ville et nos tirailleurs étaient sur la tête de pont. Le général Reynier et le général Dombrowski avaient dépassé Coswig et marchaient sur Roslau. Une grande canonnade s’est fait entendre de ce côté, à quatre heures après midi. Le prince de la Moskova me mande qu’on voit sur la rive droite des colonnes immenses de bagages et de parcs qui remontent la rivière et viennent du pont d’Aken. ll n’y a donc plus de doute que toute l’armée de Berlin a repassé sur la rive droite. Le roi de Naples ayant reçu le renfort du duc de Castiglione, et le duc de Raguse ayant ordre de se rapprocher de la ville, cela fera au roi de Naples près de 90,000 hommes, ce qui me donnera le temps de finir demain les opérations contre l’armée qui a passé sur la rive droite.

Je vous écris dans le premier moment, pour que vous expédiiez un courrier au duc de Padoue et au roi de Naples pour leur donner ces nouvelles. Je vous écrirai probablement une autre lettre dans deux heures pour vous instruire de ce qui se sera fait à Roslau. Nous avons remarqué dans les prisonniers que, pour la première fois, il y avait beaucoup de Cosaques; reste à savoir si ce sont de vrais Cosaques ou seulement des hommes habillés en Cosaques. On a détruit un bataillon qui s’appelait Bataillon de la Vengeance, et on lui a pris ses deux pièces de canon. Je pense que c’est bon à écrire à Bacher, pour qu’il en fasse un bulletin. Que dans tout cela il ne soit pas question de moi; qu’on ne sache pas où je suis. Qu’on fasse connaître aussi les prisonniers et le grand nombre de voitures qui ont été enlevées avant-hier.

Je vous le répète, faites connaître ces nouvelles au roi de Naples et au duc de Padoue, par courrier extraordinaire. Donnez-en commu­nication au roi de Saxe à son lever.

Faites écrire par le général Curial à Wurzen que tous les malades et les vivres qui sont à Wurzen doivent être dirigés sur Torgau et qu’on doit se procurer à cet effet tous les moyens de transport nécessaires.



Düben, 13 octobre 1813, une heure du matin.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Düben.

Mon Cousin, donnez ordre au duc de Raguse d’être rendu aujour­d’hui 13, à sept heures du matin, à trois lieues de Leipzig, et de prendre les ordres du roi de Naples pour sa position, pour entrer en ligne.

Donnez ordre au duc de Castiglione de prendre les ordres du roi de Naples.

Donnez ordre au général Pajol de prendre le commandement de tout le 5e corps de cavalerie.

Donnez ordre que tous les régiments et détachements du 5e corps de cavalerie soient réunis et que les trois divisions soient formées. Le général Milhaud et le général Lhéritier commanderont chacun une division de dragons. Le roi de Naples désignera quelqu’un pour prendre le commandement de la division de cavalerie légère.

Le régiment de marche du 5e corps sera dissous, et tous les déta­chements qui le composent seront réunis à leurs régiments respectifs; les compagnies seront tiercées dans la matinée d’aujourd’hui, de manière que les nouveaux soldats et les anciens soient mêlés ; ce qui mettra dès aujourd’hui dans la main du roi de Naples un corps de trois divisions, fort de 5,000 bons chevaux, et sous les ordres du général Pajol. Mandez au Roi qu’il pourrait mettre sous les ordres du duc de Castiglione la division composée de troupes de Leipzig, que je le laisse maître de cette disposition.

Faites connaître au duc de Castiglione que tout le 5e corps de cavalerie est directement sous les ordres du général Pajol et du roi de Naples.



Düben, 13 octobre 1813, une heure du matin.

A Joachim Napoléon, roi de Naples, à Freyberg.

Le duc de Raguse est à Delitzsch; il a ordre d’être rendu à sept heures du matin à Hohenleina, et pourra par conséquent entrer en bataille; ce qui, avec le duc de Castiglione et la garnison de Leipzig, vous fera de 80 à 90,000 hommes.

Toute l’armée de Berlin a repassé sur la rive droite. Le général Tauenzien était hier 12, à midi, à Roslau; une de ses divisions gar­dait Dessau ; elle a été culbutée par le prince de la Moskova, qui lui a fait 2,500 prisonniers et pris deux pièces de canon; le reste s’est éparpillé et l’on espère le ramasser; il s’est emparé de la ville et du pont, qui n’était pas brûlé. Le général Reynier est sur la rive droite ; on a entendu de son côté une canonnade dont on ne connaît pas encore l’issue. J’ai reçu des nouvelles de Dresde; elles sont bonnes. Le maréchal Saint-Cyr poussait aussi avant qu’il convenait.

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"Tant que les Français constitueront une Nation, ils se souviendront de mon nom."

Napoléon.


