Interview réalisé par Mauro Zanon, journaliste au Libero.
1) Quelles sont les preuves qui vous amènent à affirmer que Napoléon ne repose pas aux Invalides ? Et quelles sont les avancées qui renforcent votre thèse depuis 2003, année de publication de votre livre ?
La preuve la mieux établie d'une manipulation de la sépulture à Sainte-Hélène, c'est l'absence des madriers vus par Marchand et Antommarchi au fond du tombeau en 1821. En 1840, ils ont disparu, mais on retrouve les cordes coincées sous le cercueil qui repose sur une plateforme en pierre. L'autre qui est évidente, ce sont les bottes percées de chaque côté qui laissent passer le bout des pieds et qui ne comportent pas de bas. Enfin, les principaux témoins décrivent le visage de l'exhumé comme étant identique avec le masque mortuaire officiel (signé par Antommarchi). Or, ce masque n'est pas celui de Napoléon.
Depuis 2003, nous avons établi que le véritable masque mortuaire de Napoléon est bien le Rusi Mask et non le faux d'Antommarchi, notamment par une analyse ADN des poils trouvés sur le masque. Enfin, il est avéré que les douze porteurs du sarcophage impérial en ébène pesant officiellement 1 200 kg, n'ont transvasé le 2 avril 1861, au cours de la cérémonie de transfert des cendres impériales, qu'un cercueil qui était vide. Dans ce dernier cas, il ne pesait que 750 kg, ce qui était encore beaucoup pour douze hommes, mais qui était possible. A titre de comparaison, les 800 kg du cercueil de Napoléon II (l'Aiglon) ont été convoyés par 20 porteurs en 1940 et en 1969.
2) Il y a-t-il d’autres historiens reconnus, français ou étrangers, qui ont validé votre thèse ? Et qu’est que les autres historiens, ceux qui parlent d’«infox historique » comme Thierry Lentz, contestent dans votre enquête ?
Il n'y a guère que Franck Ferrand et Stéphane Bern qui se sont intéressés à ma thèse, sans la valider pour autant complètement. Philippe Delorme s'est pendant longtemps interrogé, au point d'en admettre la possibilité. Mais finalement, il a rejoint l'opinion de Thierry Lentz. Ce dernier considère que je ne respecte pas la méthode historique. Il est amusant de constater qu'il a développé cette conclusion sans citer ses sources, ce qui -reconnaissons-le- fait désordre. En définitive, les historiens préfèrent ne pas aborder cette question : il est plus confortable de considérer qu'elle n'existe pas.
3) Pourquoi l’État français s’obstine à refuser l’analyse Adn d’un fragment de l’épiderme facial de Napoléon, ce qui mettrait fin au mystère ?
Officiellement, ce n'est pas d'actualité. Le musée des Invalides a fait savoir qu'il avait d'autres priorités. C'était la position du président François Hollande. Le chef de l'Etat actuel préfère ignorer le problème ; il est plus bienséant de continuer à honorer le symbole dans le sarcophage de faux-porphyre. C'est un monument au service des visites officielles, par exemple avec le président chinois ou américain...
4) Ces dernières années, on n’a pas trop entendu votre voix sur les principaux médias français. Avez-vous été victime d’une sorte de censure après la publication de votre livre en raison de son contenu « dérangeant » ?
On peut le supposer. Ainsi, la revue Historia a refusé tous mes articles sur la question, depuis cette date (2003), alors qu'elle lui avait donnée une éclatante visibilité en janvier 2 000. Autre exemple, la revue Paris-Match a toujours ignoré la question. C'est un "choix rédactionnel", comme le répètent les principaux media quand ils acceptent de s'exprimer sur les raisons de leur silence. L'AFP boycotte tous mes communiqués depuis 2 007. On peut considérer qu'il y a consensus entre les media et la République pour ne pas lever ce tabou ! Et comme je suis censé ne pas respecter la méthode historique, tous mes manuscrits ont été refusés par les grandes maisons d'édition.
5) Comptez-vous publier une suite de votre enquête prochainement ?
En effet, il y aura probablement une suite. C'est en cours d'écriture. A condition de trouver un éditeur. Pour l'instant, les grands éditeurs en France sont aux abonnés absents !
6) Une dernière question. Qu’est-ce que vous pensez, en tant qu’historien, de la querelle qui oppose les « napoléonistes » et les antiracistes, les décolonialistes et les féministes qui demandent de ne pas célébrer le bicentenaire du premier empereur des français au prétexte qu’il était « raciste », « colonialiste » et « macho » ?
C'est déplorable. Comme si on pouvait effacer la place de Napoléon dans l'histoire ! Mais je suis bien tranquille, Napoléon sera honoré comme il se doit, ne serait-ce qu'en Italie, en Pologne, en Russie, en Allemagne et même... en Angleterre !
_________________ "Tant que les Français constitueront une Nation, ils se souviendront de mon nom."
Napoléon.
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