L'Énigme des Invalides

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Message Publié : 18 Fév 2020 10:44 
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Effectifs de départ des mouvements ultimes avant Leipzig :

Napoléon : 240 000 hommes.

Armée du Nord : 110 000 hommes.
Armée de Silésie : 80 000 hommes.
Armée de Bohême : 240 000 hommes.

Total Coalisés : 430 000 hommes

Ratio : 55,81 %

A la veille de la bataille :

Napoléon : 190 000 hommes.

Coalisés : 330 000 hommes (60 000 + 60 000 + 210 000).

Ratio : 57,57 %

Le 18 octobre :

Napoléon : 160 000 hommes.

Coalisés : 290 000 hommes (60 000 + 50 000 + 180 000).

Ratio : 55,17 %

Le 19 octobre :

Napoléon : 130 000 hommes.

Coalisés : 235 000 hommes (55 000 + 40 000 + 140 000).

Ratio : 55,31 %

Le 20 octobre (après la catastrophe) :

Napoléon : 105 000 hommes.

Coalisés : 225 000 hommes.

Ratio : 46,66 %

On constate que malgré 2 jours de combats sanglants, Napoléon maintient jusqu'au bout un ratio équivalent de l'ordre de 55 %. Le manque de munitions le contraint à la retraite. Il perd 5 000 hommes dans les combats du 19. Et surtout 15 000 prisonniers. Les Allemands se rallient aux Coalisés.

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"Tant que les Français constitueront une Nation, ils se souviendront de mon nom."

Napoléon.


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Message Publié : 24 Juin 2021 16:15 
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Je viens de lire tous les messages consacrés à cette campagne de Saxe que je connaissais assez mal... C'est dur à reconnaître, mais il faut avouer que l'étoile de Napoléon a pâli, après la victoire éclatante de Dresde. Je ne soupçonnais pas à quel point il avait été en-dessous de sa réputation ! Comment concevoir qu'il ait si mal coordonné la poursuite des "bohêmiens", alors que la ruine de cette armée était à portée de mains ? Son malaise (si malaise, il y eût) n'explique ps tout. La préoccupation d'une marche rapide sur Berlin semble l'avoir emporté dans son esprit sur toute autre considération... :grands yeux: L'essentiel était fait, il n'avait plus qu'à resserrer les mailles du filet pour entraîner sa ruine définitive ! Tout a basculé le 29 août 1813 : en manquant la destrutcion en détail de cette grande armée de Bohême, il a perdu l'occasion unique de dissoudre la coalition d'une manière définitive ! En effet, celle-ci étant acquise, il n'avait plus qu'à accabler successivement Blücher et Bernadotte. Il est même probable que les souverains n'auraient pas attendu pour implorer la paix !

Il y a pas mal d'autres détails que j'ignorais, mais le plus important reste ce moment où tout aurait pu basculer en sa faveur... On en reste pantois d'étonnement et saisi de stupeur !


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Message Publié : 24 Juin 2021 17:32 
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Nous sommes d'accord : Napoléon a manqué une victoire totale après celle de Dresde. La grande armée de Bohême ne devait pas échapper à la poursuite des corps victorieux de la Grande Armée ! Le commandant X évalue qu'elle n'aurait atteint que 130 000 hommes environ après son équipée tragique dans les monts de Bohême. Après un tel désastre, elle aurait été facilement contenue par les 80 000 hommes de Murat, Victor, Marmont et Saint-Cyr. Si la coalition n'implorait pas une paix immédiate, Napoléon était libre de filer avec Vandamme et la garde contre Blücher qui aurait repassé la Katzbach plus vite qu'il ne l'avait franchie ! L'Empereur n'avait plus qu'à prendre Berlin et repousser Bernadotte derrière l'Oder. Il pouvait alors débloquer Dantzig et se couvrant par la Vistule, refouler Bernadotte vers Blücher et qu'il aurait écrasé l'un sur l'autre.

Il est infiniment probable que les souverains coalisés, réfugiés à Prague, n'auraient pas attendu pour solliciter un armistice que Napoléon n'aurait pas accordé sans des préliminaires draconiens. La Prusse n'aurait sans-doute subi aucune amputation, Mais Napoléon aurait certainement reconstitué le royaume de Pologne, en exigeant le district de Byalistock à prendre sur la Russie et la Gallicie à prendre sur l'Autriche, en échange de l'IIllyrie. Qui sait même si l'Angleterre n'aurait pas incliné à la paix ?

