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Extraits de l'ouvrage de Vaulabelle, 1815. Ligny-Waterloo, Paris, 1844; Annexe 8 de la revue ABN; fichiers consacrés à Waterloo:
Page 1 - 279 -ANNEXE 8. Enquête sur un ordre daté du Caillou le 18 juin 1815 à dix heures du matin. Le 18 juin 1815, jour de la bataille de Mont-Saint-Jean, Napoléon envoie deux dépêches au Maréchal Grouchy:l'une datée de dix heures du matin, l'autre de treize heures. Grouchy reçoit ces missives avec retard, fait que maints historiens ne manquent pas de faire apparaître au registre des causes du désastre, bien qu'ils ne s'accordent guère sur l'importance de ce retard. Achille de Vaulabelle a écrit à ce sujet : "Etrange fatalité! Deux ordres contenant le salut de toute une armée, de tout un empire, sont l'un et l'autre confiés, en un seul original, à un seul officier,(...) chaque officier, au lieu de trois lieues en fait onze et, au lieu de deux ou trois heures, reste six heures en chemin ! Jamais, nous le croyons, il n'y eut exemple, en des circonstances aussi graves, d'une pareille incurie 1. Certes, certains détails ont depuis été corrigés tant au niveau horaire qu’à celui des distances. Diverses opinions ont, depuis, également été formulées. Nous connaissons le nom du porteur du premier ordre. Il s’agit de Georges Zenowicz, officier polonais, naturalisé français 2. Georges Zenowicz voit le jour vers 1775 dans une famille de la noblesse polonaise qui possède d’immenses propriétés dans le Nord-Est lithuanien. En 1797, il s’attire les foudres de la police du Tsar en conspirant contre la toute puissante Russie occupée à dépecer son pays. Pourchassé, il rejoint Dombrowski, un autre patriote polonais, en Italie. Après moultes péripéties, Zenowicz rejoint l’état-major de l’armée d’Italie qui est alors commandée par un jeune général du nom de Bonaparte. Blessé une première fois lors du combat de « La Trébbia », en juin 1799, il reçoit une nouvelle blessure à « Novi », en août suivant. Promu chef d’escadron en1800, il est confirmé dans son grade par une lettre de service datée du 5 décembre 1805. C’est à cette époque qu’il entame les démarches nécessaires afin d’être naturalisé français pour des raisons qui nous échappent encore aujourd’hui. 1805, Zenowicz combat en Autriche. Il est également présent en Prusse, en 1806 ainsi qu’en 1807, où il sert sous Oudinot. Il se distingue à Essling, en mai 1809; se fait remarquer à Wagram, le 6 juillet de la même année, en marchant à la tête de son bataillon 3, qui fait partie de la colonne d’attaque destinée à briser le centre ennemi. Au cours de cette action, il reçoit une contusion à la tête. Suite à cette action, un décret impérial, signé à Witebsk (?), le nomme adjudant-commandant. Le 9 août 1812, sa probité étant mise en doute, une enquête administrative lui vaut d’être mis en disponibilité ce qui l’empêche de participer aux campagnes de 1812 et de 1813. Le 1er mars 1815, Napoléon débarque à Golf Juan. Zenowicz assaille littéralement les bureaux afin d’être réincorporé dans l’armée. Il finit par obtenir gain de cause et est affecté à l’état-major du Ier Corps de l’armée du Nord placé sous les ordres du lieutenant-général comte Drouet d’Erlon. Le 15 juin, l’armée française franchit la frontière au Sud de Charleroi. Vers midi, les Marins de la Garde enlèvent le pont qui enjambe la Sambre à Charleroi, ouvrant ainsi la ville aux troupes dirigées par l’Empereur en personne. Zenowicz, à la recherche de l’état-major du Ier Corps, passe par Charleroi où il rencontre le général Maret qui le charge de porter plusieurs dépêches à l’Empereur. C’est ainsi qu’on retrouve Zenowicz au Caillou le17 juin au soir.
