Inscription : 14 Déc 2002 16:30 Message(s) : 15661
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Les "Matouba" continuent de distiller leur petite désinformation et leur venin... Ils accablent le pauvre Richepance, enfoncé -il est vrai- par "notre dame de Paris"...
Richepance a réprimé une sédition. Il n'a point rétabli l'esclavage à la Guadeloupe ! C'est bel et bien Lacrosse qui s'en est chargé après sa mort et le Préfet Lescallier...
"Richepance réagit vite par une série de mesures qui restreignent les droits de la population de Guadeloupe. « Considérant que par l’effet de la révolution et d’une guerre extraordinaire, il s’est introduit dans les noms et les choses de ce pays des abus subversifs de la sûreté et de la prospérité coloniale, et que les bienfaits accordés par la mère patrie » — c’est–à–dire la liberté — ont créé une situation de « vagabondage », de « paresse » et de « misère », Richepanse déclare que « le titre de citoyen français ne sera porté dans l’étendue de cette colonie et des dépendances que par les blancs. Aucun autre individu, ajoute–t–il, ne pourra prendre ce titre ni exercer les fonctions ou emplois qui y sont attachés ». Il justifie cette action en expliquant que les colonies « ne sont autre chose que des établissements formés par les Européens » et qu’ils ont étés formés par « les blancs » qui sont « les indigènes de la nation française ». Le reste du décret de Richepance met en œuvre, sans écrire une seule fois le mot « esclavage », le système du Code Noir : tous les hommes et toutes les femmes « noirs ou de couleur » qui n’ont pas de titres prouvant qu’ils étaient libres avant l’abolition doivent retourner dans les habitations ou ils étaient « avant la guerre ». Le paiement des ouvriers agricoles est supprimé et remplacé par un système dans lequel la nourriture et les vêtements, seuls, sont assurés ; et les propriétaires peuvent à nouveau utiliser le fouet
1. Curieusement, c’est à peu près au même moment qu’à Paris le Consulat déclare que l’esclavage sera rétabli en Guadeloupe et à Saint–Domingue. Ce décret est envoyé au général Richepance en Guadeloupe par le ministre de la Marine et des Colonies, Denis Decrès. Entre–temps, Richepance meurt de lafièvre jaune. C’est donc le gouverneur de la Guadeloupe, Lacrosse, et son préfet,
1Auguste Lacour, Histoire de la Guadeloupe, Basse Terre, Imprimerie du Gouvernement, 1858, vol. 3, p. 354–356. -------------------------------------------------------------------------------- Page 10 Daniel Lescallier, qui doivent prendre la responsabilité de mettre en œuvre cette nouvelle politique. Decrès conseille une approche lente : l’annonce du retour del’esclavage doit attendre jusqu’au moment où la sécurité de la colonie seraassurée, c’est–à–dire quand la résistance aura été entièrement éliminée. Puisqueles batailles contre les rebelles se poursuivent en Guadeloupe, Lacrosse garde lesecret et évite d’annoncer la nouvelle politique par peur d’offrir aux rebelles denouvelles raisons de continuer à se battre1. Lescallier, entre–temps, prépare le rétablissement de l’esclavage enorganisant les mécanismes qui doivent en préserver certaines personnes decouleur. Le décret de Richepance avait enlevé les droits de citoyens à tous ceux qui n’étaient pas “blancs”, et le général s’était plaint que durant les treize années de la Révolution les anciennes formes d’enregistrement du statut des gens de couleur libres n’aient plus été respectées. Il était devenu impossible d’établir qui, parmi les individus de couleur, avait été libéré par la Révolution et qui devait saliberté à une naissance libre ou à un affranchissement par son maître. De telles préoccupations n’étaient pas, semble–t–il, très importantes pour Richepance et Lacrosse. Le préfet Lescallier qui, après tout, avait un passé d’abolitionniste, écritqu’il veut s’assurer que les personnes “bonnes et honnêtes” de la classe grande et“industrieuse” des gens de couleur seront protégées par un gouvernement “juste”. En conséquence il déclare que tous les individus noirs et de couleur qui sont néslibres ou ont été émancipés avant 1794 doivent présenter des « titres » et « patentes » qui prouvent qu’ils étaient libres avant l’abolition. Ceux quiprésenteront des documents acceptables recevront une « patente » officielle leurassurant la liberté. Lescallier fait tout de même des distinctions importantes parmi les gens de couleur libres. Ainsi, ceux qui ont été libérés après le début de la Révolution, en1789, auront à payer une taxe de 1.200 francs pour recevoir cette patente. C’est une restriction qui n’est pas sans signification politique car, entre 1789 etl’abolition de l’esclavage en Guadeloupe en 1794, les mécanismes d’émancipation ont été profondément remis en question comme beaucoupd’autres pratiques administratives partout en France. En 1792 et 1793, en particulier, il y a eu, en Guadeloupe, un grand nombre d’affranchissements enregistrés par des notaires, en partie parce que les « taxes de liberté » que les