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Message Publié : 25 Juin 2021 14:56 
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La note suivante si elle est authentique, souligne l'aveuglement de Napoléon. Cela n'est pas arrivé souvent, mais nous sommes en face d'un cas d'école :

Citer :

Dresde, 30 août 1813.

NOTE SUR LA SITUATION GÉNÉRALE DE MES AFFAIRES.

Je suppose l’armée de Silésie ralliée derrière le Bober; il n’y aurait même pas d’inconvénient qu’elle se mît derrière la Queis.

Si je voulais faire venir le prince Poniatowski à l’armée de Berlin, le débouché de Zittau ne serait plus gardé. Il pourrait cependant arriver à Kalau en quatre jours; alors il serait indispensable que l’armée de Silésie s’appuyât sur Gœrlitz et même en avant de Bautzen. Pourvu qu’un corps occupât Hoyerswerda, mon opération de Berlin ne serait pas compromise.

Renonçant à l’expédition de Bohême afin de prendre Berlin et de ravitailler Stettin et Küstrin, le maréchal Saint-Cyr et le général Vandamme prendraient position, la gauche à l’Elbe, le duc de Raguse formerait le centre, le due de Bellune la droite; le roi de Naples pourrait commander ces quatre corps et s’établir à Dresde avec Latour-Maubourg : ce serait une belle armée. Il serait possible, dans des positions connues, de se couvrir de quelques redoutes. Cette armée serait menaçante, n’aurait aucun danger à courir, et elle pourrait se replier sur Dresde, dans le temps que j’y arriverais de Luckau.

L’armée de Silésie pourrait s’appuyer sur Naumburg, sa gauche à Weissenberg, et occuper Bautzen et Hoyerswerda.

Mes deux armées seraient alors sur la défensive, couvrant Dresde sur l’une et l’autre rive, dans le temps que j’opérerais sur Berlin et porterais le théâtre de la guerre sur le bas de l’Oder.

Les Russes ne pourront pas être indifférents à l’existence d’une armée de 60,000 hommes à Stettin; le blocus de Danzig serait me­nacé, et probablement une partie de leur armée de Silésie passerait l’Oder pour se mettre en bataille entre Danzig et Stettin. L’armée russe doit avoir perdu beaucoup de monde. Aussitôt sa frontière menacée à Stettin, ce sera un prétexte pour abandonner la Bohême. Et moi, étant dans une position transversale et ayant tous les Polonais entre Stettin et Küstrin, j’aurais l’initiative de tous les mouvements.

J’ai deux plans d’opération à adopter :

Le premier, d’aller à Prague, profitant de mes succès contre l’Autriche. Mais d’abord je ne suis plus en mesure d’arriver avant l’en­nemi à Prague, ville forte; je ne la prendrais pas; la Bohême peut s’insurger : je serais dans une position difficile; 2° l’armée ennemie de Silésie attaquerait mon armée de Silésie : je serais dans une posi­tion délicate à Prague; il est vrai, cette armée pourrait se portera I Dresde et s’y appuyer; 3° dans cette position de choses, l’armée d’Oudinot ne peut rester que défensive ainsi que celle du prince d’Eckmühl, et, vers le milieu d’octobre, je perdrai 9,000 hommes à Stettin. J’occuperais alors la ligne de l’Elbe, de Prague à la mer; elle est par trop étendue : si elle perçait dans un point, elle ouvrirait accès dans la 32* division et pourrait me rappeler dans la partie la plus faible de mes États. Les Russes ne craignent rien pour eux ni pour la Pologne : ils se renforceraient entre l’Oder et l’Elbe, dans le Mecklenburg et en Bohême.

Ainsi le projet d’aller à Prague a des inconvénients : 1° Je n’ai pas suffisamment de chances pour être sûr d’avoir la ville de Prague. 2° Que je me trouve alors avec mes principales forces dans un tout autre système, et me trouvant, moi, de ma personne, à l’extrémité de ma ligne, je ne pourrais me porter sur les points menacés; des sottises seraient [faites; ce qui porterait la guerre entre l’Elbe et le Rhin, ce qui est le désir de l’ennemi. Le troisième inconvénient : je perdrais mes places de l’Oder, et ne serais pas en acheminement sur Danzig.