1A. de Vaulabelle, 1815. Ligny-Waterloo, Paris, 1844. -------------------------------------------------------------------------------- Page 2 - 280 -Ici commence la controverse selon laquelle il serait responsable de la transmission tardive des ordres de l’Empereur auprès du maréchal Grouchy. C’est ici également que nous ouvrirons notre enquête après vous avoir indiqué que Zenowicz est décédé à Bruxelles, en 1853 (Malgré nos recherches, nous n’avons pas retrouvé son acte de décès). Quant au porteur du deuxième ordre, l’Histoire n’a pas retenu son nom; tout au plus Grouchy se souvient-il qu’il était ivre au point de ne plus trouver ses mots. L’accusation portée par Achille de Vaulabelle en 1844 pousse Zenowicz à réagir en publiant sa version des faits 4. Si ce récit a attiré l’attention des historiens, ceux-ci n’ont cependant jamais pris la peine de le comparer avec d’autres assertions de Zenowicz portant sur le même sujet : a) Un récit en Allemagne en 1820. b) Trois relations des événements du 18 juin 1815, parues entre 1827 et 1829 dans des journaux bruxellois. Si le récit de 1820 est introuvable, nous avons pu étudier les articles de 1827 et 1829 conservés dans une bibilothèque privée. Durant son séjour à Paris, Zenowicz entretient d’étroits contacts avec un compatriote polonais bien connu puisqu’il s’agit du général Kosciuszko, le héros malheureux de l’insurrection polonaise de 1794. Or, Kosciuszko est influent dans la capitale française. De là à penser que Zenowicz a pu bénéficier de la protection de compatriotes pour obtenir de l’avancement, il n’y a qu’un pas que nous éviterons de franchir. Rappelons simplement que l’émigration polonaise à Paris est, à cette époque, très importante et qu’il y règne une division politique qui oppose les modérés supportant le Général Dombrowski comme chef des légions polonaises aux radicaux, ou républicains, qui sont ses ennemis déclarés. Or, si Kosciuszko a la sagesse de se tenir à l’écart de ces querelles, Zenowicz, lui, n’hésite pas à prendre parti en se liant avec les radicaux. Il participe dès lors à toutes leurs activités; du moins jusqu’en 1805. Lorsqu’éclate la déclaration d’une nouvelle guerre contre l’Autriche, plusieurs officiers polonais résidant en France sont enrôlés dans l’armée française. Zenowicz est du nombre. C’est à cette époque que se situe un incident fort compromettant pour sa carrière militaire. Zenowicz voue une véritable passion aux objets d’art. Aussi, lors de son séjour dans la capitale autrichienne, entre-t-il en relation avec un certain Charles Ridel, antiquaire de son état. A l’issue de plusieurs visites, ce dernier lui confie un camée à tête de méduse d’une valeur de 500 louis d’or. Zenowicz s’engage à vendre le bijou une fois de retour à Paris. Si la vente devait ne pas avoir lieu, il est convenu que le camée sera retourné à l’antiquaire pour le 15 février 1810 au plus tard. Ces conditions figurent sur un reçu signé par Zenowicz en date du 22 décembre 1809. Or, non seulement Zenowicz ne vend pas le camée, mais il « oublie » de le renvoyer à Ridel qui, désireux de récupérer son bien, se met en rapport avec une de ses relations influentes à Vienne, le prince Albani. Il se fait que ce dernier a un frère, Cardinal de son état, résidant à Paris. A la demande de son parent, le cardinal contacte l’indélicat à plusieurs reprises, en vain. Ses multiples ambassades auprès de Zenowicz ayant échoué, le cardinal finit par déposer une plainte, le 21 mars 1811, auprès du Ministre de la Guerre. Convoqué, Zenowicz se montre fort ennuyé et consent finalement à restituer l’objet du litige. Le 1er avril 1811, pressentant peut-être le danger, il adresse une lettre d’excuses au Ministre de la Guerre en demandant qu’elle soit communiquée au cardinal Albani. Trop tard, le 25 avril 1811, il est déchu de ses fonctions au sein de son régiment et mis en disponibilité 5. Sans emploi, Zenowicz occupe son temps en écrivant deux livres : « Morale et politique russe », publié à Paris en juin 1812 et « Défense de la Pologne, ou Histoire morale, politique et littéraire de cet ancien Etat ». 4 G. Zenowicz, Waterloo, déposition sur les quatre journées de la campagne de 1815, Paris, 1848. 