L'Énigme des Invalides

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 Sujet du message : Une fois n'est pas coutume...
Message Publié : 04 Nov 2005 16:29 
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Inscription : 14 Déc 2002 16:30
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J'approuve complètement ce billet du baron Gourgaud... Avec modération et talent, il morigène les deux responsables qui dirigent la République...

J'espère que les électeurs bonapartistes ou napoléoniens n'oublieront pas l'affront, lors des prochaines élections !

Bicentenaires : un bien pâle « Soleil d'Austerlitz »
(Article de GOURGAUD baron )





Il y a plusieurs écoles en matière de commémorations. Celle qui domine aujourd'hui paraît préférer des choix politiquement rentables ou permettant une séance d'auto-flagellation sur tel ou tel épisode malheureux de notre histoire. On ne s'étonnera donc pas de la discrétion avec laquelle l'État a traité et continue à traiter les bicentenaires napoléoniens, laissant chacune des institutions nationales créées par Napoléon se débrouiller avec son acte de naissance ou s'en remettant à l'initiative privée.
Si nous pouvions à la rigueur comprendre que la République ait escamoté la proclamation de l'Empire ou le Sacre de Napoléon, nous sommes fort surpris et déçus que rien d'officiel n'ait été prévu pour le bicentenaire de la bataille d'Austerlitz (2 décembre 1805), une des plus grandes victoires de l'armée française dont le nom figure sur les drapeaux de nombreux régiments. L'actuel Premier ministre, dont l'intérêt pour la chose napoléonienne est connu, n'a sans doute trouvé aucun dossier sur ce sujet à son arrivée à Matignon. Pourquoi ? On nous dit parfois que le président de la République ne serait pas très « napoléonien ». On murmure ici et là qu'aucun crédit n'a pu être dégagé pour permettre, par exemple, au Musée de l'Armée (institution tout indiquée) de célébrer l'événement. On suggère enfin que l'on n'a pas souhaité célébrer une victoire remportée sur les armées de ceux qui sont depuis devenus nos amis européens, Autrichiens et Russes. J'ignore si cela est vrai, mais si tel était le cas, je serais inquiet de la façon dont on envisage désormais de nous apprendre et de nous intéresser à l'histoire de notre pays.
Je remarque en revanche que les autorités anglaises ne se posent pas tant de questions lorsqu'elles célèbrent avec pompe le bicentenaire de Trafalgar, victoire navale sur la France et l'Espagne, pourtant membres éminents de l'Union européenne. On a même vu de prestigieux navires de guerre français participer à une parade navale organisée à cette occasion ou le président de la République accorder son Haut Patronage –de concert avec la Reine Élisabeth- à une soirée franco-britannique organisée le 21 octobre, précisément le jour du bicentenaire de Trafalgar. Dans la même veine, le musée britannique de la marine propose actuellement une formidable exposition « Nelson-Napoléon » où sont présentés de véritables trésors historiques… dont bon nombre ont été prêtés par les musées français. A aucun moment, l'Entente cordiale n'y est égratignée. Le propos est purement historique et neutre, avec cette intelligence toute britannique de dire les choses sans jamais avoir l'air de les dire. Les institutions muséales françaises n'auraient-elles pas pu en faire autant pour commémorer l'éclatante victoire du 2 décembre 1805, en lien avec les musées russes, autrichiens et tchèques (1) qui, nous le savons, ne demandaient que cela ?
Outre la question du peu de cas qui est fait de la tradition militaire ou celle de leur proverbiale frilosité, il me paraît que l'absence de commémoration du bicentenaire d'Austerlitz révèle, chez ceux qui décident, deux erreurs d'appréciation fondamentales :
Première erreur : croire que Napoléon est unanimement perçu avec hostilité en Europe. A la Fondation Napoléon, dans notre activité de recherche historique, nous sommes bien placés pour dire qu'il n'en est rien et que si « syndrome » il y a eu, il appartient au passé. L'épisode napoléonien est partout considéré –avec ces sensibilités nationales qui font la richesse du débat- comme partie intégrante de nos racines communes. Il est devenu un objet historique, non polémique, étudié avec rigueur et ouverture d'esprit.
Seconde erreur : ne pas avoir compris qu'une commémoration –qui n'est pas une célébration- ne pouvait se concevoir que dans un cadre européen, entre anciens vainqueurs et anciens vaincus, avec imagination (pour dépasser le simple fait guerrier) et envie de réfléchir ensemble. C'est vrai, par exemple, pour un projet d'exposition historique… et c'est ce qu'ont compris nos amis anglais.
Il est trop tard pour que quoi que ce soit de significatif et de réfléchi soit organisé pour le bicentenaire de la bataille d'Austerlitz. On devra donc se contenter de colloques confidentiels, de prises d'armes régimentaires ou de quelques discours dont l'écho se perdra dans le fracas médiatique ou, au pire, sera moqué par ceux qui pensent qu'il faut être « pour » ou « contre » Napoléon. Rien ne sera proposé à la réflexion d'un large public pour mieux connaître ce morceau fondamental de notre histoire militaire et politique, car la bataille était aussi l'affrontement de diverses conceptions de l'Europe et de la société.
En revanche, le silence officiel autour de ce bicentenaire nous permet, je le crains, de réfléchir sur la façon nos responsables voient la France et les Français d'aujourd'hui.


