Exemplaire du Mémorial de Sainte-Hélène en fascicule édité par Ganier-Frères, libraires éditeurs 6 rue des Saints-Pères. Comprend 240 fascicules et agrémentée de dessins de L. BOMBLED. Daté de 1895.
Message de l’éditeur.
Citation:
"La grande figure de Napoléon semble sortir de l’ombre qu’avaient projetée sur elle les malheurs et les fautes du second Empire.
Le temps, qui apaise les haines et dessille les yeux des hommes, maintenant qu’on peut parler de l’Empereur en faisant abstraction de toute idée politique, commence à faire envisager aux Français, dans Napoléon, uniquement l’homme qui a fait un moment de la France la plus glorieuse et la plus puissante de toutes les nations, le vainqueur dont le nom seul jetait l’effroi dans ces hordes allemandes que nous avons revues si arrogantes en 1870.
Bientôt, sans doute, des historiens viendront conter à nouveau ses quinze années de victoire et l’on se plaira encore chez nous à revivre avec eux les journées de Rivoli, d’Austerlitz et d’Iéna. N’est-elle pas de Napoléon lui même cette arole si juste :
« Quand on viendra me dire que le peuple Français peut vivre sans gloire je répondrai qu’il peut vivre sans pain »
Pour notre part, ce que nous offrons aujourd’hui au public, c’est l’histoire de sa captivité sur un rocher perdu dans l’Atlantique ; c’est le récit détaillé jour par jour de son agonie sous la main implacable de l’Anglais. C’est le Mémorial de Sainte-Hélène.
L’anglais !… A ce seul nom, tout ce que nous avons encore en nous du sang généreux de la vielle France frémit dans nos veines.
Subitement, et comme par l’effet d’un rideau qui se lève, se présentent à nous des siècles de perfidies commises à notre égard, et nos oreilles s’emplissent du bruit des insultes éternellement jetées par l’Angleterre à tout ce que nous aimons.
Pour ceux qui savent l’Histoire, c’est une chaîne d’ignominies qui se déroule à leurs yeux, depuis le bûcher de Jeanne d’Arc jusqu’aux obstacles que nous trouvons encore journellement dressés sur notre route par cette éternelle ennemie de notre nation et de notre race.
Quant à ceux qui n’ont pas étudié l’Histoire, ils frémissent d’instinct, par le seul fait de l’atavisme qui leur a mis jusqu’au plus profond des moelles la haine de l’Anglais.
Nous sommes solidaires de nos pères.
Ceux d’entre eux dont l’Anglais ravageait les terres, par des descentes incessamment renouvelées sur nos cotes ; ceux dont il a pillé les champs et brûlé les chaumières pendant cent années, des rives de la sine à celles de la Loire et de la Gironde ; ceux qu’il a fait périr de misère dans l ‘épouvantable captivité de ses pontons, sont morts, ne l’oublions pas, en léguant à leurs descendants le soin de leur vengeance. C’est donc à nous qu’ils en ont appelé, et nous n’avons pas le droit de leur faillir.
Si, pour d’autre revanche, nous ne sommes pas, selon l’expression arabe, les « maîtres de l’heure », notre devoir est, du moins, de ne pas laisser ces souvenirs tomber dans l’oubli. Il ne faut pas qu’un peuple égoïste, mercantile et sans scrupules, dont l’idéal en ce monde est une pièce d’or et le seul but la dépossession du voisin, puisse jamais croire qu’il a eu le dernier mot avec une nation comme la France qui, quoi qu’on en dise, personnifie encore ici-bas tout ce qui rehausse l’humanité : la générosité, le désintéressement et l’honneur.
Voilà pourquoi nous publions le Mémorial de Sainte-Hélène."
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