5 Service Historique de l'Armée, Vincenne, dossier du Col. Georges Zenowicz. -------------------------------------------------------------------------------- Page 3 - 281 -Il met à profit les avant-propos, pour se plaindre de son éloignement des « champs de gloire ». A l’issue d’innombrables démarches, Zenowicz parvient à se faire réintégrer dans l’armée; du moins le croit-il. Sur proposition du Ministre de la Guerre, l’Empereur signe, le 9 août 1812, de Witebsk, un brevet d’adjudant-commandant. Mais voilà, en date du 31 janvier 1813, Zenowicz n’a encore reçu aucune affectation. Pire, sa situation à Paris devient de plus en plus précaire au point qu’il finit par être incarcéré à Sainte-Pélagie pour dettes. C’est au cours de cette mise à l’écart qu’un rapport mettant en doute la probité de Zenowicz arrive sur le bureau du Ministre de la Guerre. Une enquête est ouverte afin d’examiner le bien-fondé de l’accusation. La lenteur administrative sévissant déjà à cette époque, le dossier végète dans les méandres ministériels pour finalement aboutir, le 27 janvier 1814, à la nomination de Zenowicz au grade de sous-chef d’état-major à la 2e division du Ier Corps; ce qui signifierait qu’aucune charge n’a été retenue contre lui. « L’indélicatesse viennoise » de Zenowicz lui aura finalement coûté fort cher car, hormis le fait d’avoir été tenu éloigné des champs de bataille en 1812 et en 1813, sa probité même a été mise en doute par les autorités militaires avec toutes les conséquences que cela implique. Avril 1814, Napoléon, abandonné de tous, quitte la France pour l’île d’Elbe. Contrairement à bon nombre de ses compatriotes, Zenowicz ne rentre pas en Pologne bien que le gouvernement de Louis XVIII lui en donne la possibilité. Non, il reste à Paris où il met tout en œuvre pour que sa naturalisation soit confirmée. Malgré ses antécédents, il finit par obtenir gain de cause. En mars 1815, lors du retour de l’Empereur, Zenowicz n’est plus un officier polonais au service de la France, mais bien un officier français en demi-solde, comme des centaines d’autres. Peut-être soucieux de prouver sa fidélité vis-à-vis de l’Empire renaissant, Zenowicz fait partie du « commando » qui intercepte les voitures du duc de Berry à Saint-Denis afin de les ramener à Paris. Ne perdant pas de temps, il se fait admettre en audience particulière par le ministre de la Guerre, le 24 mars. Ses doléances sont précises: obtenir un service plus actif que celui d’adjudant-commandant. Le maréchal Davout, alors ministre de la Guerre,n’ayant donné aucune suite à cette demande, Zenowicz renouvelle sa démarche le 13 avril. Cette fois il semble avoir été entendu puisqu’il se voit affecté, en tant que sous-chef d’état-major, auprès du Ier Corps de l’armée du Nord placé sous le commandement du lieutenant-général comte Drouet d’Erlon. Le 16 juin, en fin de journée, Zenowicz rencontre le duc de Bassano à Charleroi. Ce dernier le charge de porter des dépêches à l’Empereur qui se trouve à Fleurus. C’est ainsi que Zenowicz rejoint, le 17 juin au matin, le G.Q.G. qu’il ne quittera plus. Le 18 juin, bien que ne faisant pas partie de l’état-major général, c’est à lui que Napoléon confie le premier ordre destiné au maréchal Grouchy, aussi bizarre que cela puisse paraître. En effet, il est étonnant qu’un officier se trouvant par hasard au quartier-général, et n’ayant fait l’objet d’aucune autorisation de déplacement, soit choisi en lieu et place des aides de camp et autres officiers d’ordonnance attachés à la personne de l’Empereur. Le 19 juin, lors de la retraite de Grouchy, Zenowicz se trouve auprès du commandant du IIIe Corps, le généralVandamme. De retour en France, il a recours aux chevaux de poste pour se rendre à Laon afin d’être, selon ses dires, le premier à apporter la nouvelle au quartier général que le Corps de Grouchy est sauvé. Nous sommes au matin du 21 juin 1815. Zenowicz reste en service au G.Q.G. jusqu’à la fin de l’aventure impériale. Après la dissolution de l’armée sur la Loire, il rentre à Paris où la police royale l’interpelle afin de lui demander des comptes concernant l’affaire du 20 mars et l’interception des voitures du duc de Berry à Saint-Denis. Dans sa foulée, la justice royale lui reproche sa participation dans l’affaire de l’imprimé bonapartiste, le « Nain Tricolore ». Reconnu coupable par la Cour d’Assises de la Seine, il est condamné à la déportation le 11 juin 1816. Cette peine est commuée en bannissement à vie, le 2 juillet 1817, grâce à l’intervention de ses nombreuses relations. Zenowicz quitte donc la France pour l’Allemagne où il rédige son premier ouvrage sur la bataille de Waterloo, ouvrage publié en 1820. -------------------------------------------------------------------------------- Page 4 - 282 -C’est l’époque où les germes de la liberté, issus de la Révolution française et propagés à travers l’Europe par les Aigles de l’Empire, finissent par causer une succession de bouleversements dans des pays comme l’Italie et l’Espagne. Zenowicz ne manque pas de s’enflammer pour ces nouvelles causes. C’est ainsi qu’il se trouve, en 1823, auprès du colonel Riego, chef du parti libéral espagnol. Cugnet de Montarlot, proclamé Président de la République à Madrid, entame l’organisation d’un