En marchant au contraire sur Berlin , j’ai aussitôt un grand résultat : je protège ma ligne de Hambourg à Dresde; je suis au centre; i en cinq jours, je puis être aux points extrêmes de ma ligne; je dégage Stettin et Küstrin ; je puis obtenir ce prompt résultat de séparer ‘les Russes des Autrichiens; dans la saison, je ne puis être embar­rassé de vivre à Berlin; les pommes de terre, les grandes ressources de cette ville, les canaux, etc., me nourriront, et je maintiens la [guerre où elle a été jusqu’à cette heure. La guerre d’Autriche n’a pour moi que l’inconvénient d’un sacrifice de 120,000 hommes mis sur la défensive entre Dresde et Hof, défensive utile à mes troupes qui se forment. Je puis me prévaloir auprès de l’Autriche de cette condescendance à ne pas porter la guerre en Bohême. L’Autriche ne pouvant se porter nulle part, ayant 120,000 hommes sur ses fron­tières, je menace d’aller à Prague sans y aller. Les Prussiens ne se soucieront pas de rester en Bohême, leur capitale prise, et les Russes eux-mêmes seront inquiets pour la Pologne, en voyant les Polonais réunis sur l’Oder. Il faudrait alors qu’il arrivât une de ces deux choses. Les Russes, les Prussiens de Bohême forceront l’Autriche à reprendre l’offensive, â revenir à Dresde; ce ne peut être que dans quinze jours. Alors j’ai pris Berlin, ravitaillé Stettin, détruit les travaux des Prussiens et désorganisé la landwehr. Alors, si l’Autriche recommence ses sottises, je me trouverai à Dresde avec une armée réunie; de grands événements, une grande bataille termineraient la campagne et la guerre.

Enfin, dans nia position, tout plan où de ma personne je ne suis pas au centre est inadmissible. Tout plan qui m’éloigne établit une guerre réglée, où la supériorité des ennemis en cavalerie, en nombre et même en généraux, me conduirait à une perte totale.

En effet, pour bien comparer les deux projets, il faut placer mes armées en bataille dans les deux projets.

1° Projet de Prague. — II faut m’y porter de ma personne, y mettre le 2e, le 6e, le 14e et le 1e corps, la cavalerie Latour-Maubourg; il faudrait le prince d’Eckmühl devant Hambourg, les trois corps d’Oudinot sur Wittenberg et Magdeburg, l’armée de Silésie sous Bautzen. Dans cette situation, je suis sur la défensive : l’offen­sive est à l’ennemi ; je ne menace rien; il serait absurde de dire que je menace Vienne; l’ennemi peut masquer l’armée de Silésie, faire déboucher des corps par Zittau, m’attaquer à Prague, ou bien, masquant l’armée de Silésie, il détachera sur le bas Elbe, ira sur le Weser, tandis que je serai à Prague; il ne me restera qu’à gagner le Rhin en toute hâte. Le général qui commandera à Bautzen ne convien­dra pas que l’ennemi s’est affaibli devant lui, et mon armée sur Hambourg et Magdeburg sera tout à fait hors de ma main.

2° Hypothèse. — Maintenant le 1ercorps, le 14e, le 2e, le 6e et Latour-Maubourg resteront tranquilles autour de Dresde, sans craindre les Cosaques; le corps d’Augereau s’approchera sur Bam­berg et Hof, l’armée de Silésie sur la Queis, ou le Bober et Bautzen: point d’inquiétude encore pour mes communications; mes deux armées de Hambourg et de Reggio seront sur Berlin et Stettin.



Demain 31, au soir, j’aurai à Grossenhayn :

Infanterie, 18,000 hommes;

Cavalerie, 7,000;

Artillerie, cent cinquante pièces de canon.

Au total, la valeur d’une armée de 30,000 hommes.

Selon la note de Caraman, les trois corps auraient 45,000 hom­mes d’infanterie, 9,000 hommes de cavalerie; soit 54,000 hommes, avec près de deux cents pièces de canon.

Ce serait donc 63,000 hommes d’infanterie et 16,000 de cava­lerie avec trois cent cinquante pièces ; ce serait une armée de plus de 80,000 hommes.

Il faudrait préparer les lettres d’ordres chiffrées pour les généraux: prince d’Eckmühl, duc de Reggio, Lapoype, Lemarois. Cependant ces lettres ne partiraient que lorsque je serai bien décidé.

