L'Énigme des Invalides

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 Sujet du message : Re: Gouvion, un incapable ?
Message Publié : 31 Juil 2022 18:05 
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Un texte fustige l'attitude de Gouvion, lors de sa retraite de Polotsk (son bâton de maréchal avait dû lui monter à la tête) :

" Le général de son avant-garde [celle de Victor] dépêcha un officier pour connaître la vérité de la position des Français et les informer de sa marche. L’officier trouva aux environs de Séménetr le maréchal Saint-Cyr, qui par une fausse gloire ou plutôt un amour propre bien mal placé, se contenta de répondre froidement : qu’il avait tellement battu l’ennemi à Polotsk, qu’il ne pensait pas qu’il osât le poursuivre dans sa retraite ; mais que cependant si le maréchal Victor jugeait à propos de faire un mouvement, il pourrait être utile aux armes de l’empereur. Ce maréchal étant en marche pour aller au devant de l’armée de Polotsk, la continua : mais sur la lettre de son collègue il ne se pressa plus. Aussi le sang coula-t-il encore inutilement à Orcha, Gomet et Goroni le 24 octobre et devant Lepel le 26 où le colonel Lebrun fils du prince architrésorier de France fut tué.

Le maréchal Saint-Cyr, réfléchissant néanmoins que le maréchal Victor, venant se réunir à lui, prendrait comme le plus ancien le commandement général, jugea que sa présence n’était plus nécessaire et qu’il pouvait aller hâter la guérison de la légère blessure. Il voulut se démettre provisoirement du commandement en faveur du général Comte Legrand qui, blessé lui-même, le refusa par deux fois. Mais le général Saint-Cyr n’en partit pas moins le 23, laissant l’armée dans l’incertitude de commandement. Chaque général de division manœuvra isolément et pour son compte jusque sur Orcha où l’un d’eux se résolut à devenir général en chef. Par les malentendus qui résultèrent des jours précédents, mille hommes de cavalerie légère et les débris de la division bavaroise furent coupés et perdirent tout leur bagage, leurs drapeaux et leur batterie de réserve. Ainsi le maréchal Saint-Cyr, au lieu de se reposer sur une fausse sécurité, aurait pu prévenir à tout événement le maréchal Victor et se maintenir ensemble à Polotsk : il sacrifia les intérêts dont il était chargé à la fausse et dangereuse gloire de vouloir triompher seul. Ainsi, loin d’accueillir avec transport dans la retraite l’avis et l’offre qui lui sont envoyés et d’après lesquels il était temps de revenir encore sur ses pas, il se contente de répondre une lettre dictée par la présomption et abandonne ensuite pour ainsi dire à elle-même une armée qui regrette d’avoir ceint le front de ce général de lauriers dont il se rend indigne en le vouant à un conseil de guerre et à la justice de l’empereur."

D'Aupias, Memoire Historique, Anecdotique et Militaire de la Campagne de 1812, faitte par les Français en Pologne et en Russie (1813)

_________________
"Tant que les Français constitueront une Nation, ils se souviendront de mon nom."

Napoléon.


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 Sujet du message : Re: Gouvion, un incapable ?
Message Publié : 22 Août 2022 9:43 
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Dresde, 12 août 1813.

ORDRES POUR LE MAJOR GENERAL.

Dans les huit redoutes de la rive droite de l’Elbe, il sera construit huit baraques conformes au modèle de celles de la jeune Garde; mais on choisira des arbres plus gros, de sorte que les hommes soient à l’abri, non-seulement de la fusillade, mais de la mitraille. Le commandant du génie donnera l’ordre pour tracer ces baraques. Elles seront doubles de celles de la Garde et contiendront 40 hom­mes. Le comte de Lobau donnera l’ordre pour que les bataillons de la jeune Garde soient chargés chacun de faire une de ces baraques, et pour qu’elles soient terminées demain.

Il sera construit pareillement de semblables baraques dans les cinq redoutes de la rive gauche. Les deux bataillons du régiment de Westphalie et les quatre bataillons du 11e de tirailleurs et du 11e de vol­tigeurs construiront ces baraques.