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Message Publié : 12 Oct 2022 11:00 
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D'accord : Napoléon a changé son fusil d'épaule dans la matinée du 12 octobre 1813. Il renonce à franchir l'Elbe ou à attaquer Bernadotte et Blücher. Il veut revenir sur Leipzig pour y livrer bataille le 15. Mais, c'était la veille qu'il aurait dû prendre cette décision, puisqu'il savait que Blücher se retirait vers Halle. La preuve, c'est qu'il ne pourra réunir son armée que le 16, alors qu'elle aurait pu arriver sur le champ de bataille dès le 15, s'il n'avait pas persévéré dans son intention de passer l'Elbe... Donc, Napoléon a bien tergiversé le 11, sur ce qu'il devait faire !


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Message Publié : 12 Oct 2022 12:00 
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Napoléon n'apprend le mouvement de Blücher sur Halle qu'à 3 heures du matin, le 12 :

Citer :
Düben, 12 octobre 1813, trois heures du matin.

Au maréchal Ney, prince de la Moskova, commandant les 3e, 4e et 7e corps de la Grande Armée, à Graefenhaynchen.

J’ai reçu votre lettre de Graefenhaynchen le 11, à cinq heures du soir. Tous les renseignements que je puis avoir disent que, dans la journée du 10, le général Blücher s’est dirigé sur Halle; que le quartier général de l’armée ennemie était près de Radegast, et qu’il y avait beaucoup de bagages à Cœthen.


C'est là qu'il se décide à renoncer à son projet de passer l'Elbe. En fait, il renonce à attaquer Blücher qui pourrait se couvrir de la Saale et marcher sur Leipzig. Même décision concernant Bernadotte qui pourrait suivre Blücher en évitant la bataille. Or, Napoléon a besoin d'un succès rapide pour enrayer la défection de la Bavière qu'il sait probable à brève échéance. Il pense alors encore être en mesure de battre les bohémiens, avant la réunion de tous les coalisés et avant la défection de la Bavière... Il ignore encore que le changement bavarois d'alliance est effectif depuis le 8 octobre.

Les puristes diront que son plan éventuel de passer l'Elbe pour prendre les coalisés à revers, était irréaliste, en tout cas impraticable. Du moment que les armées du Nord et de Silésie avaient évité le combat et étaient en situation de donner la main aux bohémiens, son passage de l'Elbe serait tombé dans le vide. Même s'il avait alors pu détruire les corps de Walmoden et de Tauenzien, les coalisés n'en auraient pas moins constitué une masse de 330 000 hommes autour de Leipzig, coupant ainsi ses communications avec la France. Ils étaient libres de marcher vers le Rhin, puis d'envahir la France.

A cela, il suffit de répondre que Napoléon lui-même était sur leurs communications. Si les coalisés s'éloignaient de Leipzig pour gagner le Rhin, Napoléon les y suivait. Il se renforçait des 20 000 de Davout, devenu inutile à Hambourg et des 30 000 hommes de Gouvion. C'est alors 250 000 hommes que les coalisés avaient sur leurs arrières. Un grand choc devait en résulter, avec 330 000 hommes d'un côté et 250 000 de l'autre... Qui sait alors ce qui pouvait survenir ?

Les coalisés pouvaient aussi décider de repasser l'Elbe et y suivre Napoléon. Mais c'était difficile. Voir le sujet sur la campagne de Saxe, par "X" :

viewtopic.php?f=30&t=7179

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Message Publié : 13 Oct 2022 8:51 
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Inscription : 14 Déc 2002 16:30
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Ainsi, la prudence veut qu'on ne s'engage entre deux corps ennemis que lorsqu'ils sont éloignés de plus d'une journée l'un de l'autre.

C'est pour avoir violé ce principe que Napoléon perdit, en i8i3, la trop fameuse bataille de Leipaick, qui changea le destin de l'Europe.
Qu'il me soit permis de prendre les événements de plus haut, et d'indiquer les mouvements d'armée qui précédèrent cette terrible catastrophe. J'aurai en même temps l'occasion de rapporter la bataille de Dresde, qui semblait promettre aux armées françaises un avenir plus heureux.

Les Français, maîtres de la Saxe et du cours de l'Elbe jusqu'à Hambourg, étendaient en mêmes temps leurs cantonnements dans la basse Silésie, lorsque les hostilités recommencèrent en i8i3. Les alliés venaient de former trois armées, l'une de soxante-dix mille hommes, pour couvrir Berlin, l'autre de quatre-vingt mille hommes en Silésie, et une armée principale de deux cent mille hommes en Bohème, destinée à prendre la Saxe de revers et à opérer sur le flanc des Français.

Napoléon disposait de deux cent cinquante mille hommes: il avait par conséquent cent mille hommes de moins que ses ennemis, soutenus d'ailleurs par des forces en arrière destinées à renouveler leurs forces actives. Il forma de ses troupes quatre armées l'une sur Wittemberg et Torgau, paur menacer Berlin; l'autre en basse Silésie, sur la rivière de la Bober; la troisième à cheval sur l'Elbe, pour observer les débouchés de la Bohème sur l'une et l'autre rive; et la quatrième, de cinquante mille hommes d'élite, composée de sa garde et de sa grosse cavalerie, formait à Dresde, sous ses ordres immédiats, une réserve centrale capable de faire pencher la
balance par-tout ou elle se porterait.