gouvernement, entreprise que Zenowicz qualifie « d’immortelle ». L’aide-principal du nouveau président n’est autre que le Général Guillaume de Vaudoncourt 6, officier arrivé là après l’échec de la révolution piémontaise où il commandait les troupes révolutionnaires. Mais voilà, l’intervention de l’armée de Louis XVIII, au nom de la Sainte-Alliance, réduit à néant les beaux plans de Madrid. L’ordre ancien est rétabli, Riego pendu, Cugnet de Montarlot fusillé. Quant à Zenowicz et à de Vaudoncourt, ils ont pris la fuite vers Cadix où ils embarquent pour l’Angleterre, nation qui, après avoir contribué à la chute de Napoléon et à la création de la Sainte-Alliance, donne asile aux proscrits et rescapés des mouvements libérateurs européens. A Londres, Zenowicz devient le chef de file des proscrits, ce qui finit par l’opposer au général de Vaudoncourt, mettant ainsi un terme à l’amitié qui les a unis tout au long de leur voyage commun depuis l’Espagne. De Vaudoncourt finit par quitter Londres pour Bruxelles avant de rentrer en France en 1825. Zenowicz, lui, reste à Londres jusqu’aux premiers mois de 1826, époque à laquelle il quitte à son tour Londres pour Bruxelles. La Révolution de juillet 1830 ayant levé son bannissement, il rentre quelque temps à Paris avant de revenir à Bruxelles où il décède vers 1853. A la lecture d’une vie aussi mouvementée que celle de Zenowicz, nous avons découvert un homme brave, résolu, dévoué, tant à la cause de la liberté qu’à Napoléon, avant d’embrasser les mouvements progressistes. Si l’affaire du camée de Vienne obscurcit sa carrière militaire, il est étonnant que, dès l’aube de cette carrière, en1805, Zenowicz se soit complètement désolidarisé de la cause polonaise. Dans l’ouvrage qu’il publie en 1812, il parle de la Pologne comme étant sa « première patrie » et de la France comme étant sa « nouvelle patrie ». Il n’entreprend rien non plus pour aider ses compatriotes dans leur lutte contre les Russes en 1830 et 1831. Il n’invoque sa nationalité polonaise qu’en 1827, lors de sa querelle avec le général de Vaudoncourt, mais uniquement pour renforcer la défense de son rôle durant la journée de la bataille de Mont-Saint-Jean. Il rappelle alors qu’il était impossible pour un « Polonais » de manquer à ses devoirs au champ d’honneur et ce, quelles que soient les circonstances. Zenowicz reste un personnage mystérieux, ce qui nous incite à nous poser certaines questions concernant la crédibilité de cet officier et, par conséquent, de ses écrits. Le général de Vaudoncourt est le premier, dans son ouvrage sur la Campagne de Belgique de 1815, à formuler des accusations graves à l’encontre de Zenowicz 7 en mentionnant que cet officier, expédié vers une heure auprès du maréchal Grouchy, n’est arrivé à destination qu’à dix-neuf heures, trop tard, par une négligence bien coupable; et d’ajouter : Nous ne rapporterons pas les bruits qui ont couru dans le temps sur son compte. De Vaudoncourt désigne Zenowicz comme étant le porteur du deuxième ordre de NApoléon, celui de treize heures. Or, dans une lettre publiée le 21 janvier 1820 dans le « Constitutionnel », le colonel A. de Grouchy 8 nomme bien Zenowicz comme porteur du premier ordre, c’est-à-dire celui daté de 10 heures du matin. Rappelons que le Général de Vaudoncourt n’était pas à Mont-Saint-Jean et qu’il tient ses informations de la bouche même de Zenowicz. Dans sa défense contre les accusations du général de Vaudoncourt 9. Zenowicz ne corrige pas l’erreur; au contraire, il la confirme en écrivant : Je reçus sur le champ de bataille, vers une heure, l’ordre de me rendre auprès du maréchal Grouchy. 7 Général Frédéric-Guillaume de Vaudoncourt, Histoire des campagnes de 1814 et 1815 en France, 1826,vol.4. 8Fils du maréchal. 9 Deux lettres de G. Zenowicz au rédacteur du « Courrier des Pays-Bas », numéros des 1er et 2 septembre 1827. -------------------------------------------------------------------------------- Page 5 - 283 -Il est difficile de se soustraire au soupçon que Zenowicz, se sentant coupable d’un retard, préfère être considéré, non pas comme porteur du premier ordre, mais bien du second. Nous ignorons tout de la version que Zenowicz a présentée dans son écrit de 1820 puisque nous n’avons pas pu la consulter, nous savons uniquement qu’il l’a fait connaître au général de Vaudoncourt et que celui-ci a eu la bonté de lui faire quelques observations au sujet des principes de stratégie figurant dans l’ouvrage. De 1827 à 1829, Zenowicz parle de son écrit comme si celui-ci était disponible. Or, en 1848, le bruit court que l’édition complète de l’ouvrage a été rachetée dès sa publication et détruite par un Anglais mécontent de la manière dont sont présentés les exploits de