Il sera placé une pièce de canon de campagne dans chacune de ces treize redoutes ; cette pièce sera sans caisson, mais il sera placé dans un petit magasin 200 coups à tirer et 5,000 cartouches d’in­fanterie avec les pierres à feu nécessaires. Il y aura dans chaque re­doute, et à dater de demain, un canonnier de service et 25 hommes d’infanterie de garde; ils seront cinq ou dix jours de garde. Le ca­nonnier apprendra à six hommes les manœuvres de la pièce d’artillerie. Il y aura un sergent chargé de l’inspection et du commande­ment de ces pièces sur la rive gauche, et un autre sergent sur la rive droite. Ils visiteront les magasins et feront tous les jours l’inspection des pièces qui seront dans les redoutes. Il y aura tous les jours, de service dans la grande lunette, 100 hommes d’infanterie, un capi­taine de la garnison, quelques officiers, et au moins un sergent d’ar­tillerie, un caporal et quatre canonniers.

Il sera fait un approvisionnement de sacs à terre et de gabions suffisant pour barricader en peu d’heures les débouchés des cinq rues qui donnent sur la brèche de Wilsdruf, et provisoirement on établira à chacun de ces débouchés une barrière, de sorte que ces rues soient fermées tous les jours. En cas de rapproche de l’ennemi, on se servira des sacs à terre et gabions, et derrière les barrières l’on établira des traverses de dix-huit pieds de largeur. On placera de suite des palanques devant toutes les portes des maisons qui don­nent sur la brèche, autant que cela ne gênera pas la communication de ces maisons et qu’elles auront une autre issue. Dans le cas con­traire, on déposera les palanques à portée, pour qu’elles soient pla­cées dans une heure. On aura aussi des gabions et des sacs à terre à portée pour en placer dans tontes les fenêtres, de manière que, si l’ennemi se présente, on s’établira dans toutes ces maisons, et les sacs à terre serviront de créneaux. La même opération sera faite pour les maisons qui donnent sur la brèche de Pirna, et tout cela sans donner de l’inquiétude aux habitants.

On réunira tous les ouvriers au fossé de la porte de Pirna, de ma­nière que cette partie soit renforcée par un fossé plein d’eau; ce tra­vail est le plus urgent de tous.

Toutes les portes des murs de jardin, ainsi que les sept à huit portes des faubourgs, seront fermées par une palanque, de manière qu’on ne puisse entrer que par ces portes des faubourgs. Il sera placé, avant le 18, une pièce de campagne à chaque porte et bar­rière des faubourgs, avec un canonnier de service et des servants pris dans les corps de garde, qui seront de 25 hommes.

Le pont en bois, qui est sur le fossé plein d’eau, près de la brèche de Wilsdruf, sera couvert par une barrière et un cheval de frise, et tous les soirs on en enlèvera des planches; la nuit l’usage en sera interdit. On établira à la porte du Soleil une bonne porte et une barrière.

On procédera à l’armement de la place de manière que, le 18, quatre-vingts pièces de canon soient en batterie, et vingt en réserve. Il y aura dans la place, indépendamment d’une compagnie d’artillerie saxonne, une compagnie d’artillerie française forte de 120 hommes; il y aura un colonel, un chef de bataillon et cinq ou six officiers d’artillerie.

Dans le cas où l’ennemi approcherait, les ponts-levis seront levés la nuit, et toutes les mesures seront prises. Dans le cas où la ville serait menacée, on s’emparera des quatre maisons qui sont sur la contrescarpe, près de la porte de Pirna, et, selon les circonstances, on les démolira ou on les occupera militairement.

Passé le 18, on réunira tous les bateaux et batelets dans Königstein et dans Dresde; tout ce qui sera plus bas qu’à mi-chemin de Meissen sera renfermé dans Torgau. On laissera subsister les bar­ques, niais il y aura un corps de garde, une sentinelle et une pièce.

Toutes les voitures des équipages non attelées qui sont en répara-lion, ainsi que de l’artillerie, soit française, soit saxonne, seront renfermées dans les fortifications de Dresde, sur les différentes esplanades.

Tous les dépôts de malades, de blessés et de convalescents qui sont hors de Dresde y rentreront à dater du 18, et des patrouilles de gendarmerie française et saxonne parcourront les campagnes pour faire rentrer les hommes isolés.

Dès demain 13, on coupera les bois tout autour et à cent toises des redoutes qui sont sur la rive droite; ces bois serviront pour des abatis dans les lieux où cela sera nécessaire. On placera des chevaux de frise aux différentes issues des portes.