Du reste, sa position en Saxe, et surtout en Silésie, resserrée d'un côté par la Bohême, et de l'autre par la Prusse, sans autre base d'opérations que le Rhin, était fort critique et fort précaire; il ne pouvait se tirer d'affaire que par de nombreuses victoires. La carte indique qu'il aurait dû purter sa base d'opérations sur la Saale, dans le prolonge.ment du bas-Elbe, qu'il faisait garder par un corps d'armée à Hambourg. C'était la position la plus rapprochée de ses armées actives qu'il pût prendre, sans s'engager dans le rentrant
formé, d'un côté par la Bohême, et de l'autre par la Prusse. Mais, au lieu de placer sur cette rivière ses magasins, ses dépôts, ainsi que ses troupes de réserve, et de s'y fortifier par des points d'appui, il n'avait pas même eu la précaution d'y assurer ses ponts par des têtes retranchées.

L'armée des alliés en Silésie, se rassemble, et semble menacer le corps français sur la Bober: le général français quitte aussitôt Dresde avec son armées d'élite, rejoint le corps de Silésie, et passe la Bober pour attaquer l'ennemi mais celui-ci se replie sur la route de Breslau en évitant la bataille.

Cependant l'armée principale des alliés, après avoir passé 1 Elbe en Bohême débouche en Saxe par la route de Peterswalde et se porte sur Dresde par la rive gauche du fleuve. Cette ville, qui reufermait d-inai son sein non dépôts et nos principaux ponts de passage sur l'Elbe, était de la plus grande importance. Napoléon quitte brusquement la Silésie en y laissant un corps d'observation, et accourt à sa défense il arrive au moment où les ennemis attaquaient les faubourgs mal fortifiés de Dresde; son arrivée fait échouercette attaque, où les ennemis perdent dix millehommes, et l'on se prépare de part et d'autre à la bataille.

Dresde est environnée sur la rive gauche, à demi-lieue ou une lieue de distance, d'une chaîne de hauteurs dont le milieu est coupé par un ravin très-escarpé, qui, se dirigeant transversalement, sépare cette chainc en deux. C'est cette position que l'armée ennemie, forte d'environ deux cent mille hommes, avait choisie; elle s'étendait en demi-cercle autour des Français, en appuyant ses deux ailes au fleuve, et se trouvait ainsi séparée en deux par le ravin, qui isolait et coupait sa gauche de son centre. Cette disposition vicieuse
échappe point à l'œil pénétrant du général français il porte toute sa cavalerie et deux corps d'infauterie sur cette gauche, l'attaque avec des forces supérieures, la renverse, et lui fait dix mille prisonniers, sans qu'elle puisse être secourue par le reste de l'armée ennemie; tandis-que sur le reste du front, on se bornait à échanger quelques boulets.

Le général français avait un pont et une tète de pont sur l'EIbe, à Kœnigstein, petite forteresse quatre lieues au-dessus de Dresde; il
profite de cet avantage pour faire passer un corps de trente mille hommes de la rive droite sur la rive gauche, afin de le faire porter par le camp de Pirna sur la ligne d'opérations et sur les derrières des ennemis. Ce corps français chasse les troupes qui lui sont opposées et réussit en partie dans son mouvement.

Cependant l'armée ennemie, battue sur son aile gauche, et menacée sur ses derrières par le corps qui débouchait de Koenigstein, profite de la nuit pour faire sa retraite. Cette opération n'était rien moins que facile; il fallait faire repasser les défiles difficiles des montagnes de la Bohême à une armée battue, surchargée de voitures et de blessés, défilés que le corps français venu par Koenigstein pouvait occuper avant elle.

Ce corps se porte effectivement, par la route de Peterswalde, sur le défilé principal, passant à Tœplitz; mais à peine est-il descendu des montagnes dans le bassin de Toeplitz, qu'il est enveloppé par les troupes ennemies fuyant de Dresde, qui cherchent a s'ouvrir un passage pour rentrer en Bohème. Il se bat courageusement, et résiste toute une journée. il est évident que, si le général français eût poursuivi vivement ses succès le lendemain de la bataille, il arrivait à son secours, le dégageait, et achevait la destruction de l'armée ennemie; mais, par une fatalité et un aveuglement inconcevables, il s'arrête à Pirna, rétrograde ensuite sur Dresde, comme pour
donner le temps aux ennemis de se retirer, et laisse un corps de trente mille hommes aux prises seul avec une armée encore fort nombreuse. Ce corps est entièrement détruit après une résistance courageuse, digne d'un meilleur sort. Indè mali lobes!