Wellington. Faut-il voir là une tentative de la part de Zenowicz de minimiser l’importance des ordres du 18 juin et, par la même occasion, de mettre en doute leur nécessité ? Toutes les sources consultées laissent apparaître que Zenowicz était parfaitement au courant que la mission confiée au maréchal Grouchy consistait principalement en une mission d’observation destinée à empêcher l’armée prussienne de se joindre à celle de Wellington. Mais Grouchy devait également veiller à manœuvrer de manière à pouvoir se mettre en rapport direct avec l’Empereur en vue de futures opérations. Il écrit à sujet : Le maréchal Grouchy avait été détaché de l’armée principale dans ce but; il n’avait donc pas besoin d’ordres postérieurs pour sa conduite. Un élément va cependant réduire à néant la thèse du porteur du deuxième ordre : l’apparition du registre d’ordres du major-général 10 qui a été sauvé du désastre et remis au maréchal Grouchy à Soissons. Nous avons vu que, déjà en 1820, le Colonel A. de Grouchy a désigné Zenowicz comme étant le porteur du premier ordre; cette assertion devait déjà être basée sur le contenu du registre d’ordres. En 1829, le général Gérard le cite également dans la brochure qu’il fait éditer en réponse aux allégations du maréchal Grouchy sur les retards du 18 juin 1815 11. Confondu, Zenowicz est dès lors contraint à choisir un autre moyen de défense. Il rédige donc une nouvelle lettre qu’il destine à la presse bruxelloise. Datée du 4 décembre 1829, celle-ci semble être beaucoup plus proche de la vérité que les précédentes 12. Son importance réside dans le fait qu’il y cite les paroles prononcées par Napoléon à son intention dans la matinée du 18 juin, paroles qu’il mentionne également dans son livre publié à Paris en 1848. Il semble intéressant de comparer ces deux versions.Version de 1829 : Le 18 juin au matin, en avant de la ferme du Caillou, Napoléon me donnant l’ordre de me rendre auprès du maréchal Grouchy, me dit après m’avoir expliqué la direction dans laquelle se trouvait le Corps que commandait celui-ci :Partez, partez; il me tarde qu’il soit en communication directe, qu’il débouche sur la droite; suivez ses pas, passez par Gembloux... Je rejoignis le marquis de Grouchy à Bierges, près de Wavre, sur les bords de la Dyle, il était seul avec le général Gérard, dans une maison située en face de l’église et où l’on avait établi l’ambulance. Lorsque je lui eus communiqué les intentions de l’Empereur, le général Gérard parut vivement agité et dit au maréchal Grouchy :
11 Général Etienne-Maurice Gérard, quelques documents sur la bataille de Waterloo propres à éclairer la question posée devant le public par M. le Marquis de Grouchy, Paris, novembre 1829.Ces courriers ont fait l'objet d'une réédition dans le cahier n°12 de l'A.B.N. - Radioscopie d'une campagne. 12 Courrier des Pays-Bas du 9 décembre 1829 et Journal de la Belgique du 29 décembre 1829. -------------------------------------------------------------------------------- Page 6 - 284 - "Je te l’ai toujours dit, si nous sommes f.... c’est de ta faute." Le mouvement du Corps s’opéra bientôt, le général Gérard fut blessé grièvement, et ce jour-là on ne put passer la Dyle. On sait le reste. Version de 1848 : "Le 18 juin 1815, jour de la bataille de Waterloo, j’étais de service, comme officier supérieur, au quartier impérial, et j’eus l’ordre de ne pas quitter un instant Napoléon. Vers neuf heures du matin, l’Empereur monta à cheval; je le suivis. En s’approchant vers la ligne droite de l’armée, après avoir parlé quelques moments au comte d’Erlon, il laissa sa suite en arrière et, accompagné seulement du major général (le maréchal Soult), il monta sur une petite élévation d’où on découvrait facilement les diverses positions des deux armées. Après avoir examiné quelque temps avec sa lorgnette, sans changer de place, il adressa quelques paroles au major général; puis, au moment où celui-ci descendit du plateau, l’Empereur me fit signe de monter près de lui; j’obéis; il m’adressa alors la parole : Voilà le comte d’Erlon, à notre droite, me dit-il en me montrant le Corps d’armée de ce général; puis continuant, après avoir décrit un cercle de sa main vers la droite de la ligne, il ajouta : Grouchy marche dans cette direction, rendez-vous de suite auprès de lui 13, passez par Gembloux, suivez ses traces; le major général vous donnera encore un ordre par écrit. Je voulus faire observer à l’Empereur que la route qu’il m’indiquait était trop longue; mais sans me laisser le temps d’achever, il me dit : C’est égal, vous seriez pris en suivant la route la plus courte; et désignant ensuite l’extrémité du flanc droit de la ligne, il dit encore : Vous reviendrez par ici me rejoindre, quand