Si je portais mon quartier général à Luckau, je serais à deux jour­nées de Torgau, à trois de Dresde, à quatre de Gœrlitz. Je serais donc dans une position centrale à portée de prendre mon parti, soit pour lancer tout ce que je voudrais sur Berlin, soit pour y aller de ma personne. Il faudrait, en m’éloignant de Luckau, être assuré de la situation de mes derrières. En faisant venir 3,000 chevaux du roi de Naples, j’aurais 10,000 chevaux pour maintenir mes communica­tions entre Berlin, Dresde et Torgau.

Il faudrait donc écrire les lettres suivantes.

Suivent des projets de lettres au duc de Reggio, au prince d’Eckmühl, au général Lemarois, au général Lapoype et au commandant de Torgau, pour leur donner avis du mouvement sur Berlin et leur faire connaître les ordres qui les concernent.


L'évidence saute aux yeux : Napoléon n'avait pas perçu à quel point la grande armée de Bohême était en difficulté... :bouhou:


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Message Publié : 09 Août 2022 10:53 
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Bruno Roy-Henry a écrit :
Nous sommes d'accord : Napoléon a manqué une victoire totale après celle de Dresde. La grande armée de Bohême ne devait pas échapper à la poursuite des corps victorieux de la Grande Armée ! Le commandant X évalue qu'elle n'aurait atteint que 130 000 hommes environ après son équipée tragique dans les monts de Bohême. Après un tel désastre, elle aurait été facilement contenue par les 80 000 hommes de Murat, Victor, Marmont et Saint-Cyr. Si la coalition n'implorait pas une paix immédiate, Napoléon était libre de filer avec Vandamme et la garde contre Blücher qui aurait repassé la Katzbach plus vite qu'il ne l'avait franchie ! L'Empereur n'avait plus qu'à prendre Berlin et repousser Bernadotte derrière l'Oder. Il pouvait alors débloquer Dantzig et se couvrant par la Vistule, refouler Bernadotte vers Blücher et qu'il aurait écrasé l'un sur l'autre.

Il est infiniment probable que les souverains coalisés, réfugiés à Prague, n'auraient pas attendu pour solliciter un armistice que Napoléon n'aurait pas accordé sans des préliminaires draconiens. La Prusse n'aurait sans-doute subi aucune amputation, Mais Napoléon aurait certainement reconstitué le royaume de Pologne, en exigeant le district de Byalistock à prendre sur la Russie et la Gallicie à prendre sur l'Autriche, en échange de l'IIllyrie. Qui sait même si l'Angleterre n'aurait pas incliné à la paix ?


Evidemment, il est difficile d'examiner la position de l'Empereur dans ces circonstances délicates ! Il semble bien qu'il soit passé à côté d'un grand succès qui aurait pu transformer toute la physionomie de la campagne. Je crois que le 1er à en avoir ressenti toute l'amertume, c'est bien lui... Sur le moment, et plus tard, il a donné un ensemble d'explications plus ou moins recevables. Il n'allait pas quand même se crucifier à la plus grande satisfaction de ses adversaires. Son malaise n'a certainement pas été simulé et -dans une certaine mesure- peut expliquer l'affaiblissement passager de ses facultés. Nous ne devons pas oublier que Napoléon n'était qu'un homme, comme il s'est plu à le dire à plusieurs reprises. Vouloir en faire un Dieu omniscient et non une personne qui pouvait avoir des faiblesses, est certainement exagéré. Certes, dans une circonstance critique, à un moment où la fortune balançait entre la France et ses ennemis, il a manqué le moment propice. Cela doit nous faire réfléchir sur la vanité des entreprises humaines : qui que ce soit, placé au faîte des grandeurs et de la gloire, peut se révéler un instant en-dessous de la tâche qu'il s'est fixé. Néanmoins, il ne faut pas oublier que cette armée de Bohême dont il poursuivait la destruction, bénéficiait d'une supériorité numérique importante et que les généraux alliés présentaient des qualités, acquises à la suite de nombreux combats contre l'armée française. De son côté, Vandamme a certainement été imprudent et n'a pas respecté comme il convenait les règles tactiques en pareille matière. La perspective d'un grand succès l'a aveuglé, alors que Saint-Cyr ne semblait pas avoir le même feu-sacré... Tout s'est combiné pour produire ce désastre de Kulm, qui a d'ailleurs eu plus de conséquences morales que matérielles, puisque Napoléon a pu reconstituer 1e 1er corps avec un effectif de 18 000 hommes. La perte que Vandamme a essuyée à Kulm a été évaluée à 8 000 hommes, tués, blessés ou prisonniers. Celle-ci s'ajoutant aux pertes que la campagne avait déjà occasionnées. Bien sûr, son impact a été plus fort, du fait qu'il ait été capturé, ainsi que le général Haxo. Le tout a fâcheusement relevé le moral des alliés, suite aux échecs de Gross-Beeren et de la Katzbach. D'une certaine manière, je me demande si l'échec d'Oudinot n'était pas plus grave, car tenant beaucoup aux dispositions initiales de Napoléon : le fait d'avoir sous-estimé Bernadotte et ses troupes, d'avoir sur-estimé les talents d'Oudinot me semble finalement plus grave que la diminution passagère des facultés de Napoléon. Et cette tendance n'a pas été vraiment corrigée pour l'équipée de Ney qui a conduit à l'échec de Dennewitz. 2 défaites sur la route de Berlin prouvent que ni les bons chefs, ni les troupes adéquates, n'avaient été mobilisés pour le succès d'un projet pourtant déterminant...