Dès lors nous n'avons plus que des revers, et notre situation devient tous les jours plus déplorable. Notre armée de Silésie, obligée de rétrograder, ne peut rétablir sur la Bober ses ponts enlevés par des inondations, et perd une partie de son matériel. L'armée qui marchait sur Berlin est ramenée deux fois sur Wittemberg et Torgau par des forces supérieures. La faute du général français était de vouloir, avec des forces inférieures, prendre l'offensive en même temps sur tous les points, tandis qu'il ne devait songer à l'attaque que sur ceux où il se portait avec son armée d'élite, et n'avoir partout ailleurs que des corps d'observation chargés d'amuser l'ennemi et de retarder sa marche.

Je sais que deux des armées ennemies étaient invulnérables celle de Silésie, en rétrogradant sur Breslau dès que nous nous portions sur elle; et celle de Bohème, eu prenant une position inexpugnable au débouché des montagnes, dans le bassin de Toeplitz. Mais la troisième, fixée en avant de Berlin par la nécessité de défendre cette capitale, ne pouvait pas échapper à nos coups. C'était donc sur elle qu'il fallait diriger l'armée d'élite, en abandonnant momentanément Dresde et la Silésie, si les circonstances l'exigeaient, sauf à y revenir ensuite. Ce mouvement changeait le théâtre de la guerre, et nous rapprochait de nos places portes sur l'Oder et sur l'Elbe:
mais le général français s'opiniàtra vainement dans son premier projet autour de Dresde.

Dans cet état de choses, les alliés forment le dessein de se réunir sur les derrières des Français dans tes plaines de Leipsick, c'était le moyen de terminer cette campagne par une bataille décisive. Pour cela, ils réunissent leur armée de Silésie à celle de Berlin, et passent l'Elbe à Dessau, non loin de Leipsick, tandis que leur grande armée de Bohème débouche des montagnes, et se porte par Chemintz sur Leipsick. Rien n'était plus aisé que de faire avorter leur projet de réunion, en quittant Dresde au moment opportun pour aller combattre l'une ou l'autre de ces armées avant leur jonction à Leipsick; mais le général français, qui ne pouvait jamais se déterminer à propos à un mouvement rétrograde, le diffère trop longtemps, et, faute inexplicable, au moment où il va jouer son empire dans les plaines de Leipsick contre toutes les forces de ses ennemis, il se prive de deux corps d'armée qu'il laisse inutiles à Dresde, sans espoir de les retirer en cas de revers. Il les réduit ainsi à ne jouer aucun rôle daus l'une ou l'autre fortune.

Nous partons enfin de Dresde, lorsque nous apprenons que l'ennemi passe l'Elbe à Dessau, et nous arrivons en hâte à Düben sur la Mulde. Nous n'étions plus qu'à une marche de Leipsick; nous avions justement le temps d'y arriver avant les armées ennemies, et d'empêcher leur jonction, en nous plaçant entre elles; ou bien, nous pouvions prendre encore un autre parti, celui d'éviter la bataille, en passant l'Elbe à Wittenberg, pour aller le repasser à Magdebourg.

Napoléon parait hésiter entre ces deux partis; contre sa coutume, il consulte quelques officiers généraux, et j'étais de ce nombre. En marchant sur Leipsick, nous nous trouvions obligés de livrer une bataille double aux deux armées très rapprochées de l'ennemi nous agissions suivant ses desseins; nous nous trouvions éloignés de tous nos dépôts de munitions; et les passages de l'Elster et de la Saale, qui n'étaient point apurés par des têtes de pont, devenaient fort hasardeux en cas de retraite. Le second parti nous faisait éviter le passage de ces deux rivières; nous nous rapprochions de Magdebourg, grande place de dépôt, qui pouvait nous fournir abondamment toutes les munitions nécessaires, et qui devenait un appui pour notre armée; nous prenions une nouvelle ligne d'opérations par la
route de Wesel, plus assurée et plus aisée à couvrir que celle de Mayence; nous restions les maîtres d'éviter ou d'accepter la batailles; notre retraite était assurée en cas de revers; nous nous renforcions du corps de Hambourg, fort de vingt-cinq mille hommes; nous nous procurions le temps de rappeler ceux que nous avions laisses si mal-à-propos à Dresde; enfin, nous déconcertions, par une démarche inattendue, le plan que les alliés avaient formé, et dont ils suivaient l'exécution depuis quelque temps. La raison semblait conseiller le second parti mais le général français choisit le premier.

Nous arrivons à Leipsick au moment où les deux armées ennemies en approchaient par des chemins opposés; déja nous apercevions leurs têtes de colonnes. Notre armée était d'environ cent vingt mille combattants; les forces ennemies qui se rassemblaient autour de nous montaient à près de trois cent mine hommes. C'est, je crois, l'armée la plus nombreuse qui ait été réunie sur un champ de bataille, depuis celle des Gaulois contre César, au siège d'Alésia. Le général français oppose un corps de vingt mille hommes en avant de Leipsick, aux troupes ennemies qui arrivaient par les routes de Halle et de Dessau; il fait garder le pont de Leipsick sur l'Elster, sa seuie retraite; et il marche avec le reste de ses troupes à la rencontre de l'armée de Bohème, sur la route de Borna. Les deux armées se rencontrent, et prennent position à trois lieues de Leipsick, derrière un petit ruisseau.