Dans la journée du 14 au plus tard, les adjudants de place qui doivent commander les faubourgs, et les officiers supérieurs qui com­manderont sur les deux rives, seront à leur poste et le service com­mencera.

On exercera 400 hommes de la garnison à la manœuvre du ca­non, selon l’usage établi dans le service des places.

On exécutera l’ordre donné de faire de petits retranchements en bois à 120 toises des redoutes, pour contenir les avant-postes. On fera aussi des retranchements, en corps d’arbres et d’une forme car­rée, en avant des portes et du pont en pierre.

Le gouverneur me rendra compte le 14 de l’état des travaux.

Le major général prendra les dispositions nécessaires pour l’exé­cution du présent ordre.

Dresde, 12 août 1813.

Au général Mouton, comte de Lobau, aide-major de la garde impériale, à Dresde.

Donnez ordre au général Nansouty de charger le général com­mandant la 2e division de la Garde d’avoir des postes sur Neustadt et sur les chemins qui de Bautzen vont en Bohême.

Donnez ordre à la division Delaborde de se tenir prête à partir demain avec ses trois batteries, et de prendre des vivres pour quatre jours; elle aura son artillerie, son organisation du génie, ses ambu­lances et son administration.

Vous nommerez un général de brigade pour rester avec la brigade composée du 11° de tirailleurs et du 11e de voltigeurs, et qui doit faire la garde de Dresde. Vous lui donnerez ordre de laisser des postes au camp, afin de le garder et de veiller à ce qu’on ne le dé­grade pas.

Vous donnerez ordre à la vieille Garde de se tenir prête à partir demain; même ordre à l’artillerie, aux équipages militaires, et enfin à tout le service de la Garde.

Donnez des ordres pour qu’on évacue, dans la journée d’aujour­d’hui et demain, 6 ou 700 malades de la Garde sur Torgau, où il sera établi un hôpital de la Garde.

Donnez ordre à l’ordonnateur de passer des marchés et de faire tout ce qui sera possible pour que sous deux jours tout ce qui doit compléter l’approvisionnement de Bautzen soit expédié.




Dresde, 13 août 1813.

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Dresde.

Mon Cousin, vous ferez connaître au maréchal Saint-Cyr que ses quatre divisions sont destinées à couvrir Dresde et le pont de Königstein; que la forteresse de Königstein et le fort de Stolpen sont sous ses ordres, et qu’il doit couvrir la frontière depuis au-delà de Neu­stadt jusqu’au débouché de Hof, et être instruit de tout ce qui s’y passe.

Vous demanderez au général Gersdorf qu’il y ait auprès du maré­chal Saint-Cyr un officier supérieur saxon, qui soit chargé de rece­voir les rapports des baillis et de la gendarmerie saxonne sur toute cette frontière, ainsi que de veiller à l’approvisionnement du corps d’armée.

Faites connaître à ce maréchal qu’il doit placer deux bataillons de la 42e division au camp de Lilienstein, et le général commandant celle division à Hohnstein, avec l’artillerie de la division. Il placera au débouché de Neustadt une avant-garde de cavalerie et d’infanterie, qu’il mettra sous les ordres du même général, auquel il donnera à cet effet 4 à 500 chevaux, et il portera lui-même son quartier géné­ral du côté de Pirna. Dites-lui de placer toute la 45e division et toute la 43′, avec leur artillerie, sur le plateau, dans la position qu’il reconnaitra la meilleure, du côté de Berggiesshübel, pour couvrir les deux roules qui viennent de la Bohême à Dresde. Qu’il occupe Hellendorf, avec une avant-garde de cavalerie, d’infanterie et d’artille­rie : il laissera son artillerie légère à portée de renforcer son camp. II doit employer aussi une partie de la 44e division au même but. II emploiera le général Bonet pour commander ce camp, et, en général, il l’emploiera indistinctement pour commander plusieurs divi­sions ou pour commander là où il ne pourra pas être lui-même. Le reste de la 44° division sera employé à observer les autres débou­chés. Il doit former, sur son extrême droite, du côté de la route de Leipzig, un corps d’observation qu’il pourra faire commander par le général Pajol. Ce corps devra être d’un millier de chevaux avec deux pièces d’artillerie à cheval, si cela est nécessaire, et quelques batail­lons d’infanterie. Le général commandant la 44e division aura ordre de soutenir le général Pajol, qui éclairera la route de Leipzig et toute cette frontière jusqu’au débouché de Hof. Le maréchal Saint-Cyr fera placer une garnison dans le fort de Stolpen.