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Message Publié : 12 Août 2022 9:34 
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Sébastien D. a écrit :
Evidemment, il est difficile d'examiner la position de l'Empereur dans ces circonstances délicates ! Il semble bien qu'il soit passé à côté d'un grand succès qui aurait pu transformer toute la physionomie de la campagne. Je crois que le 1er à en avoir ressenti toute l'amertume, c'est bien lui... Sur le moment, et plus tard, il a donné un ensemble d'explications plus ou moins recevables. Il n'allait pas quand même se crucifier à la plus grande satisfaction de ses adversaires. Son malaise n'a certainement pas été simulé et -dans une certaine mesure- peut expliquer l'affaiblissement passager de ses facultés.


Si malaise il y eut, cela ne l'a pas empêché de dicter ses ordres pour remédier aux défaites de Gross-Beeren et de la Katzbach. Gouvion et Vandamme subirent aussi son ire et cela était justifié, jusqu'à un certain point. Gouvion avait ordre de se lier avec Vandamme et de pousser l'ennemi l'épée dans les reins. Sa poursuite ne fut pas un modèle du genre. Vandamme avait reçu l'ordre d'intercepter les communications de l'ennemi "EN DIRECTION" de Toeplitz. Il aurait dû s'assurer qu'il serait soutenu, même si cela paraissait vraisemblable, compte-tenu de ses instructions. De plus, il aurait dû laisser une "sonnette" à Nollendorf, ne serait-ce qu'un bataillon...

Citer :
Nous ne devons pas oublier que Napoléon n'était qu'un homme, comme il s'est plu à le dire à plusieurs reprises. Vouloir en faire un Dieu omniscient et non une personne qui pouvait avoir des faiblesses, est certainement exagéré. Certes, dans une circonstance critique, à un moment où la fortune balançait entre la France et ses ennemis, il a manqué le moment propice. Cela doit nous faire réfléchir sur la vanité des entreprises humaines : qui que ce soit, placé au faîte des grandeurs et de la gloire, peut se révéler un instant en-dessous de la tâche qu'il s'est fixé.


Certainement, cela est plaisant de lire ceci sous votre plume...

Citer :
Néanmoins, il ne faut pas oublier que cette armée de Bohême dont il poursuivait la destruction, bénéficiait d'une supériorité numérique importante et que les généraux alliés présentaient des qualités, acquises à la suite de nombreux combats contre l'armée française. De son côté, Vandamme a certainement été imprudent et n'a pas respecté comme il convenait les règles tactiques en pareille matière. La perspective d'un grand succès l'a aveuglé, alors que Saint-Cyr ne semblait pas avoir le même feu-sacré... Tout s'est combiné pour produire ce désastre de Kulm, qui a d'ailleurs eu plus de conséquences morales que matérielles, puisque Napoléon a pu reconstituer 1e 1er corps avec un effectif de 18 000 hommes. La perte que Vandamme a essuyée à Kulm a été évaluée à 8 000 hommes, tués, blessés ou prisonniers. Celle-ci s'ajoutant aux pertes que la campagne avait déjà occasionnées. Bien sûr, son impact a été plus fort, du fait qu'il ait été capturé, ainsi que le général Haxo. Le tout a fâcheusement relevé le moral des alliés, suite aux échecs de Gross-Beeren et de la Katzbach. D'une certaine manière, je me demande si l'échec d'Oudinot n'était pas plus grave, car tenant beaucoup aux dispositions initiales de Napoléon : le fait d'avoir sous-estimé Bernadotte et ses troupes, d'avoir sur-estimé les talents d'Oudinot me semble finalement plus grave que la diminution passagère des facultés de Napoléon. Et cette tendance n'a pas été vraiment corrigée pour l'équipée de Ney qui a conduit à l'échec de Dennewitz. 2 défaites sur la route de Berlin prouvent que ni les bons chefs, ni les troupes adéquates, n'avaient été mobilisés pour le succès d'un projet pourtant déterminant...