Grouchy débouchera sur la ligne. Il me tarde qu’il soit en communication directe et en ligne de bataille avec nous. Partez, partez ! Aussitôt cet ordre reçu, je courus après le major général qui se dirigeait en ce moment vers la ferme du Caillou, où le quartier impérial avait passé la nuit. Nous arrivâmes à dix heures à la ferme. Le major général se rendit dans sa chambre, et fit demander son secrétaire. La première chose que l’on fait en commençant à écrire un ordre, c’est d’y mettre la date et l’heure. Il est facile de voir que cette heure ne peut être celle du départ de la dépêche; car avant le départ, il faut du temps pour l’écrire; il en faut aussi pour l’inscrire sur le registre d’ordre du major-général. Tout cela demande assez de temps; dans un service ordinaire, où les heures et les minutes n’ont aucun rôle à jouer, cette remarque n’est d’aucune importance; mais dans un cas particulier, quand on compte les heures et les minutes, quand on jette un tort au porteur d’un ordre, il doit être permis de rétablir les faits tels qu’ils se sont produits. Je me répète, la date de l’ordre dont je fus porteur fut mise à dix heures; je me retirais alors au salon de service. Après une demi-heure d’attente (± 10h30), je rejoignis le major général. Rien encore que la date n’était écrit; le major général regardait la carte, et son secrétaire s’amusait à tailler une plume. Je retournais au salon, où je trouvais M. Regnault, ordonnateur en chef du premier Corps qui, apprenant que depuis vingt-quatre heures, ayant toujours été en course, je n’avais pu rien me procurer pour manger, voulut bien envoyer chercher dans son fourgon un morceau de pain et de l’eau-de-vie. Après mon repas, je rentrai de nouveau chez le major général; il était occupé à dicter l’ordre que j’attendais; je me rendis encore une fois au salon de service. Au bout d’une demi-heure, je fus demandé. Le Maréchal Soult me répéta à peu près, en medonnant son ordre, ce que l’Empereur m’avait dit. Je partis de suite (± 11h30). J’atteignis enfin, entre trois et quatre heures, une division d’arrière-garde qui faisait partie du Corps de l’armée à la recherche duquel j’étais envoyé. Un quart d’heure après, j’avais rejoint le comte Grouchy; il était avec le général Gérard dans une petite chambre d’une maison où une ambulance avait été établie. Je présentais mes dépêches au maréchal, et lui dis encore de vive voix ce dont j’étais chargé. Après avoir parcouru l’ordre que je venais de lui remettre, le maréchal Grouchy le communiqua au général Gérard qui, après en avoir prisconnaissance, s’écria, animé d’une émotion énergique, en apostrophant Grouchy : Je te l’ai toujours dit, si nous sommes f...., c’est de ta faute."
13 Tard dans la nuit Napoléon reçut le rapport de Grouchy, daté: Gembloux, le 17 juin, 10 heures du soir, dans lequel Grouchy informait l'Empereur que si la masse des Prussiens se retire sur Wavre, je la suivrais dans cette direction. Napoléon avait aussi d'autres informations que les Prussiens se dirigeaient sur Wavre. Il était alors en mesure d'indiquer à Zenowicz où celui-ci devait trouver Grouchy. -------------------------------------------------------------------------------- Page 7 - 285 - Dans son « 1815 » Henry Houssaye considère comme impossible que les paroles du général Gérard aient pu être prononcées lors de la réception de la première dépêche de Soult. Pour cela, il argumente qu’elles prescrivaient la marche sur Wavre que Grouchy prévoyait malgré l’avis négatif de Gérard 14. Or, nous avons vu que, dans sa lettre du 4 décembre 1829, Zenowicz écrit qu’il a communiqué Les intentions de l’Empereur au maréchal; et que dans son livre de 1848, il affirme avoir rapporté de vive voix à Grouchy ce que Napoléon lui avait confié. S’il a réellement répété ces paroles, tel qu’il le prétend, la colère du général Gérard peut dès lors être considérée comme légitime; rappelons que le commandant du IVe Corps voulait marcher aucanon depuis Sart-à-Walhain. Toujours selon Houssaye, Napoléon ne peut avoir prononcé les paroles que Zenowicz lui prête, celles-ci entrant en contradiction avec l’ordre écrit 15. Malgré tout le respect que mérite l’œuvre de M. Houssaye, nous ne le suivrons pas dans son analyse. En effet, quelques instants après avoir parlé à Zenowicz, Napoléon donne l’ordre au colonel Marbot du7e Hussards de prendre position en arrière de Fichermont et d’envoyer des petits postes vers Lasnes, Couture ainsi qu’aux ponts de Mousty (Moustier) et d’Ottignies. Voici la relation que Marbot a laissée concernant cet ordre : Au commencement de l’action, vers onze heures du matin, je fus demandé de la division avec mon régiment et un bataillon d’infanterie placé sous mon commandement. Ces troupes