Vous lui ferez connaître que ceci ne doit être considéré que comme une instruction générale. Son but est de couvrir Dresde sur les deux rives, d’assurer la communication du pont de Königstein à Bautzen, et de veiller à ce que les partisans ennemis ne s’introduisent pas sur la route de Neustadt à Bautzen. Mon quartier général étant à Bautzen, le général de cavalerie commandant l’avant-garde placé au dé­bouché de Neustadt, ainsi que le général commandant la 42e division, auront l’instruction de vous envoyer directement à Bautzen leurs rap­ports qui pourraient presser, indépendamment de ceux qu’ils enver­raient au maréchal. Faites connaître au maréchal Saint-Cyr qu’il doit instruire tous les jours le général Durosnel, gouverneur de Dresde, de ce qui se passe et de tout ce qui peut intéresser la sûreté de ce dépôt de l’armée. Dites-lui qu’il reste à Dresde pour garnison huit bataillons et plusieurs compagnies d’artillerie. Si l’ennemi débouchait sur lui avec des forces beaucoup plus considérables que les siennes, il devrait retarder sa marche autant que sa position le permettrait, et se replier sur Dresde, où il prendrait le commandement supérieur du camp retranché et de la garnison, afin de défendre la ville contre l’ennemi; il conserverait cependant toujours Stolpen, le pont de Königstein, ainsi que les redoutes de Königstein, afin que je puisse faire déboucher des troupes par Königstein pour les porter sur les derrières de l’ennemi, ou bien, selon les circonstances, revenir sur Dresde. Il est important de faire réparer le chemin qui du pont de Königstein va à Hellendorf et à Berggiesshübel, afin que la commu­nication entre les deux rives soit la plus prompte et la plus directe possible.

Faites connaître au maréchal que j’ai ordonné qu’il y eût au pont de Königstein 6,000 quintaux de farine, de riz, et 100,000 ra­tions de biscuit; il doit aussi y avoir une manutention et un dépôt de munitions.

11 fera reconnaître le chemin qu’il pourrait prendre pour se porter sur Bautzen. Je ne sais pas si la route qui y conduit de Neustadt est praticable pour l’artillerie.

Il fera aussi reconnaître les chemins qu’il faudrait prendre pour se porter directement sur Zittau ou Gœrlitz, en cas de manœuvres de guerre. Il peut arriver tel cas où je ne laisse que deux bataillons au pont de Königstein et un millier de chevaux, avec deux ou trois ba­taillons d’infanterie légère sur la ligne, qui auraient leur retraite sur Dresde, et que je porte son corps rapidement, par un à-gauche et un mouvement forcé, sur Gœrlitz ou Bautzen, pour servir de réserve au moment d’une grande bataille.

Faites-lui connaître qu’il est autorisé à attaquer l’ennemi et à faire des incursions en Bohême dans toutes les directions, soit pour inquiéter l’ennemi, soit pour avoir des nouvelles, soit pour exercer ses troupes. Il fera interroger tous les déserteurs et prisonniers de guerre, et on demandera à chacun d’eux le nom de son régiment et la force de sa compagnie. Il enverra des espions, et aura soin d’interdire toute communication entre la Saxe et la Bohême. On arrêterait sur­tout tout ce qui passerait de Saxe en Bohême, et il fera interroger tous ceux qui arriveraient.

Aussitôt qu’il aura placé ses camps et ses postes, il vous les fera connaître. Il fera tirer tous les jours à la cible, et fera établir les baraques de ses camps à l’abri de la pluie. Il placera des postes de correspondance sur la route la plus directe de Königstein à Bautzen, afin de pouvoir communiquer rapidement avec le quartier général. Il en placera aussi sur la route de son quartier général à Dresde, afin de pouvoir avertir le général Durosnel de tous les mouvements de l’ennemi sur toute sa ligne qui paraîtraient menacer cette ville. Recommandez-lui d’activer l’arrivée de toutes ses troupes et de ses batteries qui sont encore en arrière; tout cela pourra être dirigé sur Dresde, d’où cela viendra le rejoindre.