Effectivement, on peut s'étonner à bon droit que Napoléon n'ait pas mis les meilleurs moyens pour assurer le succès d'une marche sur Berlin. Ni Oudinot, ni Ney ne convenaient pour assurer la direction des opérations (C'est Davout qui s'imposait pour cette manoeuvre ; l'Empereur pouvait le remplacer par Gouvion et appeler Oudinot à la place de ce dernier). Certains auteurs ont assuré que l'Empereur estimait que Bernadotte n'avait aucun talent et que les troupes prussiennes n'avaient qu'une piètre valeur. Il craignait davantage Blücher qui avait sous ses ordres de nombreux Russes et surtout Schwarzenberg qui bénéficiait d'une large supériorité numérique...

Pour en revenir à Bernadotte, l'Empereur considérait encore qu'il ne pourrait jamais concentrer les 100 000 hommes qu'il lui attribuait, qu'il lui fallait observer et contenir Davout, ce qui le privait d'au-moins 30 000 hommes et qu'avec seulement 70 000 hommes, il convenait de défalquer ses 25 000 Suédois que le prince-héritier de Suède voudrait toujours tenir loin des combats, ce qui lui en ferait de 45 000 à 50 000, tout au plus. Avec une pareille manière de raisonner, on conçoit qu'il ait pu confier à Oudinot et ses 65 000 hommes, la marche sur Berlin !

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Message Publié : 14 Août 2022 14:32 
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Cher Bruno, je suis quasiment en accord sur l ensemble de vos propos avec Sébastien.
Toutefois, et comme il me plaît de le rappeler souvent, quel que soit les atouts ou les infortunes que Napoléon a connu lors de ses batailles, si l on peut se permettre de mettre à jour les erreurs du Grand Homme, nul ne pourra jamais saisir son état d esprit du moment, car cet esprit restera impénétrable.

Ne nous arrive t il pas parfois, en ayant la conviction de faire pour le mieux, de s apercevoir ensuite que nous avons fait une erreur de jugement ?
Et pourtant, nous pensions avoir les bonnes raisons pour agir de la sorte ...

:salut:


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Message Publié : 18 Août 2022 13:14 
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Il est certain que l'Empereur n'a pas suivi ses propres maximes pour ces 1ères opérations, si décousues... Dédain pour Bernadotte et la Landwehr prussienne : c'est plus que probable. :salut:


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Message Publié : 22 Août 2022 17:34 
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Oui, c'est paradoxal, alors qu'il n'y avait plus une seule faute à commettre... :bouhou:


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Message Publié : 23 Août 2022 10:40 
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Ayant relu la correspondance de l'Empereur donnée par Bruno, je suis frappé par l'évaluation des effectifs des Alliés. Napoléon les sous-estime : il donne 80 000 hommes à Blücher, tout au plus. Moins de 100 000 pour Bernadotte et 200 000 au grand maximum pour Schwarzenberg ! Total = 380 000 hommes, alors qu à ce moment les effectifs alliés étaient de 450 000 hommes. Ayant sous la main 360 000 hommes, l'Empereur pouvait penser pouvoir venir à bout des 3 armées qui l'encerclaient. Cette mauvaise évaluation des effectifs de l'ennemi explique mieux, à mon sens, le plan jugé défectueux contre Bernadotte. Le patriotisme prussien et des Allemands en général, avait tari le recrutement des espions. Et Napoléon ne pouvait pas admettre que les Prussiens se recrutent au-delà de 100 000 hommes, après l'effort colossal du printemps 1813. Je suis persuadé que le plan général défectueux d'août 1813 provient essentiellement de cette cause, outre la sous-estimation des talents de Bernadotte et de ses moyens.


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