Le lendemain les alliés commencent l'attaque, et le combat s'engage sur toute la ligne. L'ennemi, beaucoup plus nombreux que nous, présente un front plus étendu; ne pouvant pas agir sur ses flancs, nous tentons de percer son centre, en l'occupant en même temps sur ses ailes par des attaques réitérées, qui le forcent à céder du terrain sur sa droite; il est obligé d'envoyer une partie de ses réserves au secours de cette aile. L·entreprise sur son centre a d'abord quelques succès, et il est obligé d'engager les gardes impériales russes et autrichiennes ses dernières réserves, pour nous repousser. On se bat de nouveau de part et d'autre avec furie; mais, comme il ne restait plus de réserve aux ennemis, il est probable que l'équilibre du combat était rompu, et la victoire était à nous, si nous avions fait donner sur leur centre, déja harassé et en désordre, notre réserve composée de la vieille garde, et d'un corps de quinze mille hommes arrivant de Leipsick, où il était resté disponible toute la matinée, prêt à marcher au secours de l'une ou de l'autre armée. Déja ces troupes se
portaient en avant, lorsque le général français, troublé à la vue de quelques partis de cavalerie qui s'étaient glissés sur ses derrières, s'arrête dans ce moment décisif, et fait rétrograder sa garde, dont il forme un quarré pour sa sûreté personnelle, Ce mouvement rétrograde si intempestif, exécuté à la vue du reste de l'armée, ralentit l'ardeur des autres troupes, et la nuit vient mettre fin au combat avant que la victoire ne se décide pour l'un ou l'autre parti.

Cependant, dans la situation affreuse ou nous nous trouvions, une bataille indécise était pour nous une bataille perdue. Nous commencions à manquer de munitions, et notre armée secondaire qui couvrait Leipsick sur la route de Ilalle, attaquée par des forces très -supérieures, avait été repoussée jusqu'aux portes de la ville..Ses revers nous plaçaient dans une situation bien critique; car si cette ville toute ouverte tombait entre les mains du vainqueur, notre armée principale, prise à dos, était entièrement détruite. Le général français, qui sent le vice effrayant de sa situation, se rapproche de Leipsick, se réunit aux débris de sa seconde armée, et forme
un demi-cercle autour de cette ville. Il avait à dos un défilé effroyable d'une demi-lieue, formé par les bras nombreux et encaissés de l'Elster. Il se soutient toute une journée dans cette position critique, en se battant pour la retraite, et non plus pour la victoire. Enfin, la nuit vient terminer ce combat sanglant, et lui donner la facilité de faire passer son armée sur la rive gauche de l'Elster.

Mais ou profite mal de ce temps précieux, et le lendemain, l'ennemi trouve encore la moitié de l'armée française sur la rive droite. il attaque ces malheureux débris de deux batailles, et parvient à s'en emparer en se rendant maître de Leipsick.

Telle fut l'issue funeste de cette double bataille : la défaite de notre armée secondaire entraîna la perte de notre armée principale; défaite qui pouvait avoir des résultats bien plus fâcheux encore, si Leipsick fùt tombé le premier jour entre les mains du vainqueur. Mais si le général français arrivait un jour plutôt à Leipsick, comme il le pouvait, les chances étaient pour lui, au lieu d'être contre. Les deux armées ennemies, qui se fussent trouvées encore à deux journées l'une de l'autre, auraient pu être attaquées séparément, et l'une après l'autre. Il eût envoyé un simple corps d'observation pour retarder la marche de l'une, tandis qu'il aurait combattu l'autre avec toutes ses forces. Mais dans la position où il s'était mis, entre deux armées qui n'étaient plus qu'à trois lieues l'une de l'autre, obligé
de faire face de deux cotés, aucun de ses deux corps d'armée, placés dos à dos, ne pouvait céder du terrain sans laisser l'autre à découvert, et par conséquent la défaite de l'un entraînait la ruine de l'autre. Cet exemple confirme le principe que nous avons établi, de n'engager une armée entre deux corps ennemis que lorsqu'ils sont éloignés à plus d'une journée l'un de l'autre.