II fera évacuer l’hôpital de Pirna, si cela n’est pas déjà fait, et s’en servira comme d’ambulance.

Si l’ennemi faisait un grand mouvement du côté de Neustadt, le général commandant sur ce point préviendrait directement le gou­verneur de Dresde de ce qui pourrait intéresser la sûreté de ce pivot de l’armée.

Dresde, 13 août 1813, au soir.

INSTRUCTIONS

POUR LES MARÉCHAUX NEY, GOUVION SAINT-CYR, MACDONALD ET MARMONT.

Voici le parti que j’ai pris. Si vous avez quelques observations à me faire, je vous prie de me les faire librement.
[...]
De ce côté-ci, Dresde est fortifié et dans une position telle qu’il peut se défendre huit jours, même les faubourgs. Je le fais couvrir par le 14e corps, que commande le maréchal Saint-Cyr; il a son quartier général à Pirna, il occupe les ponts de Königstein, qui, protégés par la forteresse, sont dans une position inexpugnable. Ces ponts ont un beau débouché sur Bautzen. La même division qui fournit des bataillons à Königstein occupe Neustadt avec la cavalerie. Deux divisions campent dans une très-belle position à Berggiesshübel, à cheval sur les deux routes de Prague à Dresde. Le général Pajol, avec une division de cavalerie, est sur la route de Leipzig à Karlsbad, éclairant les débouchés jusqu’à Hof. Le général Durosnel est dans Dresde avec huit bataillons et cent pièces de canon sur les remparts et dans les redoutes. Le 1e corps du général Vandamme et le. 5e corps de cavalerie seront à Bautzen. Je porte mon quartier gé­néral à Gœrlitz; j’y serai le 16; j’y réunis les cinq divisions d’infan­terie, les trois divisions de cavalerie et l’artillerie de la Garde, ainsi que le 2e corps, qui seront placés entre Gœrlitz et Zittau; et entre le 2e corps et la Bohême sera l’avant-garde, formée par le 8e corps (polonais).



Bautzen, 17 août 1813.

Au maréchal Gouvion Saint-Cyr, commandant le 14e corps de la Grande Armée, à

Mon Cousin, je ne saurais trop vous recommander de placer des postes entre Königstein et Bautzen, afin qu’indépendamment des postes du pays vos correspondances soient très-rapides. Il y a de Bautzen à Königstein neuf lieues ; il faudrait donc trois postes de cavalerie, et un de Königstein à Pirna.

Les rapports sont que 40,000 Russes sont entrés le 13 par Glatz en Bohême. Cette nouvelle est douteuse. Si cela est une combinaison de cabinet, si ces troupes se portent sur Prague, elles ne pourront y arriver que le 25 ou le 26. L’armée autrichienne ne peut opérer sur la rive droite que par les débouchés de Zittau; j’ai fait occuper par 40,000 hommes la position d’Eckartsberg près de Zittau, ce qui rendrait impossible son débouquement par cette gorge. L’armée au­trichienne veut-elle opérer sur la rive gauche, le général Vandamme sera à Bautzen; une de ses divisions sera à Schluckenau et Rumburg, une autre à Neustadt, une troisième à Bautzen, le quartier général à Bautzen.

Je porte mon quartier général à Goerlitz, où je réunirai les cinq divisions de ma Garde, les 3e, 6e, 5e et 11e corps; le 1er et le 2e corps de cavalerie se réunissent à Bunzlau, ayant des camps volants à trois ou quatre marches sur la gauche. Vous occupez Pirna, le camp de Berggiesshübel, ayant une division à Stolpen, Schandau et Hohnstein. Les choses ainsi placées, je puis agir dans toutes les hypo­thèses. Ou les Russes et les Autrichiens réunis déboucheront en force sur Zittau et Gabelé, ce que le prince Poniatowski et le comte de Valmy croient impossible devant la position qu’ils occupent, renforcés par le 2e corps; mais, dans ce cas, le général Vandamme se joindra à eux en une marche et demie; votre 42e division rempla­cera les troupes du général Vandamme aux débouchés de Neustadt et de Rumburg; il se trouvera donc alors 70,000 hommes sur la posi­tion opposée à Gabel, et si dans ce moment la Garde n’est pas enga­gée ailleurs, je m’y porterai dans un jour avec 50,000 hommes, ce qui formerait là une armée de 120,000 hommes. Ou bien, si toutes les forces autrichiennes et russes se portent sur Dresde par la rive gauche, le général Vandamme marchera sur Dresde; deux de ses divisions n’en seront qu’à un jour; sa troisième n’en sera qu’à un jour et demi : vous réunirez donc sous vos ordres près de 60.000 hommes au camp de Dresde sur les deux rives. Le camp de Zittau devenant inutile se porterait sur Dresde, où il arriverait en quatre jours, et vous auriez plus de 100,000 hommes à Dresde. Enfin je me porterai avec les 50,000 hommes de ma Garde également à Dresde, si les circonstances l’exigeaient, et en quatre jours noua nous trouverions 160 à 180,000 hommes autour de Dresde.