furent mises en potence à l’extrême droite, derrière Frichemont (sic), faisant face à la Dyle. Des instructions particulières me furent données, de la part de l’Empereur, par son aide de camp Labédoyère et un officier d’ordonnance dont je n’ai pas retenu le nom. Elles prescrivaient de laisser le gros de ma troupe toujours en vue du champ de bataille, de porter deux cents fantassins dans le bois de Frichemont, un escadron à Lasnes, poussant des postes jusqu’à Saint-Lambert; un autre escadron moitié à Couture, moitié à Beaumont, envoyant des reconnaissances jusque sur la Dyle, aux ponts de Moustier et d’Ottignies. Les commandants de ces divers détachements devraient laisser de quart de lieue en quart de lieue des petits postes à cheval, formant une chaîne continue jusque sur le champ de bataille, afin que, par le moyen de hussards allant au galop d’un poste à l’autre, les officiers en reconnaissance pussent me prévenir rapidement de leur jonction avec l’avant-garde des troupes du maréchal Grouchy, qui devaient arriver du côté de la Dyle. Il m’était enfin ordonné d’envoyer directement à l’Empereur les avis que me transmettaient ces reconnaissances. Je fis exécuter l’ordre qui m’était donné 16. Où voulons-nous en venir ? Tout simplement à ceci : Les ordres de Napoléon démontrent clairement son intention d’appeler Grouchy sur le champ de bataille de Mont-Saint-Jean dès la matinée du 18 juin. Houssaye lui-même formule la supposition suivante : "Faut-il en inférer que Napoléon eut soudain l’intuition du mouvement qui allait être proposé par Gérard à Grouchy, et qu’il pensa qu’avant de recevoir sa dépêche le maréchal, au lieu de suivre les Prussiens à Wavre, passerait la Dyle à Mousty pour se porter sur leur flanc gauche ?"17 Il ne s’agit nullement là d’une quelconque intuition de Napoléon, mais bel et bien d’un plan parfaitement arrêté et précisé dans l’ordre rapporté par Zenowicz. Or, si la crédibilité de Zenowicz peut être mise en doute sur certains points, dans ce cas précis, la véracité de ses écrits ne semble pas sujette à caution étant donné qu’elle s’accorde parfaitement avec les ordres adressés à Marbot et d’ailleurs, il n’est point ici dans l’intérêt de Zenowicz d’inventer ces détails; bien au contraire, il serait plus avantageux pour lui de les soustraire afin de minimiser l’importance de son retard. 14 Henry Houssaye, 1815, vol 2, Waterloo, 30e éd, Paris, 1900. 15 Houssaye. 16 Mémoires du général baron Marbot, Paris, 1891, vol III. 17Houssaye. -------------------------------------------------------------------------------- Page 8 - 286 - Le général Marbot termine sa relation de la manière suivante : "Des faits que je viens de raconter résulte pour moi la conviction que l’Empereur attendait sur le champ de bataille de Waterloo le Corps du maréchal Grouchy. Mais sur quoi cet espoir est-il fondé ? Je l’ignore" 18... La réponse à cette question semble pourtant simple : Pas un seul instant Napoléon n’a douté que son ordre arriverait en temps utile après du maréchal Grouchy et serait exécuté ! M. Houssaye a parfaitement raison lorsque qu’il mentionne certaines contradictions entre les paroles prêtées à Napoléon par Zenowicz et l’ordre écrit dépêché à Grouchy le matin du 18 juin. Ces contradictions peuvent-elles être imputées à Napoléon alors que nous savons pertinemment que l’ordre a été rédigé sous la dictée du major-général et que ce dernier y a adjoint deux éléments complémentaires, à savoir : la réponse au premier rapport de Grouchy 19 et les nouveaux ordres destinés à ce dernier ? Zenowicz prétend avoir entendu : Il me tarde qu’il soit en communication directe, qu’il débouche sur la droite. » (Citation de 1829). Il me tarde qu’il soit en communication directe et en ligne de bataille avec nous. » (Citation de 1848). L’ordre transcrit au registre du major-général ne contient nullement les mots « déboucher sur la droite » ni « en ligne de bataille avec nous », mais l’officier supérieur, porteur de l’ordre est, semble-t-il, qualifié pour pouvoir donner ces précisions à partir des ordres verbaux de Napoléon et de Soult. Mais voila, Grouchy confond les ordres de l’Empereur avec la réponse à son premier rapport dans lequel il est question de Wavre. Wavre que Soult mentionne encore, ignorant que Grouchy ne peut pas suivre les Prussiens sur cette position tout en manœuvrant pour se « mettre en rapport d’opérations » avec l’Empereur. Alors, qui de Napoléon ou de Soult doit être tenu pour responsable d’une telle confusion, si confusion il y a ? A vous de juger ! Extrait du registre d’ordres : "Le maréchal Grouchy, par l’adjudant comte Lenowich (sic). En avant de la ferme de (sic) Caillou. Le 18 juin, à 10h. du matin. Paragraphe concernant le