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Message Publié : 14 Oct 2022 9:33 
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je ne n'avais rien lu sur Rogniat, bien que le connaissant de nom... :rougi: Si je comprends bien, Rogniat valide l'option de Napoléon pour passer l'Elbe et adopter une nouvelle ligne d'opérations et regrette que Napoléon ne l'ait pas finalement retenu... Et il souligne que l'empereur n'a pas été assez rapide pour se précipiter sur Leipzig. Donc, de son point de vue, Napoléon est bel et bien resté trop longtemps à Düben ! :diablotin:

Citer :
Le second parti nous faisait éviter le passage de ces deux rivières; nous nous rapprochions de Magdebourg, grande place de dépôt, qui pouvait nous fournir abondamment toutes les munitions nécessaires, et qui devenait un appui pour notre armée; nous prenions une nouvelle ligne d'opérations par la
route de Wesel, plus assurée et plus aisée à couvrir que celle de Mayence; nous restions les maîtres d'éviter ou d'accepter la batailles; notre retraite était assurée en cas de revers; nous nous renforcions du corps de Hambourg, fort de vingt-cinq mille hommes; nous nous procurions le temps de rappeler ceux que nous avions laisses si mal-à-propos à Dresde; enfin, nous déconcertions, par une démarche inattendue, le plan que les alliés avaient formé, et dont ils suivaient l'exécution depuis quelque temps. La raison semblait conseiller le second parti mais le général français choisit le premier.


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Message Publié : 15 Oct 2022 0:15 
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Inscription : 14 Déc 2002 16:30
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Le 12 au matin, Napoléon renonce à passer l'Elbe. Il donne des ordres pour que son armée marche sur Leipzig, pour y arriver le 15 octobre. Mais, les ordres de la veille prescrivaient l'exact contraire. Il faut du temps pour réorienter les troupes. Marmont, Bertrand, la garde sont les plus près. Ils seront au rendez-vous. Mais, Mac-Donald, Souham, Reynier seront à la traîne. D'ailleurs, il donne l'ordre à Rey)nier d'achever la destruction des têtes de pont à Rosslau, car le pont de Düben serait trop encombré pour permettre à tous les corps au nord de la ville, de passer en masse. J'ignore s'il eût été possible de construire un second pont pour faciliter le passage des troupes. L'état des chemins ne permet pas non plus une allure rapide. Mac-Donald ne débouchera sur le champ de bataille que dans la matinée du 16, Souham dans l'après-midi, et Reynier que le soir du 17 octobre !

A la limite, Napoléon aurait peut-être pu attaquer dès le 15 octobre, en se servant de Marmont à la place de Mac-Donald et employer Bertrand sans se soucier de Leipzig, laissée à sa seule garnison, sous Margaron. Mais Bertrand n'est arrivé que dans la matinée du 15 et Marmont devait observer Blücher...



Reudnitz, 15 octobre 1813.

BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE.

Le 7, l’Empereur est parti de Dresde. Le 8, il a couché à Wurzen, le 9, à Eilenburg, et le 10, à Düben.

L’armée ennemie de Silésie, qui se portait sur Wurzen, a sur-le-champ battu en retraite et repassé sur la rive gauche de la Mulde; elle a eu quelques engagements, où nous lui avons fait des prison­niers et pris plusieurs centaines de voitures de bagages. Le général Reynier s’est porté sur Wittenberg, a passé l’Elbe, a marché sur Roslau, a tourné le pont de Dessau, s’en est emparé, s’est ensuite porté sur Aken et s’est emparé du pont. Le général Bertrand s’est porté sur les ponts de Wartenburg et s’en est emparé, te prince de la Moskova s’est porté sur la ville de Dessau ; il a ren­contré une division prussienne; le général Delmas l’a culbutée, et lui a pris 3,000 hommes et six pièces de canon. Plusieurs courriers de cabinet, entre autres le sieur Kraft, avec des dépêches de haute importance, ont été pris. Après s’être ainsi emparé de tous les ponts de l’ennemi, le projet de l’Empereur était de passer l’Elbe, de manœuvrer sur la rive droite, depuis Hambourg jusqu’à Dresde, de menacer Potsdam et Berlin, et de prendre pour centre d’opération Magdeburg, qui, dans ce dessein, avait été approvisionné en munitions de guerre et de bouche. Mais, le 13, l’Empereur apprit à Düben que l’armée bavaroise était réunie à l’armée autrichienne et menaçait le bas Rhin. Cette incon­cevable défection fit prévoir la défection d’autres princes, et fit prendre à l’Empereur le parti de retourner sur le Rhin; changement fâcheux, puisque tout avait été préparé pour opérer sur Magdeburg; mais il aurait fallu rester séparé et sans communication avec la France pendant un mois : ce n’avait pas d’inconvénient au moment où l’Empereur avait arrêté ses projets; il n’en était plus de même lorsque l’Autriche allait se trouver avoir deux nouvelles armées dis­ponibles ; l’armée bavaroise et l’armée opposée à la Bavière. L’Em­pereur changea donc avec ces circonstances imprévues, et porta son quartier général à Leipzig.

Cependant le roi de Naples, qui était resté en observation à Freyberg, avait reçu le 7 l’ordre de faire un changement de front, et de se porter sur Penig et Frohburg, opérant sur Wurzen et Wittenberg. Une division autrichienne, qui occupait Augustusburg, rendant dif­ficile ce mouvement, le Roi reçut l’ordre de l’attaquer, la défit, lui prit plusieurs bataillons, et après cela opéra sa conversion à droite.