Si l’ennemi pénètre par Bayreuth et arrive en Allemagne avec toutes ses forces réunies, comme il le publie, je lui souhaite bon voyage, et je le laisse aller, bien certain qu’il reviendra plus vite) qu’il n’aura été. Ce qui m’importe, c’est qu’on ne nous coupe pas de 1 Dresde et de l’Elbe; peu m’importe qu’on nous coupe de France. Cependant l’armée de Bunzlau, qui est de 130 à 140,000 hommes sans la Garde, peut être renforcée de la Garde; et je puis avec 180,000 hommes déboucher sur Blücher, Sacken et Wittgenstein, qui, à ce qu’il paraît, marchent aujourd’hui sur mes troupes, et, une ‘ fois que j’aurai détruit ou malmené ces corps, l’équilibre se trouvera] rompu, et je pourrai, selon les succès de l’armée qui marche sur-j Berlin, l’appuyer sur Berlin, ou marcher par la Bohême derrière^ l’armée qui se serait enfoncée en Allemagne.

Tout cela n’est pas encore clair. Ce qui est clair, c’est qu’on ne tourne pas 400,000 hommes qui sont assis sur un système de places fortes, sur une rivière comme l’Elbe, et qui peuvent déboucher indif­féremment par Dresde, Torgau, Wittenberg et Magdeburg. Toutes les troupes ennemies qui se livreront à des manœuvres trop éloignées seront hors du champ de bataille.

Ceci est le résultat des nouvelles que j’ai aujourd’hui. Je vous tiendrai fréquemment au courant de ma position, selon les nouvelles j que j’aurai de l’ennemi, afin que vous soyez toujours dans le cas de manœuvrer d’accord et de prendre un parti. Gagner du temps, dis­puter le terrain et garder Dresde, avoir des communications très-sûres et actives avec Vandamme et le quartier général, voilà pour le moment ce qu’il est nécessaire de bien observer.

Une division russe a attaqué hier 16 le général Charpentier, à Laehn, croyant le surprendre; les Russes ont été repoussés, on leur a fait 100 prisonniers dont un officier; je l’attends avec impatience pour avoir des nouvelles.

Gœrlitz, 18 août 1813.

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
[...]
Le quartier général est à Gœrlitz. Le maréchal Saint-Cyr, avec les 42e, 43e, 44e et 45e divisions, a son quartier général à Pirna, occu­pant de belles positions aux débouchés de la Bohême, et observant la frontière jusqu’à Hof; sa gauche est appuyée au fort, au camp et au pont de Königstein. Le général Durosnel est dans Dresde avec dix bataillons; la place est armée de cent pièces de canon. J’ai fait établir sur les deux rives de l’Elbe deux camps retranchés, où 40,000 hommes peuvent résister à 100,000. Les remparts démolis ont été réparés; les fossés ont été remplis d’eau. Sur la rive droite, la place peut soutenir un long siège; sur la rive gauche, le camp retranché étant forcé, elle peut encore se défendre plusieurs jours.

Gœrlitz, 23 août 1813.

Au général comte Durosnel, gouverneur de Dresde.