rapport de Grouchy : M. le maréchal, l’Empereur a reçu votre dernier rapport daté de Gembloux, vous ne parlez à Sa Majesté que de deux colonnes prussiennes qui ont passé à Sauvenière et Sart-à-Walhain. Cependant des rapports disent qu’une troisième colonne qui était assez forte a passé à Géry et Gentinnes se dirigeant sur Wavre. Paragraphe concernant l’ordre de l’Empereur : L’Empereur me charge de vous prévenir qu’en ce moment Sa Majesté va faire attaquer l’armée anglaise qui a pris position à Waterloo près de la forêt de Soignes, ainsi Sa Majesté désire que vous dirigiez vos mouvements sur Wavre, afin de vous rapprocher de nous, vous mettre en rapport d’opérations et lier les communications poussant devant vous les corps de l’armée prussienne qui ont pris cette direction, et qui auraient pu s’arrêter à Wavre où vous devez arriver le plus tôt possible. Instructions de Soult : Vous ferez suivre les colonnes ennemies qui ont pris sur votre droite, par quelques corps légers afin d’observer leur mouvements et ramasser leurs traînards. Instruisez-moi immédiatement de vos dispositions et de votremarche ainsi que des nouvelles que vous avez sur les ennemis, et ne négligez pas de lier vos communications avec nous; l’Empereur désire avoir très souvent de vos nouvelles. 18 Marbot 19 Celui du 17 juin, vingt-deux heures. -------------------------------------------------------------------------------- Page 9 - 287 - L’ordre écrit et signé par le duc de Dalmatie est-il, à vos yeux, confus ? Grouchy pouvait-il l’interpréter différemment que Gérard, en admettant que Zenowicz, connaissant les intentions de l’Empereur, pouvait les transmettre verbalement au principal intéressé de manière plus explicite ? Lorque Zenowicz joint Grouchy, celui-ci a déjà donné l’ordre d’enlever le pont de Limal. Il est donc évident que les ponts de Moustier et d’Ottignies sont déjà bien loin derrière les têtes de colonnes françaises. Donc, lorsque Gérard lance l’attaque destinée au franchissement de la Dyle à Bierges, il est déjà trop tard pour exécuter l’ordre de l’Empereur. Reste le facteur temps.Six heures se sont écoulées entre l’instant où Napoléon a dépêché Zenowicz en lui disant : Il me tarde...partez, partez! et celui où ce dernier a rejoint Grouchy à Bierges. Que de choses se sont déroulées à Mont-Saint-Jean durant ces trois cent soixante minutes. Afin de justifier ce retard Zenowicz invoque le temps perdu au quartier général lors de la transcription de l’ordre. Il argumente également le fait que c’est Napoléon qui lui a prescrit de prendre la route de Gembloux. Or, l’indication « Au maréchal Grouchy à Gembloux ou en avant » ne peut pas provenir de l’Empereur. Il nous semble évident que si Napoléon avait indiqué une route à son courrier, il lui aurait indiqué celle indiquée au colonel Marbot, c’est-à-dire celle de Moustier. Zenowicz, dans sa première lettre publiée à Bruxelles en 1827, parle de maraudeurs prussiens. Il nous semble que, dans ce cas, il aurait choisi lui-même le long chemin allant de Genappe par les Quatre-Bras, Sombreffe et Gembloux afin d’éviter ce danger. Mais, même en supposant qu’il ait emprunté cette route, le temps mis pour rejoindre Grouchy reste anormalement élevé. Toutes ces réflexions laissent clairement apparaître que Napoléon connaissait parfaitement les distances de même que le temps nécessaire pour les franchir; et que s’il a ordonné à Zenowicz de revenir auprès de lui dès que Grouchy déboucherait sur sa ligne, c’est qu’il était convaincu que le porteur de son ordre remplirait sa mission dans un laps de temps le plus bref possible. Zenowicz, offensé par les accusations portées contre lui par le général de Vaudoncourt dans son ouvrage, a réclamé le retrait de celui-ci. De Vaudoncourt lui adressa alors une lettre dans laquelle il affirme être étranger aux mots offensants; que ceux-ci sont dus à l’éditeur. Les choses n’iront pas plus loin, Zenowicz arrêtant là la polémique. A Sainte-Hélène, Napoléon a dicté plusieurs notes relatives à la bataille du 18 juin 1815. Ces notes sont accompagnées d’un plan de bataille basé sur la présomption de l’arrivée du Corps de Grouchy sur son aile droite, ce qui accrédite les relations de Zenowicz qui sont en parfaite concordance avec les ordres adressés aucolonel Marbot. Voilà ce qui valorise l’importance des récits de Zenowicz, récits trop souvent boudés des historiens de la campagne de Belgique de juin 1815... -------------------------------------------------------------------------------- Page 10
http://www.abnapoleon.be/fichiers_pdf/doc-024.pdf
_________________ "Tant que les Français constitueront une Nation, ils se souviendront de mon nom."
Napoléon.
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