Cependant la droite de l’armée ennemie de Bohême, composée du corps russe de Wittgenstein, s’était portée sur Altenburg, à la nouvelle du changement de front du roi de Naples. Elle se porta sur Frohburg, et ensuite par la gauche sur Borna, se plaçant entre le roi de Naples et Leipzig. Le Roi n’hésita pas sur la manœuvre qu’il devait faire; il fit volte-face, marcha sur l’ennemi, le culbuta, lui prit neuf pièces de canon, un millier de prisonniers, et le jeta au-delà de l’Elster, après lui avoir fait éprouver une perte de 4 à 5,000 hommes.

Le 15, la position de l’armée était la suivante :

Le quartier général de l’Empereur était à Reudnitz, à une demi-lieue de Leipzig.

Le 4e corps, commandé par le général Bertrand, était au village de Lindenau.

Le 6ecorps était à Lindenthal.

Le roi de Naples, avec les 2e, 8e et 5e corps, avait sa droite à Dœlitz et sa gauche à Liebertwolkwitz.

Les 3e et 7e corps étaient en marche d’Eilenburg pour flanquer le 6e corps.

La grande armée autrichienne de Bohême avait le corps de Gyulai vis-à-vis Lindenau, un corps à Zwenkau, et le reste de l’armée, la gauche appuyée à Crœbern, et la droite à Naunhof.

Les ponts de Wurzen et d’Eilenburg sur la Mulde, et la position de Taucha sur la Partha, étaient occupés par nos troupes.

Tout annonçait une grande bataille.

Le résultat de nos divers mouvements, dans ces six jours, a été 5,000 prisonniers, plusieurs pièces de canon et beaucoup de mal fait à l’ennemi.

Le prince Poniatowski s’est dans ces circonstances couvert de gloire.


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Message Publié : 15 Oct 2022 10:10 
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Leipzig, 16 octobre 1813, au soir.

BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE.

Le 15, le prince de Schwarzenberg, commandant l’armée enne­mie, annonça à l’ordre du jour que, le lendemain 16, il y aurait une bataille générale et décisive.

Effectivement, le 16, à neuf heures du matin, la grande armée alliée déboucha sur nous. Elle opérait constamment pour s’étendre sur sa droite. On vit d’abord trois grosses colonnes se porter, l’une le long de la rivière de l’Elster, contre le village de Dœlitz; la seconde contre le village de Wachau, et la troisième contre celui de Liebertwolkwitz. Ces trois colonnes étaient précédées par deux cents pièces de canon. L’Empereur fit aussitôt ses dispositions.

À dix heures, la canonnade était des plus fortes, et à onze heures les deux armées étaient engagées aux villages de Dœlitz, Wachau et Liebertwolkwitz. Ces villages furent attaqués six à sept fois; l’ennemi fut constamment repoussé et couvrit les avenues de ses cadavres. Le comte de Lauriston, avec le 5e corps, défendait le village de gauche, Liebertwolkwitz; le prince Poniatowski, avec ses braves Polonais, défendait le village de droite, Dœlitz, et le duc de Bellune défendait Wachau.

À midi, la sixième attaque de l’ennemi avait été repoussée; nous étions maîtres des trois villages, et nous avions fait 2,000 prisonniers.



À peu près au même moment, le duc de Tarente débouchait par Holtzhausen, se portant sur une redoute de l’ennemi, que le général Charpentier enleva au pas de charge, en s’emparant de l’artillerie el faisant quelques prisonniers.

Le moment parut décisif.

L’Empereur ordonna au duc de Reggio de se porter sur Wachau avec deux divisions de la jeune Garde. Il ordonna également au duc de Trévise de se porter sur Liebertwolkwitz avec deux autres divi­sions de la jeune Garde, et de s’emparer d’un grand bois qui est sur la gauche du village. En même temps il fit avancer sur le centre une batterie de cent cinquante pièces de canon, que dirigea le général Drouot.

L’ensemble de ces dispositions eut le succès qu’on en attendait. L’artillerie ennemie s’éloigna. L’ennemi se retira, et le champ de bataille nous resta en entier.

Il était trois heures après midi. Toutes les troupes de l’ennemi avaient été engagées. Il eut recours à sa réserve. Le comte de Merveldt, qui commandait en chef la réserve autrichienne, releva avec six divisions toutes les troupes sur toutes les attaques, et la garde impériale russe, qui formait la réserve de l’armée russe, les releva au centre.

La cavalerie de la garde russe et les cuirassiers autrichiens se précipitèrent par leur gauche sur notre droite, s’emparèrent de Dœlitz et vinrent caracoler autour des carrés du duc de Bellune.