Vous ne m’avez pas écrit, et je n’ai appris que par la lettre du maréchal Saint-Cyr, en date d’hier à onze heures du soir, le mouve­ment de l’ennemi sur Dresde. Je suppose que je recevrai une lettre de vous par estafette. La première mesure que vous aurez prise aura été de garnir les blockhaus de Königstein et de Dresde, et de faire passer sur la rive droite les bateaux qui étaient sur la rive gauche. Faites faire une grande quantité de pain. Envoyez sur-le-champ des courriers pour que toute la ligne d’opération depuis Dresde, par Nossen et Colditz, soit gardée; qu’on retienne tout ce qui devait arriver à Leipzig; que les estafettes ne passent plus par Leipzig; qu’elles passent la rivière à Meissen ou même à Torgau; et, si vous êtes assuré qu’il n’y a point de partis ennemis du côté de Torgau, ce qui ne peut plus exister depuis le mouvement du due de Reggio, il faudrait prendre la ligne de Leipzig sur Torgau et de Torgau sur la rive gauche.

Je suppose que les gardes d’honneur sont arrivées aujourd’hui 23 ; si elles ne sont point arrivées, veillez à ce qu’elles ne soient pas compromises, en les faisant venir par la rive droite.

Je ne sais pas quelle est la situation de la garnison de Torgau. Si elle n’est pas considérable, vous pouvez écrire au général Margaron, à Leipzig, de s’en rapprocher, en laissant une garnison suffisante pour mettre Leipzig à l’abri des partis. Je suppose que vous avez fait passer sur Torgau vos dépôts de cavalerie et tous vos embarras, et tout ce qui est nécessaire à la vie, sur la rive droite.

Nous serons avec l’armée à Dresde le 25, si cela est nécessaire. Faites faire beaucoup de pain d’avance; cela est l’affaire la plus importante.

Bautzen, 24 août 1813, trois heures après midi.

À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Dresde

Monsieur le Duc de Bassano, j’ai reçu votre lettre à onze heures. J’arrive maintenant, à trois heures après midi, avec la Garde. Le général Vandamme est à Stolpen et Neustadt. Toute l’armée sera demain à Stolpen. J’y aurai demain mon quartier général, et plus tôt, si j’apprends des nouvelles de Dresde de la journée d’aujour­d’hui qui nécessitent ma présence. Les gardes d’honneur, ayant avec eux un bataillon d’infanterie et une batterie d’artillerie, auraient pu prendre position à Meissen, pour assurer ce point important contre les Cosaques. Toutefois, si cela n’est pas, on leur ordonnera de se porter sur Torgau, et donnez le même ordre au général Margaron : il a de l’infanterie, de la cavalerie et de l’artillerie. Je ne suppose pas’ que l’infanterie ennemie soit de sitôt à Leipzig. Il est probable qu’a­près-demain, 26, j’attaquerai l’ennemi. Si le général Margaron est compromis, il doit se retirer à Torgau et communiquer avec moi par la rive droite. Je crois vous avoir mandé tout cela hier, de sorte que la fausse direction donnée aux gardes d’honneur aura été contremandée. Vos courriers sont fort mal appris : ils partent sans ordre. Donnez-leur des instructions pour qu’ils ne repartent plus, ni ne remettent de lettres à personne, sans l’ordre du grand écuyer.

Rendez-moi compte des mesures que j’ai ordonnées de s’emparer des maisons et de barricader les rues qui donnent sur les brèches. Si elles sont exécutées, Dresde peut tenir plusieurs jours. Demain, à deux heures après midi, 40,000 hommes pourront entrer dans Dresde; mais, si toutes les mesures sont prises, que les redoutes soient armées et que les troupes soient bien disposées, il n’y a rien à craindre, et alors je préférerai faire déboucher les 40,000 hommes par Königstein, et je déboucherai sur la rive ennemie avec toute l’armée par Königstein.

Stolpen, 25 août 1813, neuf heures du matin.

Au maréchal Gouvion Saint-Cyr, commandant le 14e corps de la Grande Armée, à Dresde.