1Voir les deux lettres de Lacrosse au ministre Decrès, 1er vendémiaire an XI (23septembre 1802) et 4 vendémiaire an XI, 26 septembre 1802, Centre des Archives d’Outre–Mer (dorénavant CAOM), C7A56, 137–138, 155–156, et 166–169. -------------------------------------------------------------------------------- Page 11 maîtres auraient dû payer à l’administration locale pour les rendre légales n’étaient plus encaissées du fait de l’anarchie politique qui régnait dans l’île. En exigeant une taxe de la part de ceux qui ont été émancipés pendant cette période, Lescallier remet en question la validité des actes administratifs conclus après le début de la Révolution, y compris lorsqu’ils concernent des blancs. La liberté des personnes émancipées après 1789 dépend donc désormais de leur capacité à payer une somme importante. Celles qui ne pourront la payer seront considérées comme esclaves, au même titre que celles qui n’ont pas de « patente de liberté »
1. Lescallier lui–même se charge de l’expertise des différents documents quilui sont présentés. Je n’ai pas trouvé de registre de ces délibérations mais, grâce aux actes notariés, nous apprenons qu’il a délivré une série de « patentes de liberté » en octobre et novembre, et qu’il a continué à le faire jusqu’en mai 1803.Ceci signifie qu’il a accepté de proroger la date butoir fixée dans sa première proclamation. L’examen des documents amenés par les personnes cherchant àfaire confirmer leur liberté s’est peut–être avéré plus compliqué qu’il ne l’avait imaginé. Ceux qui avaient reçu ces patentes devaient les présenter quand ils signaient un contrat ou déclaraient une naissance, c'est–à–dire lorsqu’ils mettaient en œuvre des droits légaux qui avaient été, durant une décennie, accessibles indistinctement à toute la population mais qui ne l’étaient plus. Parmi ceux quiont reçu une patente de Lescallier se trouvait le « métis libre » Jean Icard et le« nègre libre » Jean–Pierre qui a présenté la sienne en 1804 lorsqu’il a vendu unepetite propriété à Basse–Terre. Marie Louise « dite » Rose a produit la siennequand elle a acheté une maison et des étables à Basse–Terre la même année, etLaurence Le Sueur quand elle s’est « libérée » d’une dette contractée auprès d’unblanc. La « négresse libre » Madeleine a utilisé sa patente quand elle a vendul’esclave Sophie et ses quatre enfants en 18042.
1« Arrêté concernant l’état des personnes de Couleur », 22 fructidor an X (9 septembre 1802), CAOM C7A57, 11 ; « Arrêté », 21 vendémiaire an XI (13 octobre 1802), CAOMC7A58, 26 ; voir aussi Lacour, op. cit., vol. 3, p. 367–368. 2« Arrêté concernant l’état des personnes de Couleur », 22 fructidor an X (9 septembre 1802), CAOM C7A57, 11 ; pour Icard voir CAOM EC Basse Terre 21, p. 2 ; pour Jean–Pierre voir Archives départementales de la Guadeloupe (dorénavant ADG), Castet 472, 28messidor an XII (17 Juillet 1804) ; pour Le Sueur voir ADG, Castet 472, 23 thermidor anXII (11 août 1804) ; pour Marie–Louise dite Rose voir CAOM Castet 472, 5 germinal anXII (26 mars 1804) ; pour Madeleine voir ADG Castet 472, 8 messidor an XII (27 juin 1804). -------------------------------------------------------------------------------- Page 12 Ces individus ont eu de la chance. Il y en eut certainement d’autres dont les documents personnels ont été considérés insuffisants par Lescallier. Il voulait, semble–t–il, s’assurer que le nombre de gens de couleur libres dans la colonie necroissait pas trop vite. En octobre 1802, quand un général a proposé de recruter des esclaves pour combattre les rebelles dans l’île, en leur offrant la libertécomme appât, Lescallier est resté toute la nuit sans dormir. Il note que tropsouvent ce sont les noirs dans lesquels on avait “le plus de confiance” qui ontassassiné leurs maîtres et se demande ce qu’on fera avec ces soldats, une foisqu’ils auront étés libérés. Il imagine qu’ils deviendront des vagabonds qui ne voudront plus travailler sur les plantations et constitueront donc un « danger »pour la société. À ses yeux, la pratique consistant à offrir la liberté en contrepartied’un enrôlement dans l’armée, qui avait joué un rôle si important dans ladéstructuration de l’esclavage quelques années auparavant, ne pouvait plus fairepartie du nouvel ordre des choses1. Lorsque la