L'Énigme des Invalides

Permettez-moi un petit bémol.

Certes, la 1ère partie de la campagne est une défaite stratégique (logistique, peut-être, conviendrait mieux). La prise de Moscou n'était pas le but de la campagne!

Le but, c'était la destruction de l'armée russe, pour contraindre le Czar à la paix. Une paix qui aurait découragé les Anglais et maté le reste de l'Europe...

Il faut quand même reconnaître que la victoire de la Moskova est très proche d'un succès de ce point de vue. Koutousov ne dispose plus que de 50 000 hommes valides. Il est donc incapable de s'opposer à une marche de Napoléon, quelque direction que celui-ci choisisse...

Il prend le chemin de Moscou: Koutousov est incapable de défendre la capitale.

Mais ayant menti au Czar et celui-ci l'ayant crû, il devient irremplaçable !
En fait, il joue gros et a sa tête sur le billot !

L'incendie de Moscou commandité par Rostopchin sauve la mise à Koutousov... et fouette l'orgueil des Russes, leur désir de vengeance!

Cet incendie est capital. Il annihile, en quelque sorte, la capacité de réflexion stratégique de l'Empereur.

Pour lui, rien n'a changé, si ce n'est que Moscou est une non-valeur ! Suivant sa logique, il devrait poursuivre Koutousov afin de le détruire totalement, ou bien conquérir la 2ème capitale des Russes où réside habituellement le Czar et son aristocratie.

Détruire Koutousov ? Celui-ci se soustraira indéfiniment à ses poursuites!

Marcher sur Saint-Petersbourg ? C'est la seule solution. Il s'en ouvre à son entourage une 1ère fois mais ne recueille que murmures réprobateurs...

On annonce alors que Moscou n'est pas détruite autant qu'on le craignait. Napoléon décide d'y attendre les offres de paix du Czar. C'est sa 1ère faute! Est-il seulement convaincu que le Czar va traiter ? Il semble que non, mais il lui faut reprendre le contrôle de ses subordonnés.

Un mois va s'écouler sans que ses espoirs se concrétisent. Pendant ce temps, Koutousov se renforce de 30 000 hommes, surtout des cosaques et des recrues inexpérimentées.

Il réunit ses subordonnés une 2è fois tous ensemble. Tous sont d'avis de quitter Moscou pour rejoindre de bons cantonnements pour l'hiver (Smolensk, au minimum). Seul, Daru est d'avis que l'armée peut hiverner à Moscou.

Il présente encore son projet d'une marche vers Saint-Petersbourg. La plupart se récrie. En fait, il n'est plus temps...

La vérité, c'est que Napoléon pourrait quitter Moscou et y laisser l'armée. Il n'y songe pas: c'est sa 2ème faute!

Le principe de la retraite est donc décidée, par la route du sud. C'est alors que l'on apprend que Murat a été bousculé à Winkowo.

Il tempête et décide de marcher contre Koutousov, ce qui camouflera la retraite. Pourtant, Mortier demeure à Moscou avec 10 000 hommes.

Au spectacle de son armée qui défile devant lui dans une cohue indescriptible et avec l'aspect d'une horde barbare, il renonce à attaquer Koutousov et espère gagner Kalouga en dérobant sa marche.

Mais Koutousov le prévient et arrête Eugène à MaloIaroslavetz. La ville reste finalement dans les mains des Français, mais l'armée de Koutousov lui barre le passage.

Il faut donc qu'il le détruise ! Finalement, indécis et en butte à la méfiance de ses lieutenants qui frise l'insubordination, il y renonce et se résigne à reprendre la route dévastée de l'aller pour rejoindre Smolensk. C'est un contre-temps et une mauvaise décision: c'est sa 3ème faute !

Quand l'arrière-garde de Davout quitte les lieux et tire ses derniers coups de canons, Koutousov -pris de peur- évacue la position !

Dans cette partie de poker menteur, Napoléon a cédé le 1er, vaincu par la démesure de cette campagne...

C'est le commencement de la fin !