Le roi de Naples marcha avec les cuirassiers de Latour-Maubourg et chargea la cavalerie ennemie par la gauche de Wachau, dans le temps que la cavalerie polonaise et les dragons de la Garde, com­mandés par le général Letort, chargeaient par la droite. La cavalerie ennemie fut défaite; deux régiments entiers restèrent sur le champ de bataille. Le général Letort fit 300 prisonniers russes et autrichiens Le général Latour-Maubourg prit quelques centaines d’hommes de la garde russe.

L’Empereur fit sur-le-champ avancer la division Curial de la Garde, pour renforcer le prince Poniatowski. Le général Curial se porta au village de Dœlitz, l’attaqua à la baïonnette, le prit sans coup férir, et fit 1,200 prisonniers, parmi lesquels s’est trouvé 1« général en chef Merveldt.

Les affaires ainsi rétablies à notre droite, l’ennemi se mit er retraite, et le champ de bataille ne nous fut pas disputé.

Les pièces de la réserve de la Garde, que commandait le généra Drouot, étaient avec les tirailleurs; la cavalerie ennemie vint le charger. Les canonniers rangèrent en carré leurs pièces, qu’ils avaient eu la précaution de charger à mitraille, et tirèrent avec tant d’agi­lité, qu’en un instant l’ennemi fut repoussé. Sur ces entrefaites, la cavalerie française s’avança pour soutenir ces batteries.

Le général Maison, commandant une division du 5e corps, officier de la plus grande distinction, fut blessé. Le général Latour-Maubourg, commandant la cavalerie, eut la cuisse emportée d’un boulet. Notre perte dans cette journée a été de 2,500 hommes, tant tués que blessés. Ce n’est pas exagérer que de porter celle de l’ennemi à 25,000 hommes.

On ne saurait trop faire l’éloge de la conduite du comte Lauriston et du prince Poniatowski dans cette journée. Pour donner à ce der­nier une preuve de sa satisfaction, l’Empereur l’a nommé sur le champ de bataille maréchal de France, et a accordé un grand nombre de décorations aux régiments de son corps.

Le général Bertrand était en même temps attaqué au village de Lindenau par les généraux Gyulai, Thielmann et Liechtenstein. On déploya de part et d’autre une cinquantaine de pièces de canon. Le combat dura six heures sans que l’ennemi pût gagner un pouce de terrain. À cinq heures du soir, le général Bertrand décida la victoire en faisant une charge avec sa réserve, et non-seulement il rendit vains les projets de l’ennemi, qui voulait s’emparer des ponts de Lindenau et les faubourgs de Leipzig, mais encore il le contraignit à évacuer son champ de bataille.

Sur la droite de la Partha, à une lieue de Leipzig, et à peu près à quatre lieues du champ de bataille où se trouvait l’Empereur, le duc de Raguse fut engagé. Par une de ces circonstances fatales qui influent souvent sur les affaires les plus importantes, le 3e corps, qui devait soutenir le duc de Raguse, n’entendant rien de ce côté à dix heures du matin, et entendant au contraire une effroyable canon­nade du côté où se trouvait l’Empereur, crut bien faire de s’y porter, et perdit ainsi sa journée en marches. Le duc de Raguse, livré à ses propres forces, défendit Leipzig et soutint sa position pendant toute la journée; mais il éprouva des pertes qui n’ont point été compensées par celles qu’il a fait éprouver à l’ennemi, quelque grandes qu’elles fussent. Des bataillons de canonniers de la marine se sont faiblement comportés. Les généraux Compans et Friederichs ont été blessés. Le soir, le duc de Raguse, légèrement blessé lui-même, a été obligé de resserrer sa position sur la Partha. Il a dû abandonner dans ce mouvement plusieurs pièces démontée» et plusieurs voitures.

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Message Publié : 17 Oct 2022 9:15 
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Citer :
A la limite, Napoléon aurait peut-être pu attaquer dès le 15 octobre, en se servant de Marmont à la place de Mac-Donald et employer Bertrand sans se soucier de Leipzig, laissée à sa seule garnison, sous Margaron. Mais Bertrand n'est arrivé que dans la matinée du 15 et Marmont devait observer Blücher...


A vérifier tout ça... Je n'ai pas assez d'ouvrages sur cette campagne pour le faire... Mais ça mérite d'être approfondi !


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Message Publié : 17 Oct 2022 10:30 
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Inscription : 14 Déc 2002 16:30
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D'après Bruno Colson, le corps de Bertrand a marché de Düben (4 heures du matin), le 14, pour parvenir à la nuit à Delitzsch. Ceci pour éviter la route plus courte passant par Eilenburg, mais encombrée par la Garde. Les troupes du 4ème corps sont harassées et transies ; elles ont marché par un temps exécrable. Elles n'étaient donc pas vraiment disponibles pour se battre le 15 au matin.

Tout indique que Napoléon n'envisageait plus de combattre le 15 octobre. Il était pourtant sur place, le 14, vers 14 heures à Reudnitz. S'il déploie ses cartes, il ne reconnaît nullement le terrain et ne se porte pas au feu lors de l'engagement de Liebertwolkwitz entre Murat et Wittgenstein.

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