Il est indispensable que je sois sans inquiétude sur Dresde, pen­dant les journées des 26, 27, 28, 29 et 30. Dresde doit tenir plus de six jours. Sa défense consiste, premièrement, dans le camp retranché : on a dû mettre huit à dix pièces de canon dans chaque redoute, indépendamment de trois batteries mobiles de vingt pièces chacune qu’ont la garnison ou le corps d’armée pour se porter par­tout où il serait nécessaire. Je suppose que le génie aura élevé quel­ques petits épaulements aux saillants de l’enceinte entre les redoutes. Les redoutes et les faubourgs évacués, il y a encore l’enceinte de la ville. Elle a un fossé plein d’eau et une palanque. Ce n’est pas dans la palanque que consiste la défense de la place, mais bien dans le rang de maisons derrière. J’avais ordonné que ces maisons fussent occupées par la garnison, et que les rues fussent barricadées avec des sacs à terre et des tonneaux, de manière qu’elles fussent toutes impraticables. Dès lors, l’ennemi doit d’abord éteindre le feu des bastions; et j’ai fait placer dans des casemates plusieurs pièces dont il serait difficile d’éteindre le feu, et tant que ce feu ne serait pas éteint, ce serait en vain que l’ennemi renverserait la palanque; il faudrait qu’il passât le fossé et qu’il fît brèche dans les maisons. Mais, avec une nombreuse garnison, je ne sais comment on peut faire brèche dans des maisons, puisqu’on peut se retrancher derrière les ruines. Enfin les feux de la place ne peuvent être éteints qu’en établissant régulièrement plusieurs batteries; ce qui consommera les sept ou huit jours que je demande. Des barricades établies derrière la première ligne de maisons, vis-à-vis les brèches, rendraient d’ail­leurs vains les- efforts de l’ennemi et prolongeraient la défense. Dresde peut donc se défendre, selon les règles de l’art, six ou sept jours, et, avec opiniâtreté, quinze à vingt jours. La ville prise, il resterait les ouvrages sur la rive droite, où l’on aurait fait transporter fout ce qu’il y aurait de précieux et où l’on se défendrait longtemps. Le major général vous fera connaître les ordres donnés pour aujourd’hui et demain. Mon intention est de prendre le camp de Pirna avec toute mon armée. Je ferai déboucher demain le général Vandamme pour s’emparer des bois et des défilés de Hellendorf. La 12e division occupera Pirna et formera ma droite. Aussitôt que je serai maître de Pirna, je ferai jeter deux ponts vis-à-vis de Pirna; les pontons nécessaires sont tout prêts. Dans cette disposition des choses, quand vous serez arrivé à la hauteur de Pirna, vous retrou­verez la 42e division. Si l’ennemi se sépare, ou s’il est mal enfourné, je tâcherai d’en profiter. S’il a pris la ligne d’opération de Leipzig, je me trouverai plus près que lui de Prague, et je tâcherai, en jetant des ponts sur l’Elbe, d’établir ma communication avec le prince Poniatowski et l’armée de Silésie par le débouché de Gabel.

Stolpen, 25 août 1813.

Au général baron Rognat, commandant le génie de la Grande Armée, à Dresde.

Monsieur le Général Rogniat, la place de Dresde, telle qu’elle est dans ce moment, vient de me rendre des services : sans elle, je n’aurais pu m’éloigner; l’ennemi aurait pu y être dès le 23. Ce pre­mier moment passé, ce serait erreur de croire que son rôle a cessé.

L’échiquier de la guerre actuelle est compliqué; le nombre des ennemis que j’ai à combattre est redoutable; si les trois redoutes déjà tracées avaient été achevées, si les barricades avaient été ter­minées dans la ville et si le fossé de Pirna avait été bien établi, j’au­rais eu plus de confiance dans Dresde, j’aurais pu en espérer une défense de dix à douze jours : alors je me serais moqué de la con­fiance de l’ennemi; j’aurais marché sur la Bohême. Mais, dans l’état où est cette ville, je ne puis y avoir cette confiance que je désire. Donnez des ordres pour faire achever les trois redoutes déjà tra­cées et pour qu’on en établisse trois autres nouvelles conformé­ment au premier plan. Il faut que les palanques des faubourgs soient terminées et que tout ce qui doit concourir à la défense de Friedrichstadt soit bien organisé. Donnez des ordres pour achever le fossé de Pirna et pour que les barricades soient exécutées dans la ville; il est nécessaire que toutes les maisons de la ligne soient crénelées et occupées comme casernes; enfin il ne faut rien oublier pour bien établir l’équilibre entre la défense de la rive gauche et celle de la rive droite, afin que j’aie la conviction qu’un corps de 20,000 hommes se jetant dans la place, et portant ainsi sa garni­son à près de 30,000 hommes, puisse s’y défendre quinze à vingt jours.

_________________
"Tant que les Français constitueront une Nation, ils se souviendront de mon nom."

Napoléon.


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