résistance est presque entièrement éliminée sur l’île, l’administration proclame officiellement le rétablissement de l’esclavage. Parallèlement à la délivrance des « patentes de liberté », Lescallier supervise le processus par lequel des personnes libres retrouvent le statut d’esclaves. Dans lacolonie, il y avait un grand nombre d’individus qui vivaient toujours sur leshabitations où ils avaient été esclaves avant 1794. Il semble que, pour eux, latransition légale s’est faite sans beaucoup d’intervention administrative : les droits des maîtres, supprimés en 1794, sont rétablis et les lois qui offraient unecertaine protection aux cultivateurs des plantations disparaissent. Toutefois, il yavait aussi beaucoup de personnes qui ne vivaient plus dans les plantations oùelles avaient été captives ou encore dont les maîtres étaient morts ou s’étaient exilés. De plus il existait un nombre non négligeable de personnes qui étaientarrivées dans la colonie durant la Révolution, en provenance des autres colonies — notamment de la Martinique où l’esclavage avait été maintenu par les Anglais — ou de navires négriers capturés par les corsaires républicains. En 1802,Lescallier ordonne « à tous les habitants, propriétaires ou domiciliés des bourgs et des villes et à tout citoyen quelconque de déclarer […] les individus noirs oude couleur, de tout âge et de tout sexe, qui pourraient être chez eux, soit employés à la culture, soit comme domestiques, ouvriers ou locataires, lesquels ne leur
1Ménard, arrêté, 23 vendémiaire an XI (15 octobre 1802), CAOM C7A57, 202–203 ; Lescallier à Lacrosse, 30 vendémiaire an XI (22 octobre 1802), CAOM C7A57, 204 ; Ménard à Lescallier, 6 brumaire an XI (28 octobre 1802) et les notes de Lescallier, CAOM C7A57, 206–207, 209–210. -------------------------------------------------------------------------------- Page 13 appartiennent pas, et qui leur proviennent des prises, des propriétés nationales ou domaniales, des autres colonies, ou des autres habitations de la mêmecolonie » 1. Ce processus de transformation de citoyens en esclaves a laissé une trace remarquable : un registre dans lesquels les « nègres nouveaux », c’est–à–dire les Africains libérés des navires négriers — dont un grand nombre avaient reçu denouveaux noms lors du baptême qui suivait leur arrivée — sont décrits noncomme des sujets mais comme des choses : « Victoire, négresse Ibo provenantdes prises, 25, taille de quatre pieds huit pouces, front ordinaire, yeux grands etgros, nez court, bouche moyenne, lèvres ordinaires, visage rond, ayant desmarques de son pays sur le dos, aux tempes, et sur le ventre » et elle vaut 1.630livres. Ces personnes sont vendues par l’État français comme esclaves, de lamême manière qu’elles auraient étés vendues si elles n’avaient jamais étés capturées par des corsaires français arborant le drapeau tricolore2. Les dispositifs administratifs qui ont accompagné le rétablissement del’esclavage en Guadeloupe font partie d’une épopée dramatique dans l’histoire dumonde Atlantique. Il y encore beaucoup à écrire sur ces processus, notamment en examinant les changements qu’ils induisent dans les relations entre maîtres etesclaves dans la Guadeloupe d’après 1802 ou encore en retraçant les histoires devie de ceux qui ont pu échapper au retour à la captivité. Cette enquête pourrait, entre autres résultats, éclairer les raisons historiques qui fondent les différences entre la Martinique — qui n’a pas subi ce processus — et la Guadeloupe. Car,bien sûr, c’est seulement grâce à un examen détaillé des négociations et des luttes quotidiennes qu’on pourrait comprendre comment les structures légales qui ontdéfini l’esclavage ont étés vécues et transformées par ceux qui étaient leurs victimes3.
1Lescallier, arrêté, 22 fructidor an X (9 septembre 1802), CAOM C7A58, 15. 2La liste des esclaves est dans le registre CAOM C7A81, du 22 frimaire an XI (13 décembre 1802). 3Sur l’histoire de l’esclavage en Guadeloupe durant le dix–neuvième siècle voir Josette Fallope, Esclaves et citoyens : les noirs de la Guadeloupe au XIXe siècle, Basse–Terre, Société d’histoire de la Guadeloupe, 1992.
http://66.102.9.104/search?q=cache:etnQ ... cd=4&gl=fr
La restauration de l'esclavage en Guadeloupe, 1802-1803, par Laurent DUBOIS.
CONCLUSION: ce n'est pas Richepance qui a rétabli l'esclavage en Guadeloupe, son arrêté a exclu les personnes de couleur du statut de citoyen français; en tant que tel, ce n'est pas un crime contre l'Humanité...
_________________ "Tant que les Français constitueront une Nation, ils se souviendront de mon nom."
Napoléon.
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