Baron Gourgaud
Président de la Fondation Napoléon


Auteur : GOURGAUD baron
Mois : Novembre
Année : 2005



(1) Austerlitz, aujourd'hui Slavkov, est en République tchèque




Dernière édition par Bruno Roy-Henry le 10 Déc 2007 10:32, édité 1 fois.

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Message Publié : 05 Nov 2005 4:26 
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V'lan, bien envoyé! :ange:


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Message Publié : 05 Nov 2005 16:35 
Le baron Gourgaud a une vision lucide des choses et il n'a pas sa langue dans sa poche pour l'exprimer.
Cela fait pendant à la frilosité de certains autres descendants illustres et donne à penser que le vrai bonapartisme n'est pas mort. :4:


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Message Publié : 05 Nov 2005 17:09 
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Message Publié : 06 Nov 2005 12:40 
Mieux qu'une grosse claque :diablotin:


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 Sujet du message : Et André Santini s'en mêle !
Message Publié : 26 Nov 2005 10:56 
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Inscription : 14 Déc 2002 16:30
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Adresse au Premier Ministre pour Austerlitz


Monsieur le Premier Ministre,

Vous qui avez – et avec quel talent – exalté le génie de Napoléon pendant les Cent Jours, vous qui avez défendu – et avec quelle ardeur – la fierté de la France au siège des Nations-Unies à New-York, vous qui, en héritier du général DE GAULLE, célébrez à chaque occasion la grandeur de notre pays, pouvez-vous tolérer qu’aucune célébration officielle ne soit prévue pour commémorer le bicentenaire de la victoire d’Austerlitz, le 2 décembre prochain ?
Pourtant, voici l’une des plus belles victoires françaises ! Gergovie, Marignan, Austerlitz… tous les écoliers de France connaissent ces noms de batailles glorieuses.
La commémoration de cette victoire me paraîtrait en tout cas autrement plus pertinente que d’envoyer notre cher porte-avion Charles-de-Gaulle… à Trafalgar !! Au moment où s’étendre à n’en plus pouvoir sur le « déclin de la France » est devenu un signe d’intelligence, des salons parisiens aux comptoirs de bistrots, quel joli paradoxe français que de commémorer nos défaites et pas nos victoires !
Il serait temps pourtant, selon le mot du philosophe italien Gramsci, d’« opposer au pessimisme de l'intelligence, l’optimisme de la volonté ».


Je ne pense pas que notre pays soit plongé dans un gouffre si abyssal qu’il ne saurait plus faire face aux défis qui le guettent, du textile chinois à la grippe aviaire en passant par la situation des banlieues ou le déficit budgétaire. Et c’est aussi pour cela que la bataille d’Austerlitz doit être célébrée. Car si cette victoire mérite que l’on s’y attarde, ce n’est pas seulement pour répondre, dans un élan nostalgico-déprimé, à un besoin orgueilleux de réconforter nos ego de citoyens français maltraités à grands coups de 29 mai et de JO 2012.

Sachons tirer les leçons du passé, pas seulement celles de nos erreurs, mais aussi celles de nos victoires. Qu’avons-nous appris d’Austerlitz, ou plutôt, qu’aurions-nous dû en apprendre ? Peut-être ce que Napoléon, déjà, avait à en dire lors de son discours à ses troupes victorieuses : « Vous leur avez appris qu'il est plus facile de nous braver et de nous menacer que de nous vaincre ». Voilà l’état d’esprit des vainqueurs, voilà le leitmotiv qui nous manque aujourd’hui !


Certes, les temps ne sont pas faciles pour beaucoup de nos concitoyens. Délocalisations, chômage… la mondialisation inquiète. Mais on oublie trop souvent que celle-ci ne se résume pas seulement à plus d’échanges de biens et plus de libéralisme économique, mais aussi à plus d’échange d’informations, plus d’échanges d’hommes. Ce ne sont pas seulement des entreprises ou des balances commerciales qui se rapprochent, ce sont des cultures qui se découvrent et apprennent à se connaître, malheureusement parfois dans la confrontation. Ne vient-on pas de nous apprendre que le patriotisme de la perfide Albion s’accommode, lui, sans que cela suscite l’émotion des pouvoirs publics, des syndicats ou des sujets de sa gracieuse Majesté, de l’arrivée massive de capitaux étrangers dans son économie ?


Et l’on veut nous faire croire que la France ne saurait survivre à pareille évolution ? Au contraire, je suis convaincu que nous avons tout à gagner de cette évolution, pourvu que nous sachions y faire face, comme Napoléon face aux troupes russes et autrichiennes, dans cette confrontation des trois Empereurs, avec intelligence.


Vous avez commencé à le faire, Monsieur le Premier Ministre, comme le montre la mise en place prochaine des 67 pôles de compétitivité français, dont 15 sont reconnus « mondiaux » ou « à vocation mondiale ». J’ajoute, non sans plaisir et fierté, que deux d’entre eux sont prévus dans la ville d’Issy-les-Moulineaux : le pôle mondial SYSTEM@TIC PARIS-REGION, et celui à vocation mondiale « Images, Multimédia et Vie Numérique ». Ces projets sont le fruit d’une réflexion fertile sur les valeurs ajoutées que la France peut réellement apporter à l’économie mondiale aujourd’hui, ils sont une force et une chance.


De même, la France a trouvé une position tout à fait personnelle, intéressante, et stimulante dans le cadre des relations diplomatiques. Sans prôner une opposition systématique à la politique étrangère américaine, elle a su démontrer qu’il existe une alternative à la Realpolitik américaine. Confrontés à une vision belliqueuse des relations internationales, où les rapports entre Etats ne seraient qu’une confrontation de puissances au sein d’un jeu gagnant/perdant, nous avons, notamment lors de la guerre en Irak, défendu la conviction que les rapports entre Etats devraient être régis par des principes de négociation multilatérale et de consensus, au sein d’un jeu pacifique « gagnant/gagnant ». Est-il nécessaire de rappeler le succès que nous avons rencontré alors, et auquel vous avez contribué ?


Voilà les enseignements d’Austerlitz ! Montrons notre volonté de victoire, trouvons notre place et affirmons là, tout en sachant rester humbles, comme Napoléon se retira du champs de bataille il y 200 ans pour mieux surprendre l’ennemi par la suite !


En commémorant Austerlitz, nous ne célébrerons pas la défaite de nos adversaires, mais la victoire de la France audacieuse et volontaire, fidèle à l’esprit « qu’impossible n’est pas français ! ». C’est avec cette France-là que l’avenir peut se dessiner. Et il nous suffira de dire « j’étais de ceux qui ont cru en la France » pour que l’on nous réponde « voilà un brave ! ».



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 Sujet du message :
Message Publié : 27 Nov 2005 22:26 
Santini a de la verve et du style ! :2:
Son propos est volontaire, imagé avec juste ce qu'il faut de provocation.
Il est de ceux qui savent dire les choses avec clarté sans mâcher ses mots ni tourner autour du pot.
Et comme il ne manque pas d'humour, c'est probablement l'un des politiques de l'Hexagone pour lesquels j'ai le plus